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Au Kremlin-Bicêtre, tout juste à la lisière du treizième arrondissement de Paris, on joue le dernier Wanted de la saison. Dans les locaux d'EPITA, une école d'ingénieurs en Informatique, NtK donne de la voix. Les traits tirés par la fatigue, l'homme de main Solary et figure emblématique de la scène francophone de Smash, coordonne son événement, noyé dans une foule de joueurs. Ça chahute, mais lui crie plus fort encore : « Bougez au fond ! Vous gênez les joueurs ! ». Aujourd'hui, on est plus nombreux que d'habitude, plus de cent, et il y a du beau monde. La France est là, évidemment : Flow, Jeda, VinS, PEW, Leon ou encore Ogey sont devenus des habitués de ce rendez-vous francilien incontournable. Nos voisins hollandais sont bien représentés, aussi, avec la participation de iStudying, de Meru et de S1 car c'est la "der" pour arracher le titre à Glutonny. Pour le prochain Wanted, il faudra attendre octobre.
Dans les couloirs de l'école, Trim patiente, à quelques minutes du cinquième tour du Winner bracket.
« Je vais bientôt jouer contre S1, il est plutôt fort. Je vise le Top 8 aujourd'hui ». Le jeune parisien a fait le trajet depuis le dix-neuvième arrondissement pour venir disputer cette compétition, qu'il connaît bien maintenant. « J'ai fait plus ou moins tous les Wanted, treize depuis le début d'Ultimate. Le Wanted 7, c'est celui où j'ai fait mon meilleur classement si je me souviens bien. J'avais fait troisième ».
L'attention est sur lui. À quinze ans seulement, Trim a atteint quelques jours plus tôt la treizième place de l'Albion 4, son premier grand Major de Smash Ultimate, au milieu de neuf cent inscrits. Sa performance a surpris tout le monde ici.
« Je me rends pas vraiment compte. Maintenant que je fais des résultats, c'est pas aussi incroyable que ça pouvait l'être avant. Mais je suis content. J'ai eu des victoires contre des joueurs connus, des joueurs forts, en particulier cyve ou Tru4, qui est un top allemand. C'est des grosses victoires ».
À ce niveau là, il n'y a pas de secret. Trim joue à Smash depuis tout petit. Il commence à s'intéresser à la scène à l'occasion de la sortie de Smash 4, en 2014. À cette époque, Mêlée est loin déjà.
« J'avais huit ans et c'était sur Brawl, sur Wii. À la base, c'était pas pour la compétition, c'était chez moi, avec mon frère pour s'amuser. J'ai commencé à faire des tournois en ligne sur 3DS fin 2017. Le jeu est sorti sur 3DS et Wii U mais j'avais pas la Wii U, donc je jouais sur 3DS. J'ai Mêlée mais c'est pas trop mon truc. J'aime bien regarder mais jouer, ça prend trop de temps à apprendre. C'est assez différent. Il y a des points communs mais au niveau de l’exécution, c'est plus compliqué ».
Si Trim a réussi à se faire un nom au sein de la communauté francophone de Smash, ce n'est pas uniquement dû à son jeune âge ou à ses derniers résultats en tournoi. Le lycéen est surtout connu pour son Mega Man, l'un des tout meilleurs de France.
« C'est pas le personnage le plus joué mais il y a des joueurs de Mega Man. Je pense que c'est fort. C'est pas le top du top mais c'est fort. Avec j'ai quelques mauvais match-up par contre : Pikachu, Wolf, Pichu, Shulk, Lucina et Palutena. C'est embêtant parce que ces personnages sont beaucoup joués ».
Trim s'avance vers la stage et prend place face à son fameux adversaire, qui main Ness. On l'encourage, son nom est scandé par le public qui vient se masser devant les grands écrans. C'est une place en quart de finale du bracket qui est en jeu. Le jeune parisien est dans son match. Concentré, il lui arrive de bourrer frénétiquement sa manette lorsqu'il sait qu'il a commis une erreur. Quand bien même, la première manche est pour lui et les applaudissements redoublent dans le hall.
S1 est en difficulté. Il est battu et n'a pas le soutien des spectateurs. Le néerlandais prend le parti de changer de stratégie et choisit Pikachu, puis Wolf, pour revenir dans le set. Ça paye, malgré les moqueries dans la salle. Au final, la victoire est pour lui et Trim est envoyé en Loser bracket.
Le jeune joueur est dépité, presque fatigué. S1 a abusé du match-up et la rencontre était serrée. Il est déçu mais il sait que c'est le jeu et qu'il a encore pas mal de boulot devant lui.
« C'est dur. En ce moment je m'entraîne à apprendre le maximum de match-up. Il me faut un plan de jeu contre pas mal de personnages encore. C'est de la préparation. En avantage, c'est-à-dire en ledge-trap, quand l'adversaire est au bord du terrain, le but c'est de l'empêcher de revenir au centre. Ça faut vraiment que je bosse dessus. Puis aussi mon edge-guard, lorsque l'adversaire est en dehors du terrain et qu'il essaie de revenir». Enfin il arrive à se remobiliser, fort de ses nombreux soutiens aujourd'hui.
« Les gens sont super accueillants, ils me soutiennent et sont sympas avec moi. Honnêtement, la communauté Smash est super. Ça fait toujours plaisir d'aller aux tournois, pas que pour jouer mais aussi pour voir les gens, l'ambiance, supporter aussi. C'est un plaisir. Et puis je trouve que la commu' française, en particulier, est très solidaire. À l'Albion, par exemple, ça criait vraiment pour tous les Français. Ils ont été remarqués. Rien qu'au niveau des votes pour envoyer des joueurs à l'étranger, t'auras toujours des Français. C'est incroyable ».
Trim aussi a reçu des votes, pour aller aux États-Unis. À l'occasion des Mega Smash Mondays 200, fin juillet à Los Angeles, il est intégré dans un compendium, un ensemble de joueurs dont la participation au tournoi dépend de la communauté.
« Pour faire le voyage là-bas, j'ai besoin de donations. C'est en cours... Je sais pas si ce sera suffisant, je l'espère. J'ai même fait une vidéo pour me présenter à tous ceux qui ne me connaîtrait pas ». À votre bon cœur.
Trim termine neuvième de ce Wanted particulièrement relevé. Aux portes du Top 8, il est battu deux à zéro par un compatriote, PEW, qui joue pour LeStream. Il a presque atteint l'objectif qu'il s'était fixé même si ça reste pour lui « le meilleur moyen de se mettre la pression et de se déconcentrer pendant les matchs ». Evidemment, Trim sera de la partie pour les prochains Wanted, la saison prochaine. Il y est attendu maintenant. Et un peu chez lui, aussi.
