Chaque semaine, vous trouverez ici une fanfiction qui vous permettra d'en apprendre plus sur les aventures des champions de la League of legends. Cette semaine, place au septième chapitre de la saga Freljord.
League of Legends Freljord Tryptic par ProjectVirtue
C'était une période qu'aucun homme de Freljord n'avait pu connaître jusqu'alors. La paix était enfin revenue sur le continent de glace, et ce qui n'était plus qu'un murmure dans les rêves les plus idéalistes de certains devenait enfin une réalité tangible, quotidienne.
Les deux tribus ne faisaient désormais plus qu'une seule grande nation, unie, érigée d'une force commune pour que Freljord perdure et qu'elle brille plus qu'elle n'avait jamais brillé jadis. Quelques tensions subsistaient encore parfois entre les deux souveraines, mais Ashe et Sejuani apprenaient chaque jour au contact de l'autre, et se nourrissaient de leurs forces respectives pour avancer d'un même pas vers l'avenir radieux de Freljord. Il n'y aurait plus de guerre, et lorsque l'Histoire évoquerait cette époque de sagesse et de paix, cela serait alors un exemple pour les autres contrées lointaines de Runeterra.
Freljord ne connaît pas l'impossible : on n'y connaît que la force et le courage.
Ces jours heureux et sereins perduraient au fil des mois, et la promesse d'un enfant à naître était sur toutes les bouches. C'était une rumeur, un flot intarissable de rêves et d'espoirs qui ondoyait au fur et à mesure que le ventre d'Ashe s'arrondissait. Elle portait cette aura bien connue qui caractérise les futures mères, mais la sienne était doublée de la magnificence d'une reine, aimée et choyée par son peuple. L'enfant était bientôt là, et ce fut dans l'empreinte glacée d'une sombre nuit qu'un premier hurlement retentit dans tout le village. Plusieurs hommes accoururent alors vers Ashe pour la porter et l'escorter vers la plus grande tente, située à quelques mètres de là. On allongea la jeune femme, et lorsqu'elle regarda autour d'elle, elle vit avec soulagement que tous ses plus proches conseillers étaient présents, comme le veut la tradition à Freljord. Tous seraient témoins du martyr de la jeune femme, et tous entendraient le premier cri de l'enfant rompre le silence glacial de la nuit. La ferveur était palpable, et un silence religieux s'instaura petit à petit alors que d'autres jeunes femmes s'affairaient aux côtés de la jeune reine, afin de préparer au mieux la venue au monde de l'enfant.
Lorsque la jeune femme sentit une seconde contraction lui perforer le ventre, elle songea alors qu'elle n'avait jamais connu pareille douleur, et malgré l'aspect paradoxal de la situation, elle trouva en cela que c'était poétique de souffrir ainsi, au péril de sa vie, dans le but d'en engendrer une autre. Elle sentait le regard lointain mais bienveillant de ses officiers et généraux, qui, disposés en cercle, gardaient l'entrée de la tente, tel un sanctuaire impénétrable dont elle serait la déesse d'un soir. La jeune femme laissait ses pensées vagabonder ainsi, évitant la douleur et cette peur de l'inconnu qui gagnaient peu à peu son cœur. Mais elle n'était pas à même de commander ce soir là, et ce fut en proie aux calvaires de son propre corps qu'Ashe devint peu à peu esclave de sa douleur. Jamais elle ne s'était sentie aussi vivante et chaque parcelle de son corps semblait comme lacérée, hurlante et agonisante. La violence des déchirures irradiaient le long de son corps, semblables à de vives décharges, insoutenables et électrisantes. Ashe serrait au creux de ses mains les tissus sur lesquels elle était allongée, et tandis que la douleur devenait encore plus insupportable, la jeune femme laissa échapper malgré elle de longs hurlements, stridents et déchirants. Les hommes présents à ses côtés souhaitaient rester inflexibles, mais en entendant ainsi l'agonie de leur reine, ils tressaillirent tous, attristés d'être ainsi impuissants face à la situation.
Une vieille femme apporta alors des flacons par dizaines, et dans un mystérieux mélange d'élixirs, de poudres et d'épices, elle concocta un mélange qu'elle fit brûler, et dont elle dirigea les vapeurs vers le visage de la jeune reine. Ashe inhala du mieux qu'elle pouvait cette fumée sombre et opaque : elle avait une odeur de cannelle, de bois et de cendres. Alors qu'elle respirait par grandes saccades les vapeurs qui se diffusaient vers elle, Ashe sentit peu à peu son esprit lâcher prise. Elle pouvait encore ressentir la douleur lui perforer les entrailles, mais c'était comme si elle parvenait à se détacher de ses tourments. Elle était ainsi dans un état second, et alors qu'elle regardait autour d'elle, Ashe constata que sa vue semblait différente. Elle ne voyait ni mieux, ni moins bien, mais à la lueur vacillantes des torches enflammées, tout semblait différent. Les fumées de la guérisseuse l'avaient plongée dans cet état extatique, et Ashe avait la sensation de plonger doucement dans un rêve enfumé.
Elle regarda alors les ombres qui se dessinaient sur les tissus de la tente, dansant inlassablement au gré des flammes, ainsi que les nuages cendrés que dessinaient ici et là les encens. Elle pouvait sentir à quelques mètres la respiration des hommes, et en plongeant ses yeux dans ceux de Revan, et de Tryndamere, il lui sembla qu'elle pouvait voir plus loin qu'aucun homme n'avait jamais pu le faire. En tournant la tête de l'autre côté, elle crut apercevoir l'ombre d'Avarosa dessiner autour d'elle quelques volutes de glace protectrice.
De temps à autre, Ashe était arrachée à son extase par un nouveau pic de douleur, et son propre cri la ramenait alors brutalement dans la moiteur et le sang de l'accouchement. Malgré l'empreinte glaciale du froid au dehors, la jeune femme se sentait consumée de l'intérieur, et la sueur venait perler sur sa peau endolorie, tandis que ses cheveux se collaient à son visage, obscurcissant sa vue.
Ce fut dans cet instant d'abandon et de transcendance qu'Ashe lutta de toutes ses forces contre la souffrance, tandis que les vapeurs marbrées de l'encens la replongeaient parfois dans des hallucinations délirantes.
Finalement, tout cela se déroula bien vite, même si pour la jeune femme, le temps semblait comme suspendu, figé en un climat de douleur et d'infini.
Lissandra par pro101men
Alors que dans un dernier effort, Ashe donnait enfin naissance à son enfant, elle discerna par delà la tente une sombre et grande silhouette se dessiner. Ashe respira alors plus fort, tandis qu'elle cédait peu à peu à une terreur paralysante. Elle vit la créature se diriger inéluctablement vers la tente, et y entrer. Personne ne semblait la remarquer, et lorsqu'Ashe hurla à sa vue, on lui pressa des linges glacés sur le front, et elle entendit vaguement qu'on la rassurait sur la fièvre évidente dont elle était victime. Aucun d'entre eux ne semblait percevoir le spectre terrifiant de la sorcière de glace se diriger lentement et implacablement vers elle. Lissandra semblait flotter dans les airs, impalpable et majestueuse, portée par une myriade de cristaux de glace. La sorcière se pencha alors vers la jeune reine, et tandis qu'elle approchait ses mains spectrales, Ashe se rappela de ses cauchemars passés. Elle revoyait le regard perçant de la sorcière qui la paralysait, son souffle chaud sur sa peau gelée, ainsi que ses lamentations. Cette litanie funèbre résonnait à nouveau aux oreilles de la reine, et alors que ces souvenirs enfouis remontaient peu à peu à la surface, Ashe vit à nouveau la sorcière de glace entrouvrir la bouche, tandis qu'elle posait la main sur son ventre.
« Pauvre enfant... déclara la sorcière dans un souffle rauque. »
L'empreinte gelée de Lissandra sur sa peau enfiévrée irradia le long du corps d'Ashe, et alors qu'elle se sentait sombrer peu à peu dans les foudres lentes du sommeil, la jeune femme entendit la sorcière de glace lui murmurer une histoire qu'elle ne connaissait que trop bien :
« Rapelle-toi des Veilleurs de glace, Ashe. Rappelle-toi de cette légende et souviens-toi... C'est Avarosa qui fut rongée par la cupidité, et qui sema les graines de la discorde à Freljord. C'est elle qui précipita les Veilleurs dans les abysses de l'Abîme hurlant. C'est ce jour-là que Freljord a tout perdu de sa magnificence, et toi, Ashe, fille d'Avarosa, tu vas payer de ton sang cette dette. Il me faut une vie, la sienne... Une vie pour Freljord... »
Sur ces mots, Lissandra posa la main sur l'enfant encore inconscient qui gisait encore sur le tissu ensanglanté. À son contact, le bébé prit son premier souffle et le premier pleur de l'enfant retentit aussitôt. Ashe observait avec effroi Lissandra, la main posée sur son enfant, et peu à peu, elle céda au regard de la sorcière de glace, en s'enfonçant doucement dans un sommeil brumeux.
« Rappelle-toi de ta dette, Ashe : je reviendrai bientôt. En attendant, ferme les yeux, et laisse le froid t'emporter. »
Lorsqu'Ashe reprit enfin conscience, elle était entourée d'une multitude de gens, et l'on avait placé l'enfant entre ses bras. La jeune femme se sentait affaiblie, exténuée et encore sous le joug de la souffrance, mais en apercevant le regard perdu de son enfant, et en sentant de courtes respirations agiter son corps fragile, elle sentit une émotion nouvelle la gagner. Des larmes roulèrent alors le long de ses joues, et tandis qu'elle goûtait avec délice à ces instants de plénitude, Ashe plongea ses yeux dans ceux de l'enfant. Tout cette douleur semblait maintenant évaporée avec les dernières fumées d'encens, et l'apparition de Lissandra lui paraissait n'être plus qu'un mauvais rêve. Toutefois, lorsqu'on lui annonça que l'enfant portait une étrange cicatrice, Ashe tressaillit et se sentit à nouveau gagnée par la peur. Elle écarta alors doucement le linge qui enveloppait le nouveau-né, et c'est avec terreur qu'elle vit sur son petit bras l'empreinte bleutée de la sorcière de givre, ancrée dans la peau du nourrisson. La jeune femme se sentit alors prise de vertiges, et alors qu'elle serrait l'héritier de Freljord entre ses bras, Ashe entendit résonner en son for intérieur les dernières paroles de Lissandra.
« Une vie pour Freljord... »
Lissandra, the Ice Witch par Alex-Chow