L'Incident du Sang vicié est sans doute l'un des événements majeurs s'étant déroulés dans World of Warcraft, et pourtant il ne s'agit pas de quelque chose de voulu par Blizzard. A l'heure où Zul'Gurub s'apprête à ouvrir ses portes sur WoW Classic, il est intéressant de savoir que nos confrères de PC Gamer ont pu interviewer Eric Lofgren et Nina Fefferman, auteurs d'une étude traitant de l'incident suscité.
C'est au cours de cette interview que les deux chercheurs ont avoué la grande aide que leur a apporté leur étude sur l'incident du Sang vicié dans leurs recherches sur le COVID-19.
L'Incident du Sang vicié : piqûre de rappel
Avec le déploiement du Patch 1.7 : Rise of the Blood God le 13 septembre 2005, les joueurs ont pu mettre les pieds dans un nouveau raid pour l'époque : Zul'Gurub ! Devant eux se dressaient 10 nouveaux boss uniques, dont le terrible Hakkar l'Écorcheur d'âmes. Durant la rencontre avec ce dernier, les joueurs se voyaient affectés par la technique Sang vicié, un DoT se transmettant de joueur en joueur dans le raid.
Oui mais voilà, un bug a permis au Sang vicié de se transmettre aux familiers de Chasseurs et Démonistes. Ainsi, une fois sortis du raid, ceux-ci transmettaient le virus à tous les joueurs à proximité, et c'est ainsi qu'est née la plus grande pandémie de l'histoire du jeu-vidéo : l'Incident du Sang vicié !
Pour un aperçu approfondi et détaillé de l'événement et de ses conséquences, nous vous conseillons vivement de vous rendre sur notre article dédié : L’incident du sang vicié - histoire du jeu et lore
Recherches post-pandémie
Deux ans après cet incident, Eric Lofgren, un épidémiologiste des malades infectieuses, a publié un article concernant ses recherches sur les comportements humains en période de pandémie en fonction des comportements observés durant l'Incident du Sang vicié.
Dans son papier, le Docteur Lofgren comparait le Sang vicié à une maladie hautement contagieuse et très virulente s'étant transmise d'abord à un faible pourcentage de joueurs (i.e. les joueurs ayant fait face à Hakkar), puis à la quasi-totalité des joueurs de World of Warcraft, en particulier ceux se trouvant dans les capitales.
L'analyse était sans appel, et constatable par tous à l'époque : le taux de mortalité des personnages était très important, et le chaos qui régnait était à la fois loufoque et terrifiant. Les comportements observés étaient quant à eux criant de vérité, tant du côté des joueurs que des PNJs !
Pandémie en jeu VS Pandémie réelle : quel(s) rapport(s) ?
Voyage, voyage...
Pour Eric Lofgren, le lien entre la capacité des joueurs à se téléporter depuis la source de la pandémie (Hakkar, à Zul'Gurub) vers les lieux où résidaient la plupart des joueurs (les capitales) était très semblable à la propagation des pandémies qu'eurent été la Peste bubonique et le Choléra. C'est en effet après avoir longuement voyagé pour retourner chez eux que les porteurs de ces virus ont contaminé le reste de la population et semé le chaos.
From human to...
De plus, selon l'auteur, un autre lien très similaire à la réalité a pu être constaté : la possibilité de transmission d'une espèce à une autre. A l'origine, le Sang vicié n'était censé se transmettre que de joueur en joueur, mais il s'est finalement transmis aux familiers qui, après avoir été renvoyés par leur maître, puis ré-invoqués, ont à nouveau transmis le virus aux joueurs dans les zones de forte affluence.
Dans la réalité, cet exemple est comparable aux animaux de compagnie transmettant la maladie à leur maître et à toutes les personnes entrant en contact avec eux.
Porteurs sains : amicaux, mais mortels
Finalement, les personnages non-joueurs étaient eux aussi contaminés par le Sang vicié mais, contrairement aux joueurs, ils n'en mourraient pas. Ainsi, les plus innocents allaient à l'hôtel des ventes, ou bien réparer leur équipement, et se retrouvaient contaminés... Avant de contaminer les autres joueurs et PNJs à proximité, et mourir.
Pour Eric Lofgren, c'est très largement comparable au cas des porteurs sains : ils portent le virus, le transmettent, mais n'en subissent pas les méfaits.
Peut-on se fier aux comportements en jeu pour anticiper des comportements réels ?
La question mérite d'être posée, et Eric Lofgren l'a fait à l'époque. Il indiquait notamment que la capacité de transmission de ce virus virtuel était extrêmement élevée et ne pouvait pas (ou peu) refléter les virus connus. Toutefois, avec des études plus approfondies il aurait aisément été envisageable de constater des comportements favorisant la transmission du virus, en particulier si celui-ci n'est que peu virulent.
Les comportements en jeu sont donc, aux yeux des chercheurs, très semblables à ceux constatables dans la réalité en période de pandémie. Malheureusement, Blizzard a refusé de permettre à ceux-ci d'effectuer de plus amples recherches en se servant des données de World of Warcraft.
Le Coronavirus : le Sang vicié moderne et réel ?
Non, bien sûr que non !
En revanche, le Docteur Eric Lofgren a récemment accordé une interview à PC Gamer. Il a notamment mentionné la grande aide que lui ont apportés ses heures passées à jouer à World of Warcraft dans ses recherches pour la lutte contre le COVID-19. Il explique notamment que le cas des joueurs affectés par le Sang vicié qui s'amusaient à transmettre volontairement celui-ci aux autres était un cas très intéressant trouvable en grande quantité dans cette épidémie du Coronavirus.
Bien sûr, personne ne s'amuse à transmettre volontairement le COVID-19 dans la réalité (espérons-le tout du moins), en revanche le Docteur Lofgren estime que les personnes négligeant volontairement la haute transmissibilité du virus et outrepassant les recommandations sanitaires agissent en quelque sorte comme des épandeurs volontaires de la maladie.
Joueur de WoW Classic, il estime que la demande des joueurs d'avoir accès à un Zul'Gurub pré-patch permettant à nouveau à l'incident du Sang vicié d'avoir lieu serait une excellente opportunité pour les joueurs d'en parler et de chercher des solutions pour lutter contre cette nouvelle menace qu'est le Coronavirus sans prendre de risque.
De son côté, la Doctoresse Nina Fefferman, co-autrice de l'article traitant de l'Incident du Sang Vicié, affirme que cette étude fût une aide inestimable dans ses recherches futures, notamment aujourd'hui avec l'épidémie qui plane au-dessus de nos têtes.
Pour elle, les discussions qui avaient lieu durant l'Incident du Sang vicié et les actions qui étaient entreprises sont également d'actualité avec le COVID-19. Alors qu'elles avaient lieu sur le Canal Commerce à l'époque, aujourd'hui elles se déroulent sur les réseaux sociaux et notamment Twitter. C'est en discutant et en s'informant que la population apprend et comprend comment mieux lutter contre les épidémies.
Bien que le Coronavirus ne soit vraisemblablement (et espérons-le une fois encore) pas aussi virulent que le Sang vicié, il n'en demeure pas moins important d'en limiter au maximum la transmission. Respectez les consignes sanitaires : limitez les sorties au strict minimum, évitez de vous toucher le visage et lavez-vous les mains souvent, très souvent !
Profitez-en pour jouer à WoW ! Zul'Gurub débarquera sur les serveurs européens de WoW Classic début avril, n'est-ce pas le timing idéal ?
Finalement, si le coeur vous en dit et que vous disposez de quelques notions en anglais, nous vous conseillons vivement de lire l'article de Nina Fefferman et Eric Lofgren datant de 2007, puis l'interview d'Eric Lofgren et Nina Fefferman au sujet du Coronavirus.