Salutations, invocateurs ! Bienvenue dans le dix-neuvième numéro des Chroniques de Runeterra. Chaque semaine, vous trouverez ici une fanfiction qui vous permettra d'en apprendre plus sur les aventures des champions de la League of legends. Cette semaine, place au dernier chapitre de la saga.
Lucian The Purifier by Ryuuuna
« Voilà le moment que je préfère, Lucian. T'avoir ici, face à moi, me permet de me sentir vivant à nouveau. J'ai aimé que tu me traques, j'ai aimé voir ce défi dans tes yeux à chaque fois que tu entendais le tintement de mes chaînes. C'est grâce à toi que j'existe vraiment, et depuis que la haine habite ton cœur, chaque jour est pour moi un jour merveilleux. »
Lucian écoutait avidement le discours de Thresh. Il se sentait comme envoûté par ces paroles, et il lui sembla qu'elles résonnaient en lui d'une manière tout à fait particulière, comme s'il devait en être ainsi. Un malaise l'envahissait peu à peu, car maintenant qu'il était face à son ennemi, Lucian savait que la fin était proche. Dans un cas comme dans l'autre, il y aurait un dénouement, une fin glaciale et implacable qui viendrait achever l'histoire mémorable de cette traque. Le jeune homme ignorait s'il s'agissait de l'emprise de Thresh ou si c'était la fatigue qui l'accablait de la sorte, mais il ressentait une nostalgie grandissante à l'idée de voir ce dénouement arriver. Finalement, depuis qu'il avait tout perdu, Thresh était devenu pour lui une raison de se réveiller le matin, plutôt que de s'enivrer de son propre désespoir et d'y succomber. Il regarda alors les auras de lumières qui dansaient autour du démon, puis baissa les yeux. Il ne parvenait pas à soutenir le regard de Thresh, et il s'en méfiait terriblement, craignant sans doute qu'il ne lui dérobe son âme, à lui aussi.
« Que va-t-il se passer maintenant ? demanda Lucian.
- Je pourrais te répondre, mais aimeras-tu la seule réponse que j'ai à te donner ?
- Je suis prêt à tout entendre. Maintenant qu'il n'y a plus que toi et moi, il est temps d'en finir.
- Je vais donc te parler sans artifices, Lucian. Tu es un homme surprenant, et je dois avouer que tu m'as beaucoup diverti depuis que j'ai croisé ta route. J'aime les défis, tout comme toi, et lorsque je t'ai aperçu ce jour-là, que j'ai vu la grandeur d'âme dont tu savais faire preuve ainsi que la vertu qui guidait chacun de tes gestes, j'ai su que j'avais trouvé ma nouvelle proie. »
- Tu m'as donc choisi ?
- Je choisis toujours les âmes que je convoite. Finalement, tout a été très simple : un cœur vertueux tel que le tien est tellement vulnérable. Il était si facile de te faire croiser le chemin de Senna, si facile de faire en sorte que tu en tombes éperdument amoureux. Et lorsque tu ne pouvais plus envisager la possibilité d'une vie sans elle, ça a été si simple de m'inviter dans ses cauchemars, si simple de détourner ton attention afin de la torturer et de la faire mienne. Je n'avais aucun doute là-dessus, et jusque-là, mon plan était infaillible. J'ignorais par contre si tu allais te laisser aller à ton désespoir ou si tu choisirais de me traquer. Mais j'ai vu ce potentiel en toi, et c'est pour cela que je ne t'ai pas laissé sombrer. Je suis venu te chercher, et nous voilà maintenant, avec ce lien privilégié, attendant que le sort vienne décider de qui l'emportera. »
À l'idée qu'il n'avait été qu'un pantin entre les mains expertes de Thresh, Lucian sentit la colère et la rage gagner son cœur. Le démon avait finalement réussi à faire tomber sa vertu en la déguisant sous un masque vengeur. Il était maintenant terrorisé, mais déterminé. Quoi qu'il en coûte, il n'aurait de répit qu'une fois l'âme de Senna libérée.
« Ton arrogance ne me fait plus peur, Thresh, et si j'ai pu être pour toi une simple marionnette, sache maintenant que cette époque est révolue. Je suis là, devant toi, et je viens t'ordonner de libérer Senna sur le champ.
- Parce que tu crois que cette âme me tient à cœur ? Son esprit est si faible qu'il ne m'a fallu qu'une fraction de seconde pour y pénétrer. La pauvre femme est réceptive à toutes les souffrances et je ne m'amuse plus de l'entendre hurler dans ma lanterne. Elle me fatigue, elle m'exaspère et, entre nous, je trouve qu'elle ne te mérite pas. Si c'est là ce que tu veux, je veux bien t'accorder quelques instants avec elle, mais si tu la veux libre, tu devras venir la chercher... »
Sur ces mots, Thresh se volatilisa soudainement. La forêt sombre et torturée dans laquelle ils étaient encore il y avait quelques secondes se métamorphosa en un lieu enchanteur. Tout y était calme et silencieux. Un épais tapis de brume caressait le sol, tandis qu'une lune bienveillante éclairait la scène de ses rayons complices. Une odeur de sainteté se dégageait de l'air, et tandis qu'il regardait aux alentours, Lucian vit les auras de lumière se diriger vers lui. Peu à peu, les âmes vinrent l'entourer, comme pour assister au spectacle émouvant qui se préparait en ces lieux. À l'endroit où Thresh avait disparu gisait maintenant le corps sans vie de Senna. Lucian se précipita vers elle, et la prit au creux de ses bras. Il la regarda pendant quelques minutes, glissant sa main le long de sa peau, marbrée par la décomposition, rigide et inéluctablement froide. Alors qu'il la berçait doucement, Lucian observa la gorge de la jeune femme et il tressaillit lorsqu'il vit une brève respiration agiter la poitrine de la défunte. Petit à petit, le souffle se fit régulier et doux, tandis que les joues de Senna commençaient à se parer de rouge. Lucian posa la main sur le cœur de la jeune femme et il se mit à pleurer en sentant les battements retentir sous ses doigts. Il prit ensuite la main de Senna dans la sienne, et la caressa jusqu'à ce que son aimée lui rende la pareille. La jeune femme ouvrit alors doucement les yeux, et vint doucement sécher les larmes de Lucian d'un revers de main. Alors que le jeune homme approchait son visage pour l'embrasser, Senna le repoussa doucement et avec peine, elle commença à lui parler d'une voix douce, mais résignée :
« Qu'es-tu devenu, pauvre fou...
- J'ai fait tout ça pour toi, Senna, j'ai tout fait pour te libérer.
- Mais tu te trompes, encore maintenant. Tu es faible et aveugle. Tu me crois revenue à la vie, vraiment ? Tu es un homme lucide, et tu sais bien que cela n'est pas possible. Tu délires, mon ange, tout est déjà fini. »
Lucian ne parvenait pas à trouver les mots et il ne comprenait pas ce que Senna lui disait. Encore en proie au doute et au malaise, ses sanglots redoublèrent de plus belle.
« Tu es déjà mort, Lucian, autant que je le suis. Thresh ne t'a pas sauvé ce soir-là sur le toit de l'immeuble. Il t'a laissé mourir, en jubilant d'avoir fait faillir un homme tel que toi. Il t'a regardé agoniser jusqu'à ton dernier souffle, et lorsque la vie s'en est allée, il s'est emparé de ton âme, tout comme il l'a fait avec moi. Ce que tu vis maintenant, ce n'est qu'un rêve, un songe que tu refais chaque jour, et dans lequel tu resteras prisonnier à jamais. Il a gagné, Lucian. Nous voilà maintenant damnés, sans personne pour nous porter secours. »
Horrifié par les révélations de Senna, Lucian eut un mouvement de recul et il repoussa la jeune femme avec violence. Comment pouvait-il être mort alors qu'il sentait son cœur battre plus que jamais, et ses larmes creuser des sillons acides le long de ses joues ? Le jeune homme ferma brièvement les yeux, et lorsqu'il les rouvrit, il vit la forêt se métamorphoser une nouvelle fois. Des torrents de flammes vinrent déferler de toutes parts, menaçants et dangereux. Des gouttes d'eau perlaient et sortaient du sol pour regagner le ciel, défiant toute logique et laissant Lucian paralysé et terrorisé. À quelques mètres de là, Lucian discerna péniblement les parois immenses de la lanterne. Senna disait-elle donc la vérité ? Était-il un spectre lui aussi, promis à une agonie éternelle, prisonnier de la relique du monstre ? L'histoire ne pouvait pas se finir comme cela, et Lucian ne pouvait se résoudre à accepter l'évidente réalité. Il saisit alors son arme, la braqua contre sa tempe, et au bout de quelques secondes, infernales et interminables, il pressa la détente. Il entendit alors le tumulte provoqué par la détonation, il sentit son corps pulvérisé avec une violence inouïe tandis qu'une douleur insoutenable le torturait encore et encore. La balle avait traversé la tête de part en part, mais rien n'avait changé. Il était toujours là et, autour de lui, la prison spectrale brûlait toujours, se rapprochant de plus en plus. Il vit alors Senna se relever péniblement, traînée par les chaînes de Thresh qui réapparut à ses côtés. Il vit son aimée marcher aux côtés du démon, dans une ambiance macabre et sordide. Ils s'avancèrent jusqu'à lui et lorsque Lucian vit un sourire démoniaque se dessiner sur le visage de Thresh, le jeune homme regarda alors Senna avec détresse, l'implorant du regard, comme pour lui signifier de mettre fin à ses souffrances. La jeune femme avança alors sa main et la posa sur le front de Lucian :
« Ne pleure pas, Lucian, laisse-toi aller... Tu oublieras tout dès que tu te seras endormi. Tu oublieras tout, jusqu'à la prochaine fois, car tout recommencera, encore et encore... »