Suite directe du deuxième épisode de notre chronique hebdomadaire dédiée à vos meilleurs souvenirs dans World of Warcraft, nous vous invitons cette semaine à nous raconter quel a été le raid ayant le plus marqué votre esprit. Non seulement pour ceux doutant encore de l'avenir de World of Warcraft, mais aussi pour que les nouveaux joueurs puissent découvrir ce que peuvent avoir vécu les plus anciens, ou même tout simplement pour partager et apprécier ensemble vos souvenirs les plus marquants.
Épisode 3 : Le raid de votre cœur
Nous sommes tous marqués par certains raids plus que par d’autres, ceux qui nous font die & retry pendant des mois, ceux qui nous ont vu réussir après tant de tentatives infructueuses, ou ceux qui nous ont simplement tenus en haleine, vu leur importance dans le Lore de World of Warcraft. Quel est le vôtre, et pourquoi ?
De mon côté, c’est Ulduar, le raid mythique de Wrath of the Lich King, même si nos débuts furent plus que compliqués et qu’au final, je n’ai jamais eu l’occasion de le terminer. Ulduar constitua aussi et surtout le point de rupture de ma guilde, le moment où nous avons décidé que nos routes devaient se séparer. Malgré tout, il me semble que notre histoire avec ce raid, dans ses bons comme dans ses mauvais moments, est assez emblématique du ressenti des joueurs dans les guildes aspirantes PvE HL de l’époque et de la nécessité de savoir dire au revoir quand il n'y a plus de fun et que les moments passés ensemble deviennent au mieux, agaçants, et au pire, douloureux.
Note : Par respect pour les anciens membres de cette guilde, je ne mentionnerai ni leurs pseudos, ni le nom de la guilde. Même si nous nous étions globalement séparés en mauvais termes – en termes neutres, mais pas top, dirons-nous – je leur conserve une estime certaine, en souvenir de tous les très bons moments qui ont précédé l’épisode compliqué d’Ulduar. Eh oui, malgré tout, Ulduar reste mon raid préféré car c’est avec lui que j’ai atteint mon meilleur niveau sur le jeu, mais pas que…
Le commencement
J’avais rejoint cette guilde littéralement par hasard. A l’époque, je jouais sur le serveur Khaz Modan, un « petit » serveur, majoritairement peuplé de casu. J’en étais, je m’y sentais bien. Sam Vostok a un jour expliqué qu’il aimait explorer les zones qui n’étaient pas de son niveau, juste parce que le moindre mob rôdant trop près du sentier principal devenait un danger et procurait une petite décharge d’adrénaline. Je faisais déjà complètement partie de cette mouvance des joueurs et joueuses plus intéressé(e)s par le Lore, les paysages et les embuscades que par le leveling. C’est donc tout naturellement qu’à un niveau 20 ou 25, je me suis retrouvée à Azshara… Mauvaise idée, ma pierre de foyer était en cool down ; je vous laisse imaginer la suite. Les morts en boucle avaient déjà bien affecté mon équipement, et je ne voyais pas vraiment de solution pour, ne serait-ce que sortir du cimetière. De guerre lasse, j’ai envoyé un message de détresse sur le chan de la zone – un peu honteuse quand même, il faut bien le dire, et contre toute attente, un joueur m’a répondu et m’a escortée en lieu sûr. On a rapidement sympathisé et il m’a proposé de rejoindre sa guilde. Voilà comment tout a commencé.
Nous étions dans les derniers mois de Burning Crusade, au printemps 2008, et je venais donc d’intégrer une petite guilde qu’on qualifierait de « familiale » : agréable, drôle, bienveillante ; je peux dire, sans me tromper, qu’à cette époque, nous étions heureux de jouer ensemble. Mon retard de leveling sur les autres a été comblé juste avant la sortie de WotLK en novembre 2008. Les choses sérieuses allaient commencer : les raids à 10 !
Naxxramas, le début des réjouissances
Il est arrivé comme un réel défi : Naxxramas, le raid l’immense nécropole flottant au-dessus de la Désolation des Dragons. Je trouvais ces rendez-vous nocturnes, à 10 devant l’entrée, particulièrement excitants. On savait que ça allait être difficile, exigeant, parfois pénible, mais aussi que tomber un boss de plus par rapport à la dernière tentative serait tellement gratifiant. Encore aujourd’hui, l’attente impatiente de l’heure fatidique de début de raid me manque.
Tout le monde a progressé et petit à petit, on a vidé cette saleté de nécropole. J’y ai appris la technique du kiting sur Grobbulus et, comme tout le monde, j’ai « dansé » pour tomber Heigan, l’Impur. J’ai aimé chaque étape de Naxxramas, chaque petit bout de progression. Avec ce qu’on avait appris là bas, c’était sûr, on ne ferait qu’une bouchée d’Ulduar !
Ulduar, les choses sérieuses commencent
Quelques semaines avant de commencer Ulduar, notre chef de guilde a disparu pendant 10 jours, non sans avoir disband la guilde, à la grande incompréhension du reste de l’équipe, moi y compris. Lorsqu’il est revenu, il a fait savoir à tout le monde qu’il recréait une guilde… PvE HL ! Et ce terme… ce terme… je pense que je l’ai entendu des centaines de fois à partir de cet instant. L’objectif, c’était de devenir PvE HL, de penser PvE HL, de manger PvE HL, de dormir PvE HL, PvE HL, PvE HL ! Deux officiers chargés de faire de nous des winners du PvE HL ont également rejoint la nouvelle guilde. Voilà pour le contexte dans lequel nous avons entamé Ulduar.
Ulduar était un raid mythique. Horriblement difficile, mais tellement bien foutu, tellement pénétrant. L’ambiance de chaque salle, chaque pont, chaque dialogue faisait hérisser les poils de mes avant-bras. Mais Ulduar dénotait aussi par son originalité dans les combats. Le premier boss, le Léviathan des Flammes, gardant l’entrée, ne pouvait être défait que par le maniement d’engins de siège. Et c’était vraiment réjouissant de se battre « différemment ».
Les problèmes arrivèrent lorsqu’il devint clair que certains de mes compagnons et moi-même n’avions pas le niveau pour… le sacro-saint PvE HL. Les boss suivants nous donnèrent du fil à retordre, pas seulement parce qu’ils étaient difficiles, mais parce qu’il nous manquait quelque chose pour les tomber proprement. L’ambiance a commencé à se crisper entre les officiers et le reste de la guilde. En tant que démoniste, on me fit savoir que j’aurais dû être en première place du classement DPS à la fin de chaque combat et qu’il n’était pas normal que je ne sois que seconde ou troisième. Ce n’était pas faux, compte tenu de la surpuissance du démoniste à l’époque.
Le moment de gloire
Bien décidés à avancer dans ce raid de l’enfer, tout le monde y a mis du sien. Je ne me suis jamais autant intéressée aux guides de classe qu’à cette époque. J’ai même étudié jusqu’à la configuration de mon clavier pour enchaîner les sorts plus rapidement. Et ça a payé. Un soir, sur le Déconstructeur XT-002, je me tais, concentrée. Je ne regarde que le boss, je décale pour l’avoir directement dans mon champ de vision, sans rien, ni personne entre nous. J’enchaîne mes sorts à la perfection, je connais tous mes cooldowns par cœur. Aucune fausse manœuvre, aucun missclick, pour une fois, la première fois, la meilleure fois. Plus rien d’autre ne compte que ce boss, ce foutu boss. Mes yeux s’accrochent aux mouvements de bras que fait mon perso lorsqu’il lance un sort, comme un tempo. Placement, Affliction, burst. Il tombe. Enfin. Je suis première au classement DPS. Ça y est,on a réussi. Je suis fière de nous.
L’euphorie du moment ne sera pas appréciée de la même manière au sein de la guilde. En bas, on est contents, fiers, pleins d’espoir. En haut, on est un peu rassuré, mais considère surtout que le niveau de jeu qu’on a montré sur ce boss est normal, tout juste passable, qu’il doit constituer la base sur laquelle progresser. La base… alors que nous avions l’impression d’avoir tout donné ce soir-là.
Les raideurs de la galère
La suite de notre épopée à Ulduar sera à l’image de la première partie : laborieuse. Quelques belles victoires, mais une inconsistence chronique chez plusieurs membres de la guilde, moi y compris. Et une frustration grandissante des deux côtés. Le côté de ceux qui voulaient juste jouer pour s’amuser et le côté de ceux qui jouaient pour performer. Et c’est bien cette différence-là qui faisait qu’on n’aurait jamais dû continuer à jouer ensemble. Cette règle aujourd’hui admise dans le PvE HL, mais qui était plus floue à l’époque ou moins respectée sur les petits serveurs : on n’atterrit pas comme par magie dans une guilde de haut niveau – ou qui se conçoit comme telle. On y postule, on s’y prépare, on discute de sa motivation et de ses attentes avec les officiers pour finalement, si tout concorde, être recruté, parce qu’on partage une même vision du jeu et un même objectif. Nous avions été intégrés au roster parce que, tout simplement, nous étions là, disponibles, ce qui économisait le temps et l’énergie d’un recrutement fastidieux, mais qui, au final, a plombé les ambitions de notre maître de guilde.
Comme l’ambiance se détériorait, nous avons fait de moins en moins d’efforts. Les combats étaient silencieux, juste entrecoupés de soupirs d’agacement, d’ordres secs, et de casques qu’on entendait claquer contre un bureau. C’était la fin mais personne ne voulait l’admettre.
La goutte d'eau
Alors, j’ai fait quelque chose dont je ne suis pas nécessairement fière, mais qui me donne quand même un sourire quand j’y repense. En bas de la guilde, l’ambiance était plutôt bonne. Un soir, avec trois comparses, on a l’idée « d’animer » un peu le raid. Pour être claire, on va foutre en l’air notre participation au raid, de manière délibérée et préméditée. Quelque part, je pense qu’on espérait se faire virer du roster. On met en place un petit jeu bien connu : on s’attribue une vingtaine de phrases à prononcer sur le vocal pendant le raid. Des phrases qui n’ont bien entendu rien à voir avec le raid et qui allaient du slogan publicitaire à la notice d’utilisation d’une cafetière. Le résultat sera à la hauteur de nos attentes : le raid tourne court, le chef de guilde finit par comprendre et fulmine. Nous sommes « convoqués » sur le chan des officiers… ça y est, on va se faire sortir, peut-être même virer de la guilde. Mais non. On nous passe un savon, notre comportement immature est inacceptable, il faut y remédier, mais rien d’autre. Mince ! Ils avaient vraiment besoin de nous…
La situation en devenait pathétique. Il fallait se résoudre à prendre une décision que personne ne voulait prendre. Je serai finalement la deuxième à partir. Désolée et triste, parce que j’avais aimé jouer avec cette guilde avant… quand on jouait juste pour s’amuser. Voilà. C’est comme ça qu’un jour, j’ai failli faire du PvE HL.