Lancée par Ubisoft pour rythmer la scène compétitive de Rainbow Six Siege, en partenariat avec l’ESL, la Pro League a façonné de nombreuses histoires sportives, humaines, fantastiques. Un grand cru de storytelling et de poils dressés, ce que l’esport-spectacle a de toute façon de mieux à proposer à tout passionné.
Le format a beaucoup évolué avec, à son commencement, des ligues seulement en Europe et en Amérique du Nord (de la S1 à la S3), dont les deux meilleures équipes se retrouvent en finales « mondiales ».
Puis, avec l’intégration de nouvelles régions comme l’Amérique du Sud (le Brésil, surtout) et l’Asie-Pacifique dominée par l’Australie et le Japon, la Pro League vient à reposer sur des phases finales à huit équipes au lieu de quatre (de la S4 à la S10).
Après 10 saisons bien remplies, et avant la régionalisation du circuit et ses Majors trimestriels, la Pro League devait clôturer son histoire en apothéose, à São Paulo, en mai. Mais ce ne sera pas le cas. La pandémie de Covid-19 ayant impacté l’ensemble de la planète, les rassemblements festifs en premier lieu.
Alors que la deuxième partie de saison de la onzième et dernière saison de Pro League devrait compter « pour du beurre », que pourrait-on faire de mieux que rendre hommage à plus de quatre ans de compétitions à travers tous les champions qui nous ont été donnés d’acclamer ? Pas grand-chose, alors let’s go.
Penta Sports (S1 - 2016) : À jamais les premiers
Pengu (Danemark), S4i (Allemagne), rendier (Allemagne), KRYP (Espagne), oVie (Pays-Bas)
Petite piqûre de rappel : avant que la Challenger League ne vienne faire tampon entre le monde amateur et professionnel, les moyens de se qualifier pour la Pro League originelle étaient simplistes, voire sauvages. Un premier tournoi en Espagne a permis à une équipe ibérique de faire son entrée dans le championnat, une équipe italienne, via un procédé similaire, lui a emboîté le pas, et six autres formations ont été retenues via leurs positions dans les… GO4. À cette époque, ce sont les Français d’Aera - dont Elemzje, Enemy, Panix et Revan - qui dominent ces petites coupes européennes en ligne.
Mais une fois le coup d’envoi de la Pro League lancé - avec une partie qui sera jouée à Katowice, dans une Spodek Arena accueillant annuellement les IEM -, ce sont finalement les Penta qui dominent et clôturent la saison européenne avec 0 défaite au compteur. Aux finales mondiales, Penta remporte ses deux matchs - en jouant à chaque fois sur la map Maison - et remporte la toute première édition de Pro League, dans l’indifférence quasi totale étant donné le peu de visibilité du jeu. Loufoque… et historique.
Que sont-ils devenus ?
Cette formule ne réussira pas à dominer la saison suivante et va se disloquer au fil du temps. Seul Pengu restera jusqu’à l’arrivée des futures légendes Fabian et Joonas en Saison 3. Les autres joueurs du roster ont aujourd’hui disparu du circuit professionnel.
Yunktis (S2 - 2016) : Le plus beau titre de la France sur Rainbow Six
Falko (France) / Joghurtzz (France) / Renshiro (France) / Sixquatre (France) / spokeN (France)
Le saviez-vous ? La moitié des éditions de Pro League ont été remportées par des équipes dites « nationales », c’est-à-dire avec 4 joueurs de la même nationalité dans leurs rangs. C’est ainsi que Yunktis, une formation 100% française, a été la première à ouvrir la voie à Continuum (USA), ENCE (Finlande), Team Liquid (Brésil) et la Team Empire (Russie).
Écrasant tout sur son passage, et plus particulièrement ses adversaires sur 8 des 9 maps qui l’ont mené jusqu’au sacre de la seconde Pro League, Yunktis a quelque part bouleversé la manière d’approcher tactiquement Rainbow Six, incluant beaucoup d’éléments précurseurs dans son jeu. Il s’agit encore aujourd’hui de la meilleure performance pour une équipe française en Pro League, qui ne pourra donc plus être égalé, puisque la Pro League n’existera bientôt plus.
Que sont-ils devenus ?
Après avoir raté de peu une qualification pour les finales mondiales (toujours euroaméricaines) la saison suivante, le projet commence à battre de l’aile et les joueurs se séparent. Trois d’entre eux - Sixquatre, Joghurtzz et Renshiro - vont néanmoins reprendre le flambeau en enfilant le tricot de Millenium. Falko rejoindra de son côté Penta Sports et spokeN ira conquérir la première édition de Challenger League. Aujourd’hui, ce dernier a pris sa retraite de joueur quand Falko participe régulièrement à des projets semi-professionnels. Sixquatre est devenu un important influenceur sur la scène R6:S, Joghurtzz évolue chez Grizi Esport et Renshiro en Pro League du côté de BDS.
Continuum (S3 - 2016) : La révolte de la scène nord-américaine
Necrox (USA) / Canadian (Canada) / nvK (USA) / Retro (USA) / Yung (USA)
Surement l’une des plus belles équipes - principalement pour son storytelling - que l’esport de Rainbow Six a pu offrir. Déjà, parce qu’elle restera comme la première et dernière formation venue de l’Amérique du Nord à remporter un titre de Pro League. Mais aussi pour la longévité de son roster par la suite. Et ce, malgré des throws monumentaux au fil des âges.
Concernant son parcours jusqu’au titre de champion de Pro League Saison 3, le plus dingue restera le fait d’avoir été sacré grand vainqueur avec seulement 55% de matchs remportés tout au long de la saison. On retiendra d’ailleurs cette victoire arrachée in extremis en finale contre Playing Ducks et ses francophones, Elemzje, Enemy et Panix.
Que sont-ils devenus ?
Après avoir réalisé le doublé Pro League - Six Invitational 2017, l’équipe va connaître une période de creux en Pro League et sera tout de même acquise par Evil Geniuses, trois saisons plus tard. La base Necrox - Yung - nvK - Canadian va rester ensemble jusqu’en saison 9, une chose rare sur un jeu où les disband et mouvements vont être légion. Canadian finira cependant par quitter le groupe pour rejoindre SpaceStation Gaming et aller remporter de nouveau le Six Invitational, en 2020. Tout cela après une multitude de finales ratées avec ses anciens compagnons qui évoluent toujours au sein de la Pro League NA.
Vitality (S3 - 2016) : En mémoire de la scène console
BiOs (France) / FuriouSG (France) / Lion (France) / AnThrax (France) / KRiiSKO (France)
Avec Penta Sports, Vitality est l’un des deux seuls clubs à avoir disputé la première édition de Pro League et à faire partie encore aujourd’hui du circuit professionnel de Rainbow Six. Sauf que son aventure a commencé sur console, tout au long de la première année de compétitions sur Siege. Vitality remportera à juste titre la dernière édition de Pro League organisée sur Xbox, face à son équipe rivale de Supremacy, elle aussi française.
Que sont-ils devenus ?
Après avoir encaissé un 10-0 en finale du Six Invitational 2017 (la dernière compétition officielle pour la console), une partie du groupe - AnThrax, Bios et Kriisko - tente la transition vers la Pro League version PC. Ils échoueront. Après plusieurs projets dans la peau de joueur, Bios est désormais devenu coach pour Penta Sports. Kriisko s’est retiré du circuit pro, Anthrax et Lion participent à divers projets amateurs et semi-pros, quand FuriouSG s’est recyclé en tant que présentateur officiel français des compétitions de la discipline.
Penta Sports (S4 et S5 - 2017) : Les bases d’une dynastie
Pengu (Danemark) / Fabian (Suède) / Joonas (Finlande) / Goga (Espagne) / KS (Allemagne)
Sans aucun doute possible, ce quintet est celui qui a le plus marqué l’histoire de l’esport de Rainbow Six. Avec le français Falko en rotation lors du titre en Pro League S4, et sans lui lors du suivant, Penta Sports signe deux records qui ne seront jamais égalés. Le premier : avoir un taux de 100% de victoire sur les 7 matchs qui ont conduit la troupe européenne jusqu’à la victoire en Saison 4. Le second : avoir réalisé un doublé historique, inscrit dans le marbre après un back to back légendaire à Cologne.
Que sont-ils devenus ?
Après avoir écarté KS (qui évolue aujourd’hui en Challenger League), le quatuor restant va continuer de tout remporter sur son passage - deux fois le Six Invitational (2017, 2018), le Six Major de Paris (2018) et la Pro League en saison 8 - tout en rejoignant dans le même temps l’organisation de G2 Esports.
ENCE (S6 - 2017) : La résilience à son paroxysme
Bounssi (Finlande) / Kantoraketti (Finlande) / Willkey (Finlande) / Pannari (Finlande) / SHA77E (Finlande)
À l’heure de faire le bilan sur plus de quatre années de service, la Finlande remporte haut la main le combat de la production de talents. Avec neuf médailles glanées au fil des saisons via ses joueurs, dont cinq lors du sacre inespéré d’ENCE en Saison 6, ce bout d’Europe du Nord est sans conteste LE royaume de Rainbow Six Siege.
Pour l’anecdote, ENCE avait été la seule équipe à disputer les cinq premières finales de Pro League, tout en vivant une élimination prématurée à quasiment chaque premier tour. Jusqu’à cet exploit, à un moment où plus personne ne l’attendait. La magie de l’esport.
Que sont-ils devenus ?
La magie n’a pas duré très longtemps, cependant. Puisque l’équipe s’est totalement effondrée la saison suivante et s’est vue reléguée en Challenger League. Il faut dire que cette espèce de centre de formation sera régulièrement pillée par les plus gros clubs européens pour les talents qu’il arrivera à fournir. La formation nordique va ainsi connaître des périodes d’instabilité, entre la Pro League et la Challenger League. Aujourd’hui, Willkey est manager au sein de la structure ENCE, alors que Bounssi a recomposé une troupe avec des espoirs finlandais en Challenger League. Sha77e évolue chez Chaos en Pro League, après avoir porté la tunique de Penta Sports, au même titre que Kanto qui se trouve actuellement chez G2 Esports.
Team Liquid (S7 - 2018) : La ferveur made in Brazil
Nesk (Brésil) / ziG (Brésil) / Bullet (Brésil) / S3xyCake (Brésil) / psk1 (Brésil)
Alors que Black Dragons vient de bousiller ses cartouches devant son public de Sao Paulo, la saison précédente, face à ENCE, la Team Liquid va retourner la scène internationale dès les finales suivantes, et déchainer la scène brésilienne. Nesk est inarrêtable et dézingue tour à tour les adversaires d’une Team Liquid surprenante. Il s’agira du premier - et dernier - titre majeur international remporté par une équipe sud-américaine sur la scène Rainbow Six.
Que sont-ils devenus ?
Nesk, S3xyCake et psk1 font toujours partie de la line-up, alors que Bullet a depuis rejoint MIBR et ziG a pris sa retraite. Team Liquid est encore en Pro League et participe régulièrement aux Majors de la scène.
G2 Esports (S8 - 2018) : La meilleure équipe de tous les temps ?
Pengu (Danemark), Joonas (Finlande), Fabian (Suède), Goga (Espagne), Kantoraketti (Finlande)
Encore eux, oui. Peut-être bien sous la forme la plus puissante qu’il nous ait été donné de voir évoluer une équipe de Rainbow Six. Que ce soit sur sa saison de Pro League remportée, au Six Invitational 2019 juste après, ou au Six Major de Paris à la mi-saison, cette équipe s’est montrée imbattable. L’ancien quatuor de Penta Sports inscrira même - aux côtés d’un Kanto fraichement débarqué - le meilleur ratio de maps remportées sur une saison pour un champion de Pro League, à hauteur de 85%. I-né-ga-lable.
Que sont-ils devenus ?
Perte de motivation ? Moins d’avance dans la méthodologie de travail ? Affranchissement de la concurrence ? Il y a surement un peu de tout ça dans l’explication liée au fait que G2 a perdu de sa superbe après le début d’année 2019. Plus aucune participation à des finales de Pro League, un échec dans les derniers mètres du Six Major de Raleigh, et une performance moyenne de l’équipe au Six Invitational 2020, vont avoir raison de plusieurs stars du roster. Joonas quittera le navire pour évoluer à présent chez Team Secret, en Challenger League. Goga est parti chez Vitality et Fabian a été bench. Pengu est resté chez G2 et s’est entouré progressivement de nouvelles pépites de la scène, en plus de Kantoraketti : Uuno, Virtue et CTZN, bouclant ainsi la boucle qui devait être bouclé.
Team Empire (S9 - 2019) : La Russie roule sur le Monde
ShepparD (Russie) / JoyStiCK (Russie) / karzheka (Estonie) / Scyther (Russie) / Dan (Russie)
Conçue pour tout gagner, déployant un style de jeu très millimétré, cette équipe a réalisé un exploit de taille : se hisser en Challenger League, puis en Pro League dans la foulée, avant de remporter - en réalisant une remontada en finale - la Pro League. Une preuve de plus que les systèmes esportifs ouverts à tous ont tout leur intérêt.
Que sont-ils devenus ?
L’équipe n’a souffert d’aucun changement depuis, si ce n’est d’avoir remporté le Six Major de Raleigh en août dernier. Alors qu’on la voyait déjà rester pour longtemps au sommet et imiter G2 Esports en allant chercher un Six Invitational, la formation russe s’est trouée à Montréal et ne s’est pas non plus qualifiée entre temps pour les finales de la Pro League Saison 10.
Na’Vi (S10 - 2019) : Le champion inattendu
Kendrew (Royaume-Uni) / CTZN (Royaume-Uni) / Pie (Royaume-Uni) / neLo (Croatie) / Saves (Pologne)
Une équipe qui vient du fin fond du subtop et qui remporte la Pro League deux saisons plus tard ? C’est ce qu’on avait vu avec les Russes de la Team Empire, en effet. Mais c’est aussi ce qu’on a vu avec Na’Vi. En achetant les joueurs de MnM Gaming tout juste débarqués de Challenger League, Natus Vincere réalise le meilleur coup des temps modernes sur Rainbow Six et s’en va gagner la Pro League Saison 10. Étant donné qu’il ne devrait plus y avoir de Pro League par la suite, le phénomène Na’Vi restera non pas seulement comme l’une des plus belles aventures de la discipline, mais aussi comme le dernier champion qu’on aura à jamais en tête.
Que sont-ils devenus ?
Na’Vi n’a pas réussi à briller au Six Invitational 2020 qui a suivi, et peine trouver sa place en Pro League cette saison. Kendrew, neLo et Saves sont toujours dans l’équipe. CTZN a été acheté par G2 Esports, tandis que Doki doit purger une période de ban jusqu’en avril. Pour combler les deux places manquantes, Na’Vi a recruté Panix et obtenu le prêt temporaire de Blurr, un jeune joueur britannique.