L'évolution du nombre d'abonnés
Mais les arbres ne poussent pas jusqu’au ciel. Le succès de WoW qui semblaient jusque-là insolent commença alors à s’effriter. Au fil des mois le nombre de joueurs a commencé à s'éroder de façon significative. Cela commença timidement, tout un chacun voyant une ou plusieurs de ses connaissances de jeu arrêter WoW, puis les choses commencèrent à prendre des proportions préoccupantes pour le studio. Entre octobre 2010 et novembre 2011 World of Warcraft perdit 1,7 million de clients. Quelles furent les raisons de cette dispersion ?
Tout d’abord, un phénomène de lassitude s’était emparé de nombre d’entre eux. Après six années passées sur Azeroth certains se sont lassés. La magie n’opère pas de la même façon au début et après tant d’années. D’autant qu’avec les temps qui passe, certains arrivaient à des moments de leur existence où ils construisaient leur vie familiale et professionnelle et que WoW n’était sans doute plus leur priorité, ou une chose à laquelle ils pouvaient consacrer du temps.
Ensuite, le contenu de Catalcysm a été consommé plus vite que les précédents. C’est sans doute un des effets pervers de la massification du jeu. À tout rendre trop accessible, on permet sans doute trop vite à tout le monde d’en voir assez. Pourquoi payer un abonnement en période de crise si on a vu tout ce qui nous intéresse ?
En outre, Blizzard a passé beaucoup de temps à refaire toutes les zones d’Azeroth. Et même si la firme dispose (logiquement) de beaucoup de réserves financières elle n’a pas un nombre infini de développeurs. Par conséquent faire du contenu de bas niveau ampute le contenu haut niveau du temps qu’aurait pu y consacrer les équipes du studio. Tous les joueurs n’aiment pas forcément les rerolls, et une fois le contenu 85 exploré et farmé, il y a moins de raisons de rester sur Azeroth.
BWL IV par Jack
Une autre raison qui a pu jouer, mais dans des proportions moindres est la perte de sentiment épique des raids. On peut une nouvelle fois blâmer le manque d’enthousiasme que cause le temps qui passe. Ensuite, la massification des raids a blasé l’élite des joueurs qui se retrouvaient dépossédés de leur prestige. Des raids comme Naxxramas 60 ou le Plateau du puits de Soleil sont aujourd’hui inimaginables, tant le travail nécessaire à leur conception ne profite qu’à peu de monde. L’équipement, qui était auparavant un marqueur de réussite en jeu a également perdu son aura de gloire, WOTLK ayant marqué durablement les esprits avec ses butins épiques faciles. Les corrections apportées par Cataclysm n’auront malheureusement pas effacé ces traces. Le fait que l’élite des joueurs critique ou abandonne le jeu produit aussi son effet, fut-il uniquement psychologique.
Enfin, les différences géographiques jouent aussi. Quand 10 % (chiffre fictif) de joueurs chinois arrêtent le jeu, cela se ressent plus que lorsqu’il s’agit de 10% de joueurs sud-américains. L’arrivée à maturité de WoW dans certaines régions et ses conséquences statistiques a aussi impacté sur les courbes d’abonnés.
Bien sûr il y a sûrement d’autres raisons, mais celles-ci constituent déjà une part non négligeable du déclin amorcé de World of Warcraft. Les mesures commerciales prises par Blizzard, et les choix en termes de gameplay ou de communication n’auront fait qu’enrayer cette baisse pour le moment, mais ils ne l’auront pas stoppée. Mists of Pandaria permettra sûrement d’inverser la tendance en cours, mais combien de temps cela durera-t-il ?
Introduction de Cataclysm
La faute à Cataclysm ?
Cataclysm est-il à blâmer dans cet abaissement du nombre de joueurs ? À bien des égards la troisième extension du jeu l’a rendu bien plus accessible qu’il ne l’était avant, et a priori aurait du contrecarrer cette tendance. Pourtant certains ont été déçus par Cata, et il suffit de voir les commentaires faits régulièrement sur le net, ou dans votre entourage pour vous rendre compte que le titre a déçu ceux qui préféraient le jeu lorsqu’il était moins grand public. Pourtant Cataclysm propose aussi sa part de défis. Le PvE à haut niveau reste un réel challenge pour tous ceux qui ne font pas partie de la minorité des guildes de haut niveau. Est-ce que considérer qu’un jeu plus accessible pour certains le rend automatiquement trop facile et indigne d’intérêt ? Et est-ce là une raison suffisante pour ces joueurs de stopper leur abonnement ? Je ne pense pas que ce soit un facteur décisif, mais il peut en tout cas jouer dans la décision finale. De ce point de vue, Cataclysm semble payer les pots cassés de certains choix stratégiques et de sept ans d’évolution plutôt que d’être la mauvaise extension que certains décrient. Si Vanilla avait eu autant de possibilités que Cata, le nombre d’abonnés aurait sans doute décollé encore plus vite à l’époque.
Pour autant la troisième extension de World of Warcraft n’est pas exempte de défauts. À vouloir faire trop en même temps, Blizzard a connu quelques problèmes notamment en matière d’équilibrages, qui reste sans doute le travail le plus délicat pour la firme. La nécessité de concilier PvP et PvE est une contrainte que le jeu traîne comme un boulet depuis des années et qui a un impact sur les classes, donc sur les boss, donc sur le ressenti de chaque patch de contenu majeur. Un palier de raid mal équilibré aura des conséquences désastreuses, car il constitue la principale nouveauté des mises à jour du jeu.
Atramédès, un des boss qui avait fait débat
À la nécessaire difficulté d’équilibrage PvP / PvE se sont aussi superposé celles d’adapter les raids en mode 10 et 25 joueurs, en normal ou en héroïque. Bref, l’équilibrage du jeu sera toujours une plaie à gérer, et Cataclysm n’a pas fait exception. Est-il plus à blâmer que BC, LK ou Vanilla ? Ou bien les standards d’exigence des joueurs ont-ils évolué vers toujours plus de qualité demandée au fil des ans ? La seconde solution me paraît plus plausible. Cataclysm a des défauts, et le Diable se cache dans les détails, mais sa qualité intrinsèque ne me semble pas la principale responsable de la baisse de joueurs de WoW.
Un autre reproche fait souvent à Cataclysm est l’utilisable importante d’ancien contenu. Je ne parle évidemment pas des zones de quêtes de bas niveau, mais du contenu de fin de jeu : Ragnaros, Nefarian, Onyxia, Zul’Gurub, Zul’Aman, les Mortemines, le donjon d’Ombrecroc. Si le côté nostalgique évident est de mise, et plaît aux joueurs, d’autres ficelles sont parfois mal passées. L’affrontement de Ragnaros était attendu, les Deadmines et Ombrecroc en version héroïques ont été appréciables. Cependant combattre Nefa et sa sœur en guise de dernier boss de raid commençait à se voir, et la sortie des deux instances trolls a été une déception alors que le tier 11 s’éternisait et que beaucoup attendaient le donjon de la Gueule des abysses et l’arrivée des Terres de Feu.
L’amputation d’un tier de raid en moins avec la disparition de la Guerre des anciens initialement prévu en tant que raid mais finalement introduit en tant que donjon déçoit aussi. Et du point de vue de l’histoire, que dire de la fin apparemment vite expédiée du Vol infini dans la Fin du Temps et de la de la chute des Aspects qui ampute l’histoire de Warcraft d’un élément emblématique important ? Cataclysm laisse parfois un goût amer dans la bouche, celui d’un contenu pas assez / sous utilisé ou vite expédié dans de nombreuses zones. Le départ de beaucoup de développeurs sur Titan se fait sentir et la qualité générale du titre aurait été encore meilleure si Blizzard avait disposé de plus de temps ou d’hommes.
Ulduar par Jack, un des meilleurs raids du jeu