Le nouveau jeu de vampires d'Arkane Austin et Bethesda Softworks annoncé il y a tout juste un an, Redfall, vient d'arriver en exclusivité sur Xbox et PC. FPS, action-looter, solo, multijoueur, co-op, monde ouvert et éléments de RPG, le successeur de Prey et Dishonored cumule les mots-clés et se tare d'être le jeu le plus ambitieux du studio, en plus d'être le premier jeu Xbox de l'histoire vendu à 80€. Rien que ça. Avec une telle affiche, on se dit "Woah, ça risque d'être vraiment un sacré jeu !". Malheureusement, le jeu essuyait ses premières critiques récemment après avoir annoncé que le jeu serait capé à 30FPS sur Xbox Series, et qu'un mode performance 60FPS arriverait plus tard lors d'une mise à jour. Un seul point noir, mais le jeu en vaut-il la chandelle ? Asseyez-vous bien confortablement, vous n'êtes qu'au début de vos peines...
- Genre : FPS, action-aventure
- Date de sortie : 2 mai 2023
- Plateformes : Xbox Series X/S, PC (Steam)
- Développeur : Arkane Austin
- Editeur : Bethesda Softworks
- Prix : 69.99€ sur PC, 79.99€ sur Xbox
- Testé sur : PC, clavier/souris
NB : Le jeu aura été terminé en mode solo, n'ayant pas encore pu toucher au multijoueur.
Charmante bourgade, néanmoins
Commençons par le commencement. Avant de partir dans vos aventures de chasseur de vampires, vous devrez choisir parmi 4 personnages (et bientôt même plus selon les dires des développeurs), pour le travail. Vous aurez le choix entre :
- Jacob Boyer, le sniper mercenaire discret et précis
- Devinder Crousley, l'influenceur / inventeur aux outils non-conventionnels
- Remi De La Rosa, l'ingénieure spécialisée dans la robotique
- Layla Ellison, l'étudiante aux pouvoirs télékinétiques
Chacun de ces personnages dispose d'un kit et un arbre de compétences propre à eux, incluant 2 capacités basiques, les kit de soins, une lampe torche (pas utile une seule fois dans tout le jeu), et une capacité ultime. Et le moins que l'on puisse dire après avoir terminé le jeu, en mode solo du moins, que ce soit concernant le système de compétences ou l'identité / personnalité de notre protagoniste, ils nous laissent totalement indifférents. Les compétences sont oubliées au profit du gunplay au cœur du jeu, n'ont pas de réelle identité / intérêt, et l'arbre de compétences est tellement vieillot que la progression de notre personnage importe assez peu. Étant à la première personne 99% du temps, on voit également notre personnage que très peu, alors qu'il est pourtant personnalisable au niveau de son apparence (costumes). Des bribes concernant son histoire et son background ici et là au cours du scénario, mais on pourrait jouer Ratatouille qu'on n'y verrait que du feu.
Mais assez parlé de notre personnage. Le jeu se lance avec une cinématique où une voix de petite fille, qui se fera appeler la "Passerelle", nous explique que l'île de Redfall, autrefois paisible, s'est vue tourner au cauchemar après que des vampires aient vu le jour, suite à des expériences avec son sang. Les habitants dont nous faisons partie ont essayé de s'enfuir, mais les vampires guidés par leurs 4 divinités ont levé l'océan autour pour en faire un mur d'eau afin que personne ne puisse s'échapper.
Et nous voilà contraints de descendre du bateau pour se battre, éliminer la menace vampire et leurs nouveaux adeptes humains, et reprendre l'île par nous-mêmes. Une histoire relativement simpliste, même si l'évolution du scénario au cours du jeu est assez bien réalisée. On regrettera cependant que cette petite fille qu'on ne verra jamais est le personnage pour lequel on créera le plus d'attache, à défaut de ne pas pouvoir s'allier aux 4 chefs vampires, les seuls personnages avec un quelconque charisme dans l'entièreté du jeu.
Après quelques pas dans le monde ouvert de Redfall, qui est en réalité 2 mondes ouverts séparés, nous arrivons à une caserne, notre QG des gentils au milieu de l'île. Ici nous ferons connaissance avec d'autres réfugiés, vendeurs et trouverons nos missions principales et secondaires. On essaie vaguement de tisser des liens et de nous vendre un intérêt pour ces autres personnages, mais je ne me rappelle déjà plus de leur nom tellement les efforts déployés pour les rendre intéressants sont faibles.
Malgré tout, ce QG sera un point essentiel puisqu'on y reviendra après chaque mission (oui, chaque mission), ne pouvant prendre qu'une mission à la fois, afin de se restaurer et de recharger nos armes à la caisse de munitions. On notera également l'enfer qu'est la bande-son au cours du jeu, mais surtout à la caserne, ou l'utilisation de la musique est terriblement mauvaise et inappropriée, comme pendant des conversations sobres et tristes alors qu'on a l'impression qu'une partie de Bomberman vient de se lancer si on se fie au son.
Et là, c'est le drame
Allez c'est parti, première mission, allons nous balader un peu sur l'île et taper du vampire avec nos premières armes trouvées dans des coffres. Premier constat, les 30FPS de la Xbox sont également sur PC à certains endroits. L'optimisation est relativement mauvaise, et même si elle s'améliore dans les missions suivantes, les premières heures sur chacune des deux zones sont vraiment pénibles à jouer niveau technique, malgré une 3080 et des réglages graphiques en moyen en mode performance. Et si Redfall a quand même quelques plans qui valent la peine d'être vus, les textures sont globalement datées, avec une mention spéciale pour cette horrible brume rouge qui n'aurait jamais dû exister.
Souhaitant visiter les environs, j'ouvre ma carte pour me situer, n'ayant pas de mini-carte sur l'interface. On passe donc par le menu principal, qui prend un peu de temps et qui par ailleurs ne met pas le jeu en pause. C'est-à-dire que si un vampire vous attaque pendant que vous regardez une mission, votre carte, vos compétences ou vos paramètres, vous n'êtes pas à l'abri de prendre un croc ou une balle d'un adepte. Ne vous croyez jamais trop en sécurité ou bien infiltré, car on rentre dans un des problèmes majeurs du jeu : l'IA des ennemis.
Elle est parfois lunaire. Vous pouvez appuyer sur votre lampe-torche qu'un ennemi de l'autre bout de la carte vous aura repéré. À l'inverse, vous pouvez courir de près dans leur dos qu'ils ne vous remarqueront pas. Vous prendrez parfois des balles de nulle part sans aucune indication, gratuit. J'exagère un petit peu, mais on n'est vraiment pas loin de la réalité. L'IA des ennemis laisse à désirer en plus de leurs déplacements parfois insupportables.
Les vampires peuvent se téléporter tantôt au-dessus, dessous, derrière, c'est un enfer de devoir flickshot à tout-va, surtout lorsque le framerate laisse à désirer. Et jouant clavier/souris, je n'ose imaginer l'enfer des joueurs Xbox sur manette à venir. Seule la lampe à UV sera votre réelle amie dans ces moments, étant extrêmement permissive à la visée. Concernant les ennemis humains, leurs déplacements sont déjà plus logiques, même si on déplore voir certains léviter ou se téléporter légèrement, ce qui n'est pas pratique pour viser... Globalement le combat à court portée est un échec à part dans certains cas avec un bon gros fusil à pompe, mais les sensations au sniper sont elles très bonnes. On y reviendra.
Un point positif néanmoins, c'est l'exploration. L'île de Redfall est divisée en plusieurs quartiers, chacun comportant un refuge et divers lieux à visiter, colorés et complets. Ces refuges vous serviront de points de voyages rapides, et vous donneront la possibilité de faire des "missions de refuges", au premier abord annexes et au final pas tant que ça... Des maisons à looter, des collectibles nommés "verrous du caveau" à trouver qui vous racontent l'histoire de cette petite fille "Passerelle" plus en détail et sont un bon ajout au jeu, et autres vestiges sanguins que vous pourrez équiper afin de modifier votre santé et vos statistiques.
Des bâtiments en hauteur, des souterrains, des grottes, des portes fermées où des clés introuvables sont requises, sous un Soleil Noir magnifique qui n'est nul autre qu'une des 4 divinités vampires, et qui peut même vous parler si vous regardez le soleil de trop près... On se sent relativement sous tension et en danger à chaque endroit où on va, et on regrette même qu'ils n'aient pas poussé en plus le jeu dans cette direction. Certains endroits plus sombres et dangereux donnent enfin de l'intérêt à l'aspect "monde ouvert" du jeu, et on aurait aimé voir encore plus de terreur et d'horreur dans ces lieux, voire même dans la totalité du jeu. Tout est légèrement trop décomplexé, et pousser encore plus dans la terreur et la tension aurait été appréciable, histoire de donner une réelle identité au jeu qui en manque cruellement. On aurait vraiment aimé se sentir plus impliqué et moins dans la constatation.
Tout n'est pas à jeter, heureusement
Et oui car si Redfall est globalement une déception, il faut néanmoins soulever les quelques points qui sauvent le jeu du naufrage. On l'a mentionnée, l'exploration du jeu et ses level designs relèvent parfois le niveau et rappellent pourquoi on croyait fort en Arkane Studios. Certaines zones sont vraiment agréables à l'œil et la gestion de l'espace est vraiment bien exploitée. En plus de ça, l'existence des nids de vampires aux quatre coins de la carte se trouve être un ajout qui est vraiment bienvenu pour donner un peu d'exotisme à l'histoire.
Ces nids auxquels vous accédez en traversant un mystérieux portail bleu sont des zones surnaturelles dans lesquelles vous allez devoir vaincre des ennemis sur le chemin jusqu'à atteindre son cœur. Une fois abattu et complété, vous aurez une minute pour récupérer un maximum de butin avant de revenir dans le vrai monde. Pensez un peu au système des sanctuaires dans Breath of the Wild, sans les puzzles mais avec de la castagne. Ca fonctionne pas mal du tout.
Niveau gameplay ensuite, en faisant abstraction des compétences obsolètes, le gunplay est un des points forts du jeu. Il existe une assez grande variété d'armes. Revolvers, fusils à pompe, de chasse, d'assaut, snipers, lampe UV et j'en passe, vous pouvez choisir votre arme selon la situation et les sensations de tir sont vraiment plaisantes, surtout au sniper. Les tirs à la tête sont vraiment récompensés, et les temps de recharge et de recul rendent les sensations assez réalistes et bonnes.
Enfin, les méchants sauvent Redfall. Et c'est même dommage de devoir aller les exécuter. Les 4 divinités vampiriques sont les seuls personnages vraiment charismatiques et avec un vrai background, bien plus que pour n'importe quel personnage allié y compris le nôtre. Chacun est unique en son genre, apporte son lot de frayeurs qui fait du bien à entendre, et les combats contre ces dieux sont plutôt satisfaisants. Même si ce satané Homme Creux parle quand même un peu trop en début de partie... Car oui, si la première moitié de Redfall est globalement une purge, la seconde moitié du jeu sauve la mise et on y prend même du plaisir, en voyant la progression réussie du scénario se déplier au fur et à mesure, et la tension monter plus l'histoire et les paysages s'assombrissent.
En bref, le sentiment qui découle après avoir joué à Redfall est principalement de la frustration. Un sentiment d'inachevé et de potentiel gâché quand on connait la talentueuse équipe derrière. D'excellentes idées ruinées par une exécution, une optimisation et une IA terrible qui viennent gâcher la fête, malgré des fulgurances à certains endroits. On sent par moments que le jeu a été conçu pour essayer de plaire en multijoueur et le résultat rend l'expérience en solo décevante.
Redfall aurait pu être un grand jeu en se concentrant sur des points essentiels et en essayant moins de trop en faire, et rate malheureusement un peu le coche, quand on voit la concurrence. Vendu à 80€ sur console (!!), il fait peine à voir face aux autres grands jeu du moment à ce prix, on pense à Tears of the Kingdom ou Final Fantasy XVI à ce prix qui arrivent et lui mettent une claque démentielle sans même être sortis, ou tout simplement à Dead Island 2 sorti il y a 2 semaines par exemple, dans le même genre, première personne, balles qui pleuvent, exploration et début poussif, qui est bien plus poli et dans lequel on se sent plus impliqué. C'est dommage.