Syberia II
Face à l’excellence du premier opus, l’arrivée de Syberia II en 2004 était très attendue. Microïds et Benoit Sokal sont toujours à l’origine du projet et n’hésitent pas une seconde à le sortir sur PS2, PC et Xbox. La suite de la saga de Kate s’écoule à 600 000 exemplaires entre sa parution et octobre 2005 et bien que moins abouti que le 1er épisode de la série, il reste un succès commercial. Toujours bien noté lors des tests, Scott Osborne pointe à juste titre le problème principal de l’aventure « Bien que cette suite ne capture pas la magie ineffable du 1er jeu, c’est une reprise costaude qui surpasse aisément bien des aventures récentes ». On touche ici le cœur du problème du deuxième volet de la licence, la perte du cocon onirique et poétique que nous offrait son prédécesseur.
Une atmosphère qui se perd…
Après ses péripéties, Kate Walker a décidé de ne pas rentrer et de suivre ses nouveaux acolytes dans leur projet fou. Bien plus sûre et pleine de fougue, elle se redécouvre elle-même et le joueur aussi. Dans la continuité des changements de personnalité du premier, l’évolution est bien moins significative et parfois le personnage arrive même à paraître morne tant la transformation dans Syberia fut importante. L’attachement à l’héroïne est toujours là, mais elle ne parvient plus vraiment à surprendre. Heureusement que Hans Voralberg et Oscar sont là pour toucher la corde sensible des joueurs. La santé fragile du vieillard, l’impression que la fin est proche pour lui, ainsi que la poursuite de son rêve envers et contre tous et tout, le rendent terriblement attachant. Le sentiment d’urgence de son état presse le spectateur et le pousse dans ses retranchements afin de résoudre rapidement les énigmes. Le dévouement et la fidélité la loyauté qu’Oscar voue à son créateur et qu’il accorde au fur et à mesure du temps à Kate, force le respect. Automate un brin psychorigide et agaçant dans le 1er opus, il devient finalement un compagnon solide et de plus en plus humain. Au fil de l’aventure, un lien indéfectible se crée et les qualités des uns et des autres se complètent et permettent aux joueurs de se reconnaître dans les personnages. Pour finir, n’oublions pas Youki, cet animal fictif sibérien au croisement entre un chien et un phoque et dont la bouille provoque des embrouilles… D’après la légende, seuls les Youkols, une tribu dont les origines remontent à la Préhistoire et qui survit toujours coupée du monde au fin fond de la Sibérie, peuvent les domestiquer. Mais notre chère aventurière parviendra à l’apprivoiser à sa façon et à en faire son allié. Si l’on regrette le manque de développement accordé aux protagonistes, Syberia II semble tout de même avoir en main tous les ingrédients pour rester dans le cœur des fans et garantir un scénario solide.
En parlant du synopsis, ce deuxième volet commence avec un résumé de son prédécesseur permettant ainsi aux personnes n’y ayant pas joué de comprendre l’histoire. Après avoir passé le 1er opus à la recherche de Hans afin de conclure rapidement son affaire, elle s’est entichée du pétillant et doux doyen et l’a finalement pris sous son aile. Sentant sa santé décliner, elle décide de l’aider à aller au bout de ses rêves : retrouver les Mammouths. D’après les mythes, pour les approcher il faut aller sur l’île de Syberia, où séjournent les Youkols dont la culture est entièrement basée sur leur domestication. L’aventure s’annonce déjà périlleuse, mais Kate devra en plus compter sur Nick Cantin, un détective privé envoyé par son boss afin de la ramener à New York, et les frères Bourgoff, rencontrés à Romansbourg. Ces derniers espèrent faire fortune avec l’ivoire que représentent les Mammouths et feront tout leur possible pour arriver chez les Youkols avant nos héros. La pression imposée par le sentiment de course contre la montre et l’action, davantage présente que dans le 1er numéro de la saga, rendent le scénario bien plus mature et vivant. Entre l’enlèvement de Hans par des bandits, une tentative d’assassinat sur sa personne par les frères Bourgoff et un rite chamanique, notre aventurière n’aura pas le temps de s’ennuyer ! Cependant, elle ne sera pas au bout de ses peines, puisqu’un choix cornélien l’attend. Une fois la difficile décision prise, l’ultime voyage de Hans pourra reprendre. Après avoir frôlé la mort moult fois durant son périple, le dernier Voralberg et la tribu Youkols finissent enfin par poser les pieds à Syberia. Une dizaine d’heures seront nécessaires pour voir Hans réaliser son rêve d’enfant et Kate tenir une promesse chère à son cœur. Benoît Sokal a réussi le pari d’une histoire rythmée et palpitante, malgré la linéarité qu’impose ce genre de passe-temps. Moins prenant que le 1er opus, mais orchestré d’une main de maître, il est simple de comprendre pourquoi Syberia II surf sur le succès de son aîné.
Un aspect technique qui se repose sur ses lauriers…
Globalement, ce deuxième volet reprend le gameplay et l’interface de son prédécesseur, en y ajoutant quelques améliorations. Toujours un décor immobile avec diverses animations, à travers lesquels crapahute l’héroïne, un angle de vue fixe et une vision objective. Le système de pointeur et d’interaction reste le même. Finalement, la seule vraie différence se trouve dans le fait que Kate n’est plus la seule à posséder un portable et qu’Oscar possède également son propre mobile. Niveau révolution, on a connu mieux… Néanmoins d’un point de vue technique, l’amélioration est au rendez-vous malgré une gestuelle encore trop raide. Les textures, les animations ainsi que la variété des angles de caméra ont été perfectionnées et les énigmes, bien que toujours accessibles, ont gagné en difficulté. Plus que d’apporter d’énormes bouleversements, au risque de perdre en route les fans de la sage, Benoît Sokal a pris le parti d’améliorer ce qui fonctionnait déjà. L’intention est louable, mais laisse un petit goût de réchauffé un peu décevant.