Qu'il est bon de partir en découverte totale d'un jeu sans qu'aucune communication ne soit venue parasiter le plaisir de ladite découverte. C'est devenu mission impossible, mais bien heureusement un nouveau modèle de publication des jeux est apparu ces dernières années : le shadow drop, ou sortie surprise, qui consiste à sortir le jeu directement au moment de son annonce. On avait déjà eu une excellente surprise avec Apex Legends début 2019 et, donc, rebelote début 2023 avec Hi-Fi Rush, la nouvelle production de Tango Gameworks, le studio dirigé par le papa de Resident Evil 4. Tenez-vous prêts, parce qu'on est sur un titre capable de vous coller une mandale d'une magnitude quasi-inédite.
- Genre : Beat them up, jeu de rythme
- Date de sortie : 25/01/2023
- Plateforme : Xbox, PC
- Développeur : Tango Gameworks
- Éditeur : Bethesda
- Prix : 29,99€
- Testé sur : PC via Game Pass
Basse ton
Chai est ce que l'on pourrait appeler un boulet sympathique : déterminé à devenir une rockstar, il décide de rejoindre le Projet Armstrong qui greffe des prothèses cybernétiques aux employés de la méga-corporation Vandelay. Assigné à un bras dédié au transport des déchets, le jeune homme va voir sa vie transformer lorsque sur le billard, son lecteur MP3 va s'immiscer dans l'opération pour se placer sur son torse. Dès lors, la moindre de ses actions et tout ce qui l'entoure vont se caler sur le tempo de la musique. Considéré comme une anomalie, Chai va vite devoir recourir à la violence pour espérer échapper à la sécurité féroce du campus Avec ses nouveaux pouvoirs, et l'aide d'un mystérieux chat robot nommé 808, notre héros va décider de lever le voile sur les mystères qui entourent le Projet Armstrong, même si cela implique de se friter avec tous les chefs de département de la boîte ! Un scénario simple, original et mené au diapason grâce à un humour décapant et à une galerie de personnages attachants.
Pour claquer une référence que seuls nos lecteurs les plus âgés comprendront, il y a vraiment cette sensation de parcourir l'un des dessins-animés qui passaient le week-end à la télé : si le style graphique et la version française intégrale sans fausse note participent grandement à procurer cette sensation, les dialogues et les dizaines de gags visuels y sont également pour quelque chose, c'est certain. Et puis ça fourmille de références plus ou moins cachées à plein de belles choses comme Jojo, Twin Peaks, ou encore l'animé FLCL. Chaque chef de département est un arc scénaristique à lui seul et tous proposent des combats finaux aux mécaniques cohérentes par rapport aux clichés que véhiculent les boss de Vandelay. Aucun rebondissement abracadabrantesque dans Hi-Fi Rush, mais une pêche qui ne finit jamais de donner le sourire, du tout début du jeu au endgame fourni de quelques nouveaux éléments scénaristiques.
Omar ça riff
Pour le résumer très grossièrement, Hi-Fi Rush est un mélange de Devil May Cry et de jeu de rythme. On est sur une structure très classique, avec des stages entrecoupés de retours à la planque, dans laquelle vous pourrez acheter nouveaux combos et puces d'amélioration. On est donc sur quelque chose de très linéaire et qui va compter sur ses très nombreux secrets et son système de scoring pour booster sa rejouabilité over 9000. Et ça marche du tonnerre : pendant les 8 à 10 heures qu'il vous faudra pour terminer le jeu une première fois, jamais le rythme ne faiblit et de nouveaux éléments de gameplay sont injectés en permanence. Si Chai ne pourra compter que sur quelques combos, une esquive et un saut au tout début du jeu, son moveset va se voir décupler au fil des chapitres : parade, combos aériens, grappin façon Nero, attaques en duo... On ne va pas vous faire la liste complète, mais ce que Tango Gameworks a réussi à faire est absolument maboule : en plus d'être un excellent beat them up, c'est aussi une démonstration épatante de ce que peut offrir le mariage du jeu et de la musique.
D'abord accessoires, les mécaniques rythmiques et le fait d'avoir à "sentir" le tempo deviennent primordiales, surtout dans les modes de difficulté les plus élevés. Mais pas besoin d'être un démon du rythme pour prendre son pied, puisque quoiqu'il arrive, vos attaques seront calées sur la musique, les pressions de touche au bon moment ne sont là que pour apporter des bonus et faire gonfler votre score (qui est un peu le but ultime du jeu). Il y a tant de sections mémorables dans sa douzaine de chapitres qu'on peut vous en citer quelques-unes sans risquer de trop vous gâcher l'expérience, on pense notamment à cette arrivée en fanfare dans une base ennemie au rythme de Invaders Must Die de Prodigy, ou à ce boss complètement fou sur un remix de la 5ème symphonie de Beethoven. Hi-Fi Rush sait toujours se rendre intéressant et il le fait avec une générosité à laquelle on n'est plus habitué, puisque même après avoir terminé le jeu vous débloquerez l'accès à la boutique de costumes là où beaucoup de grosses productions tomberaient dans le piège des micro-transactions faciles.
Mais dis-donc Jamie, tu serais en train de me dire que nous sommes face à un jeu parfait ?! Oula non, il y a bien quelques petits défauts qui trainent, mais ceux-ci sont écrasés par le poids de ses qualités. Histoire de faire le job jusqu'au bout, on se sent tout de même obligé de vous signaler que certaines phases de plates-formes sont maladroites, que les boucles de certains morceaux sont peut-être trop timides dans des sections bien précises du jeu et que certains checkpoints refont passer des dialogues impossibles à passer. Vous voyez, c'est pas grand chose et surtout, à aucun moment cela ne vient entacher le plaisir de jeu immense procuré par le dernier Tango Gameworks.
Claqué au solfège
En plus de tous les superlatifs utilisés jusqu'ici, il faut aussi ajouter à l'addition son celshading, qui est certainement le plus fin que nous ayons vu dans notre vie de joueur. Le style est épuré, pour laisser un maximum de visibilité aux éléments mouvants des niveaux (et ils sont nombreux) et aux animations complètement dingues du jeu. Chaque combat donne lieu à un feu d'artifices de couleurs et d'effets visuels façon BD pour un rendu qui se passe juste de tout commentaire. On note aussi les expressions de Chai et ses potes, qui renforcent l'attachement ressenti pour cette bande de losers au grand cœur, là aussi une réussite incontestable. Mais au-delà de toutes ces considérations visuelles, c'est évidemment le taf sur la musique qui est à se damner. Non content d'exhiber des têtes d'affiches de bon goût, HFR balance aussi du lourd côté compositions originales, avec les variations d'intensité qui vont bien, pour se synchroniser au diapason. Last but not least, vous serez très certainement heureux d'apprendre que les voix françaises du jeu sont de très grande qualité et ce pour tous les personnages. Décidément, Hi-Fi Rush ne rate pas grand chose.