Nous sommes habitués depuis longtemps aux nombreux titres dérivés des jeux principaux Persona, que cela soit de la baston (Persona 4 Arena Ultimax), de l'exploration de labyrinthes (Persona Q), un beat them all (Persona 5 Strikers) ou même un jeu de rythme (Persona 5: Dancing in Starlight), il y en a eu pour un peu tous les goûts. Atlus continue de surfer sur le succès de Persona 5 Royal et ceux qui attendent Persona 3 Reload et une éventuelle l'annonce de Persona 6 peuvent se consoler avec un spin-off orienté vers la tactique cette fois avec Persona 5 Tactica, même si cela ne correspondra pas forcément à l'image que tout le monde s'en fait.
- Genre : RPG Tactique au tour par tour
- Date de sortie : 17 novembre 2023
- Plateformes : PC (Steam), PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series, Switch
- Développeur : Atlus
- Éditeur : Seta / Atlus
- Prix : 59,99€
- Testé sur : PC
Café à emporter
Comme toujours, la petite bande de lycéens composant les Voleurs fantômes de Persona 5 Royal se retrouve embarqué dans un nouveau monde étrange alors qu'ils étaient réunis chez Leblanc, pour des raisons incompréhensibles. Privés de la majorité de leurs pouvoirs, ils doivent s'allier à l'armée rebelle, pour faire face au tyran local et à ses troupes. De nouveaux alliés sont aussi introduits, dont certains plutôt inattendus, ce qui donne une bouffée d'air frais aux interactions au sein du groupe. L'aspect social de Persona 5 disparaît complètement, mais les dialogues sont nombreux et on retrouve bien l'esprit de la licence, avec une saine dose d'humour.
Mais les changements drastiques de character design, qui donnent des personnages à l'apparence enfantine, font qu'il est encore plus difficile que d'habitude de prendre quoi que ce soit au sérieux. En contrepartie, il n'y a plus à hésiter, et on peut choisir les réponses les absurdes lors des dialogues, pour le plaisir de troller son équipe sans craindre de perdre des points de relation. Cela devrait aller sans dire, mais il vaut mieux avoir joué à Persona 5 pour connaître les personnages et suivre l'intrigue. Il n'y a néanmoins pas besoin de la comprendre si c'est l'aspect tactique qui vous intéresse, puisque le jeu est linéaire, avec une histoire et une structure assez simples.
Plan à trois
Dans les très grandes lignes, Persona 5 Tactica nous fait fortement penser à Mario + The Lapins crétins, un autre spin-off tactique de licences populaires. On retrouve le même format avec une équipe de trois membres à choisir dans une équipe plus large, différents types de flingues, des arbres de talents similaires, et une large variété d'actions spéciales, sans oublier un système de couvertures derrière les obstacles. Les tuyaux sont remplacés par des échelles, et on retrouve rapidement différents outils pour déplacer les ennemis et ses personnages afin de créer des combos dévastateurs.
Un élément assez inhabituel est que les couvertures sont quasiment omnidirectionnelles, ce qui est contre-intuitif au départ. Être pris à revers n'est pas un problème. Pour qu'un ennemi ou un Voleur fantôme ne résiste plus aux dégâts, il faut qu'il soit attaqué en mêlée ou éjecté de sa position pour le rendre vulnérable. En contrepartie, être touché sans être à couvert déclenche un "One More" comme dans Persona 5, une attaque bonus gratuite. En exposant plusieurs ennemis, cela permet à votre équipe d'enchaîner les actions et de balayer le champ de bataille. Mais ces mécanismes s'appliquent pour tout le monde, et les ennemis risquent de rapidement vaincre un membre équipe en cas d'erreur.
Heureusement, ce n'est pas Fire Emblem, et vous pouvez remplacer vos unités tombées au combat un certain nombre de fois par les autres personnages durant chaque mission. Le nombre de rotations autorisées dépendant du niveau de difficulté. Même au niveau de difficulté maximum, Persona 5 Tactica n'est pas spécialement difficile. Des objectifs optionnels, comme terminer les batailles en un nombre de tours limités, et sans subir de K.O permettent de récompenser un bon niveau de jeu. Cela donne aussi des raisons de rejouer les vielles missions, en plus de donner l'opportunité de récolter davantage d'expérience et d'argent pour les joueurs en difficulté. Persona 5 Tactica n'est pas simpliste pour autant, et de nombreux mécanismes sont à prendre en compte pour vraiment dominer l'ennemi.
Par exemple, les tirs alliés sont un plus gros problème qu'on pourrait le croire. Vous pouvez potentiellement ravager votre équipe avec une grosse AoE dévastatrice lancée par votre Persona, ou vous pouvez flinguer le pauvre chat Morgana par erreur en tirant à l'Uzi avec Ann. Il faut bien réfléchir au positionnement et à l'ordre des actions du groupe, ce qui compense sa taille réduite. Il vous faudra aussi exploiter pleinement l'attaque spéciale du groupe, nommée "All Out Attack", qui consiste à former un triangle autour d'un ennemi à terre. Cela va déclencher une attaque de zone dévastatrice, touchant tous les ennemis à l'intérieur sous forme de dégâts collatéraux. La beauté de la chose est qu'il est théoriquement possible de balayer la moitié de la carte de cette manière si le groupe est bien placé.
Les batailles sont terminées rapidement, puisqu'elles ne durent que rarement plus que quelques tours, mais sont nombreuses pour compenser. Il y a aussi plusieurs manières de les aborder en fonction de la composition du groupe, et des choix faits dans la sélection de vos armes et de vos Personas. Joker ne peut plus se balader avec un stock de Personas qu'il change à la volée, à la place, presque tous les membres du groupe peuvent équiper une Persona secondaire que vous avez fusionné dans la Chambre Pourpre. Le système est plus simple que dans les jeux principaux, et un seul pouvoir peut être hérité, mais cela permet tout de même d'altérer radicalement les capacités d'un personnage.
Si on y ajoute leurs arbres de talents respectifs, un bonus passif et une capacité ultime, les possibilités s'avèrent au final riches. Les objectifs des batailles sont plutôt variés, ce qui est appréciable, et permet de donner l'occasion à différents membres de l'équipe de briller : évacuation, escorte, élimination de tous les ennemis, boss, etc. Le bestiaire est limité au départ, mais il gagne en variété au fil du temps. Mentionnons aussi la présence de quêtes, des petites batailles facultatives proposant de jouer avec un groupe prédéterminé, afin de résoudre ce qu'on peut considérer être un puzzle tactique. Il vous faudra généralement remporter la victoire en un ou deux tours, ce qui demande d'accomplir la bonne série d'actions.
Même si les vétérans ne vont probablement jamais suer pour remporter une bataille en remplissant toutes les conditions bonus, on n'a jamais l'occasion et s'ennuyer pour autant. La progression dans la petite histoire de Persona 5 Tactica permet de débloquer régulièrement de nouveaux pouvoirs, Personas et défis, ce qui évite de tomber dans la routine et de toujours utiliser la même formule gagnante. On se laisse aussi volontairement porter par l'histoire riche en action et en personnages un peu bêtes mais attachants. La durée de vie est aussi très correcte, même si elle n'est pas non plus exceptionnelle, et la rejouabilité est relativement faible à moins de s'imposer des contraintes.
Switch member
Ce n'est pas une opinion qui sera partagée par tout le monde, mais comme Persona 5 Strikers, Persona 5 Tactica est destiné à souffrir des choix du studio en termes de plateformes, et de prix. On ne va pas se plaindre du fait qu'il soit disponible sur presque toutes les plateformes de jeu modernes, mais ses graphismes et son design ont clairement été pensés pour la machine la moins puissante du lot : la Nintendo Switch. Les graphismes sont très simples voire pauvres, et dans ce contexte, le choix du design chibi semble logique puisque les deux s'accordent mieux ensemble.
Ce qui s'avère un peu frustrant est qu'on a droit à des écrans de chargement entre les différents menus comme la Chambre de velours, la boutique, etc. Même les champs de bataille ont droit à un temps de chargement notable, malgré leur taille réduite. Sur Switch, cela peut être acceptable, mais quand on y joue sur PC ou sur PS5 par exemple, cela donne la désagréable impression d'avoir payé un "petit" jeu au prix d'un AAA, au lieu des 30 à 40 euros normalement demandés pour ce niveau de réalisation. Hogwarts Legacy n'aurait probablement pas rencontré le même succès si la version Switch avait été vendue à ce prix sur toutes les plateformes. Les musiques et le doublage intégral à la fois en anglais et en japonais aident à compenser dans leur domaine, mais la pilule a du mal à passer, surtout lorsqu'il faut compter 20 euros de plus pour les DLC de la version Deluxe.
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