Alors que Moons of Madness avait été annoncé pour Halloween par Rock Pocket Games et Funcom Oslo, sans doute histoire de coller avec le côté horreur lovecraftienne de leur titre, celui-ci a finalement été lancé avec quelques jours d'avance par les développeurs norvégiens, tout au moins sur PC, puisqu'il faudra attendre trois mois de plus pour le voir arriver sur consoles le 21 janvier 2020. Cette aventure martienne est inspirée de Secret World Legends et co-financée par le Norvegian Film Institute, Innovation Norway et le programme Creative Europe Media de l'Union Européenne. Elle nous conte une histoire où l'isolement et la paranoïa basés sur des illusions plus vraies que nature et largement aptes à mettre à mal la santé mentale des protagonistes, et nous amène à nous poser bien des questions sur nous-mêmes et sur la possible existence d'une vie extra-terrestre. Peut-on décemment survivre dans de telles conditions ?
- Genre : aventure narrative horrifique à base de puzzles
- Date de sortie : 22 octobre 2019 sur PC et 21 janvier 2020 sur PS4 et Xbox One
- Plateforme : PC, PS4, Xbox One
- Développeur : Rock Pocket Games
- Éditeur : Funcom
- Prix : 24,99€ sur PC et 29,99€ sur consoles
- Testé sur : PC
Mission Top Secret
Nous sommes en 2063. Alors que la planète Terre doit faire face à des défis majeurs pour améliorer son quotidien compte tenu des dégradations opérées par les générations précédentes. Orochi, la plus grosse multinationale mondiale se donne pour objectif d'apporter de nouvelles technologies bienfaitrices pour l'humanité grâce aux moyens financiers colossaux qu'elle peut se permettre d'investir dans la recherche. Manticore, l'une de ses 8 filiales qui s'occupe de la branche dédiée à la défense, l'aérospatiale et l'industrie, est responsable de la mission Invictus à laquelle vous appartenez.
Officiellement, celle-ci se trouve en Antarctique afin d'effectuer des recherches climatiques. En réalité, il s'agit de la première station spatiale installée sur Mars, à 76 millions de kilomètres de la Terre. Composée d'une équipe de 5 personnes soumises au secret professionnel par une clause de confidentialité, elle est en fait chargée de rechercher l'éventuelle présence de vie microbienne sur la planète rouge. Aussi, afin de donner le change, des vidéos scénarisées sont régulièrement tournées sur fond vert avant d'être envoyée vers la planète maternelle.
Dans la peau de Shane Newehart, l'ingénieur en chef de la mission, vous commencez par vous éveiller d'un cauchemar dans lequel une drôle de substance noire et visqueuse agrémentée de tentacules et de sortes de protubérances oculaires, semble avoir envahi la station. Alors qu'un souvenir d'enfance de la fête d'anniversaire ayant précédé la disparition inexpliquée de votre mère Cynthia Newehart, grande théoricienne en mathématiques quantiques, vous a assailli, vous reprenez conscience au sein de la base désertée par vos camarades qui vous ont laissé vous reposer. Heureusement, votre ami Declan Delapore, l'autre ingénieur de la mission Invictus, est en contact radio pour vous aider et vous guider.
Alors qu'une grosse secousse à priori due à un incident sismique majeur semble être à l'origine des problèmes électriques constatés dans la base, il vous faut rétablir le courant en réajustant les panneaux solaires comme presque tous les jours, ce qui est bien curieux, d'autant plus que des batteries disparaissent de manière inexpliquée. Serait-ce le botaniste Lukas Van Buren qui se permettrait cela pour le compte des recherches de la xénobotaniste Inna Vokolva ? Quoi qu'il en soit, en attendant que le matériel pour analyser le problème arrive avec le reste du ravitaillement à bord du Cyrano, il va falloir sortir pour se rendre sur place à bord du Rover Myrcat. Il est en tout cas temps que la relève arrive car tout le monde est à cran et sujet à des hallucinations et autres rêves étranges ces derniers temps à force d'être coupé de tout contact en dehors des membres de l'équipage, y compris le commandant Joséphine Wilcox.
Avis de Tempête
L'ambiance posée par Moons of Madness est plutôt réussie et retranscrit bien son inspiration Lovecraftienne. En effet, au-delà de la présence de tentacules, la folie guette les personnages qui ont de plus en plus de mal à différencier rêve et réalité. La notion de rêve est d'ailleurs centrale ici, tout comme la présence de phénomènes inexpliqués, à l'image des nombreux cairns que Declan s'évertue à reconstruire chaque jour, mais qui chaque nuit voient un petit caillou situé au centre d'un tas échangé avec celui d'un autre tas. Seule une explication irrationnelle pouvant justifier cela, il y a de quoi perdre son sang-froid et sombrer peu à peu dans la démence et la paranoïa, surtout quand des hallucinations viennent conforter les théories tordues. Et il en est ainsi pour tous les astronautes de la mission, y compris vous-mêmes qui lors d'une phase surnaturelle verrez la cicatrice de votre main revêtir des aptitudes particulièrement inexplicables.
Ce qui semble en tout cas certain aux yeux de tous, c'est que quelqu'un ou quelque chose ne semble pas apprécier votre présence ici. De plus, de nombreux secrets sont enfouis tant au sein de la base elle-même qu'en-dehors de celle-ci. Et sans détenir tous les éléments pouvant expliquer ce que vous voyez, il est encore plus difficile de comprendre ce qu'il se passe. Que penser en effet des travaux gardés précieusement secrets par le Docteur Volkova ? En attendant, même si l'analyse des échantillons de terre et de roche n'ont, pour l'instant en tout cas, pas dévoilé de traces de microbes fossilisés, Declan vient de découvrir un site d'eau glacée à 36 km à l'est de la base qui semble prometteur et pourrait permettre d'avancer dans vos recherches.
Tout en anglais sous-titré en français, le jeu mise particulièrement sur l'environnement sonore pour distiller un sentiment d'oppression. Les crissements, craquements, grognements, et autres sons angoissants à base d'instruments à cordes sont omniprésents et vous accompagnent tout au long de votre aventure, incitant parfois à se retourner, souvent de manière injustifiée, pour voir ce qui pourrait bien se passer dans notre dos sans que l'on en ait conscience. De plus, lorsque l'on se met à courir, on voit s'accélérer le rythme des battements de notre cœur alors que notre souffle s'accélère, ajoutant encore plus de pression. La musique sait aussi être grandiose et majestueuse dans les moments clé de l'aventure.
Graphiquement, le titre sait également mettre en place un environnement oppressant avec des phénomènes plutôt efficaces comme la distorsion de la vision face à des situations angoissantes ou pour marquer l'arrivée d'un malaise. En revanche, il faut bien reconnaître que l'ensemble manque de finesse et que les personnages, en particulier, ne sont pas très réussis. Mais le recours à des subterfuges tels que les environnements sombres, la présence de brume ou encore l'arrivée d'une tempête de sable, permettent de justifier le manque de profondeur et une espèce de flou environnant. Le résultat est alors plutôt honorable. Même si là aussi l'effet n'est pas toujours très réussi graphiquement, les veines des yeux qui se chargent de sang en cas de stress ou de douleur savent bien rendre compte de la situation et encouragent à se calmer ou se protéger afin de récupérer pour pouvoir poursuivre sa route sereinement.
Phobos et Deimos
Régulièrement et un peu partout, vous observerez des symboles représentant 2 cercles qui se croisent. Rapidement, vous comprendrez que ceux-ci pourraient bien être liés à Phobos et Deimos, les deux satellites de Mars qui, curieusement, semblent de plus en plus proches et de plus en plus rapides. Si Moons of Madness apportera petit à petit des réponses à vos questions, certaines resteront malheureusement en suspens ou tout du moins assez obscures car insuffisamment expliquées. Globalement, on comprend tout de même à la fin les tenants et les aboutissants des différents événements, mais, à moins peut être d'être un scientifique chevronné en hyper-réalité, un certain flou demeure, ce qui, cela dit, rejoint un peu les sources d'inspiration du jeu.
Pour éclaircir tout cela, encore faudra-t-il par contre bien lire les nombreux documents que vous croiserez sur votre route ainsi que les différentes entrées sur les ordinateurs auxquels vous vous connecterez grâce aux badges des différents protagonistes. Rock Pocket Games nous offre ici avant tout une aventure narrative qui fait la part belle à l'exploration guidée. Les portes fermées, les passages bloqués, les retours en arrière coupés sont en effet légion et vous obligeront à suivre l'itinéraire prévu. Et au cas où vous vous perdiez, il est possible dans les options de donner l’opportunité d'activer une indication de direction. Même si à la toute fin deux conclusions sont possibles, c'est bien là la seule liberté que Moons of Madness vous accorde. Il faudra d'ailleurs refaire la scène finale si vous voulez assister aux deux fins et compléter vos succès.
Soit dit en passant, pour obtenir les 100% de succès, n'hésitez pas à vous faire électrocuter dans la blanchisserie. Le jeu ne proposant pas de menu des chapitres, il faudra en effet recommencer une partie si vous l'avez raté. Comme quoi, il faut curieusement parfois savoir échouer pour pouvoir être auréolé de succès. Contrairement à ce que l'on aurait pu croire au vu de La Créature dans la Brume aperçue en vidéo, aucun combat n'est ici au programme. Face à de tels dangers, seule la fuite est possible. C'est donc surtout de l'exploration qui vous attend avec aussi un peu d'infiltration lorsqu'il s'agit d'éviter les caméras et autres systèmes de sécurité. Bien qu'oppressant, le jeu ne s'avère toutefois pas vraiment effrayant. Si c'est ce que vous cherchez, vous risquez fortement d'être déçus.
En dehors de cela, le cœur du jeu réside dans la résolution d'énigmes afin d'activer un mécanisme ou réparer une technologie défaillante. Rappelez-vous que vous êtes ingénieur après tout. C'est grâce à votre bioscope, un dispositif biométrique attaché à votre bras, que vous pourrez scanner les objets à distance et vous connecter à eux lorsque cela est possible. Des mini-jeux s'ensuivent alors, et même si certains demandent de réfléchir un peu plus que d'autres, il n'y a jamais vraiment de difficulté d'en venir à bout. Il s'agit aussi parfois de jongler avec les batteries disponibles en quantité insuffisante ou de se mettre devant un panneau de commande afin de placer les interrupteurs dans la bonne position. Les puzzles s'avèrent assez variés et évitent ainsi la lassitude. Sans révolutionner quoi que ce soit, Moons of Madness permet en fin de compte de passer un bon moment pendant les 10 petites heures qu'il devrait vous occuper.
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