L’élite. Astralis, Complexity, ENCE, Evil Geniuses, FaZe Clan, Fnatic, G2 Esports, mousesports, Natus Vincere, Ninjas in Pyjamas, Team Liquid, Team Vitality, et 100 Thieves : voici les treize structures prestigieuses qui viennent d’inscrire dans le marbre un solide partenariat économique avec l’ESL ; l’organisateur de tournoi légendaire qui semble plus que jamais tenir les rênes de la compétition sur la scène Counter-Strike.
Quel est ce partenariat ? Que va-t-il apporter aux joueurs, aux clubs, et à la scène professionnelle CS:GO dans son ensemble ?
De la stabilité économique sur le long terme, en principe, déjà. Mais aussi une toute nouvelle vision de comment l’esport du FPS de Valve devrait se structurer pour devenir rentable, sans pour autant passer - entièrement - par le controversé modèle franchisé américain. Autrement dit : le but recherché via les accords du Louvre est de pérenniser un écosystème déjà existant, sans pour autant chambouler toutes les règles du jeu.
Les accords du Louvre, qu’est ce que c’est ?
Sur le papier, cela donne à la Pro League un aspect hybride, à mi-chemin entre une ligue franchisée et une compétition ouverte. Si elle était accessible pour n’importe quelle équipe auparavant, la ligue professionnelle de l’ESL sera désormais semi-fermée. Sans obliger à s’acquitter d’un droit d’entrée que l’on peut retrouver dans les hautes compétitions de League of Legends ou une Overwatch League, l’ESL offrira ainsi une multitude d’avantages à ses futurs partenaires. Des partenaires qui souffraient jusqu’ici d’un manque sur deux points essentiels plus ou moins liés : le premier étant la stabilité financière, le second étant le faible partage des revenus engendrés par leur participation au championnat.
Concrètement, les accords du Louvre - évolution finale du LANXESS agreement - signés à Paris par l’ESL, DreamHack et certaines des équipes CS:GO, permettront à ces mêmes équipes d’avoir : une place assurée à long terme en Pro League, un statut de parties prenantes, et un reversement direct d’une partie des gains engendrés par les tournois estampillés Pro Tour. Réfléchie pour assurer un partage équitable des denrées entre le TO (ESL), les organisations et les joueurs, la principale force de la nouvelle Pro League est qu’elle conservera ainsi en son sein les meilleures équipes actuelles de la planète, à l’inverse de Flashpoint, la version officielle de la B Site Ligue qui devait faire de l’ombre à ESL. Mais qui ne devrait finalement pas en faire de si tôt, étant donné qu’elle a attiré des équipes beaucoup moins prestigieuses pour son lancement.
Par ailleurs, voici une liste non exhaustive à noter des promesses tirées de l’officialisation des accords du Louvre :
• La Pro League sera composée de 24 équipes partagées en 4 groupes de 6.
• Plus de découpe par région, la Pro League rassemble désormais des équipes de tous les continents dans une seule division.
• Elle comprendra jusqu’à 16 équipes partenaires, jusqu’à 4 équipes se qualifiant par le biais de la Mountain Dew League et les places restantes seront attribuées sur la base du classement mondial de l’ESL.
• ESL travaille à améliorer son classement mondial, notamment en consultant le site HLTV qui en fournit déjà un qualifié de « référence » par la communauté.
• Les moins bonnes équipes non-partenaires seront reléguées chaque saison.
• Une place permanente est sujette à révision si l’équipe partenaire se classe dernière de son groupe au cours de 3 des 4 dernières saisons.
• Les équipes partenaires seront régulièrement invitées dans les événements du circuit Pro Tour. Elles pourront refuser deux invitations par an sans que cela n’ait d’incidence sur la part de leurs recettes provenant des événements du circuit.
• De nouvelles équipes partenaires peuvent être ajoutées par un vote à la majorité des deux tiers des équipes partenaires existantes.
• Les équipes partenaires ont le droit de transférer leur place dans la Pro League à un tiers, sous réserve de certaines restrictions.
• La CSPPA (l’association professionnelle des joueurs professionnels de Counter-Strike), aura son mot à dire sur les questions relatives aux conditions de travail, aux normes des tournois, et sur d’autres questions ayant un impact significatif sur les joueurs.
• Les recettes de la Pro League seront partagées de la manière suivante : 15% des recettes sont conservées par l’agence de production. Sur les 85% restants, 25% sont partagés avec les équipes partenaires éligibles. Après déduction de tous les coûts de fonctionnement, 65% des bénéfices sont partagés avec les équipes partenaires.
• Les recettes des événements du Pro Tour sont partagées de la manière suivante : 15 % des revenus sont conservés par l’agence de production. 25% des 85 % restants sont partagés avec les équipes partenaires éligibles. Après réduction des coûts de fonctionnement, 10 % des bénéfices sont partagés avec les équipes partenaires.
• La part des revenus de chaque équipe partenaire est basée sur le nombre d’événements auxquels elle a participé, les résultats des compétitions et le nombre de téléspectateurs.
Est-ce un modèle parfait ?
Soyons clairs : très peu de choses peuvent être qualifiées de parfaites en ce bas monde, encore moins quand il s’agit d’esport et de mesures qui se veulent très souvent expérimentales. Flashpoint et BLAST Premier sont venus mettre un petit coup de fouet à l’ESL qui a dû expressément réagir, et c’est finalement ça qu’il faudra retenir.
Dos au mur, face au risque de perdre des grands noms de la scène, l’organisateur de compétitions numéro un sur CS:GO n’a eu d’autres choix que de faire des concessions et proposer un modèle viable - en théorie - pour le bien-fondé de la scène compétitive. N’ayant pas la bénédiction de Valve pour obtenir une totale exclusivité et donc mettre en place une ligue ou un circuit totalement fermé, ESL propose aux meilleures organisations une sorte de DLC payable en nature, via une série d’engagements et d’arrangements plutôt bien construits.
Ce qu’il faut comprendre par là : les équipes partenaires ne seront pas actionnaires majoritaires et n’auront donc aucunement des parts dans la Pro League ou le Pro Tour. Leur engagement sur le long terme leur assurera des avantages, comme le fait d’être plus impliquées dans les décisions prises, ou un revenue sharing plus cohérent, mais elles resteront grossièrement à la bonne d’une ESL qui conserve ainsi le pouvoir.
Ce qu’Adam Adamou, le propriétaire de Mad Lions - engagé dans Flashpoint - ne semble pas digérer dans un post posé sur les réseaux : « Flashpoint est détenue à 99,5 % par les équipes et à 0,5 % par l’organisateur du tournoi. Cette ligue ESL est probablement l’inverse. Les équipes de la ligue ESL sont décrites comme des « parties prenantes majoritaires ». Le communiqué ne dit pas qu’elles sont des actionnaires majoritaires, probablement parce qu’elles ne le sont pas. »
Est-ce une mauvaise chose de voir l’organisateur perdurer au sommet de la pyramide esportive ? Tout est une question de point de vue. Le plus important étant la bonne santé économique des structures, au même titre que celle des joueurs. Ces partenariats vont dans ce sens, reste à voir si cela se traduira dans les faits.
Crédit photo : HLTV