Les grosses sorties se comptent sur le doigt d'une main au cours de cet été caniculaire, mais Xenoblade Chronicles 3 est là pour nous apporter notre dose de AAA, avec une aventure exclusive à la Nintendo Switch qui devrait vous tenir occupé plusieurs dizaines d'heures de jeu sans broncher. Après 70 heures et des brouettes en sa compagnie, voici notre avis définitif sur le dernier Monolith Soft.
- Genre : RPG japonais
- Date de sortie : 29/07/2022
- Plateforme : Nintendo Switch
- Développeur : Monolith Soft
- Éditeur : Nintendo
- Prix : 44,99€
- Testé sur : Nintendo Switch modèle OLED
La Guerre des Mondes
Scénario et univers
Sur Aionios, l'espérance de vie d'un être humain normal n'excède pas les dix années, qualifiées de périodes par ses habitants. Et au cours de leur existence, chacun de ces êtres vivants n'aura qu'un seul objectif : se battre, encore et encore, contre la nation d'en face. Sorte de Yin et de Yang de cet étrange monde, les nations de Keves et d'Agnus agissent de la même manière, en traitant leur peuple comme de vulgaires pantins qu'ils envoient au massacre encore et encore. Mais un groupe de héros va s'élever contre les règles injustes de l'univers, afin de changer à jamais le destin des deux nations. Un synopsis qui envoie du bois, il faut bien l'avouer, avec un contexte scénaristique original et un groupe de héros qui va se former très vite contrairement aux us et coutumes du J-RPG : le sextet composé de 3 héros de Keves et de 3 héros d'Agnus sera soudé après 2 petites heures de jeu. Un choix qui casse les habitudes et dont on ne sait toujours pas s'il est bien judicieux puisque, comme pour Xenoblade Chronicles 2, certains membres du casting ne vont pas avoir grand chose à développer côté personnalité. Mais pour que le gameplay fonctionne, il faut absolument que les combattants fonctionnent par paire pour se transformer en Ouroboros, la seule espèce capable de venir à bout des Moebius, de puissantes entités qui veillent à ce que le monde tourne comme ils l'entendent.
En trame de fond, c'est un lien entre tous les jeux de la trilogie qui se joue, mais grâce aux règles intrigantes du monde d'Aionios, ceux qui commenceraient par cet opus ne devraient avoir aucun problème à être happé par son scénario. On note quand même pas mal de faiblesses d'écriture tout au long de l'aventure, avec des héros trop bavards et qui ne se privent pas pour donner des leçons de vie à tous ceux qu'ils croisent. En particulier Noah et Mio, le duo principal, qui ont tendance à partir en grande tirade philosophique dès que la situation le permet. Ça ne gâche en rien les très nombreux moments de bravoure d'un voyage qui s'étale sur près de 60 heures en ligne droite, et même quelques séquences émotion, qui vont réussir à aller chercher le joueur grâce à sa mise en scène et à sa bande-son, menée de main de maître, malgré quelques faux raccords lors de certaines cutscenes.
Duos des cimes
Combats
Le système de combat de Xenoblade Chronicles 3 est tentaculaire et réussir à vous le décrire correctement ne va pas être une mince affaire. Pourtant Monolith Soft a retiré du gras en supprimant quelques finesses superflues afin d'en sortir une synthèse des deux précédents Xenoblade Chronicles, grâce aux spécificités des deux nations du monde d'Aionios. Côté Keves, les arts se rechargent avec le temps comme dans XC1, alors que côté Agnus, les techniques sont liées aux auto-attaques comme dans XC2. Jusque là, rien de trop complexe, mais c'est ici qu'interviennent les classes de héros : les six personnages sont capables d'apprendre toutes les classes du groupe et bien plus encore, ce qui fait qu'ils pourront utiliser les arts façon XC1 ou XC2, simplement en fonction du rôle qu'ils endossent. Ça ne s'arrête pas là, puisque les compétences apprises au cours de l'évolution d'une classe (rang max de 10 dans la plupart des cas), pourront être combinés avec ceux d'un autre job, pour un total de 6 arts actifs en combat : 3 de Keves et 3 d'Agnus, ou inversement, dont vous pourrez combiner les effets s'ils sont prêts en même temps.
Sachant que les bases solides de Xenoblade Chronicles sont toujours là, avec des arts à placer dans le bon angle afin de viser juste, pour déstabiliser votre adversaire ou lui causer davantage de dégâts par exemple. Un jeu de placement facilité par un petit indicateur placé juste au-dessus des fenêtres d'art, parfait pour indiquer dans quelle position vous vous trouvez. Toujours comme dans les deux premiers épisodes, le but du jeu va donc être de favoriser les combos d'arts entre les différents membres du groupe pour immobiliser l'ennemi et lui causer un max de dégâts. Une gymnastique qui revient vite et qu'il va être encore plus agréable de pratiquer dans cet épisode, puisque cette fois 6 personnages (+ 1 héros) seront simultanément sur le champ de bataille et qu'il est possible de changer de rôle à la volée très simplement (c'est même carrément conseillé). Fait surprenant d'ailleurs : malgré le boxon infâme causé par chaque combat d'envergure, l'ensemble parvient par miracle à rester lisible dans quasiment toutes les circonstances.
Deux autres couches de mécaniques sont à prendre en compte pendant les combats : les attaques en chaîne, gérées par une jauge qui va se remplir en fonction de vos exploits en combat. Plus vous casez de coups critiques et de techniques bien placées, plus cette dernière va avancer rapidement, jusqu'à ce que vous puissiez déclencher un assaut qui va geler le temps. Là aussi, le principe est directement repris des autres épisodes, mais son fonctionnement est inédit, avec des stratégies à choisir et un score à atteindre — voire dépasser — pour faire grimper un pourcentage de dégâts qui peut dépasser les 1000% lorsque les astres sont alignés. Enfin, chacun des trois duos de personnages est capable de fusionner en Ouroboros directement en plein combat : sous cette forme, les membres du groupe sont invincibles et ils disposent de 3 arts uniques et d'une technique signature dévastatrice.
D'autres petites subtilités sont à prendre en compte au cours de l'aventure, mais on se rapprocherait dangereusement du spoiler, alors on va éviter de les évoquer ici : comme d'habitude, nous reviendrons sur le gameplay du jeu en long, en large et en travers dans les guides que nous commencerons à publier peu après la sortie. L'ensemble des mécaniques de XC3 fonctionne très bien, mais ça commence quand même a bien tourner en rond une fois le dernier tiers de l'aventure atteint, la faute à des combats qui s'étirent bien trop en longueur et finissent par devenir fatigants. D'autant que comme son cousin Tales of Arise, XC3 n'hésite pas à délayer la sauce au cours de ses dernières heures, indigestes au possible.
Progression et exploration
Toutes ces capacités sont soutenues par des axes de progression clairs et configurables très facilement : les classes de vos personnages et l'équipement qui va avec sont à changer régulièrement. Heureusement les développeurs ont pensé à une touche pour équiper automatiquement tous les personnages d'un seul coup, ce qui va vous faire gagner un temps fou en cours de partie. XC3 garde également toutes les bonnes idées de ses prédécesseurs, avec de l'expérience spéciale à utiliser (ou non) aux différents feux de camp du jeu, une très bonne idée pour garder le challenge des combats intact si vous avez décidé de nettoyer les nombreuses quêtes annexes du jeu. A ce propos, il y a toujours une belle fournée de missions Fedex sans réel intérêt, mais Monolith Soft a quand même soigné certains des fils secondaires liées aux fameux héros. Ces figures secondaires sont le seul moyen de débloquer de nouvelles classes pour le groupe, il va donc falloir en faire une priorité si vous comptez profiter de toutes les possibilités offertes par le gameplay. Vous en croiserez beaucoup au fil de l'intrigue principale, mais certains de ces héros seront à dénicher au cours d'une exploration plus poussée du monde d'Aionios.
Ce troisième épisode fait honneur aux prédécesseurs, puisqu'il est très agréable de parcourir chacun des biomes de cette nouvelle carte découpée en plusieurs zones de (très) grande taille. De nombreux points de téléportation sont disséminés un peu partout, il y a tout ce qu'il faut en raccourcis pour accéder simplement aux quêtes, à la map et à la personnalisation du groupe. Petite originalité, certaines portions sont inaccessibles à moins d'avoir trouvé le bon héros associé à la compétence de terrain qui va bien, comme l'escalade de lierres ou la glissade sur les longs rails visibles à certains endroits. Enfin, qu'on se le dise, ce "petit truc" en plus ne transfigure pas l'exploration de XC3, qui reste très classique, mais qui parvient à aller à l'essentiel en ne se surchargeant pas de points d'intérêt, sans intérêt justement. La cuisine ou les fameuses batailles entre ennemis dans lesquelles vous pourrez choisir votre camp, sont des petites friandises qui se consomment avec plaisir tout au long du voyage. Enfin, à part l'éther, aucune ressource spéciale ne viendra encombrer votre inventaire et la récolte d'éléments pour l'encyclopédie change un peu de forme, puisque c'est désormais les PNJ qui vous demanderont une petite liste de courses dans chaque région.
Fracture planétaire
Technique et direction artistique
Après le bilan technique catastrophique Xenoblade Chronicles 2, on se demandait sincèrement si Monolith Soft allait réussir à nous sortir un jeu au confort visuel acceptable. Xenoblade Chronicles Definitive Edition et son DLC donnaient déjà quelques éléments de réponse sur leur maîtrise du hardware et c'est avec joie que nous pouvons confirmer aujourd'hui que XC3 est l'un des jeux les plus solides de la Nintendo Switch sur le plan technique. Alors attention, on se calme tout de suite, les 30 images par seconde ne sont pas tenues 100% du temps et l'aliasing peut encore piquer les yeux à l'occasion, mais par rapport à XC2, c'est le jour et la nuit ! D'autant que le jeu ne se prive pas pour nous refaire le coup de ses prédécesseurs, avec des zones absolument gigantesques aux panoramas parfois si imposants qu'ils écrasent le joueur de tout leur poids. Y a quelques moments "wow" au cours de la traversée d'Aionios, mais la mappemonde bien plus classique qu'auparavant, ainsi qu'un petit manque d'identité dans certains coins de la carte, nous font regretter Bionis et Mékonis. Dans le même registre, le consul et ses Moebius n'ont pas des designs très intéressants et il est difficile de se sentir investi par l'élimination d'une menace avec si peu de charisme.
On note tout de même l'effort de Monolith de proposer une zone plus ouverte que les autres, à traverser d'une manière un peu plus originale que nous ne dévoilerons pas ici, mais là encore, on est bien loin des deux titans de XC1 ou du monde ouvert de XCX, l'opus WiiU. Plus fragmenté, moins cohérent, Aionios est un monde que vous devriez quand même prendre plaisir à explorer, ne serait-ce que pour découvrir ses thèmes musicaux, bien souvent à tomber par terre, comme il est de coutume avec la licence. On reprochera tout de même à cette bande-son de griller toutes ses cartouches en très peu de temps, ce qui fait qu'après plusieurs dizaines d'heures de jeu, certains thèmes finissent simplement par lasser. Autre bémol déjà évoqué en début de test, parfois la synchronisation ou tout simplement le choix de la musique ne collent pas du tout avec la séquence en cours : ça détonne et ça peut éventuellement casser un peu l'immersion.