La sortie de Final Fantasy XIV : A Realm Reborn est prévue pour fin août. Le sujet principal dont les futurs joueurs discutent concerne le modèle économique du jeu. Naoki Yoshida, directeur et producteur, explique son choix de l'abonnement mensuel.
Il est vrai que le modèle free-to-play plaît à beaucoup de joueurs qui ne souhaitent pas être soumis à un abonnement mensuel et ainsi être libres de jouer comme ils l'entendent. En tant que producteur du jeu, Yoshida nous fait part de son point de vue , peu connu des fans. Pour lui, un abonnement n'est pas forcément mieux que le free-to-play. Tout dépend de la gestion du modèle par la société qui le crée.
Naoki Yoshida sur Modèle économique du jeu (Source)
ll y a toutes sortes de MMOs. Nous les classons dans deux grandes catégories. D'une part, le groupe des jeux comme Rift ou Star Wars, des MMOs à très grande échelle avec des licences bien établies. Et vous avez les MMOs plus petits, qui sont peut-être de nouvelles licences n'ayant pas besoin d'autant de joueurs pour être un succès. Commençons avec le groupe des "gros", les MMOs à gros budget, les Rift, les Star Wars, Age of Conan ou le Seigneur des Anneaux Online. Ces jeux ont tous démarré sur un modèle à abonnement, ou bien le prévoyaient lorsqu'ils étaient en développement. Puis, en cours de route, ils ont basculé vers le free-to-play.
Prenons à nouveau des jeux comme Rift ou Star Wars. Bien qu’il y ait des gens pour affirmer que le marché a changé et que tout le monde se dirige vers le free-to-play, jusqu’à récemment, ils développaient un système à base d’abonnement. Même lorsque tout le monde dit que l’industrie passe au free-to-play, ils ont conçu ces jeux énormes tout en ayant des abonnements à l’esprit. Encore une fois, on n’est pas en train de dire que l’un est meilleur que l’autre, que le free-to-play est mieux que l’abonnement ou que l’abonnement est mieux que le free-to-play. Mais pour un gros jeu à cette échelle, le plus important, plus important encore que de gagner beaucoup d’argent, c’est de se créer un revenu stable, une somme d’argent stable sur une longue durée. Et pour développer d’aussi gros MMOs que ceux-là, vous avez besoin de dépenser beaucoup de temps et de ressources, ainsi qu’une équipe conséquente.
Pour y arriver, il vous faut beaucoup d’argent, et pour avoir cet argent, en général vous faites appel à des investisseurs pour financer votre jeu. Comme vous en avez beaucoup dépensé pour préparer le jeu et que vous en avez emprunté une grande somme à ces investisseurs, lorsque le jeu sort, les investisseurs attendent des résultats. Si votre jeu gagne de nombreux joueurs et abonnés tout de suite, vos investisseurs sont contents et vous pouvez les payer. Mais que se passe-t-il si vous n’atteignez pas ce résultat immédiatement ? Vous avez des employés qui attendent leur salaire. Vous avez des investisseurs qui attendent leur dû. Vous avez tout un tas de contenu qui doit être créé, parce qu’il faut bien produire des mises à jour, mais vous ne pouvez pas le faire parce que vous n’avez pas l’argent, parce que vous n’avez pas atteint le nombre que vous vous étiez fixé. Alors, que faire? L’une des options pour se renflouer rapidement est le free-to-play, ou la vente d’objets. Pour obtenir l’argent dont vous avez besoin pour payer votre équipe, payer vos investisseurs, et commencer à créer du nouveau contenu, l’une des façons de faire est de basculer vers le free-to-play, vendre des objets et utiliser ce revenu.Alors pourquoi est-ce que Rift ou EA avec Star Wars n’ont pas fait comme ça dès le départ ? Pourquoi ne pas avoir commencé directement en free-to-play ? Il y a une bonne raison à cela. Avec le free-to-play, puisque vous vendez des objets, il y aura des mois où vous vendrez beaucoup de trucs et où vous ferez énormément d’argent en un seul mois. Mais ça, ça ne dure qu’un mois. Le mois d’après, la personne qui vous avait acheté pour 100$ d’objets le mois précédent peut très bien ne rien acheter du tout. Vous ne savez pas ce que vous allez gagner, et comme vous n’en avez aucune idée, vous ne pouvez rien planifier à l’avance. Vous ne savez pas combien d’argent vous allez gagner dans le mois. Si vous ne pouvez pas prévoir à l’avance, alors vous ne pouvez pas garder votre équipe, parce que vous ne savez pas s’il y aura assez pour payer tout le monde le mois prochain.
Avec un modèle à abonnement, si vous avez, disons, 400 000 abonnés, vous savez quelle somme d’argent vous aurez de cet abonnement pour le mois d’après. Vous savez aussi que vous avez 400 000 abonnements ce mois-ci, et que ce nombre ne va pas s’écrouler à 200 000 d’ici un mois. Ce genre de bond n’arrive jamais dans un modèle à abonnement. Et donc, vous savez que vous allez avoir un revenu régulier. Et comme vous avez un revenu régulier, vous pouvez commencer à faire des plans et des prévisions. Vous pouvez vous assurer d’avoir une équipe pour créer du nouveau contenu. Et en créant ce contenu, vous rendez vos joueurs heureux. Si les joueurs savent que leur jeu continue de recevoir du nouveau contenu, ils continueront de payer leur abonnement mensuel. Donc, au lieu de toucher ces “100 millions de dollars en un seul mois” qu’on pourrait avoir avec un modèle free-to-play, avoir ce revenu régulier nous permet de fournir un meilleur produit aux joueurs.
Maintenant, regardons Blizzard et regardons Square Enix. Nous sommes les deux seules compagnies de cette industrie, à peu près, à créer des MMOs avec notre argent propre. Cela nous donne un avantage, parce que là où d’autres compagnies doivent aller chercher l’argent auprès d’investisseurs et doivent ensuite les rembourser, nous ne passons pas notre temps à construire lentement de quoi rembourser des investisseurs. Avec Square Enix ou avec Blizzard, comme nous mettons nos propres fonds sur la table, nous n’avons pas à nous soucier d’investisseurs, ce qui veut dire qu’on peut sortir quelque chose et peut-être souffrir un peu au début, mais à mesure que le nombre de nos abonnés augmente, nous pouvons ensuite récupérer notre argent et contenter les joueurs. Nous rentrons alors dans ce cycle dont je parlais tout à l’heure, là où nous créons du bon contenu et recevons un revenu régulier qui nous permet de continuer.
Avec la version 1.0 [de FFXIV], même si c’était un échec, nous avions tout de même une base de joueurs. Pendant que nous développions la version 2.0 du jeu, nous avons également réussi à tripler notre nombre d’abonnés. Là encore, cela prend du temps. Cela demande de démontrer aux joueurs qu’on est vraiment à fond dedans, qu’on va leur donner du contenu. Mais à partir de là, on a pu observer une progression. Voilà ce que nous cherchons à faire. Encore une fois, je ne dis pas que le marché n’a pas changé. C’est juste qu’il y a deux modèles différents. Choisir celui qui correspond à votre produit et réussir avec ce modèle, voilà ce qui importe. Nous pensons que plus le jeu est gros, plus votre MMO est à grande échelle, mieux cela vaudra pour le jeu s’il suit un modèle à abonnement.
C’est pour cette raison que vous voyez beaucoup de compagnies qui ont essayé le modèle à abonnement, elles voulaient faire la même chose que nous, mais ont été contraintes au free-to-play. Elles n’y sont pas allées par choix, parce que si elles l’avaient choisi, elles auraient fait du free-to-play dès le début. Elles auraient développé leur jeu pour le free-to-play, pas pour l’abonnement, au lieu d’être forcées à aller vers le free-to-play. J’entends beaucoup de gens dire : “Star Wars est free-to-play maintenant, c’est génial !”. Mais ensuite vous leur demandez s’ils jouent à Star Wars en free-to-play et ils vous répondent : “Non, je n’y joue pas vraiment”. Tout le monde dit combien c’est génial qu’il soit passé free-to-play, mais lorsque vous demandez autour de vous, vraiment, il n’y a pas tant de monde que ça qui y joue depuis qu’il est gratuit. Si vous dépensez tout votre budget dans un jeu, que vous le sortez, et qu’il est plein de bugs et que vous n’avez pas le temps de faire vos mises à jour, les joueurs s’en iront. Les joueurs ont besoin de nouveau contenu. Si vous ne pouvez pas le leur donner, vous êtes cuit. S’ils avaient pu produire le contenu que les joueurs réclamaient, ces joueurs y seraient restés. Nous ne pensons pas que le problème vienne du modèle économique. Ça vient de la manière dont c’est géré.
Pour les plus sceptiques, rappelons que le jeu Final Fantasy XI entame sa 12éme année et que l'abonnement a toujours été présent. Il faut maintenant que Final Fantasy XIV ARR puisse à son tour fournir suffisamment de contenu et une sortie sans soucis pour justifier son tarif.
Lothia avec Sinic et CodeSqual