À la vue des groupes, Alliance avait toutes les chances de s'en sortir. Quant à Fnatic, la mission paraissait difficile, voire compromise. Impossible, cela paraissait, impossible, ce fut. Le parcours des Fnatic se termina rapidement, avec seulement deux victoires au compteur (source : Millenium). Cette compétition, la dernière pour Rekkles sous les couleurs Fnatic, ne fut que la suite logique d'une baisse tangible de niveau chez les Fnatic : Cyanide, en jungle, a réalisé une très mauvaise compétition, et Xpeke ne fut, lui non plus, pas au rendez-vous. La déception est légitime, tant Fnatic demeure l'équipe adulée en Europe, de par son passé et ses capacités, mais l'objectif était clairement hors de portée. Seule consolation, leur magnifique victoire contre les SSB, un chant du cygne qui a nourri les regrets des fans.
En revanche, Alliance avait toutes les cartes en main pour sortir des poules. En pleine confiance, la deuxième place dans ce groupe D était tout à fait jouable. C'était sans compter une défaite aussi ridicule qu'inattendue face aux modestes Kabum, qui a signé l'arrêt dans le tournoi des Européens. Cette défaite est d'autant inexplicable qu'elle intervient au moment où Alliance devait gagner pour terminer deuxième. Elle signe aussi l'incapacité des équipes européennes à répondre présent et à rester concentré à chaque instant d'une compétition majeure, là où les Coréens ont fait preuve d'une solidité permanente.
En effet, comment ne pas qualifier les World Championship autrement que par l'adjectif « asiatique ». La domination écrasante des Coréens, et en second temps, des Chinois, s'est fait ressentir : les quatre premières équipes viennent de ces deux pays. Les Samsung White n'ont laissé que des miettes à leurs adversaires, écrasant 3-0 en demie leurs jumeaux SSB et 3-1 en finale les chinois des Royal Club. La prestation du duo ImP/Pawn fut tout simplement impressionnante
Le support des Royal Club a d'ailleurs encore séparé la scène NA et Eu lors de son interview d'après World
L'Asie, avec trois équipes coréennes et trois équipes chinoises en quart de finale, a dominé ce Championnat du monde. À ton avis, de quoi manquent les équipes européennes et américaines en comparaison des équipes asiatiques ?
Il est vrai que cette année l'Asie a conquis les Championnats du monde, mais je pense que les équipes américaines ont beaucoup progressé et qu'elles ont montré leur valeur lors des Worlds. Les équipes européennes quant à elles ont encore du travail à faire.
Il met parfaitement en avant l'incroyable échec des Européens qui n'ont pas su tenir leur rang, manquant à la fois de maturité et de persévérance.
Ces Worlds ont ainsi été l'ultime symbole du fossé permanent entre scènes occidentales et scène asiatique. La fronde, menée l'an dernier par les Fnatic a fait long feu, et les Coréens ont eu plaisir à rappeler qui dominait. Samsung White en tête, les multiples oppositions entre Occidentaux et Asiatiques ont très souvent tourné à l'avantage de ces derniers. Pire, aucune équipe occidentale n'a atteint les demies-finales. Pour mieux illustrer ceci :
Groupe A | Groupe B | Groupe C | Groupe D | Quart de finale | |
Résultat des rencontres Asie/Reste du Monde |
6-0 | 4-4 | 5-3 | 4-2 | 6-2 |
SK Gaming aura été l'ultime déception européenne aux World. Partis pour être de grands outsiders, les SK ont vu leur jungler Svenkeren se faire ban pour les trois premiers matchs pour « racisme » (il a nommé son compte TaipeiChingChong), sanction synonyme d'un handicap très lourd. Finissant troisièmes d'un groupe abordable, ils signent le manque absolu de concentration des Européens lors d'une grande compétition, voire leur puérilité face au sérieux des Asiatiques.
On nuancera néanmoins la domination asiatique avec une énième déception, celle des Taipei Assassin. Les champions du monde saison 2 n'ont pu rivalisé avec l'armada coréenne, finissant au-delà de la 13e place (source : Millenium). C'est une déception de taille étant donné le potentiel de l'équipe taïwanaise, que de finir dernier du groupe B, avec un cinglant 1-5.
Les World n'ont pas seulement démontré la puissance des empires asiatiques. Ils ont permis le dernier déclic pour bon nombre d'équipes de se modifier en profondeur, et pour certains joueurs de se remettre en question. C'est après une défaite amère aux Worlds que Rekkles a décidé de prendre un tournant dans sa carrière, en se dirigeant vers les Alliance. La claque reçue aux World ne fut que l'ultime étape d'un parcours 2014 marquée par beaucoup plus de hauts que de bas. Leur défaite aux LCS, succédant déjà à un premier revers aux IEM Cologne (battus par gambit en finale), avait déjà marqué la tonalité. L'amoncellement de critiques sur leur style de jeu, de plus en plus tourné vers leur AD carry, et leur manque de constance, portèrent le coup fatal. Fnatic aujourd'hui n'est plus, ou presque. Seuls demeurent sOAZ et Yellowstar, xPeke et Cyanide ayant eux aussi de quitter la structure (le premier pour créer sa propre équipe, le second pour prendre du temps pour lui). 2014 a ainsi signé la fin des Fnatic tels que nous les connaissions, cette équipe imprévisible, au jeu agressif et capable de battre les meilleurs.