Assassin's Creed: Origins est donc sorti ce 27 octobre 2017 sur PC, Xbox One et PS4, cette fois nous allons explorer le passé d'un Medjaÿ, un ancêtre des Assassins, alors qu'il tente de rétablir l'ordre et la justice dans l’Égypte antique plongée dans la tourmente pendant que Ptolémée et Cléopâtre se disputent le trône. Est ce que l'année sabbatique prise par la licence s'est avérée salvatrice ? Ce nouveau titre saura t-il redorer le blason des studios d'Ubisoft ? Nous allons découvrir tout cela.
- Genre : RPG, Infiltration, Monde ouvert
- Développeur : Ubisoft
- Éditeur : Ubisoft
- Plateforme : PC, Xbox One, PS4
- Prix : 59,99€
- Date de sortie : 27 octobre 2017
- Langue : Anglais, Français
L'énigme du sphincter
Le début de l'aventure est pour le moins abrupt et avec Assassin's Creed: Origins, nous sommes plongés au beau milieu de l'histoire parmi des personnages inconnus et aux motivations floues et qui ont provoqué l'ire de notre protagoniste du nom de Balek. Il est le dernier des Medjaÿ et un homme en quête de vengeance pour son fils tué dans des circonstances atroces. Le pire étant que le pourquoi du comment n'est absolument pas expliqué au départ, cette confusion et de faux départ sont visiblement le prix à payer pour pouvoir commencer notre aventure en plein combat. Le contexte ne nous est offert qu'après quelques heures, sous la forme des réminiscences et rêves de Balek, marqué par la perte de son enfant (mais pas trop tout de même, ce n'est pas Heavy Rain ici). Comme vous allez vite le découvrir, il va falloir aller assassiner des conspirateurs responsables de votre tragédie personnelle aux quatre coins de l’Égypte afin de vous venger et accessoirement de sauver le pays. C'est classique et efficace même si dans notre cas l'histoire a totalement échoué pour ce qui est de nous investir émotionnellement, et on aura tendance à suivre le récit d'une oreille discrète.
Comme à chaque fois nous allons découvrir l'histoire grâce à un personnage contemporain qui utilise la machine Animus, cette dernière permettant d'explorer les souvenirs de quelqu'un mort depuis longtemps grâce à sa mémoire génétique. Ce processus bien trouvé permet de lier les différents jeux et branches de la licence Assassin's Creed à une trame globale, malheureusement elle s'avère à chaque fois aussi passionnante que le compte-rendu de session de l'Assemblée Nationale quand on sort juste d'aventure épiques où on passe son temps à galoper, escalader et assassiner. Les personnages étant bien trop plats et l'histoire bien trop abstraite pour intéresser un seul instant ceux qui ne sont pas des fanatiques du lore de la série. Nous allons donc passer sous le tapis cette partie de l'histoire malheureusement toujours présente et qui s'efforce de casser le rythme à la fin de chaque chapitre du jeu, pour nous concentrer sur le cœur du récit ainsi que du gameplay : les péripéties de Balek.
Infiltration, baston, pognon
Autant vous dévoiler la chose tout de suite, dans les grandes lignes le gameplay est de l'Assassin's Creed pur jus. Si vous avez joué à un des titres précédents, vous allez rapidement retrouver vos marques. Cette familiarité n'est cependant pas une mauvaise chose puisqu'elle a contribué à la renommée de la série et qu'elle permet de varier les plaisirs. Notre brave Balek dispose d'un attirail et de capacités similaires à ceux de ses prédécesseurs (ou héritiers, c'est compliqué quand les jeux ne sont pas par ordre chronologique). Aussi agile qu'un chat, il est capable d'escalader presque n'importe quelle paroi ou bâtiment en quelques instants et ce avec une facilité déconcertante. Cela s'avère utile en toute circonstance, que cela soit pour infiltrer une forteresse, assassiner un garde en haut des remparts, grimper au sommet des pyramides pour observer toute la région ou échapper quelques instants à un groupe de soldats en colère. C'est presque toujours un réel plaisir et il est bien rare qu'on ne parvienne pas à escalader quelque chose. Cependant grimper sur les toits n'est pas forcement suffisant pour passer inaperçu, les gardes sont nombreux et naturellement affichés en surbrillance à l'écran, pire encore ils s'avèrent souvent assez imprévisibles, pour le meilleur comme pour le pire. Il est presque impossible de prédire le chemin de patrouille et les activités de chaque garde. L'infiltration facile des précédents jeux n'est plus toujours possible, même si le champ de vision, l’ouïe et l'IA des ennemis s'avère souvent risible, il est très facile de se faire repérer par une sentinelle planquée derrière un coin. Il faudra aussi tenir compte du cycle jour-nuit, vous pouvez décider de méditer sur place avec un talent ce qui vous permettra de profiter du sommeil d'une partie des gardes et de la réduction de visibilité pour faciliter votre progression. Les animaux diurnes iront aussi dormir, certains personnages changeront d'occupation, le monde change avec le passage du temps.
Si vous souhaitez vraiment jouer sur l'infiltration il vous faudra utiliser l'arme pas si secrète de Balek : Senu, son fidèle aigle. Ce dernier passe son temps à voler au dessus de la zone lorsque vous êtes à l'extérieur, et grâce à une sorte de pouvoir magique inexpliqué vous pouvez utiliser sa vision. Cela permet de marquer les gardes, leur chemin de patrouille ainsi que les objectifs. Si on met de côté le réalisme de la chose, la fonctionnalité est intéressante, utiliser correctement son aigle tel un drone de Ghost Recon Wildlands vous offrira un sérieux avantage tactique. Il est cependant dommage que son existence serve aussi trop souvent d'excuse facile pour les développeurs et scénaristes dans de trop nombreuses quêtes. On peut déceler The Witcher 3 comme source d'inspiration, mais avec un aigle magique capable de percevoir un objet volé dans un coffre à l'intérieur d'un bâtiment, ou de lire l'âme des criminels afin de vous indiquer ou aller et qui tuer. Ce raccourci s'avère être une sérieuse épine dans la crédibilité de l'histoire et le réalisme des quêtes, mais il a le mérite de vous permettre de replonger presque immédiatement dans l'action, après 10 solides seconde d'enquête. Votre aigle vous aide aussi à chercher des ressources sur la carte, à traquer des animaux ainsi qu'à surveiller l'activité de vos cibles. On peut y découvrir non sans un certain plaisir qu'on se rapproche un peu d'un Hitman, avec des PNJ qui vaquent à leurs activités. Il nous est arrivé de tuer un personnage principal de l'histoire par hasard alors qu'il dormait, ou une autre fois d'une flèche dans la tête alors qu'il faisait une inspection des remparts.
N'allez cependant pas croire que l'infiltration est excessivement difficile ou qu'elle vous demandera une grande patience. Le jeu s'avère assez permissif en la matière, il l'est d'autant plus qu'il est excessivement rare qu'on vous demande de ne pas être repéré. Exit les filatures infâmes ou les game over au moindre pas de travers, vous pourrez toujours tenter de résoudre la situation par la force des armes et c'est tant mieux. C'est ici que le plus gros changement est perceptible dans cet Assassin's Creed: Origins, les combats ont été très sérieusement étoffés. Parade au bouclier, esquive, contre, gestion des différents types d'arme de mêlée (plus d'une dizaine, de deux épées à la hache à deux mains) aux arcs. Il va vous falloir apprendre à gérer les rigueurs du combat en mêlée si vous souhaitez survivre, les ennemis sont généralement très agressifs et simplement les attaquer de face ne sera clairement pas suffisant pour venir à bout des troupes d'élites voire des boss. Vous pourrez choisir d'être adroit et de jouer en finesse, ou alors miser sur le positionnement et le timing pour les envoyer sur les fesses avec un coup d'arme lourde. Même sans être un Dark Souls (et demander de VRAIMENT apprendre à jouer), il vous faudra tout de même un minimum d'apprentissage avant d'espérer venir à bout de plusieurs gardes en même temps. Cela reste cependant possible surtout en investissant dans les très nombreuses compétences présentes dans l'arbre de talent. Celui-ci est divisé en trois grandes branches et permet d'optimiser vos compétences au combat, mais aussi l'usage d'outils (poison, bombe fumigène, l'assassinat mais aussi le tir à l'arc). À cela viennent s'ajouter des combats montés, que cela soit avec une arme de mêlée ou à l'arc, à dos de dromadaire ou en chariot. La chose n'est pas facile mais pour une fois on n'a pas envie de descendre instantanément de selle au moindre combat. Mention spéciale au ramassage d'objet sans avoir à descendre, on apprécie.
L'arc est une partie fondamentale du gameplay cette fois, il s'avère aussi utile pour infiltrer une base discrètement que pour résoudre les combats. Vous n'avez pas un seul arc disponible mais quatre, chacun avec ses propres munitions et mode de tir. L'arc léger vous permet par exemple de tirer rapidement de nombreuses flèches alors que l'arc de prédateur vous permettra de vous prendre pour un sniper. Mention spéciale à ce dernier puisqu'un talent permet de suivre et d'orienter la flèche en vol ce qui permet de réaliser des headshots particulièrement jouissifs même à la console et au pad en étant un PC-iste. Vous pouvez donc tuer des gardes à très longue portée voire les cibles principales de cette façon. Mais les développeurs se sont visiblement rendus compte que la capacité de se cacher sur les toits et de jouer au sniper était un peu trop puissant, vous allez avoir la douloureuse surprise de découvrir que la majorité des ennemis disposent non seulement d'un bouclier, mais aussi...d'un arc. C'est assez déstabilisant quand 90% des ennemis disposent d'arcs et qu'ils sont tout à fait aptes à vous transformer en pelote d'épingle. Mention spéciale aux archers montés qui sembles dotés de mitrailleuse, on a oublié de nous prévenir que les mongoles étaient originaires d’Égypte. Les ennemis sont également presque aussi doués que vous pour escalader les bâtiments, et ça en devient effrayant. Heureusement que nous sommes sauvés par la stupidité de l'IA, plus d'une fois vous allez voir des soldats hésiter à mi distance entre utiliser leur arc et vous charger en mêlée pendant que vous les alignez un à un.
Une fois les ennemis tués, le moment est venu de passer la zone au peigne fin et de ramasser tout ce qui peut l'être. Un scanner (probablement magique lui aussi) vous indique tous les objets avec lesquels vous pouvez interagir dans la zone. Il ne reste alors plus qu'à ramasser les trésors. Attendez vous à devoir répéter ce schéma très régulièrement tout au long du jeu car le monde est vaste.
Le tour d’Égypte avec Ablette
Attaquons nous à présent à ce que l'on pourrait appeler le principal attrait d'Assassin's Creed: Origins, son monde. Cela faisait des années que les joueurs réclamaient une aventure en Égypte et on peut dire qu'ils sont servis. Non seulement les décors et bâtiments sont souvent magnifiques (même si quelques textures un peu laides trainent ici et là surtout sur consoles), mais après avoir grimpé au sommet d'une falaise ou d'une tour on se rend compte que la zone est très vaste mais sans être vide. Il n'y a pas un poil de brouillard à l'horizon, on peut dont apercevoir le phare d'Alexandrie ou les pyramides de Gizeh à plusieurs régions de distance. Et des régions nous en avons un sacré paquet, une immense portion de l’Égypte est disponible, avec des décors et environnement parfois très différents, que cela soit la métropole d’Alexandrie, les rives boueuses du Nil, les cotes méditerranéennes, le désert sablonneux, des zones rocheuses, il y en a pour tous les goûts tant que vous n'êtes pas un amoureux de la neige. un découpage très similaire à celui de Ghost Recon Wildlands a été fait et chaque région dispose d'un indicateur par tranche de niveaux, ce n'est pas du luxe car même si l'histoire principale sert de fil rouge pour visiter les région dans le bon ordre, vous êtes totalement libre de vous la jouer "Skyrim" et de partir explorer où bon vous semble.
C'est néanmoins déconseillé puisque l'histoire principale est tout de même particulièrement dense et intéressante et que revisiter certains lieux n'est pas forcement intéressant. Vous aurez de plus l'occasion de débloquer ainsi les chefs ennemis de chaque région et peut être plus tard la tête pensante de la conspiration (oui comme Wildlands encore). On regrettera cependant qu'il nous arrive de temps à autres de mourir bêtement parce que les développeurs n'ont pas respecté leur propre tranche de niveaux pour chaque zone. Réussir à s'infiltrer derrière un garde endormi pour lui trancher la gorge afin de piller un trésor est une action basique dans Assassin's Creed, cependant voir qu'on ne lui a infligé que 5% de dégâts parce qu'il est de haut niveau, puis se faire tuer d'un seul coup derrière n'est ni fun ni très respectueux de l'esprit de la licence. Heureusement que cela reste fort rare.
Sans surprise, les développeurs se sont visiblement inspirés de quelques unes des grandes références modernes en terme de monde ouvert. Citons par exemple Zelda: Breath of the Wild pour son univers vivant et certaines interactions avec l'environnement (même si l'on reste bien loin du titre de Nintendo en la matière). Mais c'est surtout The Witcher 3 qui a dû servir de modèle, après tous les deux partagent de nombreux points communs en terme de public visé, et de héros. Ici on nous épargne les collectibles inutiles qui polluent la carte de beaucoup trop d'open world (dont Wildlands listé plusieurs fois, mais aussi d'autres comme Horizon Zero Dawn) et c'est tant mieux. Les très nombreux points d’intérêt sur la carte ne sont pas d'une variété hallucinante, mais ils ont le mérite d'être généralement intéressants. Les ruines vous demanderont de fouiller à la recherche de trésors ce qui vous offrira équipement et points d’attributs, les camps militaires où des bandits vous donneront des occasions de pratiquer l'infiltration et le combat, et les animaux sauvages vous permettront de pratiquer la chasse. Même en reprenant le fameux schéma listé un peu plus haut (infiltration, combat, loot) les différences dans les circonstances et les ennemis font qu'on ne s'en lasse pas même après des dizaines d'heures. C'est un véritable plaisir de chevaucher de zone en zone pour explorer et découvrir les dizaines de quêtes locales. Elles ne sont pas non plus inintéressantes, et on peut détecter régulièrement des traces d'humour, cependant l'exécution est pour le moins maladroite. Les personnages devinent tous instantanément qui vous êtes et ils se contentent de vous donner leur quête ou la suivante, en oubliant parfois même de vous remercier, les ingrats. Il s'avère aussi très frustrant que jamais aucun choix ne nous soit offert, que cela soit lors des dialogues ou dans la résolution de la quête. C'est particulièrement frustrant lorsqu'on confronte des personnages aussi stupides et vils qu'ingrats et que Balek en bon samaritain réponde "Amen" à toutes leurs demandes. Si on ajoute cela à la résolution magique à coup d'aigle de tout élément de recherche ou d'enquête, et on se retrouve avec des quêtes à la Witcher, mais sans les dialogues et ce qui en fait leur saveur.
Vente pyramidale et tombeau des DLC
Cela a fait du bruit avant même la sortie du jeu, et malheureusement comme nous avons pu le constater Ubisoft n'a pas perdu ses mauvaises habitudes en matière de pratiques commerciales. Outre le découpage arbitraire du jeu, avec une mission réservée aux précommandes et d'autres à la version Deluxe du jeu, ainsi qu'un Season Pass à près de 40 euros, il faudra aussi passer par le Club Ubisoft pour débloquer pas mal d'éléments en jeu. Cette App additionnelle présente sur consoles aussi permet de débloquer des armes additionnelles ainsi que des composants contre des points obtenus en débloquant des trophées, jusque là ça va, même si le forcing de l'éditeur pour avoir des gens inscrits a de quoi faire grincer des dents. Mais vient en plus se greffer une boutique qui utilise une monnaie virtuelle (achetée contre de l'argent bien réel lui) dont vous pouvez vous servir pour acheter de la monnaie en jeu, de l'équipement, des "cheats" comme l'indication sur la carte de certains objectifs spéciaux. Il est aussi possible d'acheter certaines des plus belles tenues et montures exclusives ainsi que les très décriées lootbox. Parce qu'appliquer un modèle économique de Free to Play à un AAA vendu à près de 60 euros dans sa versions la plus aride est la nouvelle mode, vous voilà prévenus.
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