Sorti en 2006 sur PS5, Persona 3 fut le premier contact avec la licence phare d'Atlus pour beaucoup de joueurs. Encore aujourd'hui, c'est le titre préféré de nombreux fans, mais il est difficile d'y jouer dans de bonnes conditions à moins de se tourner vers la version portable qui diffère significativement de Persona 3 FES. Outre la difficulté d'y jouer légalement, le jeu a mal vieilli, et pas que graphiquement. Les choix de design de l'époque peuvent s'avérer frustrants, heureusement, ils ont évolué dans Persona 4 Golden et Persona 5 Royal. Tous ces éléments expliquent en quoi la création de Persona 3 Reload était effectivement nécessaire à nos yeux, ce qui est loin d'être toujours le cas (Oui, c'est toi qu'on regarde The Last of Us). Il reste à vérifier si ce remake répond aux attentes, au-delà de la nostalgie qu'on peut éprouver.
- Genre : JRPG, Simulation sociale
- Date de sortie : 2 février 2024
- Plateformes : PC, PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series
- Développeur : P-Studio
- Éditeur : Atlus, Sega
- Prix : 69,99€, aussi disponible sur le Gamepass à sa sortie
- Testé sur : PS5
FES et Portable : Prepare to Reload twice ?
Commençons parce qu'on peut considérer comme l'énorme point noir de Persona 3 Reload, qui peut remettre en question tout son intérêt. En effet, ce remake s'est concentré sur le jeu Persona 3 originel, sans y intégrer l'extension épilogue (FES) sortie un an plus tard. Les ajouts massifs de Persona 3 Portable manquent aussi à l'appel. Pour mémoire, cela comprenait principalement l'ajout d'une alternative féminine au protagoniste, avec des romances et des liens sociaux et différents. Persona 3 Reload n'est donc pas une version ultime du titre, mais plutôt une version "vanilla" modernisée et enrichie, ce qui est vraiment dommage pour un remake. L'exception notable est l'intégration du lien social d'Aigis de FES.
En parallèle, des DLC payant de contenu annexe avec des musiques, des costumes, et même des Personas supplémentaires sont déjà disponibles. Rien n'a été annoncé officiellement pour le moment, mais il est possible que le contenu de FES et/ou de Portable arrivent dans quelques années sous la forme d'une extension. Espérons qu'Atlus ne nous refera pas la même blague qu'avec Persona 5 Royal, qui forçait les joueurs à acheter un nouveau jeu complet pour profiter des nouveautés, plutôt que de proposer un DLC. C'est quelque chose qu'il vaut mieux garder en tête avant de décider d'investir plus d'une centaine d'heures dans Persona 3 Reload.
Unreal Anime
Passons à présent à ce qu'on peut considérer comme étant le cœur du remake, c'est-à-dire la refonte graphique sous Unreal engine. Les jeux d'Atlus n'ont pas pour réputation de disposer de graphismes impressionnants. Persona 5 Royal ressemble davantage à un jeu PS3 ou Switch qu'à un jeu sorti sur PS5 par exemple. Persona 3 Reload est un cran au dessus, mais il sort tout de même sur PS4 et Xbox One, ce qui donne le ton. Heureusement, la direction artistique de type "anime japonais" compense largement.
Cela va aussi très bien de paire avec les cinématiques traditionnelles directement issues de studios d'animation. L'évolution la plus notable provient des personnages. Ils ont un peu évolué et ils ont aussi muris visuellement, par rapport au jeu l'ère PS2. Le studio a aussi réalisé un excellent travail dans la création des modèles 3D de ces personnages, qui disposent d'un style anime adéquat pour coller avec l'ambiance, tout en étant riches en détails subtils comme les ombres et les reflets sur les visages et les vêtements.
Il est dommage que ce traitement ait été réservé au casting principal, les personnages secondaires sont beaucoup plus grossiers visuellement, et même la salle de classe est envahie de figurants dépourvus de visage. Les autres aspects esthétiques sont aussi en demi-teintes. Les effets visuels des sorts, et des séquences d'activation des Personas sont magnifiques, mais d'un autre côté, beaucoup de décors s'avèrent très pauvres visuellement : c'est vide, les textures sont grossières et les objets sont anguleux.
À défaut de toujours en prendre plein les yeux, on en prend plein les oreilles, avec les musiques iconiques de Persona 3 qui ont été remaniées pour l'occasion. Elles confèrent toujours une ambiance et une personnalité bien particulière au jeu à ses combats, et aux moments forts de l'histoire. Les dialogues sont disponibles en doublage japonais ou anglais, avec des textes français. Tout le monde ne sera peut-être pas de cet avis, mais on peut parfois regretter que le studio n'en ait pas profité pour sauter le pas et doubler les répliques du protagoniste aussi, puisqu'il dispose d'une voix en jeu, ainsi que dans l'anime.
S.E.E.S j'ai trop d'amis
Pour ceux au fond de la classe qui n'ont pas suivi, Persona 3 Reload nous propose d'incarner un ado transféré dans un dortoir lié à son nouveau lycée. Les événements prennent rapidement une tournure inquiétante avec l'apparition de l'heure sombre, une heure cachée chaque nuit durant laquelle les humains normaux disparaissent, une tour titanesque émerge au centre de la ville, et des ombres meurtrières tentent de tuer les rares personnes disposant d'une Persona : une manifestation de leur psyché utilisable au combat.
Même s'il adopte souvent un ton léger voire comique, Persona 3 Reload aborde aussi des thèmes sombres comme le suicide, le harcèlement et surtout la mort, qui est au cœur de l'histoire. Sur ce point, c'est probablement le jeu Persona le plus mystérieux et le plus sérieux, ce qui a contribué au maintien de sa popularité, même après la sortie des titres plus modernes. Ils ont cependant une boucle de gameplay très similaire.
D'un côté, il faut gérer sa petite vie de lycéen devant aller en cours, réviser et passer ses examens, de l'autre, il peut socialiser avec différents personnages notables, voire établir des liens très étroits avec ces derniers. Il peut servir de soutien émotionnel pour un couple de vieillards esseulés, tout en essayant d'ajouter toutes les gamines du lycée à son harem privé sans se faire choper. Ces liens sociaux servent ensuite à débloquer et à renforcer vos Personas utilisables au combat. Certains des dramas qu'on doit aider à régler sont vraiment puérils et inconséquents, ce qui donne envie de rouler des yeux, mais comme cela se déroule dans un lycée, cela semble cohérent quelque part.
Cela ne se limite pas à parler à tout le monde, puisqu'il faut développer différentes statistiques (courage, savoir, charme), choisir les bonnes réponses lors des dialogues, et surtout savoir bien gérer son planning. Le temps est la ressource la plus précieuse dans Persona, l'histoire principale avance impitoyablement, nuit après nuit, et l'année scolaire passe à une vitesse étonnante, alors qu'on apprend à connaître et à apprécier tout le monde ou presque. Sauf Junpei, personne ne l'aime.
Si vous avez joué au vieux titre, vous serez probablement heureux d'apprendre que de nombreuses interactions avec les personnages principaux ont été ajoutées, surtout dans le dortoir. Sanada, Ken et tous les autres membres de l'équipe sont disponibles régulièrement pour participer à des activités annexes comme la lecture, regarder la télévision, cuisiner, jardiner ou autre. Cela vient se glisser dans un emploi du temps déjà bien rempli, mais cela offre aussi des bonus de statistique, ainsi que des aides au combat. Cela rend aussi le dortoir beaucoup plus vivant et accueillant, et on a vraiment l'impression qu'une petite communauté s'y côtoie cette fois, ce qui aide à s'attacher d'autant plus aux personnages.
Battle Royal
L'autre facette du gameplay des Persona porte évidemment sur les combats. Ils mélangent des systèmes similaires à beaucoup de JRPG au tour par tour, avec un groupe de 4 personnages, et l'utilisation des fameuses Personas au combat. On pourrait les comparer à de lointains cousins des Pokémons, avec leurs forces, leurs faiblesses, leurs pouvoirs uniques et la possibilité de les faire évoluer, même si c'est en les fusionnant dans le cas présent. Les combats de Persona 3 avaient mal vieillis pour une raison fondamentale, il était impossible de contrôler les trois autres membres du groupe, qui n'en faisaient qu'à leur tête, et ils aimaint vous laisser mourir à un moment critique au combat.
Comme ceux qui aiment être enragés par leurs coéquipiers jouent plutôt à League of Legends ou à Overwatch, plutôt qu'à des jeux solo, il est bon que cela appartienne au passé. Ils arrêtent aussi d'AFK à l'entrée du donjon après quelques minutes de participation. C'étaient des changements attendus, mais cela ne s'arrête pas là. La quasi-intégralité du système de combat moderne de Persona 5 Royal a tout simplement été transposé dans Persona 3, il ne manque que les flingues. Toucher la vulnérabilité élémentaire d'un ennemi déclenche un "One more" permettant d'attaquer à nouveau, ou d'effectuer un relais. Le cas idéal consiste à transférer son tour à un coéquipier capable de toucher la vulnérabilité d'un autre ennemi. Une fois que tous les ennemis sont à terre, vous pouvez déclencher un assaut général dévastateur avec le reste du groupe, ce qui inflige des dégâts massifs et donne des bonus de butin.
C'est dynamique et cela récompense les bons choix dans la composition de l'équipe. Et une fois encore, la musique est une tuerie. Un nouveau type d'attaque chargée au fil des combats, nommée la théurgie vient aussi enrichir les combats et donner un aspect stratégique supplémentaire. La Chambre de velours qui gère les fusions de Personas n'a pas non plus été oubliée, et elle reprend aussi le système de fusion des jeux ultérieurs. On peut choisir manuellement quelles capacités transférer.
Il va sans dire que les pauvres ennemis du jeu d'origine n'ont aucune chance contre une équipe contrôlée par un seul joueur doté de nouveaux outils. En plus d'un rééquilibrage généralisé, un nouveau mode de difficulté nommé "Sans pitié" a été introduit. Les ennemis sont effectivement impitoyables dans ce mode, et le "Game Over" peut arriver instantanément si une de vos faiblesses est touchée. Cela peut s'avérer frustrant sur le moment, mais cela permet d'exploiter pleinement les richesses du système de combat, et il est satisfaisant de trouver la bonne parade aux pires combos. Persona 3 Reload propose aussi un nombre bien plus important d'ennemis et de boss que le titre d'originel, sur lesquels se casser les dents.
Tartare : l'escalade vaguement Rogue Like
L'unique donjon de Persona 3 est une tour titanesque dotée de plusieurs centaines de niveaux dont la configuration, les ennemis et le butin changent d'une nuit à l'autre. Quand on lit ça de nos jours, cela fait forcément penser aux nombreux Rogue-Like sortis ces dernières années, et cela n'a pas échappé aux développeurs. Le donjon de Tartare était néanmoins horriblement linéaire, répétitif et prévisible. Le meilleur souvenir que j'en garde était l'évolution du thème musical et des environnements toutes les quelques dizaines de niveaux.
Tartare ne vous demande pas de choisir entre plusieurs chemins mutuellement exclusifs, ni de tout recommencer dès le début à chaque fois. On ne peut néanmoins pas évacuer quand on le veut. Des téléporteurs permettent de sortir et revenir à des étages prédéfinis, pendant que la difficulté globale augmente avec l'altitude. Quelques variations ont été introduites pour varier l'expérience, comme des des étages spéciaux, des salles des coffres, ou des ennemis affligés. À partir d'un certain point, des opportunités vous sont offertes d'explorer des portes Nomades facultatives, avec un boss plutôt costaud et des trésors.
Si vous êtes un lâche qui décide de sortir pour sauvegarder avant de l'ouvrir, elle sera verrouillée à votre retour, ce qui ajoute une pointe de risque à l'aventure. Tartare est devenu bien plus intéressant à explorer et un peu plus varié, mais on finit tout de même de se lasser de la grimpette dans des dizaines d'étages aux décors et aux ennemis identiques. On s'empresse de terminer sa nuit d'aventure mensuelle pour retourner draguer des lycéennes entre les cours.
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