Voici ce qu’il en coûte de vouloir se la jouer Big Brother. Le 4 septembre dernier, l’ESIC, une commission veillant à l’intégrité compétitive sur la scène CS:GO, entre autres, lançait une enquête visant à déceler la triche au sein des équipes, et plus particulièrement l’exploitation potentielle d’un bug par des coachs.
Le bug en question ? Ni plus ni moins que la possibilité, via l’outil spectateur des matchs, d’avoir accès visuellement à chaque recoin de la map, afin de pouvoir connaître toutes les positions adverses et lire le jeu. Postés dans le canal d’un outil de communication partagé avec les joueurs, ils pouvaient ainsi distiller de précieuses informations pouvant emmener jusqu’à la victoire de rounds, et de rencontres.
Cette exploitation, équivalente à de la triche pour ceux qui l’utilisaient — puisque donnant un avantage certain à une équipe sur une autre —, aurait pris sa source en 2016, avant d’être finalement corrigée par Valve, le 26 août dernier. Au total, ce sont donc plusieurs années de compétition qui pourraient être remises en cause. Surtout sur un format online (dans lequel l’utilisation du bug pouvait assez facilement passer sous les radars) plébiscité depuis le début de la période de crise sanitaire, avec des rendez-vous physiques annulés ou reportés sur du « en ligne ».
Sauf que l’ESIC s’est depuis penché sur la question. Avec aux manettes, deux hommes : Michal Slowinski, un administrateur de tournois vétéran de la scène CS, et Steve Dudenhoeffer, un responsable de développement logiciel lié à l’ESEA. Ces derniers auraient déjà analysé 20% des 99 650 Demos mis à leur disposition par les bases de données de HLTV.org et l’ESEA, pour un passage à la loupe.
Ce sont ainsi 37 entraîneurs, dont certains d’entre eux tirés de grandes structures de la discipline (MiBR, FaZe, NiP, FURIA, Heroic, North et Heretics, pour ne citer qu’elles) — et ce que l’on redoutait le plus dans l’hexagone, un Français — qui se sont vus être pris la main dans le sac. Déjà lié à l’affaire d’un match truqué d’Epsilon datant de 2014, B1GGY s’est vu remercié par Heretics dans la foulée de l’annonce de l’ESIC, ayant vu son nom inscrit dans la liste des coachs bannis sortie aujourd’hui.
S’il a écopé d’environ 7 mois de suspension, certains autres cas d’interdiction de la pratique en officiel sont montés jusqu’à 3 ans, suivant l’importance et la fréquence relevées dans l’exploitation du bug. À noter que des « remises de peine » ont été accordées à ceux qui avaient avoué leur tort en amont, ou avaient aidé à faire avancer l’enquête. La résultante de toute cette affaire, pour les coachs visés, va ainsi être une exclusion des tournois de l’ESL, DreamHack, BLAST et WePlay, mais aussi de tous les autres organisateurs de tournois qui voudront s’aligner sur les jugements établis.
Tous affectés par cette affaire, les joueurs pros, les techniciens, les clubs, l’éditeur du jeu, les annonceurs, les diffuseurs et les sponsors, vont donc devoir composer avec cette problématique de confiance sur certains résultats passés, même si la plupart des malfaiteurs ont à présent été repérés et écartés.
Alors que la scène pro de Counter-Strike est déjà en proie à des clivages à propos de son organisation, mais aussi touchée par des questions sanitaires et mentales, avec la crise du Coronavirus d’un côté, et celle des burnouts de l’autre, l'ESIC a annoncé apporter un rapport final d'ici à la fin octobre, afin de boucler l'enquête définitivement.