Photo : Andrea Sznajder
Le mercato est aujourd'hui quasiment bouclé en Amérique du Nord comme en Europe. Comme chaque année, de nombreux talents européens de League of Legends ont décidé de s'envoler pour les LCS. Personne ne doute du niveau du LEC, qui a une nouvelle fois réalisé une meilleure performance que son homologue américain cette année aux Worlds. Mais cet exode continu s'explique en grande partie par l'aspect financier. Les structures américaine ont plus de moyens et n'hésitent jamais à sortir le chéquier. La tentation est grande et durant cette intersaison, ce sont des joueurs comme Luka "Perkz" Perković (Cloud9), Finn "Finn" Wiestål (CLG) ou Andrei "Xerxe" Dragomir (Immortals) qui ont fait le trajet.
Difficile de juger s'ils ont eu raison ou non de faire ce choix de carrière, comme la saison 2021 n'a pas encore commencé. Rien n'est écrit à l'avance et, par le passé, certains européens se sont brillement imposés en LCS — mais pour d'autre, l'expérience a été bien plus compliquée. Flop, scandale, glissade ou descente aux enfers, voici notre top 5 des Européens qui auraient mieux fait de rester à la maison. On préfère prévenir les âmes sensibles : ce top subjectif de fin d'année s'annonce corrosif. Mais il ne remet pas en cause le niveau des joueurs concernés (quoique).
Seul le winrate en tant que joueur a été calculé en ne prenant en compte que les compétitions aux enjeux majeurs (hors ligue académique).
1. Bora "YellOwStaR" Kim, un problème de couple
Certains y verront un sacrilège, mais c'est notre YellOwStaR national qui occupe la première place du classement. Alors qu'il est encore au sommet de son art chez Fnatic, avec qui il a remporté pas moins de 5 titres de champions d'Europe, il décide de s'envoler outre-Atlantique chez TSM. Mais qu'est-il allé faire dans cette galère ? Son passage fut court mais terriblement douloureux pour les fans français et européens en général. Puisqu'en plus de voir cette icone du jeu galérer en LCS (saison régulière en 9-9), nous avons surtout constaté, totalement impuissants, le flot de critiques déversé par les Américains à son égard. Le Français n'a pas été irréprochable, mais les stars maisons qu'étaient Søren "Bjergsen" Bjerg et Yiliang "Doublelift" Peng ont été à l'époque souvent épargnées par les blâmes.
Avec ce dernier, le support n'a jamais réussi à trouver ses marques. Incompatible, ce duo de légendes a tourné court et a démontré que sans cohérence, le talent additionné ne suffisait pas. L'Américain n'a pas été tendre avec YellOwStaR et a critiqué ouvertement son style de jeu trop passif et son incapacité à jouer le rôle de playmaker. Le Français n'a pas fait de vague et il est revenu rapidement en Europe. Mais on imagine qu'il ne partira sûrement pas en vacances avec Doublelift. Ce qui est triste, c'est que YellOwStaR n'a ensuite plus jamais retrouvé le sommet, même s'il s'éclate aujourd'hui en LFL. Comme quoi, après avoir fait le tour du monde, tout ce qu'on veut c'est être à la maison.
2. Henrik "Froggen" Hansen, le flop dans la durée
Les plus jeunes ont peut-être oublié, mais Froggyboy faisait partie à l'époque des meilleurs midlaners européens, avec Alexey "Alex Ich" Ichetovkin et Enrique "xPeke" Cedeño Martínez. Alors qu'il collectionnait les highlights en vidéo, le Danois a subitement décidé de tenter sa chance en LCS. C'était en 2016 et depuis, on aimerait bien avoir de ses nouvelles. Alors qu'on pensait le retrouver régulièrement lors des tournois internationaux (MSI, Worlds), Froggen s'est lentement mais sûrement englué dans le fin fond du classement en Amérique du Nord, très loin de ses standards européens. Avec du recul il aurait peut-être mieux fait de rester en Europe. Même si avec des si on peut refaire le monde, ça lui aurait peut-être évité de finir en ligue académique... Où même là, il n'a pas assez convaincu pour être conservé.
Froggen a connu trois équipes en Amérique du Nord : Echo Fox, Golden Guardians et Clutch Gaming. Annoncé à chaque fois comme une tête de proue, il n'a jamais fait mieux qu'une 5e place et le bilan comptable est catastrophique après plus de 200 games jouées en LCS. Les fans américains ne garderont sûrement pas un grand souvenir de lui, si ce n'est qu'il animait la galerie en sortant de temps en temps des pocket picks bien exotiques. C'est mieux que rien, mais ça reste quand même pas grand chose. Petit ange parti trop tôt, il est actuellement sans équipe et pourrait bien prendre sa retraite dans l'anonymat le plus total. Chienne de vie pour ce Danois qui souffre de la comparaison avec Bjergsen et Nicolaj "Jensen" Jensen.
3. Paul "sOAZ" Boyer, envoyé en ligue académique
Troisième place, mais c'est déjà notre deuxième Français du classement. Si les Américains ont déjà connu quelques succès en débarquant en France, notamment en Normandie, ce n'est pas vraiment réciproque pour les tricolores qui tentent leur chance aux Etats-Unis. Alors que sOAZ était habitué à déguster du caviar en Europe (Fnatic, Origen), il s'est retrouvé à manger du fast-food tous les jours en LCS. Pire, chez Immortals, on lui a même réservé un menu enfant puisqu'il a été envoyé en ligue académique. Un affront pour un joueur qui a fini à deux reprises vice-champion du monde de League of Legends. Il faut sûrement reconnaître que le niveau du toplaner français n'était plus celui qui lui avait permis d'écrire sa légende et il avait déjà reçu un premier avertissement chez Misfits Gaming. Mais l'organisation et le management d'Immortals doivent aussi être pointés du doigt. La structure, résignée à tanker pendant l'année 2020, ne s'est pas vraiment préoccupée des résultats. Mais pire, elle n'a pas du tout protégé ses joueurs, notamment français, qui se sont retrouvés sous le feu des critiques. Quand on perd aux Etats-Unis, il n'est pas toujours bon d'avoir un passeport européen et certaines stars de la NBA pourront vous le confirmer.
L'expérience de sOAZ en LCS a en tout cas laissé des traces. Le Français a pris du recul et a mis entre parenthèse sa carrière de joueur pour tenter l'aventure de coach. Le voir s'arrêter sur cette fin de carrière ferait en tout cas un peu mal au cœur. On se serait bien passé de le voir souffrir contre des joueurs comme Omran "V1per" Shoura, Kim "Ruin" Hyeong-min ou Colin "Solo" Earnest qui, réunis, n'ont même pas le quart de sa carrière.
4. Kasper "Kobbe" Kobberup, le dindon de la farce
Kobbe pensait pouvoir vivre pleinement son rêve américain chez TSM. Après voir fait ses preuves en Europe avec Splyce, il débarque en LCS avec une réputation flatteuse et des promesses de succès. Mais le rêve se transforme rapidement et injustement en cauchemar. Il n'a eu sa chance que pendant un petit segment (4e place). Il n'a pas été le plus mauvais de son équipe mais a été poussé vers la sortie comme un malpropre. La raison ? TSM a préféré rappeler son ex, subitement de nouveau disponible sur le marché. Alors qu'on avait vendu monts et merveilles au Danois, il a subitement découvert que ce n'était qu'un plan B et qu'il ne faisait pas le poids face aux beaux yeux de Doublelift. De retour depuis en Europe, il réfléchira surement à deux fois avant de retenter l'aventure américaine.
Ce qui est d'autant plus tragique pour Kobbe, c'est qu'au moment de quitter l'Europe, il était dans une équipe qui faisait partie du top 3. Contraint à être rapatrié en urgence, il n'a pas pu faire la fine bouche. Avec Misfits Gaming, il a terminé à une triste 8e place lors du dernier summer split. Choisissez la morale de cette histoire : méfiez-vous des ex de votre partenaire ou méfiez-vous tout simplement des promesses de TSM.
5. Jesse "Jesiz" Le, une glissade record
Ce flop date un peu mais mérite amplement sa place dans ce top des glissades. Jesiz s'est fait connaître du côté de SK Gaming. Avec la structure il a fini vice-champion d'Europe et a représenté la région lors des Worlds. Fin 2014, il arrive donc en Amérique du Nord avec un CV qui laisse envisager de beaux succès. Chez Team Coast, il débute bien son aventure en qualifiant l'équipe pour les LCS. Mais l'épopée tourne court et Team Coast restera dans l'imaginaire collectif comme l'une des pires équipes du monde. Avec 1 seule victoire pour 17 défaites, elle sert de paillasson et finit dernière de sa ligue. Jesiz garde sans doute un souvenir embarrassant de cette expérience. Il n'a pas demandé son reste et il est rapidement revenu en Europe par la suite. De toute manière, il avait perdu sa place de titulaire chez Team Coast en cours de saison, un mal pour un bien pourrait-on se dire.
Mais Jesiz a replongé par la suite. Chez Dignitas lors d'un IEM il a joué le rôle de remplaçant de dernière minute pendant quelques jours, mais il s'est fait sortir dès le premier tour. Il a aussi intégré le coaching staff d'Immortals sur l'année 2016 avec des résultats mitigés qui laissent surtout un sentiment d'immense gâchis. Comme quoi, quand ça veut pas, ça veut pas. Il n'a retrouvé la lumière qu'en revenant en Europe, avec un quart de finale aux Worlds (joueur) et 3 titres aux European Masters (joueur et coach).