Alors que beaucoup de grosses licences surfent avec panache sur la vague de la hype avant de plonger tête la première dans les récifs à l'arrivée, de petits projets par des studios inconnus parviennent parfois à créer la surprise avec peu de moyens. Nous sommes partis à l'aventure dans le monde de Valheim afin de juger par nous-même de son potentiel et de ce qu'il propose déjà sur l'early access. Il convient néanmoins de garder en tête que le jeu est encore loin de sortir, comme de nombreux éléments doivent encore être perfectionnés, nous ne comptons pas mettre de note.
- Genre : Survie, Action-RPG, Exploration, Construction, Multijoueur
- Date de sortie : 2 février 2021 (early access)
- Plateforme : PC
- Développeur : Iron Gate AB
- Éditeur : Iron Gate AB, Coffee Stain Publishing
- Prix : 16,79€
Beau de loin, mais loin d'être beau
L'histoire de Valheim est simple, mais un peu plus étoffée que celle de la majorité des jeux de type sandbox. Nous incarnons un vaillant Viking envoyé par Odin dans le 10e monde d'Yggdrasil qui sert de prison à des monstruosités qui y ont été scellées jadis, et qui sont sur le point de s'échapper. Après un largage via Valkyry Express dans un vaste monde unique, généré de façon procédurale, il faut se débrouiller avec notre barbe et notre corbeau pour progresser. La première chose qui saute aux yeux est que les graphismes du jeu sont très grossiers. Visuellement, cela donne un peu l'impression de jouer à World of Warcraft avec les textures de Minecraft ou d'un jeu en 3D sur PS1. En clair, ce ne sont pas des gros cubes, mais tout est composé de gros pixels bien gras quand on y regarde de très près. Cela explique le poids du jeu de seulement 550Mo environ.
Néanmoins, il ne faut surtout pas s'arrêter là. Et quand on prend un peu de recul, le jeu et ses paysages possèdent tout de même un certain charme, loin d'être déplaisant. On s'y fait très vite et les environnements ne jurent que lorsqu'on est forcé de suivre l'action de plus près, comme dans les cryptes souterraines. Le point positif est qu'une fois le jeu optimisé, il devrait être capable de tourner sur les machines et consoles les plus modestes. Mais revenons à l'action. En ramassant une branche et quelques pierres, on se crée une arme de fortune afin de tuer les premiers ennemis maigrichons mais agressifs des environs.
On découvre par la même occasion que le jeu intègre un système de progression de différentes compétences basées sur leur utilisation. Donner des coups de hache améliore la maîtrise de cette arme au fil du temps, courir beaucoup va réduire le coût d'endurance de cette action, sauter partout vous apprendra passivement à sauter plus haut, etc. Il n'y a pas de points ni d'arbre de talents, mais cela donne néanmoins une touche de progression façon "RPG" appréciable qui récompense même les actions mondaines. Ramasser des dizaines de silex sur la plage est tout de suite un peu plus fun quand on essaye d'optimiser la progression de son personnage en même temps.
Un détail qui a son importance est que votre personnage et l'équipement qu'il va acquérir par la suite ne sont pas liés exclusivement à un seul monde. Vous pouvez relancer une partie et conserver sa progression, ou alors alterner entre votre partie solo et celle en commun avec des amis, avec le même personnage, sans avoir à repartir de zéro à chaque fois en ayant à en recréer un (même si cela reste une option). C'est assez bien vu, mais n'allez pas croire que votre chemin jusqu'au Valhalla sera indolore. Mourir inflige de lourdes pertes de progression dans les compétences, et votre personnage se retrouve nu comme un ver à son point de réapparition. Tout son équipement est resté avec son corps. Le récupérer peut devenir une véritable aventure plus tard, par exemple si vous êtes mort sur un autre continent avec votre seul navire toujours sur place. Si le tout début du jeu donne la fausse impression qu'il est facile et clément, avec des mécanismes de survie simples, sachez que cela ne sera pas toujours le cas. Ce n'est absolument pas Animal Crossing et la progression finit par devenir assez ardue au niveau des combats, même si rien ne vous empêche non plus de simplement vous amuser à créer le château avec village de vos rêves après un certain point, pendant que vos coéquipiers partent à l'aventure. Mais nous n'en sommes pas encore là.
Vie de cerf
Vos débuts sont modestes, et loin d'être viking prêt à partir à l'aventure sur son drakkar, vous êtes plutôt un clochard qui doit bouffer des framboises et se créer un abri de fortune pour survivre. Valheim vous épargne les habituelles jauges de soif, de fatigue, de faim, de maladie et autres. Manger va simplement augmenter votre vie, votre endurance et leur régénération, ce qui vous évitera de vous faire tuer instantanément par un troll une fois sorti de la zone de départ. Néanmoins, vous êtes encouragé à rester chez vous et à travailler sur votre base la nuit ou lorsque le temps ne s'y prête pas. La fraîcheur nocturne et l'humidité ne vont pas directement vous mettre en danger, mais cela va sérieusement réduire votre régénération d'endurance, alors que d'un autre côté, les monstres seront de sortie en force. Cela peut facilement donner lieu à un combo mortel. Il vaut donc mieux profiter du confort de son logis, se réchauffer auprès du feu et passer une bonne nuit dans son lit pour reprendre au petit matin.
Pour cela, il faut utiliser le système de craft assez simple et intuitif. Abattre des arbres donne du bois, ce qui permet de créer un établi pour réparer son équipement, créer de nouveaux objets et construire des structures dans la zone. De nombreux éléments sont disponibles dès le départ, et il est assez fascinant de voir tous les designs de maison improvisés par les joueurs. Cela peut aller de la chaumière laide et simpliste mais fonctionnelle au véritable chalet raffiné sur pilotis. C'est un autre point sur lequel le jeu se rapproche de Minecraft Survival, la seule limite est l'imagination. Et après votre logement de base, de nombreuses installations vont être introduites au fur et à mesure de votre progression. Cela se fait d'une façon naturelle et satisfaisante. On installe un billot à côté de l'établi, puis un support à tannage. Après s'être fabriqué un arc, un bouclier et une armure de base, on peut partir chasser le cerf, puis affronter le premier boss du jeu sur un autel à proximité.
Mêler survie, construction et combats est une recette qui a fait ses preuves, le résultat dans le cas présent est assez proche de The Forest par exemple, avec une vue à la troisième personne et une gestion à la fois plus propre et intuitive des combats. Dans ce domaine, nous sommes dans l'Action-RPG classique, avec des sauts, des esquives, une attaque rapide, une attaque puissante et un blocage. Il est même possible d'effectuer une parade au bouclier avec le bon timing, ce qui permet d'infliger un coup critique dévastateur à l'ennemi. Même si c'est une comparaison facile et utilisée à l’excès, il faut dire qu'avec la gamme d'armes assez large (hache, épée, gourdin, masse, dague, lance, bouclier et nous en passons) et la jauge d'endurance à bien gérer, les combats ont un petit côté Souls-Like qui n'est pas pour déplaire. Le bestiaire manque encore un peu de variété, mais on se retrouve rapidement à devoir prendre les combats au sérieux. Cela donne du piquant à l'aventure et cela donne d'autant plus envie de progresser. Voir un énorme troll équipé d'un tronc d'arbre foncer sur sa base et tout défoncer peut sembler un peu injuste, mais cela maintient l'intérêt et il en résulte des moments mémorables en multijoueur, quand personne ne maîtrise encore vraiment tous les aspects du gameplay et les préparatifs à effectuer pour éviter un tel drame.
Une fois encore, Valheim est vraiment un jeu facile à prendre en main, mais qui vous punit sévèrement lorsque vous le sous-estimez, et c'est ce qui est bon, même si c'est une leçon qui peut devenir incroyablement frustrante par moments, plus tard dans l'aventure lorsqu'un excès de confiance ou un manque de chance donnent lieu à un drame. C'est d'autant plus vrai en solo, puisqu'on se retrouve facilement dans une position défavorable sans back-up sur place pour vous offrir un portail de téléportation, ou tout simplement lorsque la progression dans le jeu est liée à l'extraction de tonnes (littéralement) de minerai. C'est tout à fait faisable en solo, mais il est indéniable que c'est bien plus facile et rapide en multijoueur, puisqu'il n'y a pas besoin de construire de multiples exemplaires de certaines installations. Quelques petits équilibrages pourraient être bienvenus dans ce domaine, mais il n'est pas non plus déplaisant d'avoir à relever des défis supplémentaires en tant que loup solitaire.
Il est indéniable que le jeu manque encore de contenu dans certains domaines, que ce soit l’aménagement intérieur, le manque de PNJ ou de rencontres uniques dans le monde ou dans la variété des événements spéciaux. Mais les histoires et les aventures émergent déjà naturellement lors de l'exploration et de la progression dans les biomes, chacun avec ses propres difficultés à surmonter, ce qui est très bon signe. Relocaliser sa base à un meilleur endroit, échapper à un serpent de mer en bateau ou mettre en place un transport de ressources à travers la carte ne manque pas de surprise, de nombreux mécanismes de jeu et des obstacles insoupçonnés finissent par être rencontrés, et on n'a jamais le temps de s'ennuyer (sauf en mer). On ne peut s'empêcher de penser à sa prochaine activité avec impatience, que ce soit la création d'un champ de navets derrière la base, un élevage porcin ou un affrontement épique avec un boss.
Early access oblige
Outre le contenu parfois pauvre, le reste n'est évidemment pas parfait non plus, loin s'en faut. La gestion de l'inventaire et du poids vont déclencher des flash-backs traumatisants à bien des joueurs. Il n'y a par exemple même pas un panneau dédié aux objets équipés, et tout est transféré en vrac après avoir récupéré son corps, ce qui peut donner lieu à une nouvelle mort dans un moment critique. Les objets ne s'empilent pas bien, le tri de ces derniers serait une véritable bénédiction, l'interface n'aide vraiment pas à jauger l'état de votre base ou si des objets sont bien placés pour être à l’abri des intempéries. Et les combats peuvent s'avérer frustrants lorsque vos flèches décident mystérieusement de partir dans le décor, tout comme vos coups alors que vous êtes presque collé à un troll. Le système de furtivité est mal conçu, tout comme la gestion de la vie, ce qui peut donner des morts assez ridicules parce que vous n'avez pas pensé à manger avant de vous balader dans votre jardin et qu'un ennemi passait par là.
La navigation par bateau aurait certainement besoin de quelques retouches aussi, surtout dans ce qui le rend pénible, même si elle est plutôt réaliste dans les grandes lignes. Dégager un navire amarré peut demander de longues minutes si le terrain et le vent ne sont pas favorables par exemple. Et la gestion de l'orientation de la voilure en fonction du sens du vent est un peu frustrante quand il faut alterner avec des petits coups de rame poussifs. Comme en prime les océans sont à la fois vastes et assez vides, cela donne des moments un peu pénibles qu'on a tendance à éviter autant que possible quand il n'est pas nécessaire de changer de continent ou de rapatrier quelques tonnes de minerai à la base pour se forger de nouvelles armes et armures. Un patch est aussi prévu dans ce domaine, il faut donc s'attendre à une sérieuse révision de la chose, espérons que cela sera dans le bon sens.