CD Projekt a maintenant un lourd passif quant aux conditions de vie de ses employés. Les périodes de crunch abusives qui avaient été mises en place lors du développement de Witcher 3 et Cyberpunk 2077 avaient fait tellement de bruit que le studio s'est senti obligé de promettre de ne pas recommencer lors de l'annonce de Witcher 4.
Ils avaient également assuré avoir mis en place une charte afin d'améliorer le cadre de travail au sein du studio suite au scandale de 2021. Aujourd'hui, forts des ces expériences qui, on l'espère, sont derrière eux, ils annoncent une avancée sociale que beaucoup attendaient avec impatience : le congé menstruel rémunéré pour les employées.
Pourquoi commencer sur ce terrain précis ?
Il existe malheureusement de nombreux domaines qui sont encore largement en retard socialement dans le monde du travail, on peut donc se demander pourquoi CD Projekt s'attaque en premier lieu au congé menstruel. Loin d'être moins important que les autres, le sujet n'est surtout pas celui dont on parle le plus. Et c'est justement la raison derrière ce choix.
Mis en place par GOG, entreprise rattachée à CD Projekt, le congé menstruel se veut le premier pas vers la résolution des problèmes dont on ne parle pas simplement parce qu'on n'ose pas en parler.
Voilà la philospophie de GOG : mettre en avant ce qui dérange afin de pouvoir un jour le banaliser. L'initiative a été lancée début avril et la plateforme Axios nous confirme que les mesures annoncées ont bien été mises en place (source). L'entreprise reconnaît qu'il "existe des différences biologiques sur le lieu de travail" et affirme que de ce fait "le congé menstruel favorise l'inclusion".
De nombreuses entreprises semblent envisager de franchir ce pas, les menstruations douloureuses étant de plus en plus considérées comme sérieuses et nécessitant un congé. Nos confrères de chez PC Gamer ont pu contacter Radek Grabowski, directeur des relations publiques de CD Projekt, qui leur a confié que ce n'était effectivement qu'un début et que cette initiative de GOG était "actuellement à l'étude pour l'ensemble de CD Projekt".
Le jeu vidéo comme fer de lance des avancées sociales ?
Le milieu du jeu vidéo est souvent le théâtre de scandales concernant les conditions de travail du personnel. On parle très souvent de la pratique du crunch qui s'est d'ailleurs étendue au monde de la start-up en général et des fameux paiements en visibilité plutôt qu'en salaire pour les artistes qui débutent dans ce milieu. Puisque c'est un domaine qui attire, les entreprises se permettent de fixer des conditions parfois déplorables simplement parce qu'elles savent que peu importe le nombre d'employés qui partent, elles en auront toujours au moins autant qui arrivent.
Si on entre davantage dans le détail, on constate que ce sont les femmes qui souffrent le plus de discrimination. L'industrie du jeu vidéo, parallèle à celle de l'informatique en général, est un exemple parfait de domination masculine bourdieusienne où la place de la femme est sans cesse remise en cause. Même après de nombreuses protestations, manifestations, voire même lois, les abus persistent. Il n'y a qu'à voir l'affaire Activision-Blizzard en cours qui semblent partie pour durer.
Ceci étant dit, l'avantage, s'il en est un, de ce milieu est que les affaires sont largement médiatisées et que donc on en parle ouvertement. Face à cette mauvaise presse, les entreprises ne peuvent plus se cacher et prétendre qu'elles ne savaient pas ce qu'il se passait dans leurs locaux. C'est pourquoi on voit se dessiner de plus en plus de mesures qui nous font nous diriger peu à peu vers un cadre plus sain.
En plus de l'initiative de GOG, on peut rappeler que Guerilla Games a décidé de retarder la sortie de Horizon Forbidden West pour éviter que les développeurs ne craquent sous la charge de travail et que Bandai Namco Mobile est actuellement en train de tester la semaine de travail de quatre jours entièrement rémunérée en conditions réelles.
Quand on voit ce que la communauté gaming est capable d'accomplir de beau, ne serait-ce qu'en France avec des événements comme le ZEvent ou SpeeDons par exemple, on ne peut qu'espérer que ce soit ça les fondements de l'entreprise vidéoludique de demain !