Test de Hard West
Une bonne année après le lancement de sa campagne sur Kickstarter, Hard West débarque sur Steam. Mélangeant aventure, RPG et surtout tactique, le tout dans un univers sombre et étrange, façon Far West américain, qui a sombré dans la folie, le jeu a de quoi séduire sur le papier. Saura-t-il vous faire patienter en attendant XCOM 2 l'année prochaine ? La réponse dans ces lignes avec notre test.
Trailer de lancement de Hard West
Genre : Tactique au tour par tour, RPG, Aventure
Développeur : CreativeForge Games
Éditeur : Gambitious Digital Entertainment
Supports : PC, PS4, Xbox One
Prix : 19,99€
Il était une fois dans l'Ouest
Le Weird West rassemble le pire de ce qu'on peut trouver dans le genre humain, ce lieu hostile les a attiré avec ses fausses promesses de fortune facile. Des prospecteurs désespérés et des hors-la-loi se sont précipités sur cette région comme des mouches sur une charogne empoisonnée laissée dans la poussière et exposée au soleil. Cela a composé le terreau idéal pour faire fleurir superstitions, rites sanglants et forces obscures ambitieuses. Quand le diable lui-même se mêle aux affaires de vengeance des cow-boys, les choses ne peuvent que mal finir. C'est dans ce contexte que vous jouerez huit épisodes, chacun décrivant une période de la vie de personnages très différents mais voués à faire parler la poudre autant que les mots. Ces scénarios assez courts seront généralement terminés en une à trois heures en moyenne en fonction de votre façon de jouer. Comme toute votre progression ou presque est perdue d'un épisode à l'autre (même quand on conserve le même personnage assez étrangement), on finit par les enchaîner plus rapidement sans forcément vouloir être optimisé à 100%.
Les scénarios se débloquent au fur et à mesure et n'ont pas forcément de lien entre eux. Malheureusement pas de grosse campagne au menu.
Chaque histoire vous sera contée par la mort elle-même, et si son ton morne et détaché contribue activement à l'atmosphère oppressante si spéciale du jeu, on regrettera qu'il supplante tout le reste. Ici point de dialogues si ce n'est à l'écrit et encore, ils sont tous tournés d'une façon parfaitement impersonnelle comme s'ils vous étaient contés après coup par une tierce personne. Aucune voix ne sera entendue en dehors de celle de la mort, ce qui prive tout les personnages du moindre soupçon de personnalité et de toute intervention pacifique dans le scénario. Peut-être que l'équipe de développement n'avait pas les moyens de payer quelques doublages ou de faire des dialogues additionnels ? Il est vraiment dommage de n'avoir que des figures impersonnelles à ses ordres. Heureusement que l'ambiance rattrape en partie, les décors sont soignés et souvent glauques, avec un mélange de bois pourrissant, de poussière et de sang. Le tout complété par quelques musiques inspirées même si l'on regrettera rapidement de toujours retrouver les deux ou trois même. Le "fil rouge" qui lie pas mal d'épisodes entre eux, relève quant à lui davantage du câble de remorquage pour pétroliers, on voit souvent des heures à l'avance où va l'histoire, d'autant que comme souvent le trailer du jeu finit de spoiler les points centraux du scénario. Ne vous attendez donc pas à de grosses surprises ou à un dénouement renversant malheureusement.
La gestion du positionnement fait absolument tout dans Hard West.
Oubliez RNGesus, choisissez le Diable
Un autre point commun de chaque épisode est que vous serez très rapidement mené à explorer librement la carte, du moins en apparence. Les points d'intérêt que vous pourrez débloquer seront souvent liés à votre progression dans la trame principale, même si vous pouvez visiter un certain nombre de lieux facultatifs pour réaliser des quêtes optionnelles. C'est probablement la phase la plus intéressante du jeu, vu qu'il n'y a pas moyen de sauvegarder ou de charger sa partie, il faudra bien peser le pour et le contre de chaque décision, même si en général les développeurs ont été cléments et que vous ne récolterez que quelques blessures incapacitantes que vous pourrez faire soigner. Mais le jeu en vaudra la chandelle, car en fonction de votre façon d'aborder les choses vous pourrez finir avec un arsenal impressionnant et un nombre de coéquipiers plus important, dommage que les bons choix soient un peu trop souvent évidents. Le fonctionnement est très similaire à celui de Faster Than Light, la pression et le facteur aléatoire en moins. Étrangement, sur un des scénarios il nous est justement imposé de ne pas trop lambiner sous peine de tomber à cours de rations et donc d'avoir un groupe qui meurt de faim, mais pas dans les autres (alors qu'aucun élément contextuel ne les distingue).
La rejouabilité de Hard West repose d'ailleurs dans cette exploration de la carte et dans les décisions que vous prendrez, certaines sont lourdes de conséquences et il est possible de finir seul et haï par tous dans certains cas. Des choix à l'issue un peu trop évidente vous seront régulièrement donnés par le diable en personne, il tente pathétiquement d'être subtil mais on le reconnait facilement avec ses gros sabots (oh oh). Faire des sacrifices et passer un pacte avec lui permettra généralement d'obtenir des cartes de poker qui servent à personnaliser les bonus des membres du groupe et à leur donner des pouvoirs spéciaux. Malheureusement elles réduisent à néant l'équilibre déjà très précaire de ce qui devrait pourtant être le cœur du gameplay : le système de combat tactique. Étudions le donc en détails.
Quand un personnage peut tenir un siège à lui tout seul une fois planqué, c'est qu'il y a un problème.
La guerre des tranchées
Ce n'est pas pour rien que comme d'autres j'ai mentionné XCOM un peu plus tôt. Le gameplay des phases tactiques est extrêmement similaire entre les deux jeux, au point où j'irai presque jusqu'à dire que c'est XCOM version Far West, la gestion, le hasard et la difficulté en moins. Les personnages ont deux points d'action qui servent à se déplacer ou à tirer. Il est aussi très important de toujours mettre ses personnages à couvert, que cela soit un demi-couvert ou une couverture complète afin d'éviter de se faire tuer instantanément par le moindre tireur. Jusque là, tout est exactement comme dans XCOM encore une fois. Heureusement quelques idées additionnelles ont été implémentées, comme le fait que la couverture réduise plus ou moins les dégâts (remémorez vous ces moments traumatiques où sur un coup de malchance votre soldat est tué instantanément d'un coup de fusil à plasma dans la tête alors qu'il était bien planqué derrière un mur en béton). L'autre bonne idée de Hard West est la chance, cette ressource influe sur vos chances d'être touché, mais chaque fois qu'un ennemi vous rate votre réserve de chance diminue. S'il avait 30% de chances de faire mouche vous allez donc perdre 30 points chance, il vaut donc mieux bien se planquer sous peine de vite l'épuiser. Se faire toucher alors qu'on est à couvert n'est pas forcement une tragédie car vous allez alors récupérer de la chance pour compenser. C'est d'autant mieux qu'elle sert à alimenter toutes les compétences spéciales.
La très large majorité des combats seront réglés à l'écrit sur la carte générale. Vous n'aurez généralement que 4 ou 5 combats par scénario.
Faire tout sauter marche aussi
Au premier abord (c'est à dire durant le tutoriel) les combats semblent incroyablement subtils et profonds, avec la nécessité de repérer ses ennemis grâce à leur ombre ou au bruit qu'ils font. Il est alors possible de tirer à travers certains matériaux comme la toile pour tuer un ennemi qui s'abritait derrière une tente ou un rideau. Certaines compétences sentent bon la subtilité comme le fameux ricochet multiple pour tuer un ennemi autrement à couvert. Malheureusement on se rend vite compte que tout cela est très situationnel et au final inutile. Vos ennemis sont stupides, soit ils attendent passivement cachés dans une pièce que vous finissiez votre tour à découvert pour vous tuer (ce qui n'est pas censé arriver si vous êtes prudent), soit ils resteront sur place à couvert à attendre que vous veniez les déloger en les prenant à revers, soit ils foncent carrément sur vous sans se préoccuper de leurs chances de survie à découvert au milieu d'une rue pleine de tireurs. Si vous avez joué à XCOM vous devez savoir que c'est du pain béni pour tout apprenti tacticien digne de ce nom. Il suffit donc de bien positionner ses hommes à couvert jusqu'à avoir épuisé le gros des troupes de l'adversaire. Il ne reste ensuite plus qu'à aller déloger les quelques ennemis planqués derrière. Là où un XCOM vous empêche de faire cela en donnant une puissance de feu bien supérieure à vos ennemis et en vous exposant au risque de perdre des troupes sur un coup de malchance, Hard West vous donne TOUS les outils pour être simplement invincible à couvert. Entre la chance, l'énorme mitigation des dégâts à couvert (généralement réduits à 1), et surtout les pouvoirs conférés par les cartes. Absolument aucun ennemi ne dispose de pouvoir spécial (à l'exception des seigneurs démons, et encore, je vous en laisse la surprise). Ici point de bâton de dynamite bien placé pour déloger vos hommes alors que de votre coté vous pouvez tout simplement fouler aux pieds tous les mécanismes listés ci-dessus.
Les cartes pourront composer des mains comme au Poker pour débloquer de puissants bonus. À vous de voir quel rôle vous donnerez à chaque personnage et si vous préférez les bonus individuels de chaque carte ou celui des combinaisons.
Certaines missions commencent par une phase d'infiltration qui permet de récupérer des objets, de repérer le terrain et de se préparer à assassiner simultanément des ennemis clés. L'idée est bonne et elle sera même présente dans XCOM 2, mais... on vous donne pourtant une carte qui rend un personnage totalement furtif et lui permet de frotter son postérieur au nez des ennemis si le cœur lui en dit. Quel est l'intérêt ensuite ? Ce n'est plus qu'une balade dans le parc. Dans la même veine, vous commencez une mission pris en embuscade au milieu d'une rue avec des ennemis positionnés aux fenêtres de tous les bâtiments ? Qu'a cela ne tienne ! Le diable vous a donné la carte hurlement qui tue instantanément tous les ennemis de base en vue, couverture ou pas. Le gros boss de fin de scénario est retranché à l'étage de sa maison et refuse absolument de sortir pour se prendre du plomb dans le buffet ? Pas de problème, il suffira d'utiliser la balle perforante qui a aussi 100% de chances de toucher, elle traversera murs et planchers pour le tuer sans que vous ayez jamais été dans sa ligne de mire. L'existence de bonus de main avec les cartes de poker, ou de cartes qui donnent de la régénération pure et simple ne fait qu'achever l'équilibrage du jeu.
Quand bien même face à quatre ou cinq tireurs déterminés se concentrant sur votre personnage à l’abri derrière un pas de porte en bois, et qu'il ne subit que 1-2 points de dégâts par tour (vu que la chance s'équilibre entre les tirs ratés et ceux qui vous touchent, mitigés par le bonus de couverture) et que vous régénérez autant de vie automatiquement... vous pouvez donc tenir votre position indéfiniment. J'ai sincèrement du mal à voir la moindre difficulté et donc le moindre intérêt à ce genre de combats, d'autant qu'aucun ennemi ne fera jamais exception. Vous passerez tout le jeu à affronter des humains/démons avec des armes à feu, ici point de mêlée, ni d'animaux ni d'adversaire plus particuliers ou blindés par exemple. Ce manque de variété s'avère rapidement lassant même si on prend en compte les nombreux types d'armes, l'IA n'en fait jamais bon usage.
Grosse différence par rapport à XCOM, vous n'avez pas de mode sentinelle. Par contre les ennemis vous tireront dessus si vous approchez trop : n'entrez pas dans le cercle rouge pour vider votre chargeur à bout portant.
En conclusion
|
|||||
Les plus et les moins |
|||||
L'ambiance | L'IA | ||||
La personnalisation via les cartes de poker | Les compétences BEAUCOUP trop puissantes | ||||
La partie aventure | Combats simplistes & trop peu nombreux | ||||
Les graphismes pour un indé | La narration qui nous détache totalement des personnages | ||||
Les musiques inspirées même si peu variées | Les épisodes trop courts et trop souvent prétexte à une remise à zéro |