Si on peut considérer que 2023 a été une année absolument exceptionnelle en termes de sorties vidéoludiques. D'un coté, nous avons de nombreux titres dépassant la barre des 90 points sur Metacritic, mais de l'autre, plusieurs jeux sont devenus la risée de la communauté, avec des notes catastrophiques. Bien entendu, le monde du jeu vidéo ne se limite pas qu'aux notes, et nous allons aussi aborder des fails notables sous d'autres formes (hors e-sport).
Les NFTs
L'année passée, des centaines de studios et d'éditeurs se sont jetés sur la tendance des NFT (Non Fungible Token) comme des cafards attirés par l'odeur des poubelles. De multiples projets ambitieux ont été annoncés dans ce domaine par des éditeurs comme Square Enix et Ubisoft, en nous promettant qu'ils sont l'avenir du milieu, avec le Web 3.0, malgré le scepticisme grandissant du public et de tous ceux qui ont compris de quoi il retournait vraiment derrière le jargon technique. L'année 2023 touche à son terme, et c'est avec une certaine satisfaction que nous avons pu constater que la majorité des projets et entreprises liés aux NFT ont sombré dans le silence, lorsqu'ils n'ont pas carrément coulé. C'est clairement un "fail" de leur part, même si c'est une grande victoire pour les consommateurs et tous ceux qui n'ont pas perdu d'argent en tentant d'investir dans cette bulle spéculative. Espérons que la prochaine lubbie malsaine du genre ne pointera pas le bout de son nez avant longtemps.
Gollum
Cela faisait de nombreuses années que Gollum faisait parler de lui, et en cette période de disette vidéoludique pour les fans de Lords of the Ring, il avait droit à une certaine attention. On peut dire que sa sortie a eu droit à beaucoup de publicité grâce au bouche à bouche et aux notes de la presse, mais pas pour les bonnes raisons. Graphismes datés, personnage hideux, gameplay mal pensé, histoire douteuse, des bugs à foison, rien ne va ou presque chez Gollum. Les joueurs qui espéraient un jeu misant avant tout sur l'infiltration ont dû se poser des questions en voyant Sméagol élever un oisillon, donner des ordres à des esclaves, et se mêler à des intrigues politiques au Mordor.
Étrangement (ou pas), les studios et les éditeurs qui ont tendance à sortir les pires jeux, sont aussi ceux qui tentent aussi de soutirer le plus d'argent aux joueurs, avec un prix de base de 49,99€, ou 59,99€ pour l'édition précieuse comprenant le codex en jeu, le doublage en langue elfique et une émote pour Gollum. Ils auraient pu essayer de choisir un peu mieux quels morceaux du jeu couper avant de les revendre. Cela donne dans tous les cas un prix équivalent à celui d'un AAA, pour un jeu qui est loin d'atteindre ce niveau.
Redfall
Quelle déchéance pour le studio Arkane, il semble que chacun de leur jeu rencontre moins de succès que le précédent. Après les Dishonored est arrivé Prey, puis Deathloop, qui bénéficiaient au moins d'un succès critique. Mais avec Redfall, rien ne va plus. Il faut dire que proposer un FPS coopératif façon Left 4 Dead en monde ouvert est très différent de ce qu'ils ont développé jusqu'alors. Le résultat est plus que décevant, avec un jeu buggé jusqu'à l'os, des ennemis décérébrés, le mode en ligne est à peine fonctionnel, et un gameplay sans grand intérêt, le tout pour un jeu à service, vendu à 69,99€, voire à 99,99 € pour son édition deluxe.
À l'heure où nous écrivons ces lignes, il n'y a quasiment plus aucun joueur sur les serveurs, ils tombent même régulièrement sous la dizaine sur Steam, ce qui est un arrêt de mort pour un titre du genre. Cela nous fait penser un peu à Babylon's Fall qui a eu le même tour l'année dernière, il faut croire qu'avoir "fall" dans le titre rime avec "fail" dernièrement.
La raison derrière cet échec serait que la direction du studio a décidé de créer un jeu service aussi rentable que possible, ce qui a profondément déplu aux vétérans qui sont partis voir ailleurs. Les développeurs restant et les nouvelles recrues ont ensuite dû développer Redfall en très peu de temps, le résultat parle ensuite de lui-même.
Exoprimal, le jeu-service coopératif de Capcom, pourrait aussi figurer dans cette liste, mais peu de joueurs l'attendait, et même l'éditeur n'avait pas l'air de croire sérieusement au projet, et presque tout le monde l'a déjà oublié. Espérons que cela leur aidera à tirer les bonnes leçons aussi, afin de ne pas les reproduire dans Monster Hunter World 2.
Skull Island: Rise of Kong
Des dizaines de milliers de jeux sortent chaque années tous supports confondus, les jeux qui peuvent être considérés comme étant vraiment mauvais ne manquent pas, mais personne n'en parle. La raison pour laquelle le dernier jeu King Kong s'est fait remarquer, est que c'est bien plus rare pour les jeux relativement ambitieux. Ceux qui donnent l'impression d'avoir une réalisation de qualité, avec un budget et une équipe dignes de ce nom. Le studio Iguanabee pouvait donner cette image avec ses 50 employés, l'utilisation de l'Unreal Engine 5 et une sortie prévue à la fois sur Nintendo Switch, PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series et PC. La note Metacritic parle d'elle même, puisqu'elle bat tous les records, à seulement 26/100. On ne peut pas nier que la presse JV en général a des problèmes avec les notations de jeu, mais d'un autre côté, cela montre aussi à quel point Skull Island: Rise of Kong a franchi toutes les limites de l'acceptable. Gollum et Redfall peuvent pousser un soupir de soulagement, en se disant qu'au moins, ils n'ont pas droit à la place peu enviable de pire jeu de l'année 2023.
Le jeu est si mauvais qu'il est considéré comme une tentative d'arnaque de la part du studio, qui mise sur la licence pour vendre tout de même le jeu a des clients ignorants durant les fêtes de fin d'année. Malgré son moteur graphique, Rise of Kong est très laid, avec des animations ridicules, voire des images fixes remplaçant certaines scènes. Le gameplay est lui aussi ennuyeux, à la limite de l'injouable, et truffé de bugs. La seule consolation que peuvent trouver les développeurs de Rise of Kong est que la note des joueurs d'Overwatch 2 sur Metacritic est pire que la leur.
Activision Blizzard
Cela fait déjà quelques années que la réputation de Blizzard s'est effondrée. Les scandales se sont enchaînés dans presque tous les domaines concevables. On pense notamment à des jeux complètement ratés comme Warcraft 3 Reforged étaient accompagnés de publicités mensongères, ou à Diablo Immortal dont la communication et la monétisation sont devenus des modèles à ne pas suivre. D'un autre côté, gestion interne du studio a une quantité spectaculaire de problèmes, avec des problèmes de harcèlement et de discrimination, ayant mené à de nombreux départ et à des procédures en justice, toujours en cours. Quand un studio est affligé par autant de problèmes, il ne faut pas s'attendre à ce qu'ils soient résolus du jour au lendemain. Comme tous les ans, Activision Blizzard a beaucoup fait parler de lui en mal, au point de mériter plusieurs sections à lui seul. Espérons que le rachat par Microsoft lui permettra de remonter la pente.
Overwatch 2
Un des principaux arguments utilisés par Activision Blizzard pour convertir Overwatch, en Overwatch 2, était l'ajout de campagnes PvE coopérative et des missions de héros, rejouables et avec une quantité de contenu notable. Après plusieurs d'années d'attente, des problèmes de files d'attente massive, des prix excessifs dans la boutique, et un Overwatch 2 parfois décrit comme étant plutôt Overwatch 1.03, les développeurs du jeu ont fini par lâcher la nouvelle qui a enflammé la communauté : le fameux mode histoire sera bien plus modeste que prévu. Il est réduit à quelques missions saisonnières mineures, et il faut en plus payer 15 euros pour y jouer à volonté. La progression au long terme des héros au travers de ce mode, est quant à elle tout simplement abandonnée.
Modern Warfare 3 ou le DLC dont on se serait bien passé !
Comment parler des fails de cette année 2023 sans évoquer, le tout nouveau jeu Call of Duty ? Bien que nous ayons depuis plusieurs années maintenant un jeu CoD annuel à nous mettre sous la dent, il faut dire que ce Call of Duty: Modern Warfare 3 développé par Sledgehammer Games n'est franchement pas réussi. Disponible depuis le 10 novembre dernier, si celui-ci était annoncé comme étant très prometteur, il faut dire que le soufflet est assez vite retombé. Pire, il s'est totalement écrasé.
Campagne beaucoup trop courte, contenu vide, des missions qui ne sont absolument pas révolutionnaires à travers lesquelles nous avons simplement l'impression d'être lâchés dans la nature, il faut dire que ce nouveau titre n'a rien d'un grand jeu Call of Duty, et pour cause, à l'origine, il ne devait être qu'un DLC destiné à Modern Warfare 2. Ajoutez à cela un prix affiché à 79,99€, il y a de quoi serrer des dents car ça fait drôlement cher pour une extension. Concernant son Multijoueur... Là aussi il y a certaines choses à dire... Certes, c'est toujours plaisant de retrouver des maps iconiques qui ont marqué l'histoire de la franchise, surtout lorsque celles-ci profitent d'un petit rafraichissement, mais nous avons franchement l'impression que les développeurs n'ont pas voulu se prendre la tête pour cet opus et qu'ils ont sorti ce titre pour nous faire patienter en attendant de faire un véritable Call of Duty...
Quoi qu'il en soit, à force de jouer avec les nerfs des joueurs, il va arriver un moment où ils vont vraiment saturer et où ils ne laisseront plus aucune chance aux développeurs... Et soyons clairs, la nostalgie n'est pas la clé du succès pour qu'un jeu soit réussi et apprécié.
La parachute doré de Bobby Kotick
Parce que le monde réel n'est pas un conte de fées, et qu'il n'y a pas forcément une morale à l'histoire, le départ du PDG actuel d'Activision Blizzard est prévu pour cette fin d'année. Le tristement célèbre Bobby Kotick, qui a été à la tête du groupe durant de longues années, et qui a été lourdement impliqué dans de nombreux scandales. On ne doute pas que sa direction a lourdement influencé la culture d'entreprise toxique, et les décisions douteuses liées à leurs jeux. Mais tout est bien qui finit bien... pour lui du moins, avec ce qu'on peut considérer comme un départ à la retraite dans le cadre du rachat d'Activision Blizzard par Microsoft. Comme il est de coutume pour les grandes entreprises américaines, il a droit au fameux parachute doré qui prend différentes formes, mais dont le total approcherait les 400 millions de dollars.
Certains espéraient qu'il prenne plutôt un coup de pied au derrière avant d'être jeté dans la rue, voire derrière les barreaux. On peut légitimement se demander si la sortie précipitée et bâclée du dernier Call of Duty en date, n'est pas une simple tentative de sa part de rentabiliser une dernière fois la licence pour arrondir son salaire à la hausse, avant de laisser Microsoft nettoyer derrière lui. On peut se consoler en se disant qu'avec quelqu'un d'autre aux commandes, le groupe a au moins une chance de remonter la pente. Mais seul l'avenir nous dira si c'est effectivement le cas.
The Day Before (the scam)
On peut dire que 2023 est pleine de sorties notables jusqu'au dernier moment, avec The Day Before. Extrêmement attendu par les joueurs sur Steam, ce titre présenté comme un "MMO de survie" façon The Division, dans un univers post-apocalyptique était le jeu présent dans le plus grand nombre de listes de souhaits. Ses trailers aguicheurs et ses images, souvent lourdement inspirées de titres majeurs comme The Last of Us, ont visiblement fait leur petit effet. Il est arrivé le 7 décembre dernier en accès anticipé, vendu à 39,99 €, et il était loin de tenir ses promesses. Au lieu d'être un MMO de survie, c'est un extraction shooter, comme Escape from Tarkov. Le Studion Fntastic s'est d’ailleurs dépêche de retirer ses trailers mensonges de sa chaine suite à la sortie.
En plus de ses serveurs catastrophiques, le jeu s'est avéré vide, pauvre et très mal conçu à tous les niveaux. Les développeurs ont utilisé les bases de jeu et les assets préfabriquées dans l'Unreal Engine pour créer leur jeu à la va-vite. Les retours des joueurs sont vites devenus extrêmement négatifs. L'objectif étant d'attirer autant de joueurs que possibles, et de faire durer l'illusion suffisamment longtemps pour qu'ils ne puissent pas se faire rembourser sur Steam en y passant plus de 2 heures. Malgré cela, il n'est pas surprenant de voir que le temps de jeu moyen des joueurs est sous la barre des 2 heures, avec environ 50% des joueurs s'étant fait remboursés. Les choses ne s'arrêtent pas là, puisqu'à peine une semaine après la sortie, le studio a annoncé sa fermeture, et la fin du projet, faute d'argent pour continuer. Pour ceux qui en doutaient encore, cela a souvent servi à confirmer que c'était bien une arnaque.
Les développeurs ont à présent l'intention de prendre la fuite avec l'argent, en laissant les joueurs avec un jeu destiné à rester une coquille inachevée. À l'heure où nous écrivons ces lignes, nous ignorons quelle sera la suite des événements, mais on espère que Steam ne leur reversera pas un centime, et que les joueurs seront tous remboursés à la place. Il vaut mieux décourager ce genre de pratiques. Vous vous demandez peut-être où se trouve le "fail" dans l'histoire ? On peut considérer qu'il y en a plusieurs : les développeurs qui préfèrent créer une arnaque plutôt qu'un jeu, Valve qui ne contrôle pas assez les produits mis à disposition sur Steam, mais aussi les joueurs qui se sont une fois de plus laissés emportés par la hype et les fausses promesses, et qui ont sorti le porte-monnaie sans faire suffisamment attention. Comme on peut souvent le lire, les joueurs votent avec leur argent, les gacha, pay to win, DLC day one et autres pratiques douteuses prolifèrent dans le milieu du jeu vidéo à cause de cela, ils ont donc une part de responsabilité.