Crédits photos : Benjamin «ShortID» Martinet
Résumer R6:S à un jeu de tir où l’on compile les meurtres virtuels serait comme résumer le Football à « simplement courir après un ballon ». Ce serait une insulte envers les centaines de milliers d’aficionados de l’esport, portant une véritable dévotion à ce qu’apporte réellement Rainbow Six. À savoir : une valeureuse discipline esportive.
Tel un gamin un peu bizarre, différent des autres, mais ô combien talentueux, la licence compétitive d’Ubisoft s’est fait un nom en conservant sa propre identité et ce, qu’importe si les influenceurs de la cour de récré dominent les quatre coins de l’école ; si les autres n’ont d’yeux que pour les Battle Royale, ou se sont plutôt rangés dans les bandes de League of Legends ou de Counter Strike, déjà implantées depuis belle lurette. Rainbow Six chapeaute son avenir doucement, mais sûrement - corrige ses défauts, anniversaire après anniversaire, et séduit de plus en plus.
Il faut dire que la licence transpire l’ambition à grandes eaux et rêve - après trois ans de vie - de changer de statut. Elle pourrait bien se permettre, en se donnant les moyens, de se placer comme une discipline phare - participant à l’émergence toujours plus grande de l’esport - avec ses propres adhérents et sa culture personnelle. Et un mot d’ordre : le long terme.
Prenez le pour-compte, à partir du moment où vous poussez les portes de cet univers construit autour des œuvres de Tom Clancy’s, vous entrez dans un monde compétitif sain, prospère et construit pour durer. Ce qui constitue (déjà) un énorme avantage sur un marché aussi concurrentiel, mais dont on a encore du mal aujourd’hui à juger la stabilité.
Plus qu'un FPS ?
Lorsqu’on parle de Rainbow Six, on l’évoque aussi bien souvent avec ses autres appellations : le concurrent de Counter Strike ou le FPS compétitif d’Ubisoft. Or, cette dernière description n’est qu’à moitié complète. On devrait le décrire comme le FPS-MOBA compétitif d’Ubisoft.
Et si on cassait, dès maintenant, les idées reçues de l’opinion générale du gaming, en affirmant que R6 est le parfait embryon d’un rapport non protégé entre un League of Legends et un CS:GO ?
Il faut, en effet, dépasser l’aspect du Shooter et de la violence pour comprendre réellement cet OVNI. Reconnaître l’énorme part de stratégie faisant office en plein cœur du jeu. Les développeurs ne s’en cachent pas : R6 s’est beaucoup plus inspiré de mastodontes comme Dota 2 ou LoL que d’un CS. Car derrière ces disciplines - et la multitude de héros aux capacités variées qui leur sont propres - se cache un fort potentiel : celui de renouveler le jeu patch après patch, match après match, meta après meta.
Au-delà de ce gage de longévité, on pourrait faire l’impasse sur les armes et les échanges de tirs. Penser simplement à tout ce qu’exige un esport comme Rainbow Six. Principalement, le fait de devoir utiliser à la fois son cerveau pour faire des choix importants, son subconscient pour traiter la multitude d’informations qui viennent aux yeux et aux oreilles durant une partie, mais aussi la mémoire musculaire d’un bras, d’un poignet et d’une main pour faire vivre votre agent sur le terrain.
Ajoutez maintenant la modification en temps réel de l’environnement, la possibilité d’utiliser un réseau de caméras et de drones, sans oublier toutes les combinaisons d’opérateurs imaginables et les stratégies que cela implique : vous obtenez la véritable révolution qu’est R6:S sur le marché de l’esport. Et vous comprenez de facto en quoi il peut se démarquer de sa concurrence.
Bientôt le Tier One ?
Sommes-nous fous de croire que Rainbow Six pourrait atteindre le Tier 1 ? Clairement pas. Même s’il faut rester lucide et mesurer la longueur du chemin à parcourir, tous les signaux laissent à penser que les deux prochaines années pourraient être synonymes de passage à l’âge adulte pour l’audacieuse licence esportive d’Ubisoft.
Les bases sont très bonnes et ont attiré les plus curieux. Aujourd’hui, après seulement trois ans d’existence, R6 figure dans le Tier 2, en répondant aux critères de Cashprize, de nombre de spectateurs sur les plateformes de streaming ou encore grâce à son nombre d’utilisateurs actifs par mois. Repoussant ainsi de plus en plus loin les attentes des joueurs et des acteurs de l’esport en général. Peu étonnant, nombreux sont les médias, les sponsors, les structures, les recruteurs de talents et autres vecteurs de l’industrie à se tourner - les yeux pleins d’interrogation - vers Rainbow Six.
Mais reste une vraie question à résoudre pour leur prouver qu’ils sont dans le bon mood : comment l’équipe en charge du jeu va-t-elle finir de polir un joyau qui ne demande qu’à sortir de son écrin, pour s’afficher aux côtés des autres cailloux luxueux présents sur la main de l’esport ?
La réponse est simple : pour démocratiser son produit et son esport, Ubisoft va devoir faire en sorte que tout le monde comprenne de quoi il est fait et qu’est ce qu’il peut apporter aux joueurs et aux passionnés, en termes de valeurs et de spectacle. Les objectifs sont d'autant plus clairs : la licence devra offrir une expérience de jeu plus agréable, pour les débutants comme les plus aguerris. En parallèle, une expérience de spectateur plus facile à comprendre, le tout en conservant la formule magique de ce qui a fait sa réussite jusqu’ici.
Si R6:S parvient à mieux exporter son concept et à fédérer toujours plus autour de lui, alors il pourra venir toquer à la porte des LoL, CS:GO ou Dota 2, afin de revendiquer une plus grosse part de « l’esport cake ».
Dans cette optique - et pour savoir si le travail des équipes d’Ubisoft converge dans ce sens - nous avons réalisé deux Interviews exclusives, durant le Six Invitational 2019, avec deux acteurs majeurs du développement de la licence. Vous pouvez retrouver ces entretiens à l'aide du menu déroulant ci-dessous.