Après un an d'absence, Sundance DiGiovanni, PDG de la MLG, annonce le retour de StarCraft 2 au sein du circuit de LAN américaine. Ce retour se fera à l'occasion de la MLG Anaheim qui sera dotée de 40 000 $ de prix ainsi que de 4000 points WCS. Cependant de nombreuses incertitudes planent sur le succès de ce tournoi.
Prime time, LAN et décalage horaire
Vous l’entendez souvent à la télévision - si vous la regardez encore - ou même sur la Millenium TV : tout le monde parle du Prime Time. Il s'agit de la plage horaire la plus importante pour les diffuseurs. Elle s'échelonne, selon les pays, de 19h à 23h. Ce moment de la journée est le plus important car c'est celui qui dispose du plus grand potentiel de spectateurs. En ce sens, le fait que la MLG est une LAN est déjà problématique. Il s'agit d'un événement de très grande taille qui se déroule toute la journée, l'essentiel de la diffusion va donc passer hors du champ du Prime Time. D'autre part, un événement hors-ligne a de très grandes chances de prendre du retard. La finale, qui devrait être le pic de spectateurs, peut donc elle aussi sortir du champ du Prime Time en commençant à 23h par exemple.
Enfin, il ne faut pas oublier que cette MLG se déroule à Anaheim, en Californie. Cela signifie qu'il y a 9 heures de décalage horaire entre le lieu de la compétition et l'Europe de l'Ouest. Dans l'hypothèse d'un tournoi commençant à 10h, les premiers tours seront en plein dans le Prime Time européen alors que la suite de la diffusion sera en pleine nuit et les finales à l'heure du petit déjeuner. Cela pose donc un gros problème pour la base de spectateurs qui sera nécessairement réduite par l'absence des Européens.
Hype et qualifications
Les qualifications permettent de donner une chance aux joueurs d'accéder à la compétition à un stade plus avancé, via des tournois en ligne. Dans le cas de la MLG, il s'agit pour les qualifiés d'éviter le redoutable Open Bracket. Pour les organisateurs, il ne s'agit pas de faire preuve de bonté en offrant des places, il s'agit d'une stratégie de communication. Une qualification remplit deux rôles qui sont complémentaires. D'une part, il s'agit de créer de la hype c'est à dire d'exciter la communauté à l'idée du tournoi en leur proposant un avant-goût de la compétition, cela permet également de donner matière à discussion et donc à publicité. D'autre part, cela permet de générer du contenu à faible coût et donc de s’assurer un complément de revenu et de publicité pour les sponsors. Le problème est que l'impact médiatique des qualifications de cette MLG a été très faible, voire carrément inexistant. Cela s'explique par les horaires, encore une fois, mais aussi par la présence de la HomeStory Cup puis de la DreamHack au même moment. De plus, le stream officiel est diffusé par la plateforme de la MLG, mlg.tv, qui est connue pour ses problèmes de lag, notamment à destination de l'Europe. Bien que ce media soit populaire au sein de la communauté FPS Nord-Américaine, ce n'est pas le cas au sein de la communauté StarCraft 2 et cela pourrait nuire plus encore au nombre de spectateurs finale de l'événement offline.
Le circuit DreamHack, ce que la MLG aurait pu devenir
Une concurrence exacerbée des tournois européens
En 2012, la MLG était le circuit de tournoi le plus prestigieux celui que tout le monde rêvait de gagner. Depuis, les choses ont bien changé. Le circuit des DreamHack, d'abord, s'est énormément développé avec prêt de 7 événements dont 6 LAN de taille très importante. Les différentes DreamHack sont devenues des événements majeurs, attirant régulièrement les meilleurs joueurs du monde. On trouve également la semestrielle Asus ROG, avec ses éditions Summer et Winter, qui attire également les joueurs professionnels du monde entier.
Enfin, le circuit des IEM offre une concurrence encore plus directe puisqu'un de ses tournois se déroule aux États-Unis, à New York. On peut - et on doit ! - se réjouir du succès de ces grands événements qui nous garantissent un spectacle de qualité tout au long de l'année. Pour autant, il ne faut pas ignorer que les joueurs ne peuvent pas participer à tous les tournois. D'abord, parce qu'il faut aussi s'entraîner et que voyager en permanence empiète généralement sur l'entraînement. Ensuite, parce que voyager a un coût, et il peut rapidement devenir très important. Les joueurs doivent donc faire des choix. À l'heure actuelle, la plupart des meilleurs foreigners sont européens et, mis à part Harstem et TLO, qui ne sont pas réellement des têtes de série, les grandes figures de la scène internationale ne seront pas au rendez-vous de la MLG le week-end prochain.
Les IEM viennent concurrencer la MLG sur le marché américain
Une scène américaine en déclin depuis les WCS 2013
Les WCS 2013 ont vu une énorme invasion coréenne déferler sur le continent Nord-Américain. Sur les trois saisons de l'année 2013 et la première de l'année 2014, on ne compte qu'un seul joueur Nord-Américain au sein du top 8 de la compétition : Scarlett. Avec de nombreux départs à la retraite, des fermetures d'équipes et des talents qui peinent à se faire une place, la scène américaine est sinistrée. À de rares exceptions près, peu de joueurs pourront réellement tenir la comparaison face à l'armada coréenne présente ce week-end. Cette absence de joueurs en qui s'identifier pourrait nuire fortement au nombre de spectateurs.
Les WCS Amérique ont attiré les Coréens en Amérique du Nord et mis à mal le fragile écosystème local
Une victoire coréenne prévisible
Si les Européens ne sont que peu à faire le déplacement à Anaheim, les Coréens, eux, sont présents et en nombre ! Ce sont eux les favoris, comme à chaque tournoi depuis des années.
On trouve d'une part quelques Protoss de très haut niveau comme Trap le Protoss Code S de chez Incredible Miracle qui s'est qualifié pour le second tour. StarDust, le vainqueur de la DreamHack Summer 2013 en quête d'un nouveau titre et dont le style particulièrement agressif pourrait surprendre. HerO, récent finaliste de la DreamHack Summer 2014, tentera de remporter le tournoi grâce à l'absence de son coéquipier TaeJa. Enfin Alicia, qui a déjà obtenu deux secondes places lors de précédentes MLG tentera de conquérir le titre.
Les Terrans sont également bien représentés avec leur tête de série, Captain America, aka Polt, qui a réussi à se qualifier directement pour les phases de poule. Celui qui s'est installé aux États-Unis tentera de remporter ce tournoi devant un public qui lui est acquis. Ensuite vient le Poulidor Terran, Bomber, l'homme qui déçoit systématiquement ses fans tentera de conjurer le sort en remportant un tournoi majeur. Enfin viennent deux Terrans qui performent beaucoup moins ces derniers temps, KeeN et Heart. Ils ne sont pas réellement des favoris mais ils restent suffisamment bons pour en faire chuter.
Parlons enfin des Zergs. Ils représentent le contingent le plus impressionnant de cette compétition. On retrouve un autre joueur Coréen installé aux États-Unis, viOLet. Le joueur est à la recherche d'une première grosse performance pour l'année 2014. Cette MLG en est l'occasion rêvée. Vient ensuite le Tyran, Jaedong. Inutile de le présenter, il a toujours été fort et le restera. Cet ancien monstre de Brood War veut certainement ajouter une ligne à son immense palmarès. Autre époque, autres champions : deux des meilleurs Zergs de la fin de Wings of Liberty, Life et DongRaeGu, seront présents à Anaheim. Ils se sont affrontés à de nombreuses reprises dans les tournois les plus prestigieux du monde. Une finale opposant ces deux immenses champions nous rappellerait l'Iron Squid II. L'homme du moment, HyuNstoppable, revenu en forme après sa mésaventure chez Quantic Gaming, est toujours aussi impressionnant comme en témoigne son titre de champion des WCS Amérique. Enfin viennent les joueurs qui ont été très forts et qui restent redoutables : Leenock, NesTea et Revival.
D'excellent joueurs Coréens seront au rendez-vous de cette MLG. Cependant, un bon nombre de spectateurs se détournent de tournois dans lesquels aucun foreigner n'a de réelle chance d'atteindre le Top 8.
Polt, vainqueur de la MLG Anaheim 2013, laissera-t-il son titre ?
Vous l'aurez compris, une grande incertitude plane sur le succès de cette MLG. Cet événement qui fut moteur de la scène StarCraft 2 a désormais quitté le devant de la scène pour de nombreuses raisons qui ne sont pas toutes du fait des organisateurs. Si tout le monde espère un succès pour cet événement, force est de reconnaître que ça n'est pas bien parti. En effet, l'exemple de la GSL et de la Proleague, dépassant toutes deux rarement les 10 000 viewers sur le stream anglais, nous montre qu'un haut niveau de jeu n'est pas la seule condition pour rassembler un nombre de spectateurs important.