Capcom avait réussi à prendre tout le monde à contrepied avec Resident Evil 7 : désormais FPS horrifique à consommer de préférence en réalité virtuelle, le titre réussissait à se détacher de la masse de jeux d'horreur façon Oultast, en puisant efficacement dans les racines de la saga. Malgré un point de vue différent et un contexte finalement assez éloigné des manigances habituelles de Umbrella, le jeu arrivait à nous prouver que l'on avait bel et bien un "vrai" jeu Resident Evil entre les mains. Aujourd'hui, Capcom pousse les choses encore plus loin et va s'inspirer de Resident Evil 4, l'épisode qui a marqué un véritable tournant lors de sa sortie sur Gamecube en 2005. Une bonne idée ? On vous laisse le découvrir dans notre test complet de Resident Evil Village.
- Genre : FPS / survival-horror
- Date de sortie : 07/05/2021
- Plateforme : PC, PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series
- Développeur : Capcom
- Éditeur : Capcom
- Prix : 52,49€ disponible sur Amazon
- Testé sur : PC
Je danse le Mia
Trois ans après les événements tragiques de Resident Evil 7, Ethan et Mia coulent des jours heureux avec leur petite fille, Rose. Mais une intervention de Chris Redfield renverra Winters embrasser derechef goulument les ténèbres : le pauvre hère se retrouve propulsé en pleine Europe de l'Est, sans repère et le nez dans la neige. En progressant tant bien que mal dans ce nouvel environnement, notre héros finira par tomber sur un sombre village, théâtre de l'aventure et de bien des douleurs pour Ethan. Les habitants semblent avoir une appétence particulière pour la chair humaine pendant qu'une famille aux pouvoirs surnaturels dégrossit les rangs des survivants. Les premières rencontres entre le papa de Rose et les 5 êtres démoniaques ne vont pas très bien se passer, vous vous en doutez : Ethan va méchamment morfler tout au long de l'aventure et c'est d'autant plus vrai lors de ses premières heures. Il faudra pourtant que le daron se ressaisisse s'il compte sauver son bébé des griffes de Miranda et de ses 4 enfants, pour autant de boss clés. On ne reviendra pas ici sur chacun d'entre eux, Capcom a décidé de le faire par voie officielle en présentant les 4 antagonistes principaux et les zones qui leur sont associées : vous pouvez retrouver tout ça dans l'article suivant, mais si possible, on vous recommande tout de même de garder la surprise, c'est assez riche en spoilers. Ce casting souffle un peu le chaud et le froid : si côté design, ils sont tous suffisamment marquants et visuellement réussis, la façon dont les rencontres se déroulent pose problème pour 2 des membres du quatuor, mais nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque nous parlerons du gameplay.
La construction du jeu s'articule autour de ces 4 boss, avec le cœur du village en hub central. Mais hors de question de choisir quelle cible éliminer en premier, le jeu va vous prendre par la main, en ajoutant quelques étapes dans le village entre chaque visite de nouvelle zone. Ainsi, même lorsque vous êtes en proie avec l'un des rejetons de Miranda, le scénario principal va continuer d'avancer en parallèle et parfois de manière inopinée. Cela donne lieu à des scènes plutôt clichées dans lesquelles vous tomberez sur Chris Redfield un peu au pif pour qu'il vous lâche quelques phrases mystérieuses avant de s'en aller. C'est un fait, le jeu tire sur de grosses ficelles scénaristiques et les facilités d'écriture se remarquent très vite. Toutefois, le scénario du jeu est très réussi et se conjugue parfaitement à l'architecture gothique des lieux. Quelques plot-twists bien vus feront même gagner des points de charisme à Ethan, jusqu'ici rabroué par les fans de longue date de la série. Il incarne désormais pleinement ce "reboot" de la série Resident Evil, série qui n'a décidément pas fini de nous étonner.
Ethan la lumière
Si RE7 réussissait à aligner quelques combats à l'arme à feu, ce n'était pas bien probant, et le bestiaire ultra-limité du jeu n'aidait pas forcément. Avec sa volonté d'insuffler l'ADN de Resident Evil 4 à sa nouvelle formule, Capcom a donc fait le bon choix : désormais semi open-world, Village récompense l'exploration poussée et nécessite de déambuler dans moult chemins boueux, avec quelques allers-retours si vous comptez tout fouiller de fond en comble. Winters n'est pourtant pas plus agile qu'avant : impossible de sauter, son sprint est toujours un peu lent... On garde bien le demi-tour rapide avec bas+rond/B, mais pour esquiver ou absorber des dégâts, il faudra compter sur la nouvelle mécanique de garde ou prendre vos jambes à votre cou pour plomber vos assaillants à distance. Ces derniers sont particulièrement agiles et ne vont pas hésiter à enchainer les petites esquives et les sautillements pour se rapprocher plus rapidement de leur proie. Malgré tout, en dehors des zombars habillés ou équipés de manière différente, Ethan ne va pas non plus croiser beaucoup d'espèces "exotiques" et il manque encore une bonne partie du bestiaire emblématique de la série pour que ce dernier soit réellement satisfaisant. Il y a clairement du mieux cependant, d'autant que les boss sont nombreux, quoique pas toujours très intéressants à affronter. C'est notamment le cas des deux membres de la famille de Miranda que vous aurez à vaincre en milieu de partie.
Ces deux actes constituent très clairement un ventre-mou dans la progression, avec des phases en ligne droite ponctuées de phases de recherche simplissimes et d'allers-retours qui font mourir le fun à petit feu. Ce diptyque de zones nous a confirmés la première impression laissée au cours du début de l'aventure : Resident Evil Village est une nouvelle fois un jeu pensé pour la réalité virtuelle, cela ne fait pas un pli. Pourtant la compatibilité avec les HMD est bel et bien absente de cette première mouture... De là à penser que Capcom nous resservira le jeu dans une édition dédiée d'ici quelques temps, il n'y a qu'un pas que nous franchirons allègrement. On ne va pas vous lister tous les signaux qui laissent penser que le titre a été pensé pour être parcouru avec un casque VR sur la tête, ils devraient vous sauter à la figure, particulièrement lorsque vous parcourrez la Maison Benedicio. Cependant, comme pour RE7 à l'époque, ça n'empêche pas Village d'être tout à fait jouable et agréable, même sans PSVR : on regrettera la surabondance de scripts et la grande majorité de ses combats qui se règlent en tournant autour d'un objet au centre d'une pièce pour feinter l'ennemi, mais globalement, Village se parcoure avec grand plaisir. Parce qu'il a quelque chose à raconter et qu'il le raconte à un rythme effréné, parce qu'il se montre généreux en énigmes et en petits objectifs secondaires, mais pas trop, juste ce qu'il faut pour se faire plaisir à écumer le village à la recherche de ses plus gros trésors. En vous constituant un bon paquet de Lei, vous pourrez aller taper dans le stock du Duc, un mystérieux marchand qui vous suivra à peu près partout.
L'inventaire, l'amélioration des armes et tout ce qui est revente, sont entièrement repris de RE4, pour notre plus grand bonheur. Quant au système de craft, il évolue légèrement avec davantage de ressources et une plus grande emphase sur la fabrication de vos munitions. Parce qu'il y a toujours moyen de se retrouver bien à sec, et de subir ces fameuses séquences de tension où vous devez tenter de survivre avec 3 bastos dans le chargeur et une once d'espoir. Des sensations très cool, qui rappellent là aussi ce bon vieux RE4, mais qui sont encore un peu trop rares, là aussi encore à cause de scripts trop nombreux et d'une histoire qui vous impose son rythme effréné. Le plaisir de jeu est pourtant là et bien là, mais on sent que Capcom a encore quelques voies d'amélioration possible à explorer avec cette nouvelle formule. Petit point trouillomètre, pour toutes les "flippettes" assumées de l'assistance qui se demandent si elles vont résister aux horreurs du village : moins Outlastien que son ainé, RE8 collectionne tout de même quelques jolis moments d'horreur : on pense notamment à la Maison Benedicio et ses poupées possédées, ou aux cachots lugubres du Château Dimitrescu. D'autant que le bougre ne lésine pas sur le gore et que les scènes de torture (mentales ou physiques) infligées à ce cher Ethan sont légions.
Enfin, la durée de vie n'excède pas la dizaine d'heures en fouillant bien : les Resident Evil ont toujours eu tendance à en faire "trop", mais force est de constater que cet épisode s'arrête au bon moment. De plus, le jeu se base sur un contenu annexe suffisamment solide pour pousser sa durée de vie à une bonne vingtaine d'heures, voire plus pour les complétistes : sans trop en révéler, de nombreux défis se débloquent, donnant accès à des bonus plus ou moins conséquents, de séquences de tournage au mode secondaire Mercenaries. Ce dernier reprend les bases bien connues de la chasse au scoring en arène fermée, qui avait même eu le droit à un jeu dédié au lancement de la 3DS, mais en y ajoutant des compétences et des retours réguliers à la boutique entre chaque stage pour améliorer son équipement. Clairement, le cœur du jeu n'est pas là, mais il pourra faire office d'un bon défouloir occasionnel pour les joueurs qui veulent patauger un peu plus longtemps dans cet univers.
Au nom de la Rose
Testé sur une config musclée à base de 3080, Resident Evil Village est une nouvelle démonstration de la puissance du RE Engine, le moteur maison de Capcom. Et cette mouture PC dispose de tous les réglages nécessaires pour voir quels paramètres sont plus gourmands, ainsi que leur impact sur la qualité graphique du jeu grâce à un système de jauges on ne peut plus clair. La première version PC de Monster Hunter World est désormais bien loin et on sent que Capcom a pris du galon dans la maitrise de ces versions. Les décors du jeu explosent à l'écran, soutenus par une direction artistique qui claque sévère. Le jeu va vous faire passer par plusieurs ambiances, merci aux 4 boss thématiques et leurs zones respectives, qui assurent la variété. A chaque fois RE Village fait mouche et réussit à instiller le malaise, à part peut-être pour le troisième membre de la famille, relativement anecdotique.
Dans l'ensemble, la baffe reste de bonne magnitude, on en veut pour preuve le nombre de fois où nous nous sommes arrêtés, juste pour profiter de panoramas pourtant tout à fait banals mais on ne peut plus somptueux. L'OST reste quant à elle très discrète, afin de laisser toute sa place aux sons d'ambiance et aux râles des monstres qui rôdent dans le village. Sur les plans technique et artistique, Resident Evil Village est selon nous inattaquable.