Comme vous le savez sûrement, Microsoft a annoncé son projet de rachat d'un autre géant du jeu vidéo il y a quelques mois, Activision Blizzard, contre 70 milliards de dollars. Cela lui permettrait d’acquérir de nombreux studios et des licences comme Diablo, World of Warcraft, et surtout Call of Duty. Mais une acquisition d'une telle ampleur exige l'autorisation d'un certain nombre d'agences gouvernementales un peu partout dans le monde, afin de s'assurer qu'il n'y ait pas une situation de monopole. Cela implique le FTC américain et la Commission Européenne, pour citer les 2 principaux, mais ils sont loin d'être les seuls. La procédure de ces agences consiste généralement à consulter différents intervenants notables du milieu, afin d'obtenir leur avis sur la question, cela comprend Ubisoft, Warner Bros, Apple, Riot, Google, Amazon, et bien entendu, Sony, qui a un avis bien tranché sur la question.
L'avis des géants du jeu vidéo sur le rachat d'Activision Blizzard exposé
Près de 20 agences de régulation sont impliquées, avec des pays comme le Japon, la Chine, le Royaume-Uni, chacune avec sa propre procédure et ses propres consultations. Cela comprend aussi le Brésil, avec le Conseil administratif pour la défense économique (CADE), qui a la particularité d'être très transparent. Cela veut dire que la large majorité des documents de ladite procédure et les échanges entre les organismes concernés sont disponibles en ligne (en Portugais), et ils peuvent être consultés librement. Quelques sections restent cachées pour des raisons de confidentialité, mais on peut y consulter des échanges particulièrement savoureux entre Microsoft et Sony. Idas, un utilisateur des forums Resetera, a pris le soin de rassembler ces informations et de les traduire. Et forcément, ce qui nous intéresse dans le cas présent est la longue réponse de Sony, que Microsoft a pu consulter, et à laquelle il a, à son tour, répondu. C'est dans ce contexte qu'ont émergé les accusations intéressantes auxquelles nous faisons référence plus haut : Microsoft accuse distinctement Sony de payer des studios et des éditeurs afin de leur interdire contractuellement de rendre leur jeu disponible dans des services en ligne concurrents, dont le Gamepass spécifiquement. Des documents sur le sujet avaient déjà émergé l'année dernière, lors du procès entre Apple vs. Epic.
Discussion par proxy entre Sony et Microsoft
Vous pouvez consulter la très longue compilation des échanges entre Sony et Microsoft à travers leurs réponses respectives au CADE Brésilien dans ce topic, toujours par Idas, sur Resetera (en Anglais). Voici néanmoins les points principaux qui ont été échangés :
- Sony estime que tous les jeux sont en compétition pour l'intérêt des joueurs, et qu'aucun développeur ne peut concurrencer la franchise Call of Duty d'Activision. C'est une franchise unique et irremplaçable. Et ils estiment que le Game Pass est anti-compétitif pour les éditeurs et ceux qui se reposent sur la vente de consoles. Ce modèle pourrait aussi réduire la qualité des jeux. Ils estiment aussi qu'il faudrait plusieurs années pour créer un concurrent au Game Pass. Pour finir, Sony dit que Call of Duty représente une source importante de revenus pour les consoles Playstation, et qu'ils ne veulent pas que Microsoft en ait l'exclusivité.
- Microsoft a alors répondu à ces éléments, toujours via le CADE. Microsoft affirme que sa capacité à étendre le Game Pass a été gênée par le désir de Sony à empêcher cette croissance, et que Sony paierait pour le droit de bloquer l'ajout de contenu sur le Game Pass et d'autres services à abonnement concurrents. De plus, Microsoft ajoute qu'il n'a pas l'intention de garder les jeux d'Activision Blizzard uniquement sur ses plateformes et ses services, puisque cela ne serait pas profitable. Pour cela, il faudrait que ça puisse attirer suffisamment de nouveaux joueurs sur l'écosystème Xbox, pour compenser les pertes de ventes provoquées par l'absence de ces jeux sur les consoles Sony (entre autres), et ce n'est pas le cas. D'après leurs calculs, les coûts des stratégies d'exclusivités seraient trop élevées, et même si elles étaient appliquées, cela ne produirait pas une situation anti-compétitive.