Annoncé en amont des 20 ans de Grand Theft Auto 3, GTA Trilogy a réussi à faire monter une petite hype autour de sa sortie, en promettant une révision graphique bien loin des remasters paresseux et opportunistes et un gameplay remanié pour coller aux nouvelles générations. Comme nous allons le voir dans notre test, il aurait peut-être mieux valu que Rockstar s'abstienne.
- Genre : Action / monde ouvert
- Date de sortie : 11/11/2021
- Plateforme : PS4, PS5, Xbox, Xbox Series, PC, Switch
- Développeur : Grove Street Games
- Éditeur : Rockstar
- Prix : 59,99€
- Testé sur : PS5
Quand on arrive en vil
Impossible de rester indifférent face à la redécouverte de jeux qui ont tant marqué notre vie de joueur : retrouver les tronches de Tommy, Carl et Claude, remises au goût du jour avec une patine Unreal Engine, voilà une idée qui nous réjouissait par avance. De plus, l'unique trailer en action laissait espérer de belles choses, avec une nouvelle gestion de la lumière, de nouvelles textures et tout plein de petites friandises visuelles qui allaient nous permettre de revisiter, avec classe, les 3 cartes d'anthologie de cette trilogie. Mais le retour à la réalité fut rude : GTA Trilogy ne remplit pas son contrat, et même s'il s'agit des 3 jeux cultes, qui ont toujours ce charme si attractif, le travail des développeurs de Grove Street n'est pas à la hauteur des attentes qu'il a engendré. Mais avant de s'étaler sur sa technique et le crachat à la figure que représente cette compilation, remettons un peu de contexte pour les jeunes joueurs qui n'auraient pas connu les jeux d'origine : les 3 GTA de la PS2 sont des morceaux d'histoire de notre média favori.
GTA 3 a révolutionné l'exploration en 3D, alors que ses deux suiveurs ont drastiquement fait évoluer la formule, en la densifiant de manière conséquente, pour aboutir à un San Andreas chargé ras la galette de contenu. A tel point que ce dernier mettait la 128-bits de Sony à genoux, avec un brouillard omniprésent et une fluidité type diaporama. Ce sont principalement ces soucis que la Definitive Edition vient corriger avec son nouvel habillage et ses nouvelles options de confort, mais dans l'essence, ce sont exactement les mêmes jeux et c'est finalement ce qui constitue son plus gros point fort : la qualité des jeux d'origine. Parce que même si le nouvel enrobage ne sera pas du goût de tout le monde, cela ne retirera pas ses dialogues bien écrits et ses missions grandiloquentes, qui racontent toutes la montée en puissance de malfrats de seconde zone en véritables empereurs du crime organisé.
Truands de la galère
La fiche produit promettait un gameplay remanié pour mieux coller aux standards actuels, avec des éléments repris de Grand Theft Auto 5, dont la fameuse visée, bien problématique sur la trilogie 128-bits. Finalement, on se demande si on s'est pas un peu fichu de nous : le gameplay a à peine été retouché et on reste sur des gunfights d'un autre âge. Alors certes, il y a une roue des armes pour sélectionner ses pétoires à la volée et le ciblage se comporte mieux, mais on reste très loin d'un TPS contemporain. L'autre retouche concerne l'ajout de points de contrôle pour éviter d'avoir à se retaper des missions parfois longues de plusieurs minutes : une excellente idée qui vient, pour le coup, corriger un gros souci des jeux d'origine qui étaient assez punitifs en vous demandant de passer par la case hosto sans vos armes, à chaque mort.
Et c'est finalement à peu près tout ce que nous avons pu constater de sensiblement différent par rapport aux originaux : en dehors de ces deux points, les 3 jeux se comportent exactement de la même manière, ce qui va mener à quelques soucis, principalement visuels. Parce que si les décors et les personnages ont été retouchés (pas toujours avec le meilleur goût du monde), les animations sont, elles, restées d'époque, donnant lieu à des situations ridicules. Heureusement, la mise en scène de certaines parties fait toujours son petit effet, a fortiori sur San Andreas, mais la plupart du temps, on a plus envie d'exploser de rire devant ce à quoi l'on est en train d'assister.
Dégâts déso
A l'heure où ces lignes sont écrites, on se demande s'il est encore bien nécessaire de tirer sur l'ambulance : si vous trainez un peu sur les réseaux sociaux, vous avez du croiser les nombreux comparatifs, les compilations de bugs et autres dingueries visuelles qui entachent cette compilation. Pourtant on partait plutôt optimiste : côté décor c'est plutôt propre, et surtout San Andreas tourne à plus de 20 images par seconde (et encore, apparemment c'est pas forcément vrai sur Nintendo Switch) sans brouillard. Mais le prix à payer est lourd : la plupart des personnages ont perdu leur identité pour coller à cette nouvelle esthétique, avec des faciès qui font directement penser aux publicités ridicules pour Mafia City. Alors certes, cela ne va pas entacher votre expérience de jeu de voir ces trognes défigurées, mais bon sang, quelle déception de voir le travail des artistes de Rockstar de l'époque traité de la sorte.
Ce qui nous amène à un autre problème, un peu plus profond et symptomatique de nombreux éditeurs avec leur catalogue d'IP aujourd'hui : comme pour tous les remasters de ce type, les originaux sont supprimés des boutiques en ligne et avec eux, les centaines de mods de fans associés. Des années de modding et de travaux de la communauté, balayés d'un revers de main par R* pour vous proposer ce qu'ils jugent être une Definitive Edition revendue au prix fort. Ce n'est pas la première fois que cela arrive, et certainement pas la dernière, mais cette GTA Trilogy n'a même pas la décence de faire honneur aux jeux qu'il prend en modèle : les mods gratuits de restauration graphiques, réalisés par de petites équipes de "développeurs amateurs", font un bien meilleur travail que les restaurations de Grove Street Games vendues plein pot. L'identité de ces jeux s'est faite la malle avec le brouillard et le framerate à la masse : peut-être aurait-il mieux valu des remasters dans le sens le plus strict du terme, avec un ré-haussement de la résolution et un framerate correct, vendus à un prix décent et laissant tout le loisir aux modders de continuer à se faire plaisir.