Les jeux du studio français Arkane reçoivent généralement une bonne réception critique, mais le grand public a tendance à passer à côté malgré toutes leurs qualités. C'est peut-être ce qui explique qu'une grande partie de la presse française ait été invité une nouvelle fois à découvrir Deathloop en compagnie des développeurs. Après un re-visionnage du gameplay du State of Play de juillet, qui montrait différents mécanismes de jeu impliquant la boucle temporelle, ainsi qu'une présentation des coulisses, il s'en est suivi une longue session de questions-réponses, avec de nouvelles informations fort intéressantes sur ce que devrait donner le jeu complet, ainsi que sur ses mécanismes conçus pour faire fonctionner un gameplay ainsi qu'une narration très exotiques.
Une histoire hors de Control
Deathloop se déroule sur la petite île nordique de Blackreef, ce qui créé une ambiance intimiste et coupée du monde. Ils se sont inspirés de nombreux films pour le fond et la forme, comme Le Dieu d'Osier pour le côté fête païenne avec des masques, The Running Man pour les combats, Point Blank pour l'aspect visuel et bien d'autres films, dont les productions de Tarantino. La boucle temporelle est présente sur l'île de Blackreef spécifiquement, qui est connue pour ses événements paranormaux. Un groupe privé ambitieux a acheté l'île et y a mené différentes expériences, à sa tête se trouvent huit individus nommés les Visionnaires qui tentent de s'isoler du reste du monde, et de vivre dans un paradis éternel. Mais leurs expériences ont donné une boucle temporelle qui se répète à l'infini, et les habitants ont oublié qu'ils sont bloqués dans cette dernière. Leurs actes et leur destin n'ont plus aucunes conséquences. Nous incarnons un personnage amnésique qui redécouvre petit à petit son identité, en commençant par son nom : Colt. Il est aussi considéré comme un traître par les visionnaires. Il est contacté par Julianna Blake, qui l'encourage à résoudre la situation, mais dont le comportement est ambivalent puisqu'elle tente de le tuer.
Beaucoup de liberté est offerte au joueur dans Deathloop, mais il faut maintenir une histoire cohérente avec un bon rythme afin de préserver son intérêt. Donc plusieurs éléments ont été introduits par Arkane afin de livrer une narration fragmentée, capable de réagir aux actions du joueur. Alors que Colt essaye de briser le cycle en cherchant à tuer les huit cibles durant la même journée, avant que la boucle ne se réinitialise, il lui faut rechercher des informations sur sa cible et lui-même. D'un autre côté, Juliana n'a pas perdu la mémoire, et elle conserve ses souvenirs aussi d'une boucle à l'autre. Elle semble avoir eu une relation avec Colt, et elle lui parle constamment. Bizarrement, elle tente de le tuer, mais elle l'aide en parallèle avec des informations et des conseils, ce qui ne sera pas de trop. Les huit Visionnaires à tuer ne sont après tout pas des cibles faciles, ils disposent chacun d'une petite armée privée, ils sont équipés des meilleures armes ainsi que de pouvoirs paranormaux comme l'invisibilité, la téléportation ou la télékinésie. Et comme mentionné plus haut, le plus gros problème est qu'ils ne sont accessibles qu'à un endroit à un certain moment. Le temps sera votre plus grand ennemi.
Retour sur le gameplay de Deathloop
Dans cet extrait de gameplay, nous avons pu confirmer qu'une des clés pour résoudre le puzzle géant de Blackreef consistera à connaître par cœur vos cibles ainsi que leur agenda. Vous n'avez pas assez de temps en une journée pour toutes les traquer individuellement, mais vous pouvez parfois les pousser à se rencontrer par exemple, ce qui permet de faire d'une pierre deux coups. Pour vous y aider, une ressource spéciale nommée le Résidium vous permettra de conserver certaines armes et pouvoirs d'une journée sur l'autre, ce qui vous évitera d'avoir à aller les chercher à nouveau. Il vous faudra aussi espionner les habitants ainsi que bien fouiller pour découvrir de nouvelles approches qui peuvent changer la donne, un peu comme dans un jeu Hitman. On y découvre aussi que Julianna, l'assassine qui vous traque sur l'île, dispose de plusieurs pouvoirs, dont celui de changer d'apparence afin de se noyer dans la foule. Julianna peut aussi être incarnée par un autre joueur qui va alors envahir votre partie, cela devrait rappeler quelque chose aux fans des jeux FromSoftware.
Session de questions-réponses
Dinga Bakaba (Directeur du jeu), Pawel Kroenke (Lead Narrative Designer) et Sébastien Mitton (Directeur Artistique) ont répondu ensemble à différentes questions postées par la presse française et nous-même. Voici une sélection de ces questions, ainsi que leur réponse paraphrasée par nos soins.
Questions sur le Gameplay
Comment fait-on pour donner un sentiment de progression au joueur et éviter la lassitude avec la répétition de la boucle ?
Avec beaucoup de petits fragments de la narration qui sont ramassés au cours du jeu. Même si on est tué et qu'on se réveille pour la nouvelle boucle, on a quelques informations supplémentaires. Avec chaque découverte, on progresse. De plus, Juliana nous contacte afin de commenter les événements à chaque fois. On ne perd pas les informations sur la position des personnes et à quelle heure ils s'y trouvent, etc. Le joueur obtient de nouvelles armes et de nouveaux pouvoirs, puis le moyen de les garder d'une boucle à l'autre.
Avez-vous prévu des outils afin d'aider à planifier tous les détails des 8 meurtres dans la journée ? Afin de mémoriser tout le parcours, les heures et les différents détails des assassinats ?
Un menu répertorie toutes les pistes trouvées. Vous disposez d'un organigramme avec toutes les étapes où on se trouve, ainsi que les étapes suivantes pour les différentes branches de l'histoire. Et il y a la même chose pour les pistes des pouvoirs à récupérer ainsi que des armes uniques. Il y a aussi un écran avec la liste des découvertes et des post-it rassemblés par environnement afin de vous aider à garder une trace permanente de tout cela.
Y a-t-il un intérêt particulier à jouer en tant que Julianna ?
C'est une sorte de façon rapide de jouer à Deathloop, on envahit quelqu'un au hasard, ou on vise un ami spécifiquement avec un équipement de votre choix. On est alors allié aux ennemis du jeu pour abattre Colt. On peut attaquer de front, tendre des pièges, ou le harceler. Cela rend les joueurs de Colt plus prudents. On peut même se comporter de façon humoristique, voire l'aider. Cela va aussi débloquer des tenues pour Colt et Julianna après quelques matchs, ainsi que des armes et pouvoirs pour Juliana. Mais Julianna a une seule vie, alors que Colt en a trois, ce qui demande de bien jouer pour remporter la victoire.
Est-ce que les interventions de Julianna sont aléatoires ou sont-elles guidées par l'approche choisie par Colt ?
Elles sont aléatoires, mais elles n'arrivent que dans la zone qui comprend un des huit visionnaire, et uniquement lorsqu'il est présent. Et plus on est tard dans la journée, plus les chances d'être envahi par Julianna sont élevées. La progression dans l'histoire et vos succès augmentent les chances que Julianna vous envahisse.
Si on arrive à se débarrasser de Julianna, revient-elle malgré tout ou bien a-t-on la paix pour le reste de la boucle ?
Non ! Elle peut vous envahir plusieurs fois durant la même boucle. Mais la façon dont elle revient à la vie d'une période à l'autre de la journée est un secret.
Jouer Julianna permettra-t-il d'en apprendre encore plus sur l'histoire de Deathloop, ou l'intégralité du scénario sera-t-il inhérent à Colt ?
Un peu de contenu sympathique est exclusif à Julianna, mais il est possible de comprendre toute l'histoire sans la jouer. Cela en vaut néanmoins la peine.
Lors de vos sessions de jeu, combien de temps ont mis les joueurs en moyenne pour le terminer? Il y a-t-il plusieurs fins ?
On ne va pas répondre pour les fins. Mais pour le temps de jeu, en se basant sur nos tests internes, cela prend un temps similaire à celui des autres jeux Arkane, sans compter le multijoueur et la recherche de tous les éléments cachés, un peu comme Dishonored 2. Cela dépend aussi beaucoup de la façon de jouer.
Y a-t-il différents modes de difficulté ? Si oui, sur quels paramètres jouent-ils ?
Il n'y a qu'un seul mode de difficulté. Mais la difficulté est en réalité évolutive, elle accompagne les succès et échecs du joueur. En fonction de vos performances, les ennemis seront plus ou moins agressifs, plus ou moins réactifs, et plus ou moins bien équipé. Si vous avancez bien, la difficulté augmente, ainsi que les invasions de Julianna. Mais en contrepartie, cela vous donne aussi des chances de mettre la main sur de nouvelles pièces d'équipement, ainsi que d'obtenir davantage du précieux Résidium.
Est il possible de progresser de manière furtive ?
Oui, mais il n'y a pas de sauvegarde ni de chargement rapide dans Deathloop. Donc quand vous êtes découvert, il faut faire avec.
Est-ce que le principe de boucle temporelle a été un prétexte pour pousser les joueurs d'immersive sim à enfin "s'amuser" ?
Oui, et contrairement à tous ces jeux avec la possibilité de charger, ainsi que ceux qui vous proposent des scènes spectaculaires scriptées, ici tout émerge en fonction de vos choix et actions, comme de gros combats, une course poursuite et autres. Les péripéties se déroulent naturellement en fonction des actions du joueurs et la façon dont il tente de gérer ses échecs ou actions épiques, par exemple. La boucle temporelle permet de décomplexer les joueurs, tout est permis, il n'y a pas de conséquences, pas même à la mort.
Est-il possible de terminer le jeu sans tuer personne comme dans Dishonored ?
Non, bien qu'il soit possible de réaliser des boucles sans tuer personne. Il faudra au moins tuer ces huit cibles précises, c'est le prix à payer pour sortir, mais rien ne vous empêche d'avoir la main légère et d'épargner les autres.
Questions sur les inspirations et la direction artistique
Dans quelle mesure le passage à une nouvelle génération de consoles a pu modifier votre méthode de travail, notamment en termes de direction artistique ?
Le développement n'était pas prévu pour la PS5 à la base, et l'équipe avait prévu d'inclure des éléments multijoueur, ce qui les forçait à réduire la densité dans différents domaines. Mais ils ont pu revoir la taille de leurs niveaux. Ils sont à présent plus gros que ceux de Dishonored 2. Ils ont aussi pu mettre plus d’interactions, et s'autoriser plus de liberté créatrice. Cela leur a donné une bouffée d'air frais.
On sent un esprit très "Grindhouse" dans les trailers, sûrement en lien avec les références cinématographiques de l'équipe. Assumez-vous un côté plus "série B" qu'avant ?
Deathloop n'a pas de côté Série B, c'est quelque chose qui doit être fait d'une façon très intentionnelle. Ils essayent de faire quelque chose de crédible, pas de l'humour méta, mais véritablement une situation drôle en soi, pour les personnages, et pas que pour le joueur qui dispose des bonnes références culturelles. Les trailers peuvent cependant donner cette impression.
Pourquoi avoir recréé tout le design des objets, meubles et des véhicules plutôt que de reprendre ceux d'époque ?
C'est une question de droits pour commencer, mais c'est aussi pour le plaisir de créer tout un univers, une histoire. Cela offre une grande liberté créative. Et cela permet aussi de modifier tous ces éléments en fonction des besoins. Pour finir, il est aussi difficile de trouver les bonnes références dont nous avons besoin, on préfère donc faire tout cela nous-mêmes.
Qu'est ce que cela vous a fait voir les sorties de 12 minutes et de The Forgotten City seulement quelques semaines avant Deathloop ?
Lors du développement, nous avons découvert beaucoup de films, de séries et de jeux qui utilisent ce principe de boucle temporelle pour raconter leur histoire. C'est un thème qui est très riche, et il est possible de raconter des histoires complètement différentes. Deathloop est très différent de 12 minutes par exemple.
Pourquoi ce choix des années 60 plus qu'une autre période ? Pour son design général ?
C'était un moyen de s'isoler du monde moderne. À la fois dans le lieu avec l'île de Blackreef, mais aussi de la politique moderne. De plus, les années 70 ont déjà été lourdement couvertes, c'est moins le cas pour la décennie précédente, alors que les années 60 sont à l'origine de plein de mouvements artistiques et autres comme le prêt-à-porter, un changement des mentalités, etc. Mais comme c'est un monde fictif, nous n'avons pas non plus besoin de respecter la chose fidèlement, par exemple la façon de parler n'est pas fidèle à celle de l'époque.
Un phénomène paranormal autre que la boucle temporelle a-t-il été envisagé pour le concept du jeu à un moment du développement ?
C'était un des éléments fixés dès le départ, il a tracé la route pour la suite du projet. Et nous avons mis des années à le faire fonctionner dans Deathloop.
C'est tout pour le moment, les informations sur la configuration requise, ainsi que celle recommandée sur PC restent encore à venir. Vous pourrez aussi découvrir Deathloop d'ici quelques jours sur PC et PS5 le 14 septembre prochain. Un test détaillé de notre part est aussi prévu afin de partager avec vous notre avis définitif sur ce titre peu conventionnel.