Étrangement passé sous le radar de beaucoup depuis son annonce, Chorus a pourtant de quoi séduire, avec ses graphismes agréables, un gameplay résolument arcade, des pouvoirs, des bouts d'univers à explorer et une histoire riche en cinématiques. De plus, les shooter spatiaux dignes de ce nom se font rares ces dernières années, la sortie d'Everspace 2 n'est pas pour tout de suite, est-ce que Chorus va aider à patienter ?
- Genre : Shooter spatial, Action-aventure, semi-open world
- Date de sortie : 3 décembre 2021
- Plateformes : PC, PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series
- Développeur : DS Fishlabs, Deep Silver
- Éditeur : Deep Silver
- Prix : 39,99€
- Testé sur : PC
Chorus sang
Nous incarnons Nara dans Chorus, qui rejoint les rangs des héroïnes torturées de cette années avec Returnal. Elle est le fer de lance du Culte, une religion galactique à la fois militante et évangéliste, qui promulguait un message de paix et d'harmonie, au départ, le fameux Chorus, mais qui prit un mauvais tournant en chemin. Lorsque le Grand Prophète, le chef du culte dont elle est la main droite, lui ordonne de faire un Exterminatus avec ses pouvoirs sur une planète rebelle, elle s'exécute avant de déserter, ravagée par les remords. Elle se comporte ensuite comme un vieux maître Jedi lâche, elle cache son vaisseau conscient nommé Forsaken et abandonne quasiment tous ses pouvoirs avant de travailler en tant que pillarde dans un coin paumé de l'univers. Mais sept ans plus tard, elle se rend compte que ce n'était pas un si bon plan quand le Culte vient sonner à sa porte avec une armada, puisque le secteur est le prochain sur la liste de leurs conquêtes.
Vous connaissez le topo, elle se lance alors en croisade pour récupérer vaisseaux et pouvoirs, afin de vaincre le méchant culte corrompu qui massacre tout le monde sans discrimination. Derrière ce synopsis de départ somme toute classique se cachent quelques éléments originaux. Premièrement, l'aspect profondément mystique des dialogues et de l'histoire, la religiosité et la spiritualité de Nara tiennent une part importante de l'histoire, surtout lorsqu'elles sont mêlées à la culpabilité. On n'a pas l'occasion de jouer tous les jours un personnage avec un génocide sur la conscience. La chose est mise en avant via les dialogues avec d'autres personnages, ainsi qu'avec Forsaken, la conscience vindicative du vaisseau, mais aussi avec des visions des souvenirs laissés un peu partout sur le champ de bataille et des lieux témoins de drames. On a aussi droit aux pensées intérieures de Nara, dont le décalage avec ses propos est parfois un peu déroutant, ce qui fait un peu penser à Hellblade : Senua's Sacrifice par moment.
Ajoutez à tout cela des pouvoirs surnaturels issus du vide qu'elle doit apprendre à maîtriser, et une espèce alien d'une autre dimension qui érode la galaxie, les Sans-visages, et cela donne Chorus. Tout cela ne manque pas de faire penser à Control, mais depuis un vaisseau. Les nombreux dialogues et les beaux discours sur la nature humaine ne font néanmoins pas toujours mouche, loin s'en faut. Et il est un peu pénible de ne pas pouvoir passer le visionnage (souvent obligatoire) des souvenirs, qui vous privent du contrôle de votre vaisseau, ce qui casse un peu le rythme. Il y a aussi quelques opportunités manquées, avec des choix moraux à faire dans quelques-unes des premières missions du jeu, mais leur impact est très limité sur l'histoire. Par la suite, ils disparaissent complètement, et le seul choix offert est de réaliser ou non des quêtes optionnelles.
New type vs. noobs
En termes de gameplay, Chorus est aux antipodes d'une simulation spatiale. Le jeu dont il se rapproche le plus, à la fois graphiquement et en termes de gameplay est sans aucun doute Everspace, auquel on retire l'aspect rogue-like. On pourrait aussi le comparer à Strike Suit Zero. Vous contrôlez votre vaisseau en vue à la troisième personne, avec une caméra assez lointaine pour le genre. La vue depuis le cockpit n'est pas une option, elle serait probablement injouable. Les environnements sont vraiment très denses par moments, y compris sur les boss, avec de véritables parcours d'obstacles, ce qui serait un véritable cauchemar à naviguer sans visualiser clairement la position de son vaisseau. La gestion des pouvoirs demande aussi d'avoir du recul, et même avec ça, les crashes dans le décor seront de loin votre première source de décès. Les affrontements contre les chasseurs ennemis ainsi que les vaisseaux capitaux sont livrés d'une manière très différente de ce qu'on peut voir dans un Wing-Commander ou un X-Wing, Nara et Forsaken rivalisent avec une flotte à eux seuls. Oubliez les grands tournants nécessaires pour manœuvrer, car tel un Joy-con, Forsaken est capable de drifter, ce qui lui permet de réaliser des tournants incroyablement serrés ou de mitrailler ses adversaires dans n'importe quelle direction tout en gardant sa trajectoire, et donc de prendre facilement l'avantage lors des combats. C'est aussi une technique vitale lors de l'exploration des temples labyrinthiques.
Les pouvoirs de Nara viennent aussi complètement changer la donne, ils finissent même par totalement éclipser l'armement conventionnel du vaisseau. Le rite des sens permet de scanner la zone afin de repérer les ennemis ou les caisses pleines de récompenses à récupérer, mais ce qui nous intéresse vraiment est le rite du chasseur qui approche vraiment du cheat code, puisqu'il va ralentir le temps puis téléporter votre vaisseau pile dans les 6h de la cible, en vous alignant même correctement. Il ne vous reste plus qu'à tirer pour la transformer en un petit nuage de débris incandescents. Le temps de recharge de ce pouvoir est d'ailleurs assez court, il y aurait donc de bonnes raisons de s'en faire pour la difficulté en temps normal. Cependant, le jeu semble avoir été équilibré pour ne pas faire de ces pouvoirs et de ceux à venir un avantage injuste, mais au contraire, une nécessité. Les ennemis sont très nombreux et agressifs, ils disposent parfois de renforts infinis tant que vous ne détruisez pas toutes les cibles clés. On vous force aussi à jouer agressivement contre la montre sous peine d'échec.
Il vous faudra donc faire un usage approprié de tout votre arsenal pour remporter la victoire, par exemple en vous demandant de vous téléporter derrière un bouclier pour toucher un point vulnérable d'un vaisseau capital. Il y a aussi un petit aspect Metroidvania lié à ces pouvoirs durant les phases d'exploration. Heureusement que certains vaisseaux ennemis et les boss disposent de parades, se prendre un essaim de mines lâchées par le vaisseau auquel vous pensiez lâcher un petit "nothing personnel kid" est presque rafraîchissant. Ceci dit, quand vous débloquez les pouvoirs qui suivent, la balance penche trop lourdement en votre faveur et les ennemis normaux n'ont vraiment plus la moindre chance contre vous, du moins tant que vous ne jouez pas trop paresseusement. Il faut plutôt compter sur les boss ainsi que les obstacles pour vous donner un peu de fil à retordre.
Les autres éléments des combats sont plutôt classiques, vous avez les boosters, des boucliers, la réparation de coque qui a un temps de recharge et trois types d'arme, chacun adapté à un type de cible. Les lasers lâchent une attaque instantanée dévastatrice, surtout contre les boucliers, mais ils doivent se recharger. La gatling permet d'éliminer facilement les chasseurs ennemis, mais elle surchauffe si vous tirez trop. Les missiles sont parfaits contre les cibles blindées, mais vous en avez une quantité limitée (ils se rechargent en quelques secondes). Il vous faudra donc alterner souvent entre ces armes pour être le plus efficace possible. Un petit regret que nous avons avec ce système est qu'une seule arme est active à la fois, vous n'avez qu'un seul réel point d'attache sur le vaisseau. Quand vous changez d'arme, elle se transforme magiquement, au lieu d'avoir les missiles sous les ailes et la gatling dans le nez, par exemple. Et il faut passer par la croix directionnelle pour changer d'arme à chaque fois. L'arsenal se limite malheureusement à quelques variations et améliorations de ces armes uniquement, comme un laser avec plusieurs charges ou des missiles guidés.
La raison pour laquelle les armes sont sur la croix directionnelle (du moins si vous jouez au pad, ce qui est généralement vivement encouragé pour un jeu du genre) est que le joystick de gauche ne permet pas d'orienter la caméra ni le vaisseau, ce qui désoriente un peu au départ, surtout dans un jeu à la troisième personne. À la place, il sert à déclencher les esquives, les fameux "barrel rolls" dont vous aurez vite besoin pour survivre face aux nuées de missiles ainsi qu'aux tirs de laser à la précision chirurgicale. Afin de vous décourager de faire l'hélicoptère et de simplement tout mitrailler sans bouger, ces esquives ne sont possibles qu'en allant suffisamment vite. C'est probablement l'aspect le moins intuitif du jeu, mais une fois la subtilité comprise, les combats s'avèrent assez intenses et satisfaisants face à des dizaines d'ennemis en faisant bon usage de tous les outils à votre disposition. D'ailleurs, si vous trouvez les combats un peu trop faciles, vous pouvez augmenter la difficulté, voire activer le redoutable mode Ironman, avec une seule vie, et une fin définitive à votre campagne en cas de mort. Mais comme nous avons souvent dû charger la partie depuis un point de sauvegarde précédent suite à un bug ou l'autre qui bloquait la suite de la mission, cela ne nous a pas l'air très sage. Sans compter le fait que 95% de nos morts soient dues à un plongeon dans un obstacle, la mort peut arriver très rapidement.
Dans l'espace, il n'y a personne pour vous entendre crier
Chorus ne se limite pas aux combats, comme mentionné plus haut, la progression est de type semi-monde ouvert. Chaque chapitre de l'histoire débloque une nouvelle région que vous êtes libres d'explorer, mais il n'y a initialement pas grand-chose à y faire. Des lieux et des quêtes secondaires sont débloqués avec l'avancée de l'histoire dans le chapitre. Le jeu propose de grandes cartes magnifiques aux environnements variés : champs d'astéroïdes, bases spatiales, zones cataclysmiques déformées par les Sans-visages et autres. Heureusement que le mode photo est là, puisqu'il y a de quoi réaliser de magnifiques fonds d'écran. Libre à vous de foncer vers le prochain objectif principal, ou de partir en vadrouille afin de trouver des ressources ou des quêtes secondaires, ou de répondre à des appels de détresse aléatoires. Ce n'est pas Eve Online, vous n'allez pas avoir l'opportunité de jouer au mineur ou au marchand au long terme. Malheureusement, cela devient vite répétitif, il n'y a qu'une petite dizaine d'événements aléatoires différents, dont 3 à 4 variantes du même à chaque fois, comme calibrer les moteurs, ou les senseurs, ou l'ordinateur d'un vaisseau en échange d'une poignée de crédits.
Le plus gênant est probablement le fait que les cartes soient en pratique complètement vides par défaut. Il y a bien un peu de trafic spatial simulé sur les voies principales, mais c'est tout. Vous pouvez débarquer dans le QG du Culte et ne pas y rencontrer le moindre vaisseau adverse. Ces derniers sortent exclusivement de l'hyper espace sous votre nez, ou dans votre dos à la rigueur, lorsque la mission ou l'événement en cours le demande. On se contente donc de voler à pleine vitesse d'un point à l'autre en scannant afin de trouver les ressources cachées un peu partout et en observant le paysage (fort joli, encore une fois). Mais n'espérez pas de surprises, le scanner révèle toute la région, et les ressources sont au final peu utiles, les crédits ne servent quasiment à rien, ce qui est tout de même un beau gâchis de potentiel. Il y a pourtant un hangar dans lequel de nouvelles pièces d'équipement sont vendues, mais l'équipement intéressant est exclusif aux missions. L'amélioration des armes, pourtant listée dans les fonctionnalités, n'était pas non plus présente, ou alors si bien cachée que nous avons terminé le jeu presque à 100% sans l'avoir trouvée.
Set légendaire en plaque pour chasseur de combat
À défaut, vous pouvez tout de même jouer un peu avec les modules d'équipement afin de modifier les performances de votre vaisseau, par exemple en augmentant sa vitesse au combat, ses dégâts, et autres. En formant des séries de la même marque, cela va alors débloquer des bonus de set qui vont influencer votre gameplay, comme des gatling qui ne surchauffent jamais, ce qui permet de mitrailler éternellement dans tous les sens, sans jamais s'arrêter, le tout combiné à un bonus de dégâts quand vous vous téléportez derrière un ennemi. Ou alors vos pouvoirs vont devenir encore plus puissants, ce qui va finir de vous transformer en cataclysme cosmique. Il faut dire que Nara a détruit une planète dès l'introduction, détruire des vaisseaux géants en entrant à l'intérieur avec ses pouvoirs pour faire sauter le réacteur est un jeu d'enfant. On aurait aimé qu'ils aient un peu plus de répondant tout de même, plutôt que de juste rester plantés là. Heureusement que les boss sont plus travaillés et bien plus mortels, avec des affrontements qui vont demanderont d'utiliser pleinement vos pouvoirs pour survivre et les vaincre, tout en ayant à affronter des tirs et des obstacles dans tous les sens. La maniabilité du vaisseau brille alors vraiment, même si cela ne nous a pas empêché de nous crasher lamentablement à répétition.
En parallèle, un système d'accomplissements récompense aussi les actions et exploits accomplis avec d'autres bonus passifs dans différents domaines. Éliminer assez d'ennemis à la gatling va réduire sa surchauffe, se téléporter derrière des ennemis puis les détruire va offrir un bonus aussi. Il y a plusieurs objectifs pour chaque arme, chaque pouvoir, les esquives, le drift, etc. Sans rien révolutionner, cela a tout de même le mérite d'encourager aussi les joueurs à bien jouer et à utiliser tous les outils à leur disposition, ce qui n'est pas du luxe vu la puissance des pouvoirs. Cela encourage aussi à expérimenter et à mieux les utiliser. Nous en aurions probablement négligé certains sans ces objectifs secondaires.
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