Après avoir découvert Last Labyrinth à l'occasion du Tokyo Game Show 2016, où le studio tokyoïte AMATA était venu le présenter, et après une campagne Kickstarter réussie (plus de 2 millions de Yens) pour financer la promotion du titre, on l'attendait avec curiosité pour le mois de mai 2019 avant qu'il ne soit reporté à cet été puis cet automne. Disponible depuis peu sur la plupart des casques VR, on retrouve derrière ce projet Hiromichi Takahashi (Doko Demo Issho) ainsi que Tetsuya Watanabe (Pupeteer, The Last Guardian) au game design et toute une équipe d'anciens de Sony Japon ayant également travaillé sur des jeux comme ICO, Shadow of the Colossus, ou encore Gran Turismo 3 et 4. Bien que se présentant sous forme d'escape game, le titre raconte néanmoins une histoire tout en choisissant de nous attacher à un fauteuil pour nous priver de tout mouvement et nous obliger ainsi à passer par une mystérieuse jeune fille, qui nous accompagne tout au long de l'aventure, pour réaliser des actions. Largement de quoi titiller notre curiosité.
- Genre : puzzle aventure, escape game
- Date de sortie : 13 novembre 2019
- Plateforme : Oculus Rift, Oculus Quest, HTC Vive, WMR, PSVR
- Développeur : Amata K.K.
- Éditeur : Amata K.K., LL Project
- Prix : 44,99€ sur Steam et le Playstation Store, 39,99€ sur l'Oculus Store
- Testé sur : Oculus Rift
Face à la Mer
Tout commence dans le noir, ou presque, seul le chapeau d'un lampadaire ressort de l'obscurité avec le cordon permettant de l'allumer au bout duquel pend un nounours en peluche. Vous ne savez pas qui vous êtes ni où vous êtes, mais une chose est sûre, vous ne pouvez pas bouger. Seules vos mains et votre tête répondent à vos ordres. Dans votre main droite, se trouve un commutateur qui, lorsque vous l'utilisez, active un faisceau laser rouge qui semble provenir d'un pointeur laser fixé sur le sommet de votre crâne. Vous désignez donc ainsi la seule chose intéressante qui se présente à vous : le nounours. Une main fine au bout de laquelle pend un ruban rouge, surgit alors de l'obscurité et allume la lampe.
La pièce dans laquelle vous vous trouvez vous est totalement inconnue, et la jeune fille qui se trouve devant vous semble tout aussi surprise de vous voir ici que vous de vous y trouver. Maintenant que la visibilité est rétablie, vous comprenez la raison qui vous empêche de bouger, mais pas pourquoi vous vous retrouvez dans une telle situation : vous êtes ligoté sur un fauteuil roulant. La jeune fille vous indique alors la porte en s'exprimant dans un langage que vous ne comprenez pas. Vous lui répondez donc en hochant simplement la tête. Comprenant la consigne, elle ouvre la porte puis vous pousse dans la pièce voisine.
Pour vous échapper de cet étrange manoir, vous devez ainsi passer de pièce en pièce en résolvant divers puzzles avec l'aide de la mystérieuse jeune fille qui vous accompagne et que vous guidez avec votre laser. Mais attention, car les pièges sont nombreux et un individu au souffle rauque erre également dans le manoir et ne vous veut pas vraiment du bien. De plus, l'échec dans la résolution des énigmes se solde par la mort de la jeune fille à laquelle vous assistez avant de subir le même sort que cette dernière. Mais réussir à ouvrir la porte pour accéder à la scène suivante finit bien souvent, après avoir assisté à une scène en haut d'une falaise face à la mer, par vous ramener dans la pièce d'où vous êtes parti, dans le noir et avec le lampadaire au bout duquel pend un nouvel objet. Il faut donc essayer les différentes directions s'offrant à vous et peut être parvenir ainsi à s'échapper de ce labyrinthe, tout en découvrant peu à peu des indices sur l'identité de la jeune fille et sur vous-même, mais tout n'est pas toujours aussi simple qu'il ne le paraît.
Toi seul peut me délivrer
Comme l'explique Atsuko Fukuyama, responsable de l’animation des personnages ayant travaillé par le passé sur Yorda (ICO) ou encore Agro (Shadow of the Colossus), Katia, puisque tel est le nom donné à la jeune fille par les développeurs, bien que celui-ci ne soit cité à aucun moment dans le jeu, a entre 10 et 12 ans, une période transitoire entre l'enfance et l'âge adulte. Atsuko Fukuyama a donc cherché à retranscrire cela dans son langage corporel : si elle ressemble à une adulte quand elle se tient droite, elle court et elle bouge comme une enfant. À part un petit bug où un cube est resté collé à sa main, son animation est plutôt convaincante avec des mimiques très japonaises ou encore la grimace qu'elle fait lorsque notre laser l'éblouit. Pour mieux en profiter, il est même possible de lui demander de s'approcher en secouant la main gauche où des clochettes sont accrochées.
Comme pour Yorda et Agro avant elle, c'est la "communication non-verbale" qui a été retenue puisqu'elle parle une langue inconnue doublée par Stefanie Joosten (Quiet dans Metal Gear Solid V: The Phantom Pain) que l'on retrouve également au chant pour le magnifique thème du jeu sur une musique signée Hiroki Kikuta (Secret of Mana, Soulcalibur V). Douze langages sont pourtant disponibles, mais cela se limite, pour ainsi dire, aux traductions des menus et au texte qui apparaît sur les écrans devant lesquels vous vous trouvez lors des changements de pièces : "Toi seul peux me délivrer". Disposant de graphismes soignés et de qualité, le titre repose en effet non seulement sur la résolution d'énigmes, mais aussi sur une progression narrative.
L'histoire qu'il nous conte tourne autour du rapport qui existe entre Katia et vous. Timide, effrayée et retranscrivant ses émotions dans son langage particulier, Katia saura vous séduire, à moins de vous agacer à tout le temps, à parler et à gémir. Pour notre part, nous sommes tombés sous le charme et avons partagé ses sentiments. Phantom, le nom donné à l'autre personnage intrigant présent dans le manoir, tout de noir vêtu, nous accompagne également en quelque sorte. Dénué d'empathie, celui-ci n'hésite pas à se montrer sadique envers Katia et nous-même, n'échangeant pas un seul mot et se contentant de nous gratifier de son souffle lourd et rauque.
Plusieurs éléments récurrents vous aiguillent dans la compréhension de l'histoire qui vous est contée, mais plusieurs fins viendront ponctuer votre aventure, brouillant ainsi souvent les pistes et rendant finalement tout cela assez obscur. Après avoir assisté aux neuf contes proposés, un dernier viendra conclure le jeu sans pour autant beaucoup mieux vous éclairer. Chacun est donc libre d'interpréter tout cela comme il l'entend. Une proposition assumée, mais déroutante, ce qui n'empêche pas une ambiance bien prenante malgré un rythme très lent, que ce soit dans les mouvements de Katia, ses actions ou les déplacements. Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas un titre VR qui vous fera suer et aucun risque de motion sickness à l'horizon. Il prend un peu le contre-pied de ce que recherchent aujourd'hui la plupart des propositions actuelles en la matière qui veulent vous rendre acteur avec beaucoup d'interaction. Il n'y a rien de tout cela ici, un seul bouton suffit à tout faire et vous êtes davantage spectateur qu'autre chose, un choix qui ne plaira clairement pas à tout le monde.
Shogira bien qui shogira le dernier
Le principe du jeu repose avant tout sur la résolution d'énigmes et il faut bien admettre que celles-ci sont variées et de bonne facture. Si certaines sont évidentes, d'autres en revanche s'avèrent bien plus délicates et font appel à votre mémoire, votre réflexion et votre sens de l'observation et de la déduction. Votre matière grise sera parfois mise à rude épreuve et il faudra savoir persévérer sans baisser les bras trop vite. Le problème se pose notamment lorsque l'objectif à atteindre lui-même vous échappe. Et que dire lorsque, arrivé au bout de l'aventure, il faut encore repasser plusieurs fois par le même chemin pour résoudre les mêmes casse-tête si l'on veut atteindre la fin du jeu, il y a de quoi se décourager face à une telle option.
Si l'on rajoute à cela l'interactivité qui ne passe que par Katia et qui se limite à l'usage d'un bouton et des mouvements de la tête pour désigner un élément du décor ou pour confirmer ou infirmer les actions de Katia, le prix peut paraître excessif. Il vous occupera toutefois entre 10 et 15h, ce qui n'est pas si mal pour un titre en réalité virtuelle. Il est toutefois difficile de donner une estimation précise de la durée du jeu puisque cela dépend du temps que vous passerez à résoudre chaque puzzle et à tourner en rond en cherchant ce que vous devez faire et où aller.
Last Labyrinth est un jeu à part et les développeurs souhaitent vraiment non seulement que vous essayiez toutes les fins possibles, mais aussi que vous assistiez à toutes les morts en cas d'échec. Un petit flacon se remplit d'ailleurs de sang pour chacune d'entre elles, un succès étant à obtenir lorsque vous les avez toutes vécues. La première victime est généralement Katia, mais vous subissez ensuite le même sort, ce qui en réalité virtuelle peut parfois être glaçant. C'est ainsi que Katia et vous finissez tour à tour pendus, dévorés par des blattes, électrocutés, décapités, écrasés, fondus dans la lave, ... et même avec une balle dans la tête après une partie de roulette russe, un concept amusant.
Après la phase introductive, vous atteignez une pièce servant de hub central et dans laquelle vous revenez systématiquement après avoir atteint le bout de chaque chemin. Trois portes débouchent sur 3 puzzles amenant à une autre pièce avec 2 portes menant vers d'autres puzzles. Le chemin de droite permet d'assister à une séquence au bord de la falaise alors que celui de gauche demande de jouer à un shogi associé à une roulette russe. Les puzzles en eux-mêmes reposent sur des codes à déchiffrer, des petit trains où il faut jouer avec les aiguillages, des jeux de lumière, un memory à base de codes couleurs et de son, un système d'équilibre sur une balance, ... Mais le mieux est de vous en rendre compte par vous-mêmes, ce qui vous permettra aussi de voir si Last Labyrinth est fait pour vous, en essayant la démo gratuite disponible sur Steam.
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