L'E3, l'évènement vidéo ludique le plus important depuis 25 ans, n'aura pas lieu cette année. Cela fait maintenant 4 ans que le salon ne s'est pas déroulé en présence du public à cause de la crise sanitaire du COVID-19, après avoir été annulé en 2020 puis en 2022 — l'édition de 2021 s'étant déroulée entièrement en digital.
Si la conférence devait faire son grand retour en 2023, l'absence des plus grands acteurs de l'industrie du jeu vidéo aura eu raison de cette édition, sans grande surprise. Serait-ce la fin pour l'E3 ?
Un format obsolète dans une industrie encore trop toxique
Épicentre commercial de l'industrie vidéoludique depuis presque 25 ans, l'E3 était autrefois un passage obligé pour tout développeur prêt à remplir son carnet d'adresse et à passer des accords avec des éditeurs, ainsi que pour les fans qui attendaient avec impatience le mois de juin, chaque année, pour assister aux annonces des prochains AAA révolutionnaires. L'E3 était un lieu de rencontres professionnelles, mais aussi une occasion pour les joueurs, les professionnels, et les journalistes d'échanger.
Pourtant, l'évènement semble décliner en termes de fréquentation et d'engouement depuis quelques années déjà. Les raisons ? Elles sont diverses, et on ne va pas se mentir, nombreuses, la première étant le prix d'un stand d'exposition au sein du salon — qui peut aller jusqu'à 1,5 million de dollars pour un grand stand — mais également l'énorme engagement pour les équipes de développement qui se doivent de fournir un contenu, jouable si possible, à la presse et au public, ainsi qu'aux autres professionnels présents.
Rajoutons à tout ceci l'aberration écologique qu'est un évènement international de cette ampleur, et les nombreuses histoires de harcèlement et agressions sexuelles — de la part notamment de personnes haut placé dans l'industrie — racontées au fil des années, et vous avez un petit cocktail de "pourquoi l'E3 ne manquera à personne".
Bref, le 30 mars dernier, l'Entertainment Software Association (l'organisation derrière le salon) a déclaré à ses membres que bien que l'E3 "n'a tout simplement pas obtenu le soutien nécessaire pour organiser [l'évènement] d'une manière qui mettrait en valeur la taille, la force et l'impact de notre industrie".
Rien de plus normal, puisque Nintendo, Microsoft, Sony, Ubisoft, Tencent et Sega ont décliné l'invitation. En effet, pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple : tout simplement organiser son propre évènement en ligne.
Le streaming a-t-il tué l'E3 ?
L'augmentation d'événements numériques fait certainement partie des raisons qui ont contribué à la baisse de la fréquentation de l'E3 — de la part du public comme des professionnels — au cours des dernières années. C'est d'ailleurs le choix qu'on fait les trois géants de l'industrie, Nintendo, Sony et Microsoft, pour ne citer qu'eux, qui ont décidé de présenter leurs propres jeux à moindre coût, en ligne, et sans public présent.
Grâce à ces stream, les studio de développement et les éditeurs peuvent partager leurs création à leur guise, quand ils le veulent, sans concurrence directe ni mauvaises surprises, et sans avoir recours à des sociétés tierces de relations publiques.
Aujourd'hui, ce sont des événements comme le Summer Game Fest, crée par Geoff Keighley (qui a eu du nez, c'est le moins qu'on puisse dire) c'est à dire une sorte d'évènement hybride qui accueille un petit nombre de personnes sur place et qui offre le contenu en direct et en ligne gratuitement aux spectateurs du livestream, qui viennent remplacer l'E3.
L'ESA n'a certes pas encore sonné le glas de l'E3, mais son annulation au dernier moment — sans même être remplacé par un évènement en ligne — n'est certainement pas bon signe pour l'avenir de la convention.
Pour ceux qui déploreraient la perte de cet évènement, car il n y'a bien entendu pas que du mauvais — il y a même eu du très bon —, rassurez vous, des salons bien plus appropriés au réseautage (comme la GDC, par exemple), plutôt dédiés aux fans (comme les PAX, pour ne citer qu'eux), ou encore dédié à des genres bien spécifiques et des compétitions (comme l'EVO) ont encore bien lieu chaque année. Et puis pour le reste, la Gamescom et le Tokyo Game Show sont encore la, pour le moment. Une chose est sûre, en tout cas : vous n'avez pas fini d'entendre parler de Geoff Keighley.