Situé au sud de Kalimdor, cerné par Tanaris – où on s’ennuie, Silithus – où on ne s’ennuie pas suffisamment, et les Mille Pointes – où on s’ennuyait avant mais maintenant, ça va, le Cratère d’Un’Goro surprend en ce qu’il est animé par son propre Lore, ses propres dynamiques et ses propres intrigues. Le reste d’Azeroth ne semble avoir aucune prise sur Un’Goro. En tant que cratère traversé par un volcan, on pouvait légitimement s’attendre à ce que Cataclysm bouleverse au moins partiellement la zone. C’eût été cohérent, compte tenu de l’activité sismique que l’on peut deviner dans les sous-sols du volcan et des failles. Pourtant, la formidable entreprise de terraformage ayant suivi le réveil d’Aile-de-Mort n’aura aucun impact sur Un’Goro. La zone est comme une île en pleine terre, partie prenante du continent, mais aux dynamiques géologiques complètement autonomes.
Colonisé par une jungle aussi dense qu’hostile et peuplé majoritairement de dinosaures, Un’Goro correspond typiquement à la définition de l’enfer vert, un concept développé par le cinéma d’aventures, à partir des années 1940 et du film « Green Hell » de James Whale. L’enfer vert désigne ces régions de jungles tellement développées qu’elles constituent en elles-mêmes une menace étouffante et, comme si cela ne suffisait pas, abritant une faune agressive, prête à engloutir les aventuriers téméraires osant y mettre un pied. A Un’Goro, tout est résolument vert, et chaque petit bout de feuille peut cacher un danger mortel.
Cependant, la végétation débridée qui y règne fait aussi d’Un’Goro le supermarché de ceux que j’appelle les Full Herbal Alchemists, aka les herboristes-alchimistes. Munissez-vous d’une bonne quantité de flacons afin d’exploiter toutes les herbes que vous trouverez dans la zone. De nombreuses plantes peuvent être farm sur des cadavres de monstres – certains étant eux-mêmes des plantes, donc faciles à identifier – et le Rocher Fongique vous assurera un stock conséquent de Champignons Fantômes.
Mais on ne s’attarderait pas sur le Cratère d’Un’Goro s’il n’y avait pas… les dinosaures. La zone tient littéralement lieu de Jurassic Park du jeu, à ceci près que la nature n’étant pas si mal faite que ça, le cratère permet de contenir les bestioles et d’éviter qu’elles se répandent plus loin dans Kalimdor. Je suis d’ailleurs assez surprise qu’un Gnome n’ait jamais eu l’idée d’ouvrir un parc de loisirs avec des reptiles gigantesques, par exemple, sur une île au large de Hurlevent, qui se serait appelé Isla Nooblard – merci à ceux qui ont compris la référence. Mais revenons à notre Lore.
Une compagnie d’aventuriers, l’Expédition Marshal – encore une référence aux cinémas d’aventures dans la jungle – s’est égarée dans le cratère et se retrouve désormais piégée, au milieu de toutes les bêtes terrifiantes qui sillonnent les chemins de terre, les flaques de goudrons et les marais du lieu. La composition de la compagnie est plutôt intéressante : des Humains, une Orc, des Gobelins, des Nains et un Gnome. Elle accentue le détachement de la zone avec les divisions traditionnelles des factions d’Azeroth. Ici, ni Horde, ni Alliance, juste des êtres vulnérables, luttant pour leur survie. Heureusement que vous passiez par là pour les aider, ou les sauver, mais, et c’est l’un des ressorts excitants de la zone, il vous faudra toujours garder un œil autour de vous, y compris - et surtout - derrière vous, afin de faire attention à ne pas vous retrouver accidentellement sur le trajet du Diablosaure Rex, un Tyrannosaure qui ne dit pas son nom, mais qui en a la taille et l’agressivité.
Dans cette hystérie de la faune et de la flore d’Un’Goro, il me semble qu’il manque un personnage important : Hemet Nesingwary, le braconnier en chef des braconniers d’Azeroth que, pourtant, on retrouve jusqu’en Nagrand, sans jamais s’être demandé comment il était arrivé là. Nesingwary se serait parfaitement bien intégré au paysage et au background, mais finalement, quand on y réfléchit, son absence est assez logique. Entouré de bras cassés, il est incapable de chasser le moindre perdreau sans l’aide des aventuriers qui viennent lui filer un coup de main à travers son périple – c’est-à-dire vous. Alors bien sûr, quand il s’agit de s’attaquer à du très gros gibier, de type reptile, de type carnivore, de type létale en deux coups de dents, il n’y a plus personne.
Finalement, le Cratère d’Un’Goro offre une pause intéressante aux joueurs de World of Warcraft, éloignée des intrigues de la Horde et de l’Alliance, des chariots de peste et des feux de forêt. Il faut espérer que ni Sylvanas, ni Anduin ne le trouveront, afin de continuer à taquiner le museau du Diablosaure en paix - enfin, presque.