Après un mois de compétition acharnée, du Play-In aux Playoffs, en passant par le Group Stage, les Worlds 2020 de League of Legends viennent tout juste de s'achever par une série rocambolesque — une finale haute en couleurs et en émotions bien différente du traditionnel stomp auquel on était habitué.
DAMWON Gaming contre Suning, c'était encore une fois le match que nous n'attendions pas, mais dont nous avions besoin. C'était une rencontre placée sous l'égide de David contre Goliath, un duel dont l'issue s'est décidé à l'ultime seconde.
On vous donne le ton de cet affrontement dantesque entre deux titans de la Faille.
Game 1 : des débuts timides
Dans la première game de cette grande finale de Worlds 2020, une pression incroyable pesait sur les épaules des deux équipes. La première partie est souvent celle qui donne le ton de la journée et personne n’a envie de montrer le premier signe de faiblesse. On a donc trouvé DAMWON Gaming et Suning un peu sur la retenue. L’ensemble ou presque des laners ont opté pour la rune des cookies afin d’avoir un maximum de sustain.
Conséquence indirecte, il a fallu attendre la 10e minute pour avoir le premier kill de la finale, Lê "SofM" Quang Duy et Chen "Bin" Ze-Bin montrant une nouvelle fois la magie de leur synergie. Les Coréens ne paniquent pas pour autant et continuent de jouer sur leur force. Au lieu de s’activer dans tous les sens, ils concentrent leur activité sur un seul point de la carte : le contrôle des dragons. Comme souvent, Suning fait le choix risqué de laisser les 3 premiers dragons pour ne défendre que celui de l’âme.
L’équipe chinoise profite alors de cette liberté sur le reste des zones pour trouver quelques escarmouches bien senties et prendre un léger avantage au tableau d’affichage (gold et kills). Mais rien de très décisif, surtout en regardant le late game des Coréens (Ornn, Orianna, Ashe…). Et cette fois les Suning tombent sur un os. Damwon n’est pas n’importe quelle équipe et la science du teamfight des Chinois ne suffit pas à défendre l’âme élémentaire. A partir de là, l’issue de la partie semble verrouillée.
Pourtant, les Chinois mettent un point d’honneur à résister. Damwon Gaming, trop lente, met du temps à conclure la partie et après l’âme élémentaire on assiste à plusieurs échanges de Nashor et de Dragons ancestraux pour enfin arriver au bout de cette première game. La fin de la partie était, au final, assez anti-climatique. Suning a chèrement vendu sa peau en redoublant d’imagination. Mais peu à peu, elle s’épuisait et il y avait trop de fuites dans le navire. Très lentement, mais sûrement, les Coréens ont dans leur style si caractéristique asphyxié leur adversaire.
Avec un Heo "ShowMaker" Su toujours aussi placide et sans émotion, on ne sait même pas si les Coréens sont à fond et s’ils ont transpiré. C’est tout le contraire de Suning, qui a mis beaucoup de cœur dans cette partie. Les joueurs se sont montrés généreux dans l’effort mais aussi trop généreux envers leurs adversaires avec des petites erreurs individuelles. Mais c’était trop brouillon et ils se sont peut-être rendu compte un peu tard de l’importance des dragons. 1-0 Damwon.
Game 2 : il y a match !
La draft de la deuxième partie réservait quelques surprises. Côté Coréen, ShowMaker met enfin la main sur Lucian, un pick qui lui est si souvent retiré. Pour l’épauler et l’aider à carry la game, Canyon part quant à lui sur l’assassin du beau jeu, Evelynn. En face, Sofm répond du tac au tac en sélectionnant lui aussi un assassin… Enfin, est-ce que Rengar est vraiment un assassin quand il est joué par SofM ? Avec la sainte trinité Warmog-Vœux du chevalier-Visage spirituel, le Vietnamien continue à imposer son style unique.
De manière assez surprenante, les deux équipes ont échangé leur stratégie par rapport au duel précédent. Damwon décide de se montrer beaucoup plus proactive, tandis que Suning décide au contraire de jouer plus calmement, en se concentrant à nouveausur les drakes. Après en avoir accumulé 3, la bataille fait à nouveau rage pour obtenir ou défendre l’âme élémentaire si décisive…
Mais ça se passe mal pour les Chinois. Les Coréens semblent trop forts, trop solides, trop efficaces. Les fans les plus fatidiques commencent à se poser des questions. Quelle stratégie adopter ? Quelle que soit la physionomie de la rencontre, Damwon Gaming suit sa logique implacable et ne laisse aucune solution… Mais quand il n’y a plus d’espoir, il reste toujour le chaos. Après avoir opté pour une approche plus conservatrice, la troisième seed chinoise revient sur ce qui fait la force et la réputation de toute sa région : la folie dévastatrice.
Dos au mur, les Chinois entrent en transe. Porté une nouvelle fois par le duo SofM-Bin qui quantent de partout avec Rengar et Fiora, les autres n'iont plus qu’à suivre les yeux fermés. Dans le désordre, le jeune toplanerréussit même à obtenir le premier pentakill du mondial. Incapable de suivre le rythme, DAMWON voit la game sortir subitement de son contrôle et même la machine ShowMaker se met à faire des erreurs de positionnement. Décidemment, il ne faut jamais vendre la peau des lionceaux avant de les avoir vaincus.
1-1
Game 3 : la fausse bonne idée des picks de confort
Le format Bo5 est bien particulier. Plus la série avance, plus la fatigue se fait sentir chez les joueurs. Surtout en finale où chaque moment est important, et où la pression grignotte les nerfs. En plus, les adversaires s’habituent peu à peu à leur vis-à-vis et il faut toujours chercher plus loin dans ses ressources intérieures pour trouver de nouvelles solutions. Dans cette troisième partie, on a donc commencé à voir quelques picks de confort, notamment en toplane avec un duel Jax-Kennen. Suning, mis en confiance par sa précédente victoire opte pour une composition très soloQ. En mode ça passe où ça casse, avec Nidalee et l’Akali de Xiang "Angel" Tao pour accompagner Bin. Deux des Chinois optentn même pour la rune très cheesy Omnistone.
Malheureusement pour eux, le début de partie est très compliqué. Hors du coup et dominé partout, les Chinois se retrouvent rapidement avec 4 K gold de retard, laissant au passage échapper l’âme du dragon élémentaire. Compliqué de revenir après un départ catastrophique mais c’est dos au mur que l’équipe Suning est la meilleure.
Les lions parviennent à trouver une ouverture sortie de nulle part en 4v5 pour sécuriser un Baron Nashor et un ace. De retour dans la partie, les Chinois pensent avoir pris un ascendant psychologique, et décident d'entraîner les Coréens dans un jeu chaotique et décousu. Le problème, c’est que chat échaudé craint l’eau froide. Les Coréens ne se feront pas avoir deux fois par la même technique. Le Buff Baron ne dure qu’un temps, là où l’âme élémentaire dure toute la partie. Et une victoire bien méritée vient finalement récompenser la patience et le sang-froid des DAMWON.
De héros à zéro, Bin a vécu une phase de lane compliquée et n’a jamais eu l’impact du Kennen de Jang "Nuguri" Ha-gwon en teamfight. De même que l’Akali d’Angel a été inexistante. ShowMaker a été impériale avec sa Syndra et connaît parfaitement le match-up, Caps peut en témoigner car il a subi la loi de l’élu coréen en demi-finale. Les picks de confort n’étaient donc peut-être pas une si bonne idée… 2-1 Damwon.
Game 4 : la bibliothèque chinoise
La 4e game a été la plus décevante de la série.
On aura beau dire ce qu’on veut de la draft ou des win-conditions des équipes, cette dernière game peut se résumer en un seul mot : STOMP. Les Coréens étaient juste au-dessus et ont déroulé du début à la fin de la partie. Cho "BeryL" Geon-hee s’est même payé le luxe de 1v2 avec son Pantheon. Kim "Canyon" Geon-bu a été comme depuis le début du tournoi impeccable et décisif aux quatre coins de la carte. Nuguri a bien grandi depuis l’année dernière et a montré toute sa polyvalence. Enfin, Jang "Ghost" Yong-jun a prouvé à tous qu’il n’était pas qu’un ADC de weak side, mais que sa Caitlyn est clairement annonciatrice d'un massace.
Le spectacle n’était pas vraiment au rendez-vous dans cette dernière partie. A court d’idées et de solutions, Suning a souffert. Impitoyable, la première seed coréenne ne s’est pas posé 36 questions et a foncé tout droit sur la victoire et la coupe. Le public a vite compris que la Chine allait perdre son titre. Forcément déçus, on n’a pas beaucoup entendu d’applaudissements à l’issue de la partie. Le stade, transformé en véritable bibliothèque contemplait les nouveaux champions du monde en silence.