Magic, Warhammer, Game of Thrones, Donjons et Dragons, Star Wars, le Seigneur des anneaux, la Légende des 5 anneaux, l'Assassin Royal... Toutes ces œuvres ont un point commun : avoir été illustrées par Magali Villeneuve.
Mais qui est donc Magali Villeneuve ? Pour la version simple, on va se fier à son site internet ; magali-villeneuve.com. Elle est donc Illustratrice et Concept artist et a commencé par peindre des couvertures de livre en France. Magali Villeneuve travaille avec de nombreuses compagnies prestigieuses à travers le monde, comme Hasbro pour Magic the Gathering et Donjons et Dragons. Elle est d'ailleurs Concept artist pour Wizards of the Coast. Vous pourrez retrouver ses œuvres dans de nombreux jeux vidéos, mais aussi dans une édition spéciale de Game of Thrones par exemple.
Afin d'en apprendre plus sur l'artiste, son œuvre et sa collaboration avec Wizards of the Coast, nous sommes allés nous renseigner directement à la source en passant un moment en sa compagnie. Merci encore à toi Magali, pour cette interview passionnante, et à Wizards of the Coast pour cette opportunité formidable.
C’est une envie qui date de mes années lycée en particulier, parce que je me souviens qu’à l’époque où j’y étais, les gens jouaient à Magic pendant les intercours ou les heures de permanence et je voyais des garçons qui jouaient à ça. En réalité, ce n’est pas tellement le jeu de cartes en lui-même qui m’a intéressé, mais les dessins qu’il y avait dessus, je les trouvais vraiment super. Pourtant, quand j’étais lycéenne, je n’ambitionnais pas vraiment de devenir illustratrice, je voulais plutôt travailler dans le domaine du dessin animé. On pouvait déjà voir que je me destinais à une carrière d’artiste. Ça me faisait rêver de voir que c’était le métier de personnes d’illustrer des jeux comme Magic, surtout que Magic a toujours été très soigné graphiquement.
Mais à l’époque, ça me semblait encore très lointain, je n’aurais pas pu imaginer tout ce je fais aujourd’hui. Puis, les années passant, au début de ma carrière pro en 2006, je me disais que les artistes de Magic et leurs illustrations étaient incroyables, notamment celles des planeswalkers. J’étais très fan d’Aleksi Briclot et Daarken. Ça me paraissait inaccessible mais ça me faisait encore rêver de travailler pour Magic. J’en ai rêvé pendant longtemps, il faut bien le dire.
Comme je disais plus haut, j’ai eu une phase où je voulais faire du dessin animé. Elle a duré jusqu’à mes 18 ans, car c’est à cet âge-là que je suis tombée sur mon premier livre de fantasy “La roue du temps” de Robert Jordan. Je n’avais jamais lu de littérature de l’imaginaire avant, je lisais plutôt de la littérature blanche (ndlr : la littérature blanche est aussi appelée littérature générale. C'est une littérature qui ne relève pas de la littérature de genre, et ne contient donc pas les littératures de l'imaginaire comme la SF, la fantasy et le roman policier), voire classique. J’ai vraiment découvert la littérature de l’imaginaire à ce moment-là, ça a été une révélation pour moi et mon premier réflexe a été d’illustrer ce livre. C’est là que ma vocation s’est vraiment précisée et que je me suis dit que je voulais illustrer des livres. Comme ça n’allait pas être possible de faire une école, je me suis dit que ce n’était pas grave et je me suis mise à travailler sérieusement. J’ai dessiné énormément, j’ai étudié l’anatomie avec des bouquins ainsi que les ombres et les lumières, etc... C’était un apprentissage très artisanal, dans mon petit coin. J’ai beaucoup regardé les artistes que j’admirais. Cette étape a duré de mes 18 ans jusqu’à mes 26 ans, où j’ai monté ma micro-entreprise avec mon premier portfolio.
Il était très différent de ce que je produis maintenant, mais c’est avec ce premier portfolio que j’ai commencé à démarcher de toutes petites maisons d’édition parce que j’étais lucide quant à mon niveau et je savais qu’il fallait commencer tout en bas pour espérer se faire un nom. Toute la micro-édition française de l’imaginaire y est passée et j’ai eu mes premiers contrats très vite.
Je suis plutôt ignorante en ce qui concerne Magic, sauf ce qui concerne le domaine graphique. Je travaille avec Magic depuis 2012 (ndlr : sa première carte publiée a été une commune : Vigiles de Mélétis). Et depuis tout ce temps, on m’a demandé si je jouais à Magic et la réponse est non. Je ne connais pas le jeu, je ne le comprends pas bien et pour pouvoir expliquer comment le jeu a évolué à travers les années, je dois être honnête et reconnaître que je ne sais que très peu de choses.
Mais je connais les artistes et les cartes parce que je reconnais les dessins. Mon domaine de prédilection reste le graphisme. Ce qui me passionne dans Magic, c’est de voir les évolutions graphiques et de pouvoir y contribuer.
Aujourd’hui encore, j’hésite entre Ravnica et Zendikar qui sont des plans qui, pour moi, définissent très bien Magic. Je trouve que dans ces deux plans-là, il y a la quintessence du jeu. Que ce soit au niveau des environnements, des personnages ou des costumes. Quand on retourne sur ces plans, en tant que dessinatrice, je m’y sens très à l’aise parce que j’ai toujours trouvé que Magic avait ceci de particulier dans le domaine de l’illustration fantasy qu’elle ne ressemble à rien d’autre. C’est-à-dire que c’est une espèce de fantasy un peu hybride qui mélange plusieurs éléments. Elle ne fait pas trop High Fantasy avec un excès d’elfes aux cheveux soyeux, ce n'est pas non plus une caricature de Fantasy parce qu’il y a ce côté un peu adulte où il ont toujours su évoluer pour que ça ne vieillisse pas graphiquement.
Magic sait rester moderne et dans l’air du temps, dans le bon sens du terme, parce que l’Heroic Fantasy évolue constamment.
Dans les anciennes cartes, on reconnait bien le côté Heroic Fantasy d’il y a une vingtaine d’années qui était très marqué, à la limite du comic (bande-dessiné) très américain par moments. On voit au fil du temps que ça a maturé, évolué, que ça s’est modernisé. Ils ont intégré une nouvelle génération d’artistes ainsi que les nouvelles technologies puisqu’on a vu l’avènement des artistes numériques, là où les toutes premières illustrations de Magic étaient beaucoup plus traditionnelles dans leur ensemble. Il me semble que ça fait 25 ans que Magic existe et pendant tout ce temps, ils ont su conserver et surtout préciser leur identité visuelle et esthétique tout en suivant les courants artistiques qu’ils ont traversés au fil des décennies.
C’est effectivement quelque chose que l’on ressent quand on est illustrateur. On sait qu’il y a plusieurs catégories de joueurs et parmi eux, il y a des joueurs plus ou moins attachés aux illustrations et chez ceux qui aiment vraiment le côté graphique, on sent un attachement et parfois une identification aux dessins. Le fait que ce soit un jeu qui, graphiquement, n'exclut ni les hommes, ni les femmes, ni les plus jeunes comme les plus âgés, chacun peut y trouver quelque chose qui va lui flatter la rétine et toucher à sa sensibilité d’amateur de mondes imaginaires.
Une des grandes intelligences de ce jeu, c’est de ne pas être une caricature de lui-même. Il n’est pas trop marqué graphiquement et il n’est pas trop connoté pour une tranche d’âge ou pour un type de fantasy en particulier. Ils explorent beaucoup de choses et ce principe de plans qui changent tout le temps leur permet cette exploration. Le plan d’Eldraine, par exemple, se tourne plutôt vers le conte de fée. Parfois, c’est plus exotique ou bien ils font de la fantasy plus classique. C’est un jeu bien calibré.
Tout à fait, je pense que c’est une recherche de leur part. On sent qu’il y a une sorte de quête perpétuelle afin de ne laisser personne sur le bord de la route.