Photo : LoL Esports
Pendant toute la saison, Rogue a fait partie des meilleures équipes d'Europe et pour beaucoup c'était l'année de la maturité pour Hans Sama. Le très précoce tricolore a en effet pleinement retrouvé la lumière en 2021, après un petit passage à vide et un coup de moins bien. Le seul bémol, c'est que pendant les playoffs, les moments les plus importants, Rogue n'arrivait pas à concrétiser. C'est dans la douleur que le Français se qualifiait pour les Worlds, obtenant la 3e et dernière seed du LEC.
Avant même que la compétition ne commence, Rogue recevait un petit coup de pouce du destin. Suite au forfait des Vietnamiens, l'équipe échappait au Play-In et se retrouvait directement qualifiée pour le Main Event. Une bonne nouvelle pour éviter un accident et les dépenses inutiles d'énergie. Sauf que le karma est réel et que ce coup de chance fut suivi d'une tuile. Après un tirage au sort malheureux, le Français se retrouve coincé dans la poule de la mort, où l'on retrouve les 2 derniers champions du monde (DWG KIA et FPX) et Cloud9, une des rares équipes NA redoutable et redoutée à l'internationale.
Une première semaine compliquée
La première semaine de compétition fut compliquée pour Rogue. Malgré une première victoire face à Cloud9, l'équipe européenne se retrouvait à 1-2 à la mi-chemin, dominée de la tête et des épaules par les deux ogres asiatiques. Mais les Européens pouvaient quand même entretenir quelques motifs d'espoirs. D'une part, Hans Sama était littéralement en feu. Brillant dans la victoire comme dans la défaite, il prenait ses responsabilités au bon moment pour sonner la charge et nous offrir quelques moves de génie. On pense notamment à son escape avec Miss Fortune contre FPX (2/1/2) ou ses dégâts monstrueux contre C9 (7/2/5). Si le tricolore a toujours été très doué mécaniquement, on était franchement ravi de le voir au niveau face à des pointures et de faire preuve de caractère.
Et puis collectivement, Rogue n'était pas complètement à la rue. Alors que plusieurs fois, les joueurs ont jeté la partie de manière grossière en early game (solo kill sur Odoamne, placement douteux de la part de Trymbi...), Rogue réussissait tant bien que mal à revenir en cours de partie. Si c'était insuffisant pour tenir la distance, les Européens ne se laissaient pas faire et trouvaient toujours des moyens de faire mal, malgré un retard conséquent. Verre d'eau à moitié plein ou verre d'eau à moitié vide, on avait quand même des raisons d'y croire et on se disait que si les planètes s'alignaient, on pouvait espérer un petit quelque chose...
Un début de dernière journée catastrophique
À l'entame de la dernière journée de la poule A, de la poule de la mort, Rogue conservait une chance raisonnable de se qualifier. En commençant par Cloud9, un adversaire que l'équipe avait déjà battu, les fans du LEC comptaient bien se refaire la cerise pour entamer un sprint de folie. Malheureusement, ce fut la douche froide et Rogue a fait un faux départ. Cloud9 avait mieux drafté, mais Rogue a surtout fait n'importe quoi au niveau 1 sur une invade qui s'est très mal terminée. Après un début catastrophique, qui fut un peu un running gag pour les coéquipiers d'Hans Sama pendant cette compétition, le plan de jeu et les conditions de victoires étaient totalement brouillés. Le Français, si bon depuis le début n'arrivait en plus pas à s'exprimer. Malgré un pick de confort sensé snowball la partie, son Draven ne servit vraiment à rien (1/3/2) et la journée commençait extrêmement mal...
Pour ne rien arranger, le deuxième match de la journée ne fut pas beaucoup plus brillant avec une défaite logique face à Damwon KIA. Mais cette fois, on ne pouvait rien reprocher aux Européens devant la toute puissance des champions du monde en titre et Hans Sama avait retrouvé des couleurs avec sa Miss Fortune (6/3/0).
Une éclaircie inespérée
À ce moment là, Rogue aurait pu, aurait dû être éliminé après avoir commencé l'ultime journée par deux défaites. Mais par un concours de circonstances totalement imprévu, FPX enchaînait les défaites et Cloud9 gagnait et perdait les bonnes parties pour nous offrir une scénario rocambolesque. Rogue détruisait sans concession les Chinois avec un Hans déchaîné 3/1/14 et une force collective retrouvée. Inspired, qui avait alterné le bon et le moins bon sortait de sa boîte au bon moment pour nous gratifier d'un Fiddlesticks diablement efficace et obtenir la triple égalité. 3 équipes se retrouvaient en 2-4 derrière les Coréens, intouchables et en 6-0.
L'espoir était de retour et, dans ce scenario de folie Rogue pouvait rêver en grand. Les compteurs étaient remis à zéro et la 3e seed du LEC avait deux finales à jouer, d'abord contre FPX puis contre C9 pour accéder aux quarts de finale et relancer la flamme des supporteurs européens.
Un suspens insoutenable mais du spectacle
Étant donné que Cloud9 avait réussi à gagner vite ses parties, Rogue et FPX commençaient en bas de l'arbre des tie-breakers. Alors que les organismes commençaient déjà à se fatiguer après une journée éreintante, il fallait encore donner un dernier coup d'accélérateur. En tant que supporteur, la tension devenait étouffante et on imagine même pas ce que ressentaient les joueurs. Et cette tension fut fatale aux Chinois de FPX. Incapables de réagir, ceux qui étaient pourtant listés parmi les favoris explosèrent en vol et finirent la journée en 0 victoire pour 4 défaites. Hans Sama avait fait le boulot et jouait comme un forcené. Toujours impeccable mécaniquement malgré la fatigue, il jouait à la limite et n'hésitait pas à flash in de manière agressive pour montrer l'exemple et porter ses coéquipiers. Moribonds suite aux mauvais résultats de l'Europe, les fans reprenaient espoir. Après chaque kill on ne pouvait s'empêcher d'applaudir, après chaque teamfight gagné de crier et c'est avec un joie retrouvée qu'on célébrait la première des deux victoires nécessaires à la qualification. Alors qu'on avait promis l'enfer à Hans Sama, il se retrouvait si proche des quarts de finale...
Malheureusement, le Français s'est arrêté aux portes du paradis. Dans l'ultime match face à Cloud9, qui a duré plus de 54 minutes, ce sont nos frères ennemis des LCS qui ont pris le dessus. Rogue n'a pas démérité et a longtemps tenu le bon bout. Légèrement devant en début de partie et bien partie pour accumuler les drakes, il n'a pas manqué grand chose... Mais les Américains, plus sereins et menés par ce diable de Perkz ont réussi à se dépasser. Ils ont mieux joué et ont été plus audacieux, pour réaliser des rotations plus risquées mais plus efficaces et surtout en concrétisant un Baron Nashor qui se révéla décisif. Les Européens ont pourtant eu des occasions... Ils ont pris le dessus sur certaine séquences mais ont manqué de réalisme, n'arrivant pas à transformer les teamfights victorieux en objectifs. C'est dommage, et on imagine qu'Hans Sama était inconsolable, comme nous. Mais il n'a rien à se reprocher et on lui envoie tout l'amour du monde. Il a été bon, il a été grand, il a été fort. Et si la qualification lui est passée sous le nez, il a quand même réussi son objectif : nous redonner espoir en l'Europe.