La Corée du Sud est souvent, à juste titre, considérée comme un pays modèle en matière de promotion du sport électronique. Initiée sur StarCraft Broodwar, cette politique générale a clairement permis à la scène eSport de se développer et cela continue aujourd'hui via League of Legends ou Heart of the Swarm par exemple. Toutefois ce modèle pourrait bien être remis en cause un jour, car si la classe politique a su pousser lors de la création de ligues comme la KeSPa, elle peut tout aussi bien faire machine arrière. C'est ce qui semble se passer ces derniers temps, avec des discours de plus en plus réticents de certaines personnalités qui souhaitent lutter contre les addictions, plaçant ainsi les jeux vidéo au même niveau que l'alcool ou les drogues illégales.
Et si l'Eldorado de l'eSport n'était plus ce qu'il était ?
Le mois dernier c'est donc Hwang Woo-yea, un politicien faisant partie de la majorité des conservateurs, le parti Saenuri, qui a remis ce sujet à l'ordre du jour. Dans une déclaration reprise par le portail coréen ThisIsGame, Hwang parle de son souhait de sauver la société du mal qui la ronge.
Hwang Woo-yea à propos de l'addiction en Corée du Sud (Traduction - Source)
Selon le ministère du Bien-être, il y a quatre catégories majeures d'addictions nécessitant un traitement médical : l'alcool pour 2,18 millions de personnes, 470 000 joueurs en réseau, 590 000 joueurs de casinos et autre jeux de hasard et 90 000 toxicomanes. La somme de ces données représente 6,7% de la population coréenne, ce qui cumulé nous donne 3,33 millions de personnes. Ce pays doit être protégé contre ces quatre addictions majeures. Nous devons comprendre la souffrance individuelle et celle des familles victimes de l'alcool, de la drogue, du jeu et d'internet afin de les soigner. Ceci nous permettrait de vivre dans un environnement plus sain et nous pourrions protéger notre société de ces démons.
Hwang appelle donc à une stricte régulation dans le développement des jeux en Corée du Sud. Bien entendu les industriels ne sont pas heureux de cette situation. Le projet de loi concernant l'addiction n'est toujours pas passé et les lobbys vont très certainement faire leur job pour le modérer, voire le supprimer. Quoi qu'il en soit le parti conservateur Saenuri semble ne pas vouloir lâcher le morceau tant cette question est centrale actuellement chez nos voisins asiatiques. De plus comme ils possèdent la majorité, ils pourraient très bien passer outre les lobbys s'ils le souhaitaient. L'actuelle présidente de la Corée, Park Geun-hye, est d'ailleurs elle aussi une membre du parti Saenuri et elle souhaite également aller dans le sens de la sanction.
La jeunesse joue beaucoup, le phénomène s'est toutefois amplifié avec les smartphones
Déjà frappées par la « Shutdown Law » l'année dernière, loi empêchant aux mineurs de se connecter durant certaines heures, de nouvelles sanctions pourraient ainsi voir le jour en Corée afin de protéger les joueurs de l'addiction qui les touche par centaine de milliers. Ce genre de discours n'est toutefois pas nouveau en Corée du Sud. Plus tôt au printemps un projet de loi voulait calquer le modèle du contrôle des jeux vidéo sur celui de l'alcool et de la drogue. De plus le mois dernier le ministre de la santé coréen a déclaré qu'il souhaitait placer l'addiction aux jeux vidéo au même niveau que la toxicomanie. En faisant cela, les joueurs malades passeraient dans la catégorie des malades mentaux, ce qui pourrait par voie de conséquence aider à faire valider la loi proposée par Hwang Woo-yea.
Jun Byung-hun (politicien et président de la KeSPa) dans la peau de Gragas
Dans un pays que beaucoup prennent pour modèle et qui a fait du sport électronique un véritable métier, les bureaucrates et autres politiciens semblent avoir pris pour cible l'univers des jeux vidéo. Entre liberté totale et contrôle abusif, il faut savoir trouver un juste milieu, certains préférant malgré tout aller du côté du répressif à outrance. L’essor énorme que connait l'industrie du jeu vidéo en Corée -le pays avait notamment été le premier à être saturé en téléphones portables cette année- a forcément poussé la classe politique à se pencher sur ce problème national. Mais ne les accablons pas déjà, rien n'est encore validé chez eux et n'oublions pas que certains des hommes politiques du pays sont également connus pour adorer les jeux. On pense notamment à ce membre du congrès accessoirement président de la KeSPa, Jun Byung-hun, qui s'était déguisé en un personnage de League of Legends le mois dernier. Les jeux vidéo et l'eSport gardent ainsi des alliés de poids qui pourraient bien leur être utiles dans un avenir très proche !