Tout d'abord programmé pour l'automne 2019, The Suicide of Rachel Foster avait été finalement repoussé au 19 février 2020 sur PC par Daedalic Entertainment, en attendant l'adaptation console prévue plus tard dans l'année. Il est donc temps désormais pour le jeu d'aventure narratif du studio italien One-O-One Games d'aller à la rencontre de son public pour lui proposer de démêler une sombre histoire de famille, en fouillant dans les souvenirs d'enfance torturés de l’héroïne, tout droit issus des années 80 au sein de l'hôtel de montagne isolé, où de dramatiques événements ont eu lieu.
- Genre : aventure narrative
- Date de sortie : 19 février 2020 (Steam), plus tard sur consoles
- Plateforme : PC, PS4, Xbox One
- Développeur : One-O-One Games
- Éditeur : Daedelic Entertainment
- Prix : 16,99€ (Steam)
- Testé sur : PC
Welcome to the Hotel Montana, such a lovely place
C'est en 1980, pour Noël, que tout a commencé lorsque le père de Nicole, Léonard Mc Grath, alors âgé de 49 ans, s'est épris de Rachel Foster, une très belle jeune fille de 16 ans qui venait au Timberline Hotel pour corriger sa dyslexie. Nicole, âgée du même âge à l'époque, vivait ici avec son père et sa mère Claire Wilson, décédée en 1991. Lorsque l’idylle entre les deux amoureux à été dévoilée au grand jour, cela a été le scandale dans la petite ville de Helena, dans le comté de Lewis et Clark, dans le Montana, surtout qu'il s'agissait de la fille du rigoureux révérend Salomon Foster. Un an plus tard, fin décembre 1981, Rachel Foster se suicidait en se jetant du haut d'une falaise, alors enceinte de 9 semaines.
Deux familles ont alors été détruites suite à cet événement. Nicole et sa mère ont quitté l'hôtel Timberline, abandonnant Leonard à son sort. Dix ans plus tard, Claire Wilson succomba d'une grave maladie, mais elle laissa une lettre pour sa fille à M. Jenkins, un avocat local, que celui-ci remit à Nicole suite au décès de son père en 1993. Dans cette lettre, Claire déplore la rage qu'elle a développée pour surmonter son chagrin et demande à sa fille d'en finir avec tout cela en vendant l'hôtel et en reversant le fruit de la vente à la famille de cette pauvre fille, après avoir remboursé ses études. Elle demande à Nicole de ne pas faire comme elle. Celle-ci va donc quitter Portland pour retourner dans sa ville natale afin de céder l'hôtel et retourner au plus vite à sa vie.
Malheureusement, l'hiver est rude et une tempête approche. Nicole se retrouve ainsi coincée dans l'hôtel pendant plusieurs jours. Même si, en arrivant, seule l'odeur de la bâtisse, pourtant fermée depuis 4 ans, lui revient, peu à peu, ses souvenirs vont resurgir et elle va découvrir divers éléments plus ou moins inquiétants en fouillant les lieux. Il semblerait notamment que diverses personnes aient aperçu Rachel après sa mort. Serait-elle encore en vie ? L'hôtel, serait-il hanté ? Vieillissant, celui-ci peut en effet parfois s'avérer assez inquiétant. Par chance, Irving, un agent de la FEMA (Agence Fédérale des Situations d'Urgence) qui livre dans les zones isolées et connaissait bien Leonard et l'hôtel, entre en contact avec elle à l'aide d'un des premiers téléphones cellulaires et l'accompagne ainsi dans son périple solitaire. Et pour tuer le temps, elle va enquêter sur les événements passés et découvrir ainsi les secrets enfouis dans le chalet de montagne, son passé et sa mémoire.
Souvenirs, souvenirs
Dès le début du jeu, les développeurs nous préviennent : il s'agit-là d'un sujet sensible que tout le monde n'est peut-être pas apte à affronter. Il est donc conseillé de ne pas jouer seul et de se faire aider si l'on est confronté à des problèmes du genre. Une petite mise en garde précautionneuse et bien-pensante qui n'est pas sans nous rappeler les consignes qui accompagnent chaque épisode de 13 Reasons Why. Quoi qu'il en soit, il est vrai que l'ambiance distillée par le jeu peut parfois s'avérer angoissante. Ce vieux chalet de montagne n'est en effet plus en très bon état et regorge de bruits inquiétants, de portes qui claquent, de craquement, et même parfois de ce qui semble être des murmures. Et ce n'est pas cette histoire d'un possible fantôme hantant les lieux qui va nous rassurer, ni la coupure d'électricité obligeant à se servir du flash d'un appareil photo pour se repérer.
Le vrai héros de cette histoire est incontestablement l'hôtel et son enracinement dans le début des années 90 avec, pour ne citer que quelques exemples, des cassettes vidéo, des écrans cathodiques, des disquettes 5"1/4, ou encore les titres et autres publicités que l'on peut consulter dans les magazines qui traînent ici ou là. Nous retrouvons également la chambre d'enfant de Nicole avec ses posters de hockey, son sport de prédilection, sa vieille guitare basse et ses licornes. Sans être à la pointe de la technologie, les graphismes rendent très bien hommage à l'hôtel et proposent même parfois des jeux de lumière du plus bel effet.
Entièrement en anglais, avec un jeu d'acteur de bonne facture, le jeu offre cependant des sous-titres en français. Les petites conversations entre Nicole et Irving, alternant entre blagues potaches et flirt voilé, s'avère plutôt réussies. La musique, plutôt discrète, est également tout à fait de circonstance. Le rythme insufflé par le jeu s'avère, quant à lui, assez lent et déconcertera peut-être certains "joueurs" se transformant souvent en spectateurs sans rien d'autre à faire qu'écouter (ou lire) les conversions que tiennent des protagonistes. Le narratif l'emporte en effet bien souvent sur l'action, laissant un peu trop le joueur en attente de savoir quoi faire ensuite.
Seule avec soi-même (et Irving)
C'est en vue à la première personne, dans la peau de Nicole, que le titre nous propose essentiellement d'explorer et d'inspecter l'hôtel Timberline. Et même si une carte des différents étages est disponible, ce ne sera pas toujours chose aisée, en tous cas surtout au départ, car à force de faire des allers-retours, on finit par prendre ses repères et se sentir un peu comme chez soi. Cela n'empêche toutefois pas de découvrir régulièrement de nouveaux passages secrets dissimulés entre les murs, l'hôtel en regorge. Il n'en demeure pas moins que l'architecture des lieux est très cohérente pour accueillir des clients avec ses zones réservées à ceux-ci et celles pour le personnel communiquant discrètement entre elles à l'abri des regards.
Le but du jeu est de trouver les indices nécessaires à la poursuite de notre enquête et il faut pour cela faire preuve d'un bon sens de l'observation. L'aventure, marquée par les jours qui passent, est toutefois relativement guidée et cela ne pose pas vraiment de soucis, sauf à deux ou trois reprises où l'on peut avoir du mal à comprendre où aller ou ce qu'il faut faire et où l'on se retrouve ainsi à tourner un peu en rond. De même, il est assez curieux de croiser certains objets sans avoir aucune réaction, faute de les rencontrer au bon moment, puis de réagir avec entrain devant eux un peu plus tard comme si on les découvrait pour la première fois. Les passages dans l'obscurité où l'on ne dispose que d'une lumière intermittente parviennent en revanche à faire leur petit effet.
Les conversations proposent enfin plusieurs options de réponses à choisir en un temps limité, mais si cela a une incidence sur la façon de l'amener, il semble que la trame suive son cours quels que soient les choix opérés. Même si elle est un peu courte, il faut compter 4 à 5 heures pour en voir la conclusion, l'histoire de cette famille déchirée avec la mort de cette jeune fille sait en tout cas nous toucher et nous entraîne avec elle dans son flot de réminiscences troublantes liées au fait que "les souvenirs, comme la culpabilité, s'estompent avec le temps".
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