Crédit photo : Riot Games
Depuis des années maintenant nous étions habitués à l'inébranlable domination d'un titre qui, à nul autre pareil, a permis la démocratisation à grande échelle du sport électronique, développé une scène professionnelle pérenne, profondément influé sur nos habitudes de consommation des médias (#1 Twitch durant au moins 5 ans) et globalement insufflé à toute une industrie des ambitions mondiales jusqu'ici frileusement assumées par Blizzard.
Annoncé "dead game" par certains, trop compliqué, toxique, vieux, grignoté par la mode des Battle Royale depuis l'émergence de PUBG et Fortnite en 2017, les arguments sonnant le glas du vénérable titre de Riot Games (9 ans cette année) fleurissent de toute part.
Pour autant, à l'aune d'un championnat du monde 2018 exceptionnel en terme de spectacle et écrasant les précédents records d'audience, ne serions nous pas en train d'assister, en lieu et place d'un enterrement, à la plus grande mue stratégique de l'histoire du jeu vidéo ?
*Toutes les statistiques émanant de https://esc.watch sont soumises à débat quant à l'existence probable de bots sur les streams Chinois. Malgré tout, nous estimons qu'elles sont, tendanciellement valables.
Fortnite, ennemi public numéro 1 ?
Lancé sur PC et consoles le 28 septembre 2017, le succès du jeu d'Epic Games aura été à plus d'un titre fulgurant. Cependant c'est bel et bien League of Legends qui remporte l'année 2017 et de très loin, comme les précédentes jusqu'ici.
À ce moment là de l'histoire, le tsunami Fortnite, même s'il est encore bénin, est pourtant déjà perceptible dans ses fondements, notamment au regard des chiffres de croissanceTwitch enregistrés mois après mois. Tout le monde le sait déjà, Fortnite est voué à être un hit planétaire et ce n'est qu'une question de temps avant que la couronne ne change de tête. Une révolution en soi, mais un phénomène logique au sens où Fortnite est non seulement un jeu PC mais aussi un jeu consoles ET mobile (Le marché console est d'ailleurs de très loin la première source de joueurs sur Fortnite). En intégrant la totalité des supports disponibles, l'éditeur a logiquement pu se permettre d'aller toucher une audience potentielle beaucoup plus large que celle de Riot Games. C'est finalement en mars 2018 que la couronne change de tête entre LoL et Fortnite.
En valeurs absolues cela donne sur la totalité de la période :
- LoL : 1,151 milliards d'heures visionnées
- Fortnite : 1,208 milliards d'heures visionnées
Pour autant, si nous revenons à League of Legends, regardons l'une des premières hypothèses en vogue. Fortnite a-t-il "volé" l'audience de LoL ? Observons de plus près les statistiques de LoL en comparant 2017 et 2018.
En valeurs absolues nous avons, sur les 10 mois comparables :
- 2017 : 870 millions d'heures visionnées
- 2018 : 830 millions d'heures visionnées
- Soit un différentiel de 40 millions, ou -4,6% d'une année à l'autre.
Ainsi, nous avons d'un côté :
- LoL : 40 millions d'heures visionnées en moins d'une année sur l'autre
- Fortnite : 1,2 milliards d'heures visionnées en 14 mois.
- Soit un rapport LoL/Fortnite de 3,3%.
Même si la méthode utilisée dans notre dossier est largement améliorable, il n'en ressort pas moins qu'une information apparaît clairement à nos yeux. Le phénomène Fortnite, n'est pas la cause de la "décroissance" des audiences Twitch de LoL. L'un, nouvel acteur, prépondérant sur consoles et mobiles, est clairement allé chercher une nouvelle audience qui a du coup elle même bénéficiée à la croissance de la plateforme Twitch (et vice versa d'ailleurs, mais difficile de savoir dans quelle mesure).
League of Legends aurait certes pu potentiellement enregistrer une croissance plutôt qu'une décroissance 2018 vs 2017 mais l'histoire ne nous l'apprendra pas et il est probable que si croissance il y avait eu, celle-ci aurait au mieux été minime. En attendant, "Seulement" 4,6% de décroissance ne correspond pas non plus à un "séisme", surtout après des années de croissance continue.
Il est à noter pour la suite de la lecture que le fait de prendre Twitch en mètre-étalon de nos mesures ne nous assure pas d'englober la totalité des statistiques disponibles. En effet, bien que Twitch soit en croissance et la première plateforme du genre au monde, n'oublions pas que le marché Chinois est à lui seul aujourd'hui, à priori, au moins aussi gros que tous les autres marchés réunis. Difficile donc de parler de la santé d'un jeu sans regarder du côté de l'empire du milieu et il existe de plus en Chine de nombreuses autres plateformes de streaming avec leurs propres statistiques à analyser. Ces statistiques sont d'ailleurs régulièrement remises en question quant à l'utilisation éventuelle de bots gonflants les résultats.
De plus, nous ne comparons ici que des statisques d'audience en terme de spectacle, mais pas en terme de nombre de joueurs quotidiens. Riot Games communiquant fort peu sur ses propres données, nous n'avons pas de base solide d'analyse sur ce sujet.
Ainsi, jetons à présent un oeil à ce qui a fait la vie du jeu en lui même cette année, les choix de Riot Games quant au développement de League of Legends.
L'année de tous les changements
Cette année, le visage de League of Legends s'est métamorphosé. Des concepts de jeux, vrais pendant des années, ont volé en éclat au travers d'ambitieuses mises à jour qui ont métamorphosées la manière de jouer à LoL, en bien ? En mal ? On fait le point.
Chaque saison, Riot Games applique de lourds changements au jeu mais à la fin 2017, c'est à coups de massue que Riot Games annonce la couleur. Les runes et maîtrises, qui procurent des bonus mineurs en début de partie, deux systèmes distincts qui existent depuis les balbutiements du jeu, fusionnent. Le résultat ? Les Runes Reforgées. Pour les joueurs amateurs, réguliers comme occasionnels, ce nouveau système présente l'avantage d'être entièrement gratuit et se veut sur le papier plus simple et agréable que son prédécesseur.
Pour les professionnels, c'est à la fois un plaisir de voir du changement arriver mais aussi une contrainte forte. Il faut rapidement s'adapter, tester, comprendre, optimiser. Des centaines de nouvelles statistiques créent de nouvelles dynamiques et changent les rapports de forces.
Une refonte peut en cacher une autre
Côté champions justement, Riot Games confirme une politique expérimentée en 2017. Avec 137 champions jouables, il devient de plus en plus difficile pour les joueurs de connaître en profondeur ceux-ci, et l'équilibrage du jeu se complexifie de plus en plus. Riot Games a donc décidé, raisonnablement, de réduire la cadence de création : seulement deux nouveaux champions ont été ajoutés cette année (contre 24 en 2010 et 2011, les années où le plus de champions ont été crées).
Mais pour rester attractif pour les anciens joueurs comme aux yeux des nouveaux, un afflux constant de nouveauté est nécessaire. Plutôt que de créer de nouveaux champions, les développeurs de League of Legends ont choisi de retravailler les plus vieux d'entre eux, ce qu'on appelle un rework. 6 champions ont ainsi été revus cette saison.
A contrario, c'est le nombre de patchs sortis cette année qui explose, avec une cadence d'un patch quasiment toutes les 2 semaines, qui, même mineur est vécu par les joueurs compétitifs comme une astreinte d'adaptation supplémentaire.
Mi-saison 2018 : l'effet papillon
Il existe deux périodes de changement du jeu, chaque année. L'intersaison, comme on l'a vu plus haut, qui se déroule de novembre à janvier environ, et la mi-saison, au début du mois de mai, qui est donc, comme son nom l'indique, au milieu de la saison. Cette année, les développeurs avaient décidé de modifier la classe des tireurs à distance (ADC). Ce qui devait être une petite mise à jour a, combiné aux gros changements du début de la saison, provoqué une réaction en chaîne qui est allée jusqu'à modifier durablement les interactions entre tous les champions du jeu, et donc la manière de jouer à celui-ci.
Tous les joueurs, amateurs comme professionnels, ont dû apprendre à nouveau à jouer à League of Legends. Pour les amateurs, ce fut un défi excitant. Pour les professionnels, des milliers d'heures d'entraînement à la clé. Des joueurs stars se sont retrouvés sur le banc de touche pendant des semaines, voire des mois, ou réduits à un rôle mineur dans la stratégie de l'équipe. Lee "Faker" Sang-hyeok lui-même en est l'un des symboles les plus inattendus, et que dire de Martin "Rekkles" Larson le meilleur ADC Européen se retrouvant remplaçant plusieurs semaines durant. Il n'est donc pas exagéré de considérer cela comme le plus gros changement que League of Legends ait jamais vécu, allant jusqu'à bousculer l'ordre établi des différents championnats régionaux. Ces changements, additionnés à d'autres facteurs extérieurs, ont été le déclencheur d'une vague de protestation sans précédent historique pour l'éditeur. Nous en retiendrons un point extrêmement marquant, le fait que ce n'est pas la toxicité du jeu, la lassitude du jeu ou tout autre reproche "classique" qui ait mis le feu aux poudres. Riot venait simplement de toucher au coeur même de son succès, la mécanique historique du jeu (un ADC et un support au bot, un midlaner AP...) et par ricochet à l'esport.
Riot Games passe la seconde et dédouble sa stratégie
Blessé dans son orgueil, mis au pied du mur par sa communauté, pressé de réagir mais aussi tributaire de l'inertie naturelle d'une entreprise forte de 2500 salariés répartis sur 24 pays, c'est au début de l'été que le géant décide de lancer sa contre offensive en partant d'un constat simple. Il n'est pas/plus possible de communiquer d'une seule et même manière envers les joueurs occasionnels et la scène esport. Il n'y a qu'à regarder l'histoire du jeu pour s'apercevoir que Riot Games a jusqu'ici fait tout son possible pour conserver son public sur la faille de l'invocateur et dans le système de ladder traditionnel. Frileux quant à l'idée de rendre permanent des modes funs, de trop simplifier le jeu, de créer de nouvelles cartes, d'avoir des soucis d'équilibrage etc.. l'éditeur se rendait ainsi la tâche bien trop complexe. Impossible dès lors que tout est lié de s'autoriser à dénaturer les qualités esport de son titre en voulant rendre le jeu plus casual et ainsi de faire plaisir aux joueurs du dimanche qui ne souhaitent pas se prendre la tête sur le théorycraft des talents et de l'équipement mais veulent seulement foncer dans la mêlée en espérant le pentakill du siècle. Et pourtant, le constat est simple, proposez un mode ARURF (All Random Ultra Rapid Fire) et les joueurs se précipitent dessus. Alors imaginez un futur mode ARURF en 10vs10 ? Un mode Battle Royale ? Un mode Payload 20 vs 20 ?...
Alors certes, il existe potentiellement deux contre-exemples. D'une part le mode All Random All Mid (ARAM) sorti en 2012 et qui est finalement une sorte de jeu en soi, quoique assez peu novateur. Et d'autre part le mode Dominion, disparu en 2016 après 4 ans d'existence et qui reste à ce jour le projet le plus ambitieux de Riot Games en dehors du jeu principal. Dans les deux cas, un point commun, l'un comme l'autre n'ont jamais été mis au centre de la stratégie de communication du groupe comme éventuel vecteur de communication afin d'attirer de nouveaux joueurs. Ils n'ont pas non plus été mis en avant sur le volet esport. En définitive, ils n'ont été jusqu'ici que des sujets secondaires dans la stratégie du groupe.
Se limitant depuis des années à tout miser sur esport = nouveaux joueurs, l'éditeur semblent avoir enfin commencé à changer de dogme. C'est ainsi que, depuis l'été 2018 une nouvelle approche voit le jour, au plus grand plaisir d'une communauté de joueurs qui n'a au final jamais souhaité arrêter de jouer au jeu, mais n'arrivait simplement plus à y prendre de plaisir, celui-ci étant perçu comme trop complexe, répétitif et frustrant ainsi que difficile d'accès à un nouveau public.
"Ce jeu est cool, fun et jeune !"
Ainsi, changement de message. Pour la première fois depuis que le jeu est installé sur le marché, l'éditeur met en place une véritable campagne de communication, sur tous les fronts. De nouvelles publicités, mettent en scène des joueurs occasionnels, des streamers/youtubers généralistes orientés vers les jeunes sont associés au jeu et de nouveaux modes de jeu, comme Raid du Nexus, et Odyssey font leur apparition.
Ces modes de jeux s'inscrivent dans un calendrier plus global d'événements en jeu, autour de nombreux thèmes différents, parfois ancrés dans des fêtes de la culture traditionnelle (Noël, Halloween...), parfois autour d'une compétition, ou même d'un événement original, comme c'était le cas du mode Odyssey. Cet évènement incluait un nouveau mode de jeu, mais aussi du contenu cosmétique en jeu, des produits dérivés, etc...
Le dernier en date est certainement l'un des plus réussis. Pour ouvrir la grande finale des Championnats du monde 2018, Riot Games a travaillé pendant près d'un an avec quatre chanteuses, deux américaines et deux coréennes, pour recréer un groupe de K-pop. Ce groupe, nommé "K/DA", a joué sa chanson, créée pour l'occasion, sur scène lors de la grande finale, et un évènement "K/DA" a débuté en parallèle sur le jeu. Le succès a été immédiat : le clip virtuel de la chanson "POP/STARS", où chaque chanteuse est incarnée par une championne du jeu, enregistre même le meilleur démarrage d'un clip dans la catégorie K-pop sur YouTube, et l'évènement a eu un succès foudroyant sur les réseaux sociaux parmi les fans, et même les non-fans, attirés par la chanson.
"L'esport c'est nous"
Il n'y a qu'à regarder l'incroyable succès d'audience des Championnats du monde de League of Legends 2018 pour faire un constat simple. Chaque année, ces Worlds font mieux que l'année précédente, chaque année plus de spectateurs se joignent à la grand messe du mois d'octobre, qu'ils soient joueurs ou non du titre, l'esport sur LoL rassemble.
Avec son teasing musical désormais ritualisé, le clip des Worlds est devenu emblématique d'un phénomène planétaire. Cette année, RISE n'échappe pas à la tradition avec déjà plus de 64 millions de visionnages. Et que dire des cérémonies d'ouverture des finales qui au même titre que celle des Jeux Olympiques sont un événement majeur en soi.
Telle la coupe du monde de football, les worlds de LoL semblent être destinés à devenir plus que le jeu en lui même. On ne regarde plus forcément cet événement parce qu'on aime le jeu, mais parce que ne pas le regarder c'est passer à côté de l'événement populaire et rassembleur du mois d'octobre, dont tout le monde parle et débat, à la cantine, à la machine à café, à la maison et plus encore.. en CHINE ! Nous vous invitons à regarder cette vidéo tournée lors de la victoire de RNG au MSI 2018. Et, en parlant d'esport populaire, voilà, malgré très probablement de nombreux bots, quelques chiffres imageant le succès de la finale des Worlds 2018.
Riot Games en pleine confiance
Pour les tous les fans de League of Legends dans le monde, l'annonce des prochains Championnats du monde est un sujet qui passionne. Où les matchs seront-ils joué ? L'enceinte sera-t-elle exceptionnelle ? Le pays qui accueille l'évènement sera-t-il près de chez moi, ou dans un fuseau horaire proche ? En 2017, les Championnats du monde, qui se sont déroulés en Chine, avaient été annoncés en février.
En 2018, février est passé sans annonce. Puis mars, avril, mai, juin... C'est seulement au début du mois d'août que Riot Games a annoncé les dates précises, ainsi que les lieux où les matchs seraient joués, soit deux petits mois avant le début de la compétition.
Ajoutez à cela que Riot Games a déclaré dans la foulée que cette fois-ci, les commentateurs ne feraient pas le déplacement, mais couvriraient l'événement depuis les studios de Los Angeles, au beau milieu de la nuit pour eux, alors que la compétition se déroulerait en Corée du Sud et il n'en fallait pas moins pour déclencher une polémique sur une baisse des moyens alloués à l'esport. Alors que, nous avons pu le constater par la suite, ce changement s'est révélé quasiment imperceptible pour le public.
Ainsi donc, après le semi-naufrage de l'annonce tardive des Championnats du monde 2018, l'éditeur n'a pas hésité a prendre le taureau par les cornes. Dans la foulée de la grande finale de cette année, ont été annoncées non pas une, mais les trois prochaines destinations des Worlds pour 2019, 2020 et 2021. 2019 se déroulera en Europe, avec la grande finale à Paris, à l'AccorHotels Arena (Paris Bercy) le 1er novembre, tandis que 2020 aura lieu en Chine et 2021 aux États-Unis.
Ces trois annonces affichent une ambition affirmée à même de ravir à la fois le public (cocorico) et les investisseurs soucieux de maîtriser leurs investissements dans un secteur qui prends parfois des allures de bulle spéculative. Elle fait aussi écho au plan d'investissement de 100 millions de dollars d'Epic Games.
L'autre raison d'une confiance affichée se résume en un mot "franchises". Ce système inspiré du sport traditionnel Américain, maintenant établi depuis 2017 en LCS NA et en LPL, arrivera en Europe en 2019. Il permettra à Riot Games de partager les risques financiers avec divers investisseurs externes, de s'assurer que de nombreux acteurs de tous bords vont eux même rentrer en synergie avec le projet et assurer à l'esport sur LoL de rentrer dans la case "Too Big to fail" (Trop gros pour échouer). En somme, la recherche de l'atteinte d'une taille critique permettant à un sport/ à l'esport, d'exister contre vents et marées. Pour les investisseurs directs c'est l'assurance d'une place dans la ligue, ce, quelque soient les résultats de leur équipe et c'est aussi l'assurance de se voir reverser une part des bénéfices de la ligue au travers de droits télés par exemple. Pour les autres, annonceurs, partenaires... c'est un système connu et éprouvé qui crée de la confiance et attire les marques.
L'année dernière, ce sont 10 équipes qui se sont engagées à payer pas moins de 10 millions de dollars (13 millions pour les nouvelles structures !) sur 3 ans, dont un premier paiement de 5 millions comme droit d'entrée en LCS NA.
Pour les LCS EU en 2019, le ticket d'entrée est à priori équivalent et attire déjà de nombreux investisseurs de premier plan. On y retrouve Telefónica (Movistar Riders) et Deutsche Telecom (SK Gaming), les deux plus grosses entreprises de télécommunications en Espagne et Allemagne respectivement, ainsi que le FC Copenhague (North), l'un des plus importants clubs de football danois et scandinave. Pour rappel, Vitality, la structure française présente en LCS EU, et Orange, l'entreprise de télécommunications, se sont récemment associés.
Riot Games n'en oublie pas pour autant de développer une pyramide de compétitions permettant à chacun, en plus du ladder, d'avoir une chance de briller à la hauteur de son talent. Ainsi, il y a peu, l'éditeur lançait les European Masters, remplaçants des Challenger Series, afin d'offrir une compétition Européenne à toutes les équipes n'ayant pas la possibilité de rentrer dans le système franchisé (fermé par définition). Ne manquait plus qu'une brique Nationale afin de lier les pays à la nouvelle compétition Européenne, c'est désormais chose faite puisque que c'est aujourd'hui qu'est annoncé, pour la France la Ligue Française de League of Legends (LFL).
Avec ce dispositif proposant un maillage allant du joueur débutant souhaitant découvrir la compétition au joueur professionnel sous le feu des caméras, Riot Games s'assure d'offrir une expérience de jeu esport à tous ceux la désirant. C'est l'occasion de créer des filiaires de recrutement pour le haut niveau, d'entraîner les équipes réserves des grosses écuries et de clairement identifier un chemin vers le jeu professionnel.
L'âge de la maturité
League of Legends qu'on se le dise, n'est pas mort. Vieux à l'échelle du jeu vidéo, mais jeune à l'image de ses ambitions, la fougue d'un jeu devenu très grand très vite, érigé en symbole mondial de l'esport, jusqu'ici adolescent en pleine crise mais aujourd'hui à deux doigts de devenir adulte ?
L'incroyable succès de la stratégie esport proposée par Riot Games a indéniablement poussé tout l'univers du sport électronique vers le haut. Ligues, tournois, contrats, spectacles à grande échelle, diffusion, création artistique, méthodes de travail, merchandising, starification... autant de domaines où l'éditeur excelle, et même peut-être trop jusqu'ici. Car en ayant aveuglément voulu mixer le jeu compétitif et le jeu casual, le premier est assurément devenu plus gros que le deuxième, emportant victoire sur victoire au fur et à mesure des différents patchs. "Erreur" de jeunesse, qui du fait d'une archi dominance du secteur aura probablement duré quelques années de trop, mais erreur rattrapable. Cependant c'est aussi cette "erreur" qui aura permis à la scène esport mondiale de bénéficier d'un tel engagement et d'une telle exigence de la part de Riot Games en termes de spectacle, poussant les possibilités de son titre à l'extrême. L'esport sur LoL et notamment les Worlds sont devenus LE spectacle esport de référence, la pierre philosophale de l'éditeur, attirant inlassablement de plus en plus d'investisseurs et de spectateurs au fil des années. Il reste encore bien sûr des marges de progression, refonte du calendrier ? Création d'un seul et unique split ? Introduction d'une coupe du monde par nation ? pourquoi pas au détriment de compétitions existantes ?
D'un autre côté reste jusqu'ici le paradoxe du joueur amateur, ayant du mal à profiter de son jeu favori sans souffrir d'une communauté toxique, incapable de suivre dans le détail la pléthore de modifications du jeu, de savoir quoi choisir, quoi jouer, bref, perdu et du coup, de s'amuser.
C'est pourquoi l'annonce récente de nouveaux modes de jeux couplés à un patch d'intersaison plus calme que le précédent nous semble aller dans la bonne direction et promettre de belles surprises à venir. A l'instar de quelques autres éditeurs (coucou Fortnite), le succès est parfois au coin de la rue depuis longtemps, sous vos yeux aveugles... alors pourquoi pas un deuxième succès pour League of Legends ?
Nous laisserons le mot de la fin à Janna, un des champions de LoL qui incarne l'avatar de l'air : "Ne crains pas les vents du changement, ils seront toujours là pour te porter vers les sommets."