Photo : LoL Esports
Kameto s'est retrouvé une nouvelle fois, malgré lui, obligé de réagir en stream à cause d'une énième polémique autour de la manière de supporter son équipe. Cette fois, c'est Melon qui a déclenché l'engrenage, en critiquant, avec des mots peu châtiés, une partie des supporteurs de la Karmine Corp qui désiraient voir la région européenne faire un bon gros flop aux Worlds de League of Legends. Le raisonnement est simple : le but est de placer la KC dans une position de force pour souligner son importance et son potentiel de carry le LEC.
Mais certains membres de la communauté, notamment les plus anciens, voient d'un mauvais œil ce manque de solidarité. Pour être honnête, on n'a pas vraiment envie de prendre part à ce débat, surtout que le serpent se mord la queue indéfiniment. Mais on s'est dit que c'était peut-être une bonne idée d'expliquer d'où vient cette traditionnelle solidarité européenne quand viennent les compétitions internationales League of Legends. 4 arguments principaux nous semblent dignes d'être mentionnés. Cela pourrait ainsi apaiser les tensions et clarifier certaines positions. Libre à vous ensuite de supporter votre équipe à la manière de Melon (LEC enjoyer) ou à la manière prônée par le boss de la Karmine (KC ou rien).
L'argument structurel : le story-telling de Riot Games
Le débat qui oppose la communauté est un peu un clash de génération. Chacun a découvert l'esport League of Legends à sa manière et les "nouveaux fans", sont aussi légitimes que les plus anciens. Il n'y a pas de hiérarchie à faire et c'est important de communiquer avec respect et ouverture. Les "Ultras" de la Karmine Corp sont en moyenne plus jeunes, étant donné que la structure est née en 2020. Ils n'ont donc peut-être pas connu le développement de la scène et la structuration des régions à partir de 2013. C'est cette structuration régionale qui explique en grande partie la solidarité prônée par certains anciens.
All-Stars, Rift Rivals, Battle of the Atlantic... Par le passé, de nombreuses compétitions ont opposé des régions, qui se battaient comme un seul homme contre une région concurrente. En 2015, les All-Stars Los Angeles avaient enchanté les fans avec une grande finale EU vs Corée du Sud... Côté européen, on retrouvait une équipe composite mélangeant plusieurs clubs : Huni et Rekkles (Fnatic), Amazing (Origen), Froggen (Elements) et Kasing (H2K). Face à eux, la LCK faisait bloc avec Marin, Score, Faker PraY et MadLife. Ce genre de confrontation a peu à peu disparu... Mais ceux qui ont connu cette époque ont souvent été marqués par ce genre d'initiative prise par Riot Games. Ce story-telling poussait tous les fans européens à s'intéresser à l'ensemble de leurs représentants.
L'argument pragmatique : l'indice des Worlds
Cet argument manque peut-être de passion et certains considèrent qu'il est hypocrite sur les bords. Mais la réalité est ce qu'elle est : les équipes concurrentes d'une même région partagent un intérêt commun. Riot Games établit un classement en fonction des résultats aux Worlds et au MSI. Celui-ci détermine alors la hiérarchie internationale avec de vrais effets : nombre de slots (3 ou 4) et statut (appartenance à un chapeau). Pour le moment, l'Europe est 3e du classement et c'est grâce à ça qu'elle a obtenu un 4e slot au mondial cette année. Si les LCS étaient devant, ils auraient récupéré ce slot, laissé vacant par la région russe.
Quand on sait qu'il est extrêmement difficile de se qualifier aux Worlds, avoir une place supplémentaire est une véritable bénédiction. Si on fait un peu plus compliqué, se pose aussi la question de la compétitivité, de l'audience et des sponsors que ramène une équipe européenne qui performe bien à l'international.
L'argument identitaire : la seule alternative à la coupe du monde
Sur League of Legends, il n'y a pas pour le moment de véritable coupe du monde par pays. Le projet est souvent évoqué, mais on ne sait pas s'il aura lieu un jour... Il faut donc se contenter des Worlds, qui sont littéralement des Championnats du monde. Le statut est un peu hybride et avec le système des imports, il est impossible de parler de France vs Brésil.
Mais, il faut quand même souligner qu'il existe un vrai marqueur identitaire au sein des régions compétitives. Si on met de côté l'Amérique du Nord qui aime bien recruter des talents pourtant dans le monde, dans les équipes coréennes, il n'y a que des Coréens. En Chine, il y a une petite ouverture aux Coréens mais la tendance est de moins en moins prégnante. Enfin, si on s'intéresse aux 4 équipes du LEC qui représenteront l'Europe cette année, il y a un Turc et un Coréen sur les 20 joueurs. Le reste est composé de Belges, d'Allemands, de Polonais, d'Espagnols... Alors que les fans de la Karmine Corp aiment bien invoquer le football et son système de supporteurs, il faut imaginer un PSG en ligue des champions avec quasiment que des Français... sans Neymar (Brésil), Messi (Argentine), Verrati (Italie) ou Hakimi (Maroc). On imagine que dans ce cadre, les fans des autres clubs de ligue 1 (OL, LOSC voir OM) seraient plus enclins à soutenir l'équipe.
L'argument émotionnel : quelque chose d'au final très subjectif
Cet argument reprend un peu tous les arguments précédemment cités, en ajoutant une petite dose de pathos. Les fans les plus anciens de League of Legends, les LEC enjoyers, ont appris avec le temps à apprécier tous les joueurs de l'élite européenne. À force de les voir évoluer et de suivre leurs aventures, même en tant que fans concurrents, ils ressentent une proximité avec ces derniers. Certains ont même porté par le passé les couleurs de leur équipe préférée... Si on prend l'exemple de Fnatic, les supporteurs ont sûrement gardé de l'affection pour des figures comme caPs (G2), Nisqy (MAD Lions), Rekkles (Karmine Corp) ou Selfmade (Vitality).
Des dinosaures comme Odoamne (Rogue) ou Jankos (G2) ont aussi gagné l'amour et le respect de tous. On ne sait pas si c'est propre à League of Legends, mais cet attachement émotionnel est un facteur qui rentre en compte dans la solidarité européenne défendue par certains.