C'est dans un hangar de la banlieue de Séoul que Kim "cvMax" Dae-ho nous a donné rendez-vous. L'ancien coach des Griffin, banni de toutes les compétitions par Riot Games, indique que ses joueurs avaient l'habitude de venir s'entraîner ici, chez lui. À notre arrivée, l'homme de 29 ans pousse une lourde porte en fonte aux nombreux verrous, et nous presse d'entrer. Il a des choses à dire.
Les dernières révélations sont accablantes pour cvMax. Chez Griffin, les langues se sont déliées depuis la mise à l'écart du coach, juste avant les Worlds 2019. Aujourd'hui épinglé par les investigations de l'éditeur, son nom apparaît à plusieurs reprises dans des cas de violences, mentales comme physiques, envers ses anciens protégés. La sanction est sans appel : le coach vient d'être banni de toutes les compétitions organisées par Riot Games pour une durée indéterminée.
À la lecture des faits qui lui sont reprochés, cvMax ne peut s'empêcher de rire nerveusement. Il porte étrangement sur lui le maillot des Griffin et parle de son équipe au présent.
« La presse peut dire ce qu'elle veut, j'aime profondément mes joueurs. Ils sont comme mes enfants, vous comprenez ». Il écarquille les yeux, puis reprend : « Mais des fois, ils font des bêtises et je dois les punir. C'est mon travail ».
Il fait sombre dans cet ancien garage. Il fait froid aussi, à cause des nombreux courants d'air. Quelques ampoules tombent du plafond pour éclairer la pièce, mais la plupart grésillent. Sur le capot d'une vieille carrosserie sont entreposés plusieurs outils : une masse, une scie à métaux et des pinces crocodiles.
« Il m'arrive de bricoler, les week-ends », explique cvMax après un bref croisement de regard. « Cela me détend entre deux séances d'entraînement. Si on ne s'entraîne pas, on ne peut pas s'améliorer. Et si on s'entraîne mal, c'est mon travail de faire en sorte que cela ne se reproduise pas ».
D'abord interrogé sur les déclarations de Sword, son ancien toplaner, cvMax indique ne pas comprendre.
« Lorsque je dis, "je ne peux pas traiter une personne handicapée comme les autres", il s'agit d'une phrase sortie de son contexte. J'ai un rapport très direct avec mes joueurs et nous échangeons sans tabou. C'est une manière de travailler, un art de vivre. Je pense qu'il aurait dû venir m'en parler au lieu de jouer les victimes. S'il s'est qualifié aux Worlds, c'est avant tout grâce à moi ».
cvMax évoque ses méthodes de coaching avec beaucoup de recul. Selon lui, Griffin a dominé la compétition l'année passée en Corée parce que les joueurs adhéraient à son projet.
« De souvenir, personne ne s'est jamais plaint. Tous ont consenti à mon autorité et aucune voix ne s'est élevée pour la remettre en question. C'est comme ça que l'on progresse, ensemble. On me reproche même cette formule du "collier explosif prêt à sauter en cas de défaite". Cela me fait rire. Avez-vous déjà eu ce genre de collier autour du cou ? ».
Un long silence entrave l'entretien. « J'en étais sûr. Vous ne savez pas de quoi vous parlez », renchérit cvMax, le regard perdu.
Le nom du coach resurgit aussi lors d'une altercation physique, qui s'est déroulée avec un joueur de l'équipe qui a conservé l'anonymat. Directement mis en cause par Rather — le remplaçant de Chovy sur la midlane — cvMax est sous le choc d'avoir appris l'existence de tels faits dans la presse locale.
« Rather a toujours été un manipulateur. Il serait prêt à n'importe quoi pour prendre ma place. Je le sais. Alors que je passe mon temps à protéger mes joueurs, souvent d'eux-même d'ailleurs. Je les ai hébergés et je les ai nourris. Combien de coachs en aurait fait autant ? ».
Selon des sources concordantes, le joueur en question n'est apparemment pas sorti indemne de cette querelle. L'individu, en larmes, aurait essuyé un coup à l'origine d'un léger hématome. cvMax n'a pas souhaité commenter cette information, arguant le fait qu'elle est avant tout basée sur un solide manque de preuves.
L'entraîneur se retrouve pourtant dos au mur lorsqu'il est amené à prendre position sur l'une de ses déclarations, cette fois-ci prononcée devant témoins. À la fin d'un entraînement, cvMax avait distinctement interpellé un membre de son équipe avec la phrase suivante : "Si j'avais été ton coéquipier dans ce match, je t'aurais traité de p*te dont la mère est morte".
« Vous n'avez pas le droit, tout le monde en a rigolé. C'est même devenu une blague entre nous. Écoutez, je veux bien admettre, pour vous faire plaisir, que je ne suis pas parfait et qu'il m'arrive de commettre de petites erreurs. C'est vrai, ils sont si jeunes et il m'est arrivé d'avoir des réactions impatientes. Moi aussi j'apprends, en même temps que mes joueurs. Cette histoire a plus de deux ans ».
L'interview arrive à son terme mais le coach banni a un message à faire passer : « Aujourd'hui, j'ai reçu une mise en demeure de Griffin. Mon équipe veut se retourner contre moi pour payer l'amende de 85.000 $ infligée par Riot Games. Je veux alerter le monde de l'esport, ici en Corée et partout ailleurs, sur l'injustice de ma situation. Je suis la victime d'un complot, je suis innocent. Je veux revoir mes joueurs. Je suis prêt à leur pardonner ».
Sur le pas de son imposante porte d'entrée, cvMax explique qu'il compte beaucoup sur son témoignage pour « faire éclater la vérité ». Derrière notre équipe, la porte en fonte se referme dans un grincement assourdissant et les verrous claquent les uns après les autres.
Cet article est une fiction inspirée de faits réels. Millenium est solidaire des Griffin dans ce moment difficile et réprouve toute forme de maltraitance.
Source :
Inven Global - [Exclusive] Sword, Tarzan, Rather, and Coach Chaos Talk About cvMax's Violent Behavior