Samedi 5 avril, alors que les premiers rayons de soleil perçaient à peine le ciel français, Joo « Zest » Sung Wook a remporté la saison 1 de GSL Code S 2014 au terme d'un finale absolument dantesque contre Eo « soO » Yoon Su. Indubitablement la finale dont StarCraft II avait besoin après la baisse significative d'audience des WCS Corée en 2013.
Une saison mitigée
La saison n'annonçait pourtant rien de glorieux, au contraire. Après le Code A, devenu l'étape obligée se déroulant avant le Code S, seuls trois petits Terrans avaient gagné leur place dans la ligue la plus prestigieuse au monde : Maru, Bbyong, et SuperNova. Pis, Flash avait terminé dernier de son groupe de Code A, tout comme FanTaSy ou INnoVation. Les stars de Proleague sont décidément maudits en GSL.
Sur la ligne de départ, la moitié des effectifs étaient composés de Protoss dont certains relativement inconnus, presque éligibles au rang de MMD coréen, tels Stats, ParalyzE (l'Afrotoss), ou encore Zest. Côté Zerg on retrouvait tous les grands noms avec Soulkey, Life, DRG, Curious, Leenock, et Solar qui avait brillé en Round 1 de Proleague. On se préparait donc à voir du PvP et du ZvZ en veux-tu en voilà, et de ce point de vue on a été servi.
Heureusement, Maru était là. Portant sur ses frêles épaules tous les espoirs Terran, il aurait pu défier les statistiques et arriver jusqu'en finale. De fait, l'héritier de MarineKing est à n'en pas douter le troisième meilleur joueur de cette saison de GSL. En termes de scores, il n'a pas atteint les demi-finales, certes. Mais il aura fallu un Zerg pour l'abattre, et pas n'importe qui puisque c'est le prodige himself, StarTale Life, qui s'est acquitté de cette lourde tâche.
De plus, cette saison de GSL voyait le retour de l'abonnement à GOMTV, devenue GOMeXP. Impossible pour les viewers d'accéder au 720p ou aux VODs s'ils n'ont pas payé une souscription. Le déséquilibre dans la répartition des races, l'absence des figures de proue Terran et l'obligation de payer pour voir (chose dont les viewers ont perdu l'habitude depuis les WCS 2013), la saison s'annonçait bien morne.
Le regard qui tue
Bien entendu, la GSL est une compétition à part. Si l'on excepte Sniper-HyuN ou RorO-Symbol, qui manquaient violemment de glamour, la finale du Code S est toujours un événement très suivi. En témoigne le studio plein à craquer de samedi dernier. Pourtant, cette finale aurait pu être comme la précédente, Dear-soO : aussitôt jouée, aussitôt oubliée, ou presque.
Le 7 février, un Zest fraîchement qualifié en Code S via le Code A marche allègrement sur Trap et Leenock. Nous n'en sommes qu'au Ro32 et, même si les plus avisés retiennent son nom, la plupart des viewers zappent presque instantanément. Zest n'est pas une tête d'affiche. Pas encore du moins. Il commencera à le devenir quatre jours plus tard. C'est la grande finale du Round 1 de Proleague, les deux monstres que sont SK Telecom T1 et KT Rolster s'affrontent. Le joueur Protoss se fait un apéro de Rain, enchaîne avec une salade sauce Soulkey, une brochette de soO et, cerise sur le gâteau, souffle les bougies de PartinG, plongeant SK Telecom T1 dans le noir le plus total.
Lorsque vient le Ro16 du Code S, il n'est plus tout à fait un inconnu, mais pas encore une gloire. Pour ce faire il a besoin de confirmer. Or, et c'est là qu'on touche à la magie de cette saison, Zest tombe dans le groupe de Maru. Jouissant de bien plus d'aura ainsi que du soutien de tous ceux qui rêvent de voir un Terran s'imposer dans cette saison bancale, la performance de Zest, qui sort deuxième du groupe, passe inaperçue. Ce n'est que lorsqu'il balaie le champion des IEM World, sOs, d'un sec 3-0 en quarts de finale que la communauté commence à réaliser qui est Zest. Et de n'en retenir qu'une image :
Ce visage, qui n'est pas sans rappeler Jaedong, reflète pourtant une réalité plus abrupte que la "simple" rage de vaincre. Lors de l'interview précédant la finale, Zest dévoile en effet que c'est pour son père, mort avant ses débuts, qu'il veut cette victoire.
Trois ans, c'est le temps qu'il aura fallu à Zest pour atteindre son objectif. Ce faisant il devient le premier vrai « Royal Roader » de l'histoire : le seul à s'être qualifié au Code A, à avoir vaincu son groupe pour accéder au Code S puis remporter la grande finale. Sa popularité est à l'image de son parcours. Zest n'est pas arrivé du jour au lendemain. Il a travaillé dur et s'est entraîné des mois voire des années dans un seul but : devenir le meilleur.
L'autre champion
Outre l'absolue perfection des sept parties la composant, cette finale est aussi exceptionnelle de par l'autre joueur. Nous vous le disions avant sa demi-finale, soO est un joueur à suivre. À quelques détails près, il a montré un niveau de jeu fabuleux et une ténacité digne des vrais champions. Et là encore c'est un regard que nous retenons...
soO n'a commis quasiment aucune erreur dans la finale. Si vous recherchez désespérément les VOD, sachez que tout vient à point à qui sait attendre. La game 4 reflète à elle seule l'ensemble de la finale. Le Zerg de chez SK Telecom T1 s'oriente sur un cheese Cafards. Il tue 19 Sondes et laisse Zest gisant. Personne ne peut imaginer comment soO peut perdre cette partie tant il est en avance. Il enchaîne sur des Mutalisks, prêt à mettre le coup de grâce à son adversaire Protoss. C'est sans compter la résilience de Zest. Vague après vague, Zest défend. Passif, il attend l'erreur qui lui permettra de revenir dans la course. soO la lui offre de par son impatience à terminer la partie. Une erreur que nous avons tous commise, comme le soulignera à juste titre Tasteless. Une erreur qui lui coûtera le trophée.
Le joueur Zerg repart tout de même avec près de 15 000 $, et une réputation de joueur solide. Il n'est jamais aisé de terminer second, encore moins quand c'est la deuxième fois de suite. Peut-être certains se moqueront-ils de soO, le comparant à MarineKing. On peut le lui souhaiter : d'exploser sur la scène internationale et remporter de grands tournois internationaux comme le roi des Terrans avant lui.
Quoi qu'il en soit, soO aurait amplement mérité une victoire. C'est ce qui fait la grandeur des finales dont on se rappelle même plusieurs mois après. Ce fut le cas lors de la finale Soulkey-INnoVation, ou Life-Mvp avant cela : lorsque les deux joueurs sont si bons, sortent tellement du lot et montre un jeu si parfait qu'on en regrette qu'il doive y avoir un vainqueur, et un vaincu.
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