Annoncé lors de l'E3 dernier, Fallout 76 est un jeu de survie développé par Bethesda Games Studio, disponible dès aujourd'hui sur PC (via le launcher Bethesda), PS4 et Xbox One. Ci-dessous, vous pourrez retrouver notre test basé sur la version de lancement de ce titre qui risque de faire débat.
Testé sur PC.
- Genre :Shooter Video Game, Adventure game
- Développeur :Bethesda Game Studios
- Editeur : Bethesda Softworks
- Supports : PC, Xbox One, PS4
Appât lâche
Première tentative de l'immense Bethesda Games Studio dans le "tout multijoueur", avec un jeu de survie estampillé Fallout, la prestigieuse licence de RPG post-apo du développeur américain. Avec 76, BGS propose à 24 joueurs par serveur de survivre en coopération sur une carte immense, avec des quêtes à gogo, du craft dans tous les sens et une multitude de lieux-dits à explorer. Quant au PVP, s'il n'est pas franchement encouragé par les situations proposées par les développeurs, il est pourtant bel et bien là et semble même être au coeur d'une mise à jour qui devrait (normalement) étoffer un peu tout ça.
Car disons-le clairement, sur toutes nos sessions, nous ne sommes tombés sur des joueurs récalcitrants qu'une seule fois, et encore, à 3 contre 1... Inutile de préciser que la bataille fut de courte durée. Si tout le monde est si pacifique dans Fallout 76, c'est simplement parce qu'il y a beaucoup plus d'avantages à coopérer : tuer quelqu'un sans son consentement demande une bonne dose d'acharnement et dès que votre proie est à terre, tout le serveur est alerté du méfait, featuring jolie prime sur votre tête et tout le toutim. Pour le moment, donc, les groupes d'entraide se forment assez naturellement, du moins si vous avez la chance de croiser quelqu'un, car malgré leur maigre capacité de 24 joueurs simultanés, les "mondes" de Fallout 76 ne semblent jamais remplis (test réalisé principalement sur PC). Si vous envisagez de profiter des bonus de la camaraderie, il vous faudra souvent battre le pavé ou vous acquitter d'une taxe en caps pour du voyage rapide, histoire de se rapprocher plus facilement d'un potentiel compagnon d'infortune. Les événements auraient pu être un bon moyen de pousser les gens à se rencontrer, mais ils sont trop nombreux et pas toujours rentables : avec 5 events clignotant constamment sur la map, il est parfois difficile de savoir où donner de la tête.
Fallout 76 est de toute façon blindé d'objectifs et de quêtes récupérées "à la volée" en entrant dans un bâtiment ou en écoutant certains journaux audio. Mais que ce soit la quête principale ou les fils secondaires rattachés aux lieux, cela ne fonctionne tout simplement pas. La narration tombe à plat très rapidement et le scénario ne motive pas franchement à creuser plus profondément la question. A vrai dire, on aurait sans doute préféré que Bethesda fasse le choix tranché de s'affranchir complètement des quêtes, hormis les micro-objectifs en pleine exploration, car il n'y a guère que cette perspective qui va vous motiver, vous et vos potes, à continuer de fouler les terres désolées de la Virginie occidentale. Vos meilleurs moments de jeu seront ceux dans lesquels vous choisirez un leu-dit au hasard et tenterez de l'atteindre en pillant tout ce que vous croiserez.
Ces petites escapades entre gens de bonne compagnie permettent à Fallout 76 de laisser respirer un peu ses survivants et de faire valoir ses meilleurs arguments, à savoir un plaisir de la découverte made in Bethesda et de petites touches de narration environnementale qui font toujours mouche. Du moins avant que cette dernière ne tombe dans le potage et qu'un bug gâchant la progression ne vous redescende illico-presto de votre petit nuage radioactif.
Pour parcourir ces longs trajets, il faudra également vous préparer un minimum... Ou pas, puisque l'unité C.A.M.P. centralise tout ce qui concerne l'artisanat dans le jeu. Vous voulez vous fabriquer un lit et une cuisine pour restaurer votre santé ? Allez hop, on téléporte son module pour quelques capsules, tout est à portée et en plus ça rime. Concrètement, la construction de base dans Fallout 76 est un aspect finalement très secondaire ou, du moins, très loin de l'idée que l'on pouvait s'en faire. Si vous vous attendiez à pouvoir créer une forteresse de tôle, c'est effectivement possible, mais aussi très loin d'être rentable. Le C.A.M.P. doit être davantage considéré comme un camping de poche et un point de voyage rapide gratuit qu'une véritable base vouée à rester dans le décor pendant des semaines.
Plutôt déconcertant, très confortable certes, mais aussi un gros coup porté à la sensation de détresse qui est censée peser sur le joueur. La présence appuyée de l'artisanat via de nombreux ateliers fera forcément de l'oeil aux âmes de farmer, avec un nombre important de recettes d'armes, de mods et de consommables. Il est toutefois tout à fait possible, voire recommandé, de s'en passer : l'exploration vous récompensera bien mieux pour vos efforts que le craft. Les limitations de poids et de capacité du coffre viendront de toute façon freiner violemment vos envies de bricolage.
Le poids des maux, le choc des photons
En mangeant les kilomètres, vous tomberez forcément sur des places fortes tenues par des bestioles qui s'en prendront d'emblée à votre intégrité physique. Pour faire face à la menace, un large stock d'armes allant du simple revolver à l'épée "ski/patin à glace" (parce que pourquoi pas) vous aidera à diminuer encore un peu plus la population mondiale. L'arsenal de 76 est varié et sympa à découvrir grâce à certaines pétoires improbables et donc amusantes à manier. Du moins dans un premier temps, car les gunfights sont eux aussi repris de Fallout 4 et ça n'était pas forcément un domaine dans lequel le RPG brillait. Les affrontements sont souvent laborieux, même à haut niveau, les animations sèches et mal décomposées de certains ennemis et les lags n'aidant pas franchement au confort de l'expérience. De plus, le S.V.A.V. (pour système de visée automatique Vault-Tec) est relégué ici au second plan en se transformant en vague ciblage automatique dont la principale utilisation sera de dénicher les streums camouflés par le décor grâce au centrage automatique de la caméra sur la cible lorsqu'il est enclenché.
Mise à part le contenu de vos étuis, vous devrez également vous adapter au terrain, au type d'ennemi rencontré, mais aussi et surtout palier à vos besoins : ça serait balaud de choper un rhume. Négliger la survie est le meilleur moyen d'accumuler les malus. En vous exposant à de trop fortes radiations, votre corps va changer, ce n'est pas sale certes, mais cela va vous demander de faire quelques choix : la mutation dispense aussi des effets bénéfiques, ce qui pourrait en motiver certains à se laisser pousser un troisième bras au milieu du ventre.
Malheureusement, les mutations et les maladies n'ont aucune répercussion cosmétique et ne sont finalement, pour leur grande majorité, que des statistiques et un peu de texte dans un sous-menu reculé. Les amoureux des radiations (personne ne vous juge) en auront tout de même pour leurs frais, puisque tout le sel du end-game de Fallout 76 se trouve dans l'explosion d'une bombe atomique sur une région choisie par un groupe de joueurs. Pour faire pousser le champignon, il va d'abord falloir ramasser 4 fragments de code sur la carte (un par joueur) et décrypter tout ça pour atteindre un bunker contenant le bouton rouge, objet de toutes les convoitises.
On espérait secrètement pouvoir faire exploser la base de DarkNarut0xXx, mais il n'en fut rien, ou alors on l'aurait pas fait exprès : le N.U.K.E., de son petit nom, est plus un outil pour accéder au contenu très haut niveau du jeu qu'une véritable arme de destruction massive destinée aux rixes entre survivants. La zone touchée par l'explosif devient irradiée, le fond de l'air change et cette dernière ne devient accessible qu'aux Power Armor habilitées. Cette partie du jeu a été atteinte récemment par l'escouade du youtuber Nickaroo, avec un combat de longue haleine contre une reine écorcheuse. La chauve-souris géante est apparue parce que les joueurs avaient décidé de viser un nid d'écorcheurs, ce qui se passera dans les autres secteurs à irradier reste encore un mystère. Le N.U.K.E est indubitablement la meilleure idée du jeu et l'on espère sincèrement que cela préfigure de belles choses pour l'avenir.
Rencontre du troisième trip
La progression du personnage se retrouve également bouleversée, avec un nouveau système assigné aux fameux atouts S.P.E.C.I.A.L., sous forme de cartes de compétences à échanger et qui seront distribuées à chaque niveau. Un principe qui met en avant la collectionite et la RNG pour les résultats de l'ouverture des boosters, avec une limitation de niveau pour les plus puissantes d'entre elles. L'idée d'échanger et partager des compétences est plutôt sympathique dans l'essence, mais, car oui il y a souvent un mais avec F76, cet ensemble de mécaniques manque encore de profondeur et de clarté. Seule la statistique charisme sort du lot, puisque avec quelques points il vous sera possible de partager les effets de vos autres cartes avec le reste de votre groupe, plutôt sympa. Malgré tout, l'équipement est beaucoup plus important et impactant, même si là encore, le jeu n'aide pas forcément à ce que l'on s'y investisse convenablement : parmi les reliquats de Fallout 4 que nous évoquions déjà un peu plus haut, il y a l'interface au Pip-Boy. Et là les amis, c'est le drame !
Le véritable jeu de survie n'est pas celui que l'on croit : réussir à se dépatouiller avec les journaux de quête de 3 kilomètres de long et les fenêtres d'équipement antédiluviennes est une épreuve autrement plus risquée que de se frotter aux radiations d'un écorcheur. On exagère un peu, évidemment, reste que ce HUD omniprésent et cette boussole loin, très loin d'être pratique vont être la cause de nombreux agacements. Côté bugs, le jeu tourne correctement sur PC et s'il demeure quelques goules encastrées dans les murs et autres objets qui se mettent à s'envoler sans raison valable, le résultat est plutôt propre en considérant le passif du studio à ce sujet. Alors attention, cela ne veut pas dire que vous êtes tiré d'affaire pour autant, les déconnexions de serveurs et les containers qui refusent de charger leur contenu peuvent encore arriver.
D'un point de vue purement technique : si vous avez acheté une 2080ti pour jouer à F76, vous vous êtes fait rouler : sans être vilain, le résultat est beaucoup trop proche de Fallout 4, et de l'eau a coulé sous les ponts depuis, surtout lorsqu'il s'agit de mondes ouverts. Cependant, le soft réussit à tirer son épingle du jeu grâce à son atmosphère réussie, son bestiaire varié et à son excellente bande-son, comme d'habitude aurait-on envie de dire. Quant aux fans de Fallout, difficle de ne pas les imaginer soupirer lorsqu'ils constateront qu'une grande partie des assets graphiques du jeu proviennent de Fallout 4. L'ambiance, les décors, l'interface... Tout y est absolument identique, même les robots, seule véritable présence du monde en dehors des 24 joueurs.
Eh oui, on était prévenus, pas de PNJ. Et pour être tout à fait honnête, cela n'aurait pas été dérangeant si les bots n'agissaient pas eux-même comme des donneurs de quête : ce sont des PNJ, et il y en a absolument partout. Le travail de Bethesda pour adapter sa formule au multijoueur transpire de bonnes intentions et il est même possible de s'y amuser facilement sur de courtes sessions, cependant, les choix de game-design étranges de ce genre se mêlent aux tares habituelles des open-world du studio (bugs, interface mal fichue, mécaniques RPG de plus en plus simplistes) pour un résultat qui n'est pas à la hauteur de la saga Fallout, du moins pour le moment.