Casques haut de gamme
Si l'année 2016 est considérée comme l'année 0 de la VR, 2017 devait être l'année de sa démocratisation or le succès escompté n'a pas été à la hauteur des attentes. Alors que nous entrons désormais dans la deuxième phase de lancement de la VR, certains voient déjà l'échec de celle-ci, mais après la traversée du désert, les défauts sont en phase d'être corrigés et 2018 pourrait finalement être l'année de la véritable démocratisation de la VR. S'il fallait une preuve que l'industrie continue d'y croire, il suffit de regarder l'importance des derniers investissements dans le domaine de la réalité virtuelle comme de la réalité augmentée, où l'on retrouve de grands noms tels que Facebook, Samsung, HTC, Google, Sony...
Il est évident que le réel potentiel de la VR n'a pas encore pu être vraiment testé et qu'il ne l'a été que par peu monde. Cela est notamment lié à son prix excessif , comme pour toute technologie en phase de lancement, mais aussi au manque de jeux ou autres applications de qualité, les éditeurs rechignant à prendre trop de risques sur un marché encore trop restreint. Et les casques cardboard, en voulant permettre au plus grand nombre de tester la VR, l'ont plus desservie tant l'expérience est en-dessous de ce qu'il est possible de faire et que beaucoup ont donc été déçus.
Et cet été, nous avons assisté à la première guerre des prix entre les 3 grands noms des casques haut de gamme. C'est l'Oculus Rift qui a ouvert les hostilités avec sa promotion Summer of Rift qui a rencontré un tel succès que le pack proposé s'est rapidement retrouvé en rupture de stock et que l'offre a dû être prolongée afin de satisfaire la demande. Il faut dire qu'en proposant son pack à 449 € au lieu de 700 €, Oculus a frappé très fort, d'autant qu'à l'issue de la promotion le prix du pack est seulement remonté à 589 €.
Désormais, le nombre d'utilisateurs d'Oculus Rift sur SteamVR est quasi comparable à celui des utilisateurs de HTC Vive alors même qu'il a été initialement conçu pour ce dernier, et la très forte augmentation de la part de marché du Rift est à noter depuis le mois de mai, soit avant même le début de la promotion, mais celle-ci n'a fait qu'accroître la tendance. Au cours du deuxième trimestre 2017, l'Oculus Rift s'est en effet deux fois mieux vendu, passant de 99 100 unités au premier trimestre à 246 900 alors que, dans le même temps, le HTC Vive passait de 190 900 unités à 94 500. Le Samsung Gear VR reste toutefois en tête, talonné de plus en plus près par le PSVR. La quatrième place étant occupée par le chinois TLC, le HTC Vive est donc passé de la troisième à la cinquième place. Alors que le Vive se vendait précédemment deux fois plus que le Rift, la part de marché de celui-ci (11,6 %) représente désormais quasiment trois fois celle du Vive (4,4 %).
En réponse, le HTC Vive a également baissé son prix dès fin août de 899 € à 699 €, tout en offrant 5 mois d'abonnement à Viveport, sa plateforme de téléchargement proposant 5 titres gratuits par mois. Et quelques jours plus tard, Sony a suivi la tendance avec, dès le 1er septembre, le PSVR proposé aux États-Unis et au Canada dans un pack comprenant également la PS Camera au prix de 399 $, ce qui revient à offrir la caméra. Le pack agrémenté de 2 contrôleurs PS Move et du PlayStation VR World est lui proposé à 449 $. La baisse a beau être ici moins importante, on apprécie cette dynamique qui ne peut que favoriser l'implantation de la VR dans les foyers.
Un nouvel acteur est regardé de près aujourd'hui quant à sa position vis-à-vis de la VR, c'est Nintendo avec la Switch. Si celui-ci prétend ne pas s'intéresser à la VR, on retrouve toutefois la possibilité d'une compatibilité VR dans le code source de la Switch (mention "Set VR Mode")... On notera également l'existence en salle d'arcade de Mario Kart VR. Il demeure cependant deux petites ombres au tableau : la résolution de 720p de la Switch et son poids.
Oculus VR fait donc bouger les choses côté prix, mais pas que : une technologie permettant de réduire de 20% les calculs en VR a été mise au point. Cela permet de diminuer les besoins de calcul et donc de se contenter de machines moins puissantes, réduisant encore le coût de l'accès à la VR haut de gamme, ou alors de pouvoir bénéficier de meilleurs rendus 3D. Le principe est simple, deux images doivent être calculées pour chaque œil avec un décalage de point de vue, mais la grande majorité de l'image est identique et il est donc possible d'utiliser les calculs déjà effectués sur la première image afin de réduire ceux de la seconde. Cette méthode se limite toutefois au pixel shading mais reste incompatible avec l'optimisation multiview en OpenGL ou le rendu des textures d'un reflet de miroir ou de l'eau.
De son côté, le PSVR cherche à lutter contre ses faiblesses face au Rift ou au Vive, à savoir une résolution plus faible, des contrôleurs moins efficaces et surtout un tracking bien en-deça de la concurrence puisqu'il n'utilise qu'une simple caméra nécessitant de rester statique pour ne pas rompre le signal et générer ainsi des décalages d'image fort handicapants. Or, mi-août, Sony a fait savoir qu'ils recherchaient un ingénieur R&D pour un nouveau système de tracking reposant sur plusieurs capteurs et donc susceptible de permettre un tracking à 360° et d'améliorer l'expérience sur PSVR. On ne sait toutefois pas si la solution envisagée repose sur des capteurs disposés autour de l'utilisateur comme sur le Rift et le Vive ou de capteurs intégrés au casque à l'image de l'HoloLens de Microsoft ou autres casques VR Windows Mixed Reality, ou encore d'une toute autre technologie...
HTC , lui, s'est associé à Dalian Television et Beijing Cyber Cloud pour tester la VR en cloud, directement en streaming sur l'écran du casque, sans ordinateur. Une simple box internet Viveport suffit à condition de disposer d'une connexion à 60 Mbps. Cela permet donc de réduire le coût d'entrée dans la VR et peut permettre de la démocratiser. Demeurent les problèmes de latence et de connectivité ainsi que la nécessité d'avoir un data center assez proche ce qui, en cas d'internationalisation, impliquerait d'en installer un peu partout dans le monde, à moins d'en louer à des tiers.
Dans le même temps, empêtré dans des difficultés de trésorerie, HTC envisage de vendre sa division VR. La valorisation boursière de HTC est en effet passée de 37 Milliards de $ il y a 6 ans à seulement 1,8 Milliards de $ aujourd'hui ! Si l'on pensait probable ce rachat par une entreprise chinoise, d'autres candidats peuvent être intéressés, tels que Microsoft, Google ou... Oculus. En attendant, c'est bel et bien Google qui s'est rapproché de HTC non seulement en rachetant sa division mobile (HTC a longtemps été leader sur ce marché mais ne représente plus que 2% de celui-ci aujourd'hui), mais il a aussi injecté 1,1 Milliard de $ en partie pour la téléphonie, certes, mais aussi pour la réalité virtuelle et la réalité augmentée. HTC va donc pouvoir se recentrer sur le Vive et les casques autonomes. Google et HTC semblent donc lier des relations de partenariat privilégiées. Pour rappel, les premiers smartphones Google étaient déjà produits par HTC ainsi que les casques Daydream View dont le flop a poussé Google à vouloir se réorienter vers la VR haut de gamme. Et le Vive mobile est un des tout premiers casque Daydream.
Au-delà des trois grands noms des casques haut de gamme, une nouvelle génération de casque est en train d'apparaître, à commencer par le casque LG Steam VR qui semblerait être en voie de devenir le successeur du HTC Vive puisque développé à son tour en partenariat avec Valve. Et il présente des caractéristiques intéressantes : sans fil, eye-tracking, fov de 110°, visière amovible très pratique... Mais il dispose aussi et surtout d'une technologie LG permettant de réduire le screendoor ainsi que la technologie WOLED permettant de disposer de dalles OLED sans perte de pixels (en 1440x1280 à 90 Hz) contrairement au PenTile de Samsung que l'on retrouve sur le Vive et le Rift et qui génère une perte de 33% de pixels et un screendoor "multicolore" qui est d'ailleurs plus important que sur PSVR alors que celui-ci dispose d'un écran de plus basse résolution. Aucune date de sortie pour l'instant mais on peut l'espérer pour 2018.
Pixmax VR est l'autre casque dont il a été difficile de passer à côté ces derniers temps ! Il a été présenté lors du CES 2017 de Las Vegas et il présente des caractéristiques qui donnent le tournis puisque deux déclinaisons sont proposées : une en 8K et l'autre en 5K.
Le modèle 5K se compose de deux écrans OLED en 5 120 x 1 440 donc 2 x 2560 x 1440 ce qui correspond à du 1440p panoramique ou ultra-wide. Le modèle 8K, lui, propose seulement 2 écrans LCD, et non OLED malheureusement, annoncés en 7 680 x 2 160 donc 2 x 3 820 x 2160, ce qui correspond plutôt à du 4K panoramique. Cela représente tout de même 16,6 millions de pixels, loin devant les 2,6 millions du Vive ou du Rift. Ces casques disposent également d'une latence de moins de 15 ms, et d'un FOV (champ de vision) de 200° contre seulement 110° pour ses concurrents, ce qui le rapproche beaucoup de l’œil humain (220°) et favorise grandement l'immersion. On note toutefois un étirement sur les côtés pas très naturel mais sans doute lié au SteamVR qui est limité à 180° ainsi qu'à la présence d'écrans légèrement inclinés contrairement aux autres casques. Des mise-à-jour de SteamVR ont toutefois déjà corrigé ce dernier point. Ils sont également compatible avec les contrôleurs du Vive, y compris les Knuckles, ainsi qu'avec les bases Lighthouses.
Ces casques devraient être en commande à partir du mois de décembre, pour une livraison à partir de janvier 2018, au prix de 349 $ pour le 5K et 499 $ pour le 8K, et plusieurs modules optionnels pourront être acquis et se monter aisément sur le casque : module de eye-tracking, module sans fil, module pour les odeurs, module pour la ventilation frontale (cooling fan)... et tout ça pour un poids inférieur à celui du Vive.
Finalement, la version 8K qui sera commercialisée ne sera qu'en 5K du fait que l'on ne peut pas envoyer 2 signaux 4K sur un simple DisplayPort, il en faudra donc deux ! La version 8K X compatible 8K de base ne sortira elle qu'en mai 2018 pour 200 $ de plus soit à 699 $. 3 modèles pourront donc être achetés : 5K, 8 K et 8K X. Les chinois de Pixmax proposent toutefois d'acheter dès à présent les 8K X : vous repartirez dans un premier temps avec un 8K mais celui-ci vous sera échanger gratuitement (frais de port compris) contre un 8K X lors de leur sortie. A moins que vous ne préfériez vous contenter d'un 8K, qui sera donc un 5K, pour monter vous-mêmes un second DisplayPort et le transformer ainsi en véritable 8K.
En tout cas, la campagne Kickstarter lancée le 19 septembre 2017, malgré la déception des écrans OLED remplacés par des écrans customized low persistence liquid ou CLPL dérivés du LCD qui impliquent des couleurs plus ternes, une rémanence plus importante, des noirs moins profonds et une plus faible luminosité que sur le Rift ou le Vive, a été un franc succès. L'objectif visé (200 000 $) a en effet été multiplié par 4 en quasiment 48 h seulement et nous en sommes actuellement à plus de 1,2 millions de $. Un succès qui n'est pas sans rappeler celui de l'Oculus Rift en son temps... Si vous aussi vous souhaitez amener votre pierre à l'édifice, rendez-vous sur la page kickstarter du projet, en espérant que celui-ci aboutisse bel et bien.