Sorti début 2014, Hearthstone : Heroes of Warcraft a presque instantanément frappé un grand coup dans l'écosystème des CCG (Collectible Card Game). Le lore de la licence mythique de Blizzard aidant à construire sa base de joueurs, plus de 100 millions de comptes ont été créés depuis. Sept ans après, voici notre avis sur ce que le jeu est devenu.
- Genre : CCG (Collectible Card Game)
- Date de sortie : 11 mars 2014
- Plateforme : PC, iOS, Android
- Développeur : Blizzard Entertainment
- Éditeur : Blizzard Entertainment
- Prix : free to play avec microtransactions disponibles
- Testé sur : PC & iOS
L'expérience traditionnelle Hearthstone
Pour les anciens qui n'auraient pas remis les pieds sur Hearthstone depuis quelques années, oui, le jeu a perdu son sous-titre "Heroes of Warcraft" depuis maintenant trois bonnes années, histoire d'épargner les puritains du lore de World of Warcraft justement, et pour laisser libre cours aux délires plutôt géniaux de l'équipe artistique. Le menu global a lui aussi changé, pour aboutir à ça !
Et c'est justement là qu'on réalise que Hearthstone n'est plus maintenant qu'une petite partie d'un grand ensemble, une sorte de hub destiné à couvrir toutes les envies des amateurs de jeux mobiles de l'univers Warcraft. Ces autres modes seront traités et critiqués un peu plus tard, place pour le moment à l'essence du jeu, le CCG.
Standard
Le mode Standard est ce que l'on pourrait appeler "le Hearthstone de base", sans aucune connotation péjorative. Si après 3 ans de jeu il n'existait toujours pas de rotation Standard telle qu'on la connaît actuellement, les joueurs s'y sont maintenant faits et attendent le mois d'avril de chaque année comme une délivrance. Car dit qui nouveau pool de cartes Standard dit énorme changement de méta, et donc un vent de fraîcheur sur un jeu qui a tout de même plus de 7 ans à l'heure où l'on écrit ces lignes. Certes, beaucoup de joueurs ont un peu déserté les rangs du Standard depuis l'arrivée de Battlegrounds, mais la compétition en Masters Tour et aux GrandMasters se fait en Standard. Par contre, 2022 sera un énième gros tournant pour l'esport Hearthstone, étant donné la fin de cette ligue fermée et l'arrivée de la compétition sur Battlegrounds.
La Team 5 s'occupe toujours très bien de son bébé, et même bien mieux qu'avant. Car si l'on n'avait "que" 2 extensions et 1 aventure par année dans les premiers temps, le rythme a bien augmenté et les joueurs ne peuvent — à l'heure actuelle — plus se plaindre de la passivité des développeurs. Trois extensions par an, chacune assortie d'un mini set, et au moins une ou deux grosses vagues d'équilibrages : la méta est sans cesse renouvelée, et on peut leur tirer un grand coup de chapeau pour cela. Moralité : "c'était pas vraiment mieux avant".
Libre
Le format Libre est vraiment le format dans lequel il ne faut surtout pas jouer en espérant jouer des duels équilibrés et des parties haletantes. Au fur et à mesure des années et des extensions, les développeurs ont affirmé leur volonté de ne plus laisser trop de place aux serviteurs avec Charge, ou encore aux decks totalement orientés Combo. S'il est vrai que ces mécaniques ont quasi intégralement disparu du Standard, elles sont par contre de plus en plus présentes en Libre, là où toutes les cartes du jeu sont jouables. Avec un pool d'environ 2 500 cartes, il y a vraiment de quoi se faire plaisir et de quoi martyriser son adversaire. Et inversement ! Encore une fois, n'espérez pas passer un bon moment à chaque fois si vous vous aventurez en Libre, vous risqueriez d'être déçu si vous mourez au tour 4 alors que votre plan de jeu n'a, lui, même pas encore démarré.
Si Blizzard a parfois organisé des tournois dans ce mode, cela fait bien longtemps que ce n'est plus le cas.
Arène
En tant que premier mode alternatif au ladder, l'Arène a eu son heure de gloire pendant plusieurs années. C'était (et c'est toujours) un plutôt bon moyen de gagner des pièces d'or pour conserver un compte free to play, sous réserve d'en connaître les subtilités. Les développeurs, Dean Ayala en tête, ont passé un temps infini à modifier les taux d'apparition de telle ou telle carte — lors de chaque draft, ou encore à changer la composition des "buckets" de cartes proposés. Rien n'y a vraiment fait, et après plusieurs années, ce mode a été vraiment délaissé par le plus grand nombre, à part pour finir son farming de hauts faits. Même Oliech n'y joue quasi plus jamais, c'est dire... Malgré tout, si vous débutez sur Hearthstone, l'Arène est un bon plan pour apprendre les bases — à la dure, certes — de la prise de board et de son importance.
Duels
Héritier des Virées en Donjon qui étaient arrivées avec Kobolds & Catacombes, le mode Duels est arrivé avec l'extension Académie de Scholomance. Et on imagine que les développeurs lui auraient préféré un avenir plus radieux. Il est difficile de trouver les statistiques exactes, mais à part Tars chez Solary, personne ou presque ne joue à Duels en stream — en dehors des farmeurs de hauts faits. Et cela reflète malgré tout une large partie de la communauté globale du jeu. Un mode malgré tout très répétitif tant certains pouvoirs héroïques sont mal équilibrés et donc indispensables, mais aussi trop aléatoire et dont la finalité changera du tout au tout selon les passifs et trésors que vous récupérerez.
Les développeurs y consacrent néanmoins beaucoup de temps, y ajoutent régulièrement des nouveautés (comme Diablo dernièrement, le premier héros double classe Guerrier/Démoniste), et corrigent les plus gros bugs ainsi que plus grandes inégalités en passant par des équilibrages "à la machette".
Bras de fer
Fidèle à ce qu'il était au tout début, le mode Bras de Fer est essentiellement là pour apporter un booster gratuit par semaine à tout joueur qui en a besoin pour sa collection. Avec un seul haut fait lié à ce mode de jeu, il est certain qu'il n'aura pas beaucoup de succès. Certains Bras de fer se révèlent très fun, d'autres ont vraiment une mini méta qui leur est propre. Une fois les 500 victoires atteintes et si vous avez une collection assez remplie, vous ne devriez plus y mettre très souvent les pieds, d'autant plus que le mode est bien plus caché qu'avant car il n'est plus sur l'écran d'accueil directement.
Aventures solo
Si les premières aventures solo avaient vraiment un sens par rapport au lore de World of Warcraft, les dernières n'en ont plus trop. Mais leur format a tellement changé, et pas pour le meilleur, qu'on est forcément déçu à l'heure actuelle quand on parle d'Aventures. Auparavant, on parlait de combats épiques (en Normal et Héroïque) dans Naxxramas potentiellement des heures durant pour récupérer les quelques cartes disponibles. Maintenant, on parle juste de mini-sets sans aucune progression. Par contre, ceux-ci ont la bonne idée de révolutionner à chaque fois un peu la méta à l'aide de quelques cartes déterminantes. Du plaisir en moins, mais une méta qui bouge plus souvent : on souhaiterait avoir les deux à la fois, mais il y a tellement de choses à faire maintenant sur Hearthstone que ça ne doit plus être une priorité pour les devs. Et au final, ils ont sans doute raison.
Et pour cause, la Team 5 ne se limite plus seulement au simple jeu de cartes, mais a depuis maintenant presque 2 ans rajouté le mode Battlegrounds (Champ de bataille) au menu principal.
Blizzard a aussi son auto-battler : Hearthstone Battlegrounds
La mode des auto-battler est arrivée avec Autochess, Dota Underlords, et finalement Teamfight Tactics de Riot Games. Blizzard se "devait" d'avoir aussi sa version, mais personne n'avait anticipé un lien aussi fort avec Hearthstone. Et au final, c'est sûrement très bien vu. Les développeurs intègrent des nouveautés à Hearthstone, qui sont parfois portées et adaptées sur Battlegrounds, et inversement. Les statistiques et mots-clés sont les mêmes, et tout cela permet avant tout de ne pas inciter les joueurs à sortir du "launcher" à part entière qu'est quasiment devenu Hearthstone. La seule subtilité et difficulté réelle du mode — en dehors de devoir tryhard pour optimiser au mieux son économie et prendre les bonnes décisions d'achat —, c'est de connaître par cœur les niveaux de taverne respectifs de chaque serviteur, ou encore les forces et faiblesses de chaque héros du lobby.
A la différence de ses concurrents, Battlegrounds est simple à prendre en main, requiert extrêmement peu de connaissances pour s'amuser un minimum, et possède la base de joueurs potentiels du CCG le plus joué du monde. Rien que ça. Tant et si bien que, aux yeux de très nombreux joueurs — très souvent, plus de 50 % des streams Hearthstone actuels sont dédiés à Battlegrounds —, ce mode est devenu le plus important, dépassant le Standard et sa méta certes plus souvent figée.
Et Blizzard ne s'y trompe pas puisque, même si le mode est toujours considéré en beta après presque deux ans, les mises à jour de contenu (nouveaux héros en lien avec les extensions du jeu de cartes, nouveaux serviteurs, équilibrages...) sont très régulières. Autre gros point positif : le mode est totalement free to play, les avantages liés à l'argent réel jouant seulement sur les cosmétiques et sur le potentiel de choix du héros.
Le dernier arrivé : Mercenaires
Pour clore ce festival de modes et de types de jeux, Blizzard a abattu une dernière carte à la mi-octobre 2021 : Mercenaires. Encore une fois, à la manière de Battlegrounds, ce mode de jeu est totalement autonome, ne se joue pas directement avec les cartes du jeu de base, et possède son propre bouton sur le launcher : un haut fait pas à la portée de tout le monde. Et pour cause : il est supposé rendre encore plus rentable le jeu qui l'est déjà le plus dans le catalogue Blizzard (on tient compte ici de la taille de la Team 5, bien moins grande que celle des développeurs World of Warcraft, qui rapporte énormément avec ses abonnements et lancements d'extensions). Un modèle emprunté au style gatcha, qui n'en abuse pas forcément non plus, comme le dit très bien Zorg dans sa critique — constructive — du modèle économique. La principale différence avec les concurrents du genre ? La possibilité de farmer des ressources à l'infini, tandis que les autres ne permettent de faire qu'un nombre de runs limité. Et rien que ça, ça préserve potentiellement les joueurs de toute dépense : et en général, ça contribue à rendre un gatcha tout au moins "moins impopulaire" que ses congénères, en Occident.
Une belle progression sur pas mal d'aspects
Encore une fois, pendant de très et trop nombreux mois et années, Hearthstone s'est cantonné au rôle de "simple" CCG qui ramenait de l'argent dans les caisses de Blizzard seulement une fois tous les 4 mois. Et la communauté étant plus âgée — et donc potentiellement avec un portefeuille plus garni — que sur de nombreux autres jeux, il y a fort à parier qu'il y a eu un manque à gagner immense pendant tout ce temps. Depuis bientôt deux ans maintenant, Blizzard a intégré énormément de cosmétiques divers et variés à tous ses modes de jeu Hearthstone : 125 skins de héros au total à l'heure actuel (contre... tout juste 20 disponibles après 4 ans de jeu), des skins de Pièce liés aux hauts faits de collectionnite aiguë, des packs de cosmétiques pour Bob le Barman et pour les héros de Battlegrounds... On mentionne aussi le Passe de combat qui a révolutionné la notion de grind dans le jeu depuis plus d'un an, ainsi que les avantages Battlegrounds : et après un peu de tatonnements et d'ajustements, les joueurs sont bien mieux récompensés qu'à l'époque, en termes de pièces d'or, portraits de héros, boosters et autres cosmétiques. Ce Passe de combat est une manne d'argent qu'on imagine énorme pour Blizzard Activision, et du plaisir pour les yeux et des récompenses à foison pour les tryharders. Clairement, on aime et on adore l'inutile et l'indispensable, surtout que ça n'altère en rien l'expérience de jeu des gens qui ont envie de rester free-to-play.
Dans la même veine, la boutique est bien plus avenante qu'à l'époque, et permet parfois de se payer des anciens dos de cartes de l'époque pour la collection, ou encore des héros alternatifs comme Sylvanas, Khadgar ou Maiev, le tout contre des pièces d'or du jeu. Il est aussi possible de remettre la main sur tous les types de boosters depuis le lancement du jeu, tout comme sur toutes les aventures depuis La Malédiction de Naxxramas. De même, depuis l'arrivée de Battlegrounds dans le paysage, c'est aussi là que vous pourrez trouver les skins des héros. Toujours du pur cosmétique, qui n'a donc aucune incidence sur le gameplay, et c'est au final le principal. De son côté, Mercenaires possède sa propre boutique (jetons d'expérience, skins, boosters) incorporée à son menu, et cela évite de surcharger les autres.
Et enfin, pour en finir avec les nouveautés agréables survenues depuis la sortie du jeu, on peut citer l'arrivée des hauts-faits. Présente sur World of Warcraft depuis Burning Crusade, cette fonctionnalité aux allures insignifiantes fait gagner au jeu des heures et des heures d'une "durée de vie" plus ou moins artificielle. En effet, cela force les joueurs les plus fans de ce concept à jouer des decks et des synergies dont ils n'ont pas forcément l'habitude, et augmente juste artificiellement le temps passé sur le jeu. Mais le sentiment d'accomplissement est bien présent, tant côté collection que gameplay et persévérance. On était en droit d'attendre que cela arrive bien plus tôt, mais la machine est maintenant lancée, et elle ne devrait jamais plus s'arrêter.
Des manques qui subsistent depuis la nuit des temps
Tout ne peut pas être aussi rose, et malgré sa variété de modes de jeu et ses progrès énormes depuis maintenant plusieurs mois et années, Hearthstone a toujours quelques soucis récurrents. Tout d'abord, la "technique" : que ce soit sur le jeu d'origine ou Battlegrounds (et sûrement Mercenaires au final...), personne ne peut affirmer que le jeu est une vraie réussite technique. Des animations parfois bien trop longues qui peuvent ruiner des parties, des saccades potentielles un peu partout et qui arrivent sans prévenir... On a parfois le sentiment qu'il faudrait repartir sur un Hearthstone 2.0 une bonne fois pour toutes, en se débarrassant du code de ce premier opus, qui était à l'origine prévu pour être un "petit jeu pour la communauté". De la même manière, les développeurs annoncent parfois devoir résoudre un bug en désactivant une fonctionnalité, ou en touchant forcément une autre carte. Il est fort possible que, encore une fois, tout cela soit un sac de nœuds qui se consolide depuis maintenant 7 ans, et que certaines choses soient totalement dépendantes les unes des autres — alors que ça ne devrait pas être le cas.
Deuxième écueil et pas des moindres : l'absence du mode Tournoi interne au jeu. Même Artifact l'avait à sa sortie, c'est dire... Ce sujet est sur la table depuis 2016 environ, et les développeurs s'en sont défaussés dès que des organisateurs tiers sont arrivés dans l'équation. Au final, chaque tournoi, qu'il soit communautaire ou officiel, importantissime ou plus "négligeable", est géré par ESL ou d'autres sites spécialisés comme Battlefy. Et après quelques gros soucis lors d'un ou deux Masters Tour, le rythme de croisière a été trouvé et l'affaire a été glissée sous le tapis. Un pansement qui ne tiendra pas non plus indéfiniment, surtout si Battlegrounds trouve son public compétitif (et un circuit officiel) dans les temps à venir.
Et enfin, un souci d'interface utilisateur qui subsiste lui aussi depuis pas mal de temps : la liste d'amis qui fait souvent des siennes, et qui empêche parfois d'ajouter une personne précise à un match au bout du compte. Cela a même causé des éliminations lors de certaines Open Cup, au cours desquelles un ou plusieurs joueurs n'ont pas réussi à s'ajouter au bout de plusieurs minutes. Un souci technique qu'on imagine "bête et méchant" mais qui doit être plus profond que cela pour n'avoir toujours pas été résolu en plusieurs mois voire années.