Deux ans ont passé, et nous sommes en 1996. D'un petit studio ayant pris exemple sur ce qui se faisait en son temps, Bethesda commence à s'affirmer. Malgré ses quelques défauts, Arena a clairement marqué son époque : le magazine Computer Gaming World lui accorde la récompense de "Jeu de rôle de l'année", tandis que le jeu rafle quantité de trophées.
Du coup, les fans attendent une suite avec impatience. Cela est d'autant plus vrai que le studio avait fait baver les joueurs en présentant Daggerfall à l'E3, et en arguant au passage que le jeu allait utiliser un moteur 3D révolutionnaire : le Xngine(R). Ce moteur est jugé si novateur par Bethesda qu'il l'utilisera pour d'autres licences, et en particulier "Skynet", basé sur la licence de Terminator. La presse occidentale en générale, et américaine en particulier, était également impatiente de poser ses doigts sur le jeu.
Dans l'intervalle, Bethesda renforce son équipe. C'est l'arrivée de divers créateurs de RPG, comme Bruce Nesmith. Au moment de son embauche, cet écrivain était déjà connu pour avoir travaillé sur la série des célébrissimes Advanced : Dungeons & Dragons. Il participera à tous les épisodes des Elder Scrolls, tout comme à la série des Fallout.
Daggerfall sort en août 1996. Un mois après la sortie, Bethesda affirmait avoir envoyé 150 000 exemplaires supplémentaires aux revendeurs, avec des commandes continuant à affluer.
Le monde est toujours aussi vaste. Il fait vraisemblablement partie des plus grands univers jamais créés. Les chiffres sont difficilement vérifiables, les fourchettes sont larges, mais l'idée reste toujours la même. Il serait question d'un univers trois à quatre fois plus grand que celui de Guild Wars : Nightfall, sorti pourtant 10 ans après. Chris Weaver a affirmé en 2007 que Daggerfall était deux fois plus grand que la Grande-Bretagne. C'est dire.
D'autre part, Bethesda avait entendu que la sensation de vide dans cet immense espace avait agacé les fans. Le studio s'est empressé de communiquer sur le sujet, en donnant des chiffres vertigineux : 6000 villes et villages (en 2007, toujours, Chris Weaver parlera de 15000 lieux. Comme quoi, on ne vous a pas menti au sujet des fourchettes larges) ainsi que 750 000 personnages, incluant les PNJ amicaux et les monstres.
L'histoire se déroule 6 ans après Arena. S'il était un prisonnier, le héros est cette fois un champion. Le seigneur gouvernant la province de Daggerfall a été assassiné, et l'empereur est inquiet. Il vous envoie enquêter sur ce meurtre. Mais au cours du voyage, vous vous rendrez compte qu'une lutte de factions menace l'Empire tout entier.
Une pléthore de fonctionnalités est arrivée avec Daggerfall. Le joueur peut décider de se déplacer à pied, en bateau, à cheval... Il peut créer ses propres armes enchantées. L'augmentation d'un niveau se fait par l'amélioration de chaque talent (destruction, archerie, mysticisme, attaques dans le dos...). Et des talents, il y en a... 35, soit deux fois plus que dans Skyrim.
Côté graphismes, qu'en est-il de ce fameux moteur 3D ? Plus coloré, mieux défini, Daggerfall voit l'arrivée de très belles animations, par exemple lorsque le héros frappe avec une arme enchantée. Les monstres et PNJ ne sont plus affublés d'une teinte quasi unie : ils comprennent désormais des ombres et tout un tas de dégradés de couleurs.
Mais le jeu voit aussi l'émergence d'un level design plus poussé, capable de comprendre des objets modélisés, avec lesquels le joueur peut interagir : un coffre à ouvrir, par exemple.
Daggerfall conserve pourtant nombre d'éléments qui le font passer pour un "Arena II". Les sprites des personnages restent en 2D. Les musiques sont similaires, voire identiques. À cela, il faut ajouter des bugs persistants, qui ont empêché des joueurs de simplement lancer le jeu, voire même de l'installer. Mais comme Arena, il a tout de même eu l'accueil d'un excellent jeu : PC Gamer lui accorde son titre de meilleur jeu de rôle, affirmant qu'il dispose d'une "rejouabilité illimitée, d'une exploration non-linéaire et d'un monde gigantesque". Il n'a simplement pas réussi à se séparer de l'empreinte de ses aînés. Pas encore.
The Elder Scrolls Legend : Battlespire
Que s'est-il passé chez Bethesda ? Après le succès de Daggerfall, le monde s'attendait à un Elder Scrolls III. Mais voilà qu'un épisode un peu spécial arrive sur les ordinateurs des fans de RPG : nom différent, lieu spécifique, intrigue particulière... Que vient faire là ce trouble-fête ?
Sorti en 1997, The Elder Scrolls Legend : Battlespire devait à l'origine être une extension de Daggerfall. Mais en fin de compte, Bethesda le sortira sous la forme d'un spin-off, beaucoup plus centré sur l'action et moins sur la gestion des statistiques. Ceci lui donne une image de jeu d'action-aventure pas toujours justifiée.
Dans la province impériale, l'Académie militaire a perdu le contact avec un centre d'entraînement pour les meilleures forces de l'Empire : Mortecime ("Battlespire"). Vous voilà à devoir enquêter en ce lieu, qui se trouve être aux prises des Daedras et de Jagar Tharn, celui-là même qui avait trahi Uriel Septim VII du temps d'Arena.
Contrairement à tous les autres Elder Scrolls, l'univers de Battlespire est constitué d'un seul et unique donjon, l'objectif étant de trouver un survivant et de s'enfuir hors de Mortecime. Le jeu a tenté d'aller plus loin dans l'aventure de la 3D, et il y a une réelle différence avec Daggerfall. La troisième dimension prend doucement sa place.
Il avait été prévu (Bethesda a même appuyé sa campagne publicitaire là-dessus) que le jeu tourne avec les chipsets des cartes 3Dfx, ce qui aurait donné des personnages plus détaillés et mieux animés. Mais les limitations de ces cartes ont finalement amené le studio à les abandonner, et l'évolution est moins évidente qu'elle n'aurait pu l'être.
Mais ce que les joueurs ont d'abord retenu de Battlespire est sa difficulté. Si les premiers niveaux sont déjà difficiles, les suivants demandent un tact énorme pour être surmontés. La principale raison réside dans le fait que l'on ne trouve que peu d'objets de régénération, et que l'on ne peut pas se reposer. Il faut alors gérer ses barres de vie et de mana au mieux, et cela est très difficile lorsqu'on sait la quantité et la force des adversaires.
Battlespire était jouable en multijoueur, ce qui rendait les combats plus intéressants. Mais c'est le seul épisode à avoir bénéficié de cet aspect, et jusqu'à The Elder Scrolls Online, tous les autres épisodes se feront en solitaire.
Ardu, accusant des bugs (un monstre vous poursuivant se coince dans une chaise ou la texture d'un mur, ce bug a la vie dure), Battlespire s'est peu vendu, en comparaison de ses aînés. Il fallait autre chose pour contenter les amateurs de RPG.
The Elder Scrolls Adventures : Redguard
Un an après Battlespire, en 1998, un autre objet non identifié vient compléter la gamme des Elder Scrolls. Son nom complet est The Elder Scrolls Adventures : Redguard, et Bethesda s'est encore davantage éloigné de la trame habituelle de ses RPG.
Il s'agit en effet d'un jeu d'action-aventure, l'aspect jeu de rôle étant passé au second plan. Plus linéaire que les épisodes précédents, le joueur incarne un jeune homme nommé Cyrus. Après avoir tué le mari de sa soeur lors d'une bagarre, il s'enfuit. Il ne revient que quelques années plus tard, lorsque cette même soeur disparaît. Et vous voilà à sa recherche.
Le jeu est décevant pour les fans. Ce n'est pas pour rien si, comme Battlespire, il n'a pas été intégré à l'anthologie de 2013. Il est plutôt bon dans son genre, mais tous se demandent pourquoi Bethesda se tourne vers de l'action-aventure linéaire alors qu'ils souhaitent un jeu de rôle en monde ouvert. D'ailleurs, alors que tous les épisodes développaient un monde héroic-fantasy, Redguard nous évoque le monde des pirates. Rien à voir, donc.
En réalité, Redguard devait, comme son grand frère, être une extension de Daggerfall.
Pourtant, cet opus était une étape nécessaire dans l'évolution des Elder Scrolls. Il s'agit du premier opus où le joueur pouvait choisir entre les deux vues (objective et subjective). Plus globalement, l'épisode a été l'occasion de tester des nouveautés au niveau du gameplay. En fait, Redguard, c'est un pré-Morrowind.
Paradoxalement aux récompenses et bonnes critiques que reçoit la franchise, le studio est en difficulté. Des défauts et des choix rebutent les joueurs. Les ventes baissent, et Bethesda a même échappé de peu à mettre la clé sous la porte. Todd Howard s'était exprimé à ce sujet : "Les années qui ont suivi Daggerfall ont été les pires. Nous avons pris de mauvaises décisions et produit de mauvais jeux". Et il faudra attendre 2002 pour que la situation se redresse.
The Elder Scrolls III : Morrowind
Il a fallu deux ans pour créer Arena, et autant pour Daggerfall. Après les essais que constituent Battlespire et Redguard, c'est cette fois 4 années que les fans de RPG ont patienté pour pouvoir s'essayer à Morrowind.
Face à la situation difficile que traverse Bethesda, Christopher Weaver, le co-fondateur avec Julian Lefay, réorganise l'ensemble. Avec l'aide de Robert Altman, l'entreprise Zenimax naît en 1999. Elle sera la maison-mère, et Bethesda est placé sous sa férule. En 2001, le studio fut d'ailleurs scindé en deux : Bethesda Softworks d'une part, et Bethesda Game Studios d'autre part.
Dans le même temps, Zenimax débute la tutelle d'une entreprise baptisée Vir2L, qui va développer des jeux mobiles. Celle-ci donnera la série parallèle des Elder Scrolls : Travels.
Ceci a amené de nouvelles têtes. Ken Rolston en fait partie. À ce moment de l'histoire, il avait déjà designé des jeux de rôle papier, comme "Paranoia" ou "RuneQuest". Avec lui, et une équipe plus fournie, ceci explique probablement le nombre de livres inégalé et d'une grande qualité que le joueur a pu lire directement en jeu.
Mais la grande différence est d'ordre musical. Exit les musiques d'Eric Heberling, qui ont marqué les joueurs d'Arena et de Daggerfall, et bonjour Jérémy Soule. Le palmarès des OST de jeu vidéo composés par cet homme est impressionnant. On compte entre autres :
- Baldur's Gate : Dark Alliance
- Neverwinter Nights
- La série des Guild Wars
...ainsi que le thème de Morrowind. Profonde et poétique à la fois, jugée par beaucoup comme la meilleure de la série, la musique sera reprise et réadaptée pour tous les thèmes des épisodes suivants, qui seront d'ailleurs composés par le même homme.
Ceci fait, Bethesda reprend le travail. The Elder Scrolls III : Morrowind sort en 2002, avec du retard. Le jeu est entré de plain-pied dans la 3D, et cela se voit. Présenté à l'E3, il est impressionnant par le monde qu'il propose au joueur. Les petites comme les grandes parcelles de terrain semblent être utilisées pour donner plus de cohérence à l'univers. Rien n'est laissé à l'abandon, comme les fans l'avaient reproché aux premiers épisodes. Le jeu intègre une météo et un cycle jour/nuit. Le réalisme de l'organisation du monde et des peuples qui y résident, qu'ils soient urbains ou nomades, dotés chacun de leurs coutumes (certains pratiquent l'esclavage, par exemple) donnent l'image d'un monde quasi-réel.
Le jeu comprend également un nombre de quêtes qui a forgé la réputation du jeu (près de 500, mais le chiffre varie en fonction de ce que l'on prend en compte).
Morrowind fait clairement un retour aux sources, en se montrant plus exigeant et plus proche des RPG papiers dont il s'était tant inspiré. Le joueur ne peut plus utiliser le fast traveling (transport instantané vers un lieu déjà visité). Fini de se déplacer à la vitesse de l'éclair, comme dans Arena : désormais, le personnage se fatigue en courant.
En échange, les transports ne manquent pas. Bateaux, échassiers des marais (sortes de montures), téléportation à la guilde des mages, sortilège de marque/rappel...
Côté histoire, Bethesda et Zenimax ont recommencé à écrire. Vous répondez cette fois à une prophétie : né un jour connu de parents inconnus, il se pourrait que vous soyiez le Nérévarine, un héros des temps anciens destiné à vaincre Dagoth Ur, dont les agissements menacent le monde. Uriel Septim VII, empereur de Tamriel, sentant le danger grandir, a fait vérifier ses prisons, a trouvé que vous correspondiez à la prophétie, et vous a fait envoyer en Morrowind.
Le jeu est un formidable succès. Il s'en vend 4 millions d'exemplaires. Computer Gaming World le juge meilleur jeu présenté à l'E3. À titre de comparaison, le premier Halo s'est vendu la même année à 5 millions d'unités.
Citer Halo en guise de comparaison n'est d'ailleurs pas anodin. Microsoft avait été interpellée par la situation de Bethesda. S'intéressant au jeu, sentant le potentiel de Morrowind, il lui a permis d'être porté sur Windows, et par ricochet, sur Xbox. Microsoft aurait ainsi contribué au succès des Elder Scrolls et permettant le premier portage de la série sur consoles.
The Elder Scrolls III: Tribunal
Morrowind est sorti en mai 2002. Sa première extension, intitulée Tribunal, sortira en novembre, soit 6 mois plus tard.
Son contenu est centré sur de nouveaux lieux, et en particulier une nouvelle ville désignée comme la capitale de Morrowind : Mournhold. Ces nouveaux endroits se trouvent habités par une multitude de nouvelles créatures, dont le niveau de difficulté donnera du fil à retordre aux joueurs. Ce résumé ne vous rappelle rien ?
Tribunal est en effet une extension difficile adressée aux joueurs de haut niveau, comme Bethesda avait essayé de le faire 4 ans plus tôt avec Battlespire. Avec une différence tout de même : Tribunal a marché. Plus de spin-off : pour pouvoir jouer à Tribunal, il faut posséder une version de Morrowind. Ce sera aussi vrai avec l'autre extension du jeu, Bloodmoon.
Du coup, avec un nouveau contenu, les deux opus ont boosté les ventes de Morrowind, et ont fait d'un succès déjà réel un blockbuster.
Sans vraiment le révolutionner, Bethesda a rafraîchi son jeu : nouvelles musiques, les PNJ discutent de manière plus naturelle (Adieu le sempiternel "Que voulez-vous ?")...
Tribunal a également apporté quelques fonctionnalités supplémentaires qui ont séduit les joueurs, sans remettre en question l'esprit du jeu. Les quêtes plus abouties sont un bon exemple. C'est également le cas de leur gestion : marquer une quête comme active ou inactive est un élément des jeux de rôle que reprendront tous les épisodes suivants. Le joueur a enfin la possibilité de fonder un groupe d'aventuriers et de familiers, un élément capital des RPG.
The Elder Scrolls III : Bloodmoon
À nouveau 6 mois plus tard, Bethesda et Zenimax récidivent et sortent une deuxième extension. Comme Tribunal, Bloodmoon a amené avec lui un parterre de monstres, d'objets nouveaux et de quêtes supplémentaires.
Mais l'élément central de l'opus résidait dans la nouvelle capacité qui permettait au joueur de se transformer en loup-garou. La campagne publicitaire a beaucoup reposé sur cet élément, qui promettait de rafraîchir le gameplay et de donner un nouveau rôle au héros habituel du RPG. Dans les faits, celui-ci ressemble beaucoup aux actions des vampires vus par Morrowind : la transformation comme la modification des statistiques les évoquent. Ainsi, après avoir contracté la maladie, le joueur avait quelques jours pour trouver un remède.
Une fois transformé, il pouvait se déplacer plus rapidement et il gagnait un bonus sur sa force de frappe. Il pouvait aussi traquer les proies et sentir la présence d'êtres humains à distance.
Pourtant, Bloodmoon a apporté d'autres nouveautés, tout aussi importantes, à commencer par l'île de Solstheim. Située au nord de Vvardenfell, elle reprend le climat de Bordeciel en grande partie, et cela bien avant Skyrim. L'île intégrait de nouveaux types de donjons, dont les caves de glace et des cryptes d'un nouveau genre. Les monstres, comme pour Tribunal, étaient d'abord destinés à des joueurs de haut niveau.
Dans tous les cas, Bloodmoon affiche une durée de vie aux alentours de la vingtaine d'heures de jeu, avec autant d'incitations à rejouer à Morrowind. La réception du public est bonne, mais un an après la sortie du jeu, il est temps d'arrêter là les extensions, et d'aller de l'avant.
The Elder Scrolls IV : Oblivion
Après Morrowind, il y eut Oblivion. Cet épisode s'est attaqué à un pan énorme de l'histoire des Elder Scrolls. Le plan d'Oblivion est le monde où évoluent les créatures les plus puissantes, et bien souvent aussi les plus malfaisantes de l'univers des Elder Scrolls : les Daedras. Aussi, lorsqu'un nouvel opus avec ce nom est en route pour sortir sur les PC en 2006, tout le monde a le sourire aux lèvres.
Sauf Bethesda, peut-être.
Retour en 2002. Morrowind vient de sortir, les extensions ne sont pas toutes encore sur les étals que Todd Howard réfléchit déjà à Oblivion. Depuis quelque temps maintenant, Christopher Weaver est en litige avec Zenimax. Alors qu'il avait participé à fonder l'entreprise, il estime être mis à la porte par ses nouveaux responsables.
Le conflit est porté devant la justice. Alors qu'il est l'un des deux grands auteurs d'Arena, l'un des deux pères de Bethesda, de Zenimax et de la série des Elder Scrolls, Christopher Weaver, perdant de plus en plus de responsabilités, finit par quitter le studio en 2002.
Mais la série ne s'arrête pas. Oblivion sort en 2006, et constitue un volte-face sur bien des points. C'est le retour du fast traveling, qui ne quittera plus la série. Sur ce point, Morrowind a constitué une parenthèse que les développeurs ont préféré refermer.
En outre, le jeu a simplifié les quêtes. Une fois qu'une quête est marquée comme active, il suffit de suivre l'indicateur sur sa carte pour aller à l'objectif.
Mais par rapport à la série dans son ensemble, Oblivion tente aussi quelque chose au niveau des graphismes. Le monde a un on-ne-sait-quoi de lumineux. L'ambiance générale des Elder Scrolls jusque-là était globalement sombre. Mais cette fois, l'herbe est bien verte. Le soleil brille si fort que cela pose des problèmes d'ombrage aux PNJ. D'ailleurs, ces mêmes PNJ adressent volontiers un sourire jusqu'aux oreilles lorsqu'ils voient passer le joueur.
Sans que ce soit un réel défaut, les fans reprocheront à Bethesda ce côté un peu trop "gentil et coloré".
Mais le jeu innove énormément, et sur un point en particulier : désormais, la victoire repose davantage sur les réflexes et la méthode du joueur plutôt que sur ses statistiques. Par exemple, crocheter une serrure demande de cliquer au bon moment en soulevant le loquet, et non seulement d'avoir une statistique élevée en la matière. Convaincre une personne réclame de bien utiliser ses préférences dans différents domaines. En cela, Oblivion acquiert une dimension de jeu d'action, bien dosée, qui en ont fait un jeu d'excellence.
L'histoire est un vrai régal. Les portes d'Oblivion sont ouvertes et les troupes daedriques, commandées par le prince Mehrunes Dagon s'apprêtent à envahir Tamriel. L'empereur Uriel Septim a vu sa dernière heure arriver, et a senti dans une vision le danger qui menace. Un ordre chargé de sa protection, les Lames, ont prévu de l'évacuer en passant par les geôles. Mais le joueur se trouve dans l'une d'elles, et l'empereur a présagé que le prisonnier qu'il a sous les yeux pourrait être la clé de la victoire sur Mehrunes Dagon.
Dans Morrowind, le joueur incarnait un personnage destiné à accomplir une prophétie. Dans Skyrim, il sera l'enfant de dragon. Mais dans Oblivion, le héros n'est pas l'élu. C'est un PNJ qui le sera, et le joueur incarne le champion chargé de l'accompagner le long de sa destinée.
Après Morrowind, Oblivion est un second succès sans ambiguïté. Trois millions d'exemplaires se vendent en 10 mois. Le jeu a été porté sur la Xbox 360, et un an plus tard sur la PS3. Ce portage plus complet que pour Morrowind a visiblement participé à forger le succès des consoles de la septième génération. Le lot maintenant habituel de récompenses lui a été attribué, dont celui de meilleur RPG de l'E3 pour l'année 2005. Enfin, Oblivion a été d'autant plus rentable qu'il a pu surfer sur un produit qui se démocratise avec les consoles de la septième génération : les DLC. D'ailleurs, une anecdote récurrente veut que le premier DLC de la série ait été une armure pour cheval : seulement 2,50 $ !
The Elder Scrolls IV : Knights of the Nine
C'est effectivement sous la forme de DLC que seront disponibles les deux extensions d'Oblivion.
En fait, après la sortie d'Oblivion, Bethesda a diffusé nombre de contenus additionnels, dont certains ont laissé un goût de bâclé. À un point que la première extension, Knights of the Nine, n'en est pas tout à fait une. En réalité, cet add-on sorti 6 mois après le jeu a réuni huit des mods que Bethesda avait développés jusque-là pour son jeu (la tour du sorcier, le pic des voleurs, etc).
"KotN" ajoutait ainsi une faction, l'ordre des Chevaliers des Neuf, et une quête éponyme. Celle-ci amène le joueur à incarner un croisé à la recherche d'un Prieuré et de ses reliques. Il pouvait de cette façon retirer toute mauvaise réputation qui pesait sur lui. Mais un objectif lui incombe alors : il lui faudra défaire un ancien roi-sorcier ayléide : Umaril.
L'histoire en profite pour compléter les connaissances du monde, et notamment sur l'origine des ruines ayléides qui traînent un peu partout en Oblivion.
Les notes et les critiques restent très bonnes, aux environs de 8/10 en moyenne. Néanmoins, Knights of the Nine ne révolutionne pas Oblivion, et fait un effet de calque. Les quêtes semblent répéter ce qu'Oblivion proposait déjà et peuvent être bouclées en quelques heures. Heureusement, les combats constituent un challenge supplémentaire et permettent de proposer un minimum de défi, en particulier lorsqu'une relique ou une pièce d'équipement est en jeu.
The Elder Scrolls IV : Shivering Isles
Après l'essai qu'a constitué Knights of the Nine, Bethesda avait besoin de sortir une extension plus aboutie. En effet, exploiter le même jeu en y ajoutant continuellement de petits contenus a fonctionné un temps. Mais les joueurs et critiques ont fini par ne pas apprécier de devoir sortir leur carte bancaire aussi souvent, même pour une poignée d'euros.
Du coup, le studio a réalisé une véritable extension, avec un nouveau contenu véritable, comme pour Morrowind cinq ans plus tôt.
Il y a des dieux en Tamriel. Et c'est à l'un d'entre eux que Shivering Isles s'intéresse. À proximité de Cyrodiil se trouve une île, sur laquelle se trouve un portail daedrique. Au-delà de ce portail, le joueur a accès au royaume de Sheogorath, le dieu de la folie.
On comprend vite que quiconque traverse le portail met sa vie en danger. Car de l'autre côté, Sheogorath règne sur deux royaumes parallèles : Mania d'une part, et Dementia d'autre part. Voilà : vous êtes sur les terres de la folie pure.
Une personne seule, perdue dans un monde où la folie et les non-sens dominent : ceci devrait rappeler quelque chose aux fans de littérature. En effet, l'influence d'Alice au pays des merveilles est évidente. La cour royale, l'arrivée dans le monde, le monde divisé en deux, l'un étant très sombre et l'autre très lumineux. Tout est une référence à l’œuvre de Lewis Caroll.
C'est donc d'abord un monde à découvrir que Shivering Isles a proposé. Si de nouveaux monstres, équipements et éléments de gameplay (la possibilité de créer une arme magique à partir de rien, notamment) apparaissent, c'est d'abord l'ambiance qui est convaincante et qui justifie l'extension. Bethesda n'est pourtant pas au bout de l'aventure, et la consécration viendra bientôt. En 2011, pour être plus précis.