Mais ne vole pas les petits fours qui veut, et avant de pouvoir jouer les parasites mondains, il aura fallu sacrifier à la cérémonie grandiose organisée pour l’occasion. Sur une célèbre avenue marseillaise, le tapis rouge avait été déroulé sur toute la largeur de l’avenue, et les curieux éloignés par un impressionnant cordon de sécurité composé de CRS, de policiers anti-émeutes et de sumo-ninjas surentraînés, prêts à lancer leurs shurikens à la gorge des resquilleurs.
Face à l’entrée du cinéma, une rangée de projecteurs géants diffusaient le logo de Millenium dans le ciel marseillais, tandis que 237 danseuses indiennes assuraient l’animation devant le bâtiment en exécutant des chorégraphies bollywodiennes.
Sur les coups de 19h15 les festivités commencèrent et le mini-van noir blindé de Monsieur Cedrix arriva. Du véhicule sortirent huit gardes du corps avec oreillettes, lunettes noires et pistolets automatiques, qui sécurisèrent le périmètre, avant que des esclaves d’Interflora ne répandent au sol des pétales de rose sur la route de notre bien aimé Leader.
La réunion était sérieuse, mais on a su aussi se fendre la poire
À son passage, tous les employés firent la révérence, ne commettant pas l’imprudence de poser leurs yeux impurs sur la très sainte figure qui se mélangeait à nous. Il fut suivi par la direction, qui lui emboîta le pas quelques mètres derrière en tenant son manteau de pourpre brodé d’hermine, tandis que sa couronne étincelant de mille feux, éblouissait l’assistance de son éclat. Enfin, nous fûmes autorisés à le suivre, pénétrant dans ce bâtiment d’ordinaire réservé au commun des mortels.
Sur son passage, Monsieur Cedrix fit remarcher un paraplégique, fit voir un aveugle, mais échoua toutefois à rendre poli un joueur de LoL. Foulant de son pas rapide les couloirs écarlates recouverts de moquette bon marché, il pénétra enfin dans la salle, qui projetait le film « Lincoln » cette semaine-là (inutile de dire que tout le monde avait relevé la chose et était allé de sa blague sympathique sur son futur assassinat).
Monsieur Cedrix, dans une de ses trois apparitions photographiques de l'année
Nous nous installâmes dans les fauteuils de velours rouges, prêts à écouter celui grâce à qui tout cela existait, celui à qui nous devons nos vies actuelles, et la chance que nous avons d’avoir un travail littéralement exceptionnel. Si Monsieur Cedrix est d’ordinaire avare en discours, cette fois-ci, il nous en avait donné pour notre argent et il nous parla avec fierté et sincérité. Il nous raconta l’histoire de Millenium, et la façon dont une simple guilde devint un acteur incontournable de l’eSport et du web francophone sur les jeux vidéo. Il nous parla de cette aventure hors du commun et de la place que chacun y avait. L’émotion était là, d’autant que Jack avait réalisé pour l’occasion une vidéo rétrospective sur l’année 2012 et que l’auditoire très masculin du se retenir de verser une larme face à la charge émotionnelle. Il y eut beaucoup de rires aussi, au fil des anecdotes, racontées, de l’autodérision et des piques envoyés. Je retiendrai pour ma part que mon patron fut à l’origine de la première grève sur Dark Age of Camelot, ayant réussi à faire débrayer un raid entier qui devait attaquer une forteresse ennemie.
Le boss parla également de l’avenir, des projets qui nous attendaient, et d’autres lui succédèrent sur la scène. Mais cet évènement, le premier dans l’histoire de Millenium, aura été marqué par son intervention émouvante. Laissons maintenant les violons et les mouchoirs derrière nous, pour passer à la seconde partie de soirée.
Comme à l'école, il y a les fayots qui écoutent et les cancres qui discutent