Peu de jours avant la DreamHack Winter 2014 nous avions publié un article dans nos colonnes au titre évocateur : fnatic, l'équipe à abattre. Jamais nous n'aurions pu penser que ces quelques mots seraient pris au pied de la lettre par les concurrents des Suédois. Car depuis un peu plus d'une semaine la structure australienne est dans l’œil du cyclone au point que les joueurs menacent de mettre un terme à leur carrière pour cause de pression trop importante. Insultes, menaces de mort, accusations, pression psychologique, l'attirail déployé par ceux qui veulent réduire à néant tous les espoirs des fnatic est vaste et il ne connait vraisemblablement pas de limite. Aujourd'hui attaqués de toutes parts les Suédois sont au bord de l'implosion, mais alors comment une équipe qui dominait la scène Counter-Strike : Global Offensive a pu s'enfoncer aussi vite dans les tréfonds du sport électronique ?
Du paradis à l'enfer
Les ennuis des joueurs suédois ont débuté lorsque la vague de bannissements à frappé la scène CSGO. Pourtant à l'heure actuelle seuls les Français Hovik « KQLY » Tovmassian (ex-Titan) et Gordon « Sf » Giry (ex-Epsilon) ont été bannis par le Valve Anti Cheat (VAC). Aucun joueur de l'écurie fnatic n'a été de son côté inquiété et pourtant la suspicion qui a frappé la scène depuis cette époque a pointé de son doigt accusateur l'un des Suédois. C'est Robin « flusha » Rönnquist qui a été désigné comme coupable sans la moindre forme de procès. Des vidéos, des clips, des témoignages, des messages Twitter venant même parfois d'autres professionnels, allaient tous dans le sens de l'accusation. Robin était un tricheur, c'était avéré et son bannissement par le VAC ne saurait tarder. Difficile de juger le bien-fondé de ces attaques, ce qui est certain c'est que sans preuve aucune la communauté s'est lancée à corps perdu dans un lynchage sur les réseaux sociaux comme elle en a l'habitude ces derniers temps, malheureusement.
Alors tandis que Robin « flusha » Rönnquist et ses équipiers étaient sur leur petit nuage après leur récente victoire lors des finales de la Fragbite Masters saison 3, ils sont rapidement redescendus du ciel pour venir faire un tour en enfer. Attaqués de toutes parts, les Suédois comptaient sur la DreamHack Winter 2014 pour se racheter une image de marque. La LAN était annoncée comme étant la plus propre du monde, impossible de tricher sur place et donc seul le vrai jeu allait être enfin à l'honneur. Car depuis les dernières affaires et la découverte d'un logiciel capable de leurrer n'importe quel arbitre de tournoi, la communauté avait besoin de se rassurer. Mais cela allait-il être suffisant ? Pour certains adversaires virulents des fnatic la messe était dite, ils étaient coupables et n'avaient rien à faire à Jönköping si ce n'est pour prendre la place d'une autre équipe plus honnête. Pourtant nous vous le rappelons, à l'heure actuelle personne n'a confirmé ces soupçons, ils ont même plutôt tendance à s'estomper au fil du temps ne faisant pas face à une analyse à tête reposée.
Les joueurs fnatic en pleine action
Une DreamHack qui commençait mal
La DreamHack allait donc commencer et durant la semaine précédente, les joueurs fnatic étaient aux côtés de leurs adversaires à Stockholm où un camp d'entraînement avait été organisé par Valve et toute une série de sponsors. Pas de problème à ce moment-là, et hormis la sortie sulfureuse du coach des Ninjas in Pyjamas sur Twitter où il accusait ouvertement Robin « flusha » Rönnquist de tricher, tout semblait s'être atténué en façade. En façade seulement car pour flusha la situation était déjà compliquée, attaqué tous les jours sur les réseaux sociaux, les insultes à son sujet pleuvent et les sujets sur reddit prolifèrent, tentant de convaincre un maximum de joueurs de se joindre à la lutte contre la triche. La LAN débute donc dans des conditions déjà compliquées pour fnatic et ses joueurs. Heureusement pour eux une communication de l'organisation a expliqué la mise en place de mesures exceptionnelles contre la triche.
Pas de téléphone pendant les matchs, des ordinateurs vierges, des configurations passées au peigne fin, des arbitres aux aguets et puis une sorte de pacte de bonne conduite signé par l'ensemble des participants. Bref cela semble faire retomber un peu la pression, mais toujours pas pour flusha continuellement attaqué malgré cela. Dans la poule A, fnatic s'impose à deux reprises (contre Bravado et Cloud9) mais a le malheur de s'incliner face aux surprenants HellRaisers (14-16 de_mirage). Il n'en faut pas davantage pour relancer les assauts, les matchs étaient déjà de toute manière en permanence attaqués via le tchat où il n'était question que de VAC et de fnatic, obligeant les diffuseurs à intervenir pour réduire la liberté d'expression aux seuls abonnés ... Alors avec cette défaite les arguments se veulent renforcés : si fnatic a perdu c'est forcément parce qu'ils ne peuvent plus tricher et sont donc moins forts ... CQFD.
flusha, pronax, KRiMZ, JW et olofm posent
Le paroxysme contre LDLC
Jusque là fnatic est toujours dans la course, ils sont qualifiés pour les quarts de finale même s'ils ont terminé à la seconde place de leur poule. Ils retrouvent alors sur leur parcours les Français de la Team LDLC. Ces derniers font office de favoris lors de l'événement et jusqu'à maintenant ils ont toujours buté contre les Suédois. Les champions du monde en titre contre leurs vice-champions, enfin de quoi nourrir un peu plus la haine des uns et des autres puisque, sur les réseaux sociaux, la température monte brutalement à l'annonce de ce duel. Une map partout, les deux clubs se neutralisent sur de_dust2 puis de_cache. Arrive alors de_overpass, une carte qui fera couler de l'encre comme jamais jusqu'à aujourd'hui. Menés 12-3 lors de la première manche, les carottes semblent cuites pour fnatic mais c'est sans compter leur désormais célèbre « pixel walk ». Un petit pixel qui leur permettra de s'imposer en enchaînant 13 rounds consécutifs avant que LDLC ne comprennent d'où venaient les tirs ...
Un exemple de pixel walk durant le match fnatic contre Team LDLC
Tricheurs, menteurs et hors règlement ? Les Suédois venaient de se donner eux-mêmes le coup de grâce. Leur comportement ensuite sera d'ailleurs la pire des défenses. La DreamHack autorisant dans un premier temps le « pixel walk » alors qu'il était acté pour tout le monde que c'était interdit, les fans accusent de favoritisme envers les Suédois. Les administrateurs reviennent sur leur décision et demandent à rejouer la carte ... fnatic porte réclamation accusant les Français d'avoir utilisé un bug similaire en phase de poule. Mauvaise foi ? Les insultes s'intensifient encore contre la structure australienne, d'autres équipes prennent même la défense des Français. Au final les joueurs déclareront forfait, en grande partie suite aux nombreux assauts dont ils ont été les victimes sur les réseaux sociaux puisque leur moral vient d'être touché, et qu'ils sont même lâchés par leurs camarades des autres écuries professionnelles. Touché en plein cœur, fnatic s'écroule et quitte la queue entre les jambes un tournoi qui restera le pire souvenir de toute l'histoire de l'organisation.
Malgré la polémique tout le monde reste en bons termes
Du rêve au cauchemar
La suite du tournoi vous pouvez la suivre dans notre article dédié : les fnatic ne s'en occuperont pas puisqu'ils sont brisés psychologiquement. Ils espéraient redorer leur blason pendant la compétition, le résultat est qu'ils sont aujourd'hui l'équipe la plus détestée du monde entier. Ils voulaient faire taire ceux qui les accusent d'être des tricheurs, au final certains ont encore réussi à trouver des actions louches même si la LAN ne laissait vraiment aucune place à un quelconque logiciel de triche ... Ils voulaient conserver leur statut de numéros 1 mondiaux et puis ils sont aujourd'hui ceux qui trichent, abusant du règlement et jouant de leur nationalité pour influer sur les administrateurs locaux. Toutes ces accusations sont de trop, les joueurs s'effondrent une fois de retour chez eux et c'est tout récemment qu'ils ont choisi de s'exprimer pour la première fois :
Robin « flusha » Rönnquist - joueur (Traduction - Source)
Bonjour à tous, je vais parler un peu de toutes ces accusations de triche dont je suis la cible. Tout d'abord je tiens à dire que je joue de manière compétitive depuis 7-8 ans, que ce soit sur Counter-Strike 1.6 ou Global Offensive.
J'ai déjà été beaucoup accusé tout au long de ma carrière, sauf pendant l'année et demie qui a suivi la Copenhagen Games 2013. Mais depuis la série de bannissements du VAC concernant KQLY et Sf, la communauté n'a eu de cesse de viser des joueurs et moi particulièrement. La seule chose que la communauté est parvenue à faire à mon équipe et moi-même c'est nous déverser un flot de haine. Je n'ai jamais été banni ou disqualifié pour triche d'un tournoi, d'une ligue ou du ladder de toute ma vie. J'ai été observé par un grand nombre d'administrateurs, par exemple ceux de l'ESL qui ont eu l'occasion de me voir à de nombreuses reprises.
Tout ce que je peux dire sur les clips vidéos me concernant c'est que j'ai un style de jeu différent des autres et que je bouge énormément ma souris, bien plus qu'un joueur normal. La dernière chose que j'aimerais dire c'est que cette communauté est une putain de blague. Neuf messages sur dix que je reçois sur Twitter ou Facebook sont des insultes ou des menaces de mort. Les autres 10% sont des fans qui apprécient ce que nous faisons et qui souhaitent tout simplement nous apporter leur soutien, et je les en remercie.
C'est juste dommage de voir que vous risquez de détruire l'une des meilleures équipes du monde grâce à votre haine contre nous. Certains de mes équipiers se sentent tellement mal qu'ils ne prennent plus aucun plaisir à jouer, et qu'ils souhaitent tout simplement mettre un terme à leur carrière plutôt que de jouer dans ces conditions. J'aime le sport électronique et la joie qu'il peut nous procurer. Le seul problème c'est cette communauté et ce qu'elle peut apporter. C'est pourquoi je ne m'en suis jamais préoccupé jusqu'à maintenant, que ce soit via les réseaux sociaux ou d'autres choses. Tout ce que je fais je le fais pour les sponsors de mon club.
Markus « pronax » Wallsten - capitaine (Traduction - Source)
Malgré ce que peut penser une partie de la communauté (incluant quelques joueurs professionnels), nous essayons de jouer d'une manière juste. Pour moi la compétition signifie faire tout ce qui est en son possible pour être meilleur que ses adversaires, cela bien entendu en suivant les règles des tournois. Nous ne communiquons certainement pas autant que les autres sur les réseaux sociaux mais nous travaillons très dur pendant nos entraînements. En nous rendant à la DreamHack nous souhaitions simplement faire du mieux que nous pouvions, nous souhaitions également mettre un terme à ces accusations de triche grâce au fait que les administrateurs avaient promis l'événement le plus sécurisé de l'histoire de Counter-Strike : Global Offensive.
Mais après que quelques joueurs respectables ont rejoint la chasse aux sorcières, essayant de nous faire disqualifier du tournoi avant même que ce dernier n'ait débuté, alors que l'événement était censé être le plus sécurisé du monde contre la triche ... Ces gens voulaient nous priver de notre seule chance de prouver que nous étions honnêtes ? Je pense que c'est à partir de ce moment-là que nous avons ressenti la pression énorme qui s'abattait sur nous pendant la compétition.Quoi qu'il en soit je pense que nous avons prouvé que nous étions l'une des meilleures équipes du monde, que malgré tout cela nous avons montré ici ou là que nous pouvions proposer de beaux matchs, et je crois que flusha a prouvé à lui-même qu'il n'avait rien à se reprocher en terminant deuxième meilleur joueur en termes de statistiques durant le tournoi devant : pasha, olofm et JW. Et on retrouve des images de nous pendant la DreamHack démontrant les mêmes choses qui ont entraîné ces accusations à notre sujet, certains pensant que nous utilisons une aide à la visée. Je crois qu'actuellement tout laisse à penser que flusha est innocent.
En ce qui concerne le « pixel walk » fnatic se défend en affirmant qu'ils ne pensaient pas que cela serait interdit tout simplement car ils ont vu d'autres équipes le faire, et notamment la Team LDLC en phase de poule. De plus ils ne pensaient pas que les Français mettraient autant de temps pour comprendre d'où venaient les tirs, s'ils avaient réagi plus tôt ils n'auraient certainement pas pu engranger autant de rounds successifs.
Aujourd'hui les joueurs sont vidés, la pression aura été trop forte et malgré les tentatives du staff, notamment par la voix de Patrik « cArn » Sättermon, de les protéger ils n'ont pu échapper au déferlement de haine auxquels ils étaient soumis. Pire encore, toute cette polémique semble avoir fait réagir les sponsors du club, ce dernier ayant vu son image grandement écornée par toutes ces affaires. Alors quand dans le même temps vous commencez à perdre les soutiens de toutes parts, votre carapace s'effondre. C'est ainsi que désormais l'avenir même de la section semble remis en cause, certains membres ne sachant plus quel avenir ils souhaitent donner à leur carrière.
Le titre de champions du monde 2014 - crédit : HLTV.org
Or sans preuve ni sanction comment se priver d'une des meilleures équipes du monde ? Eux qui dominaient tous les tournois depuis quelques mois, qui ont atteint leur paroxysme en remportant la Coupe du Monde des Jeux Vidéo 2014 à Paris, connaissent désormais une descente aux enfers comment jamais nous n'avions pu en voir jusqu'à aujourd'hui. Espérons que toute cette polémique finisse par se tasser, permettant à chacun d'être jugé pour ses actes et non pas sur des suppositions. Le coup de grâce viendra peut-être avec une action du VAC auquel cas les détracteurs pourront se délecter d'avoir eu raison, mais en attendant, et jusqu'à preuve du contraire, les fnatic sont innocents.