Salutations, invocateurs ! Bienvenue dans le vingtième numéro des Chroniques de Runeterra. Chaque semaine, vous trouverez ici une fanfiction qui vous permettra d'en apprendre plus sur les aventures des champions de la League of legends. Cette semaine, place au premier chapitre de la nouvelle saga.
Les rayons pâles du soleil peinaient à se frayer un chemin au travers des lourds nuages qui surplombaient la terre gelée. Tout était calme et agité à la fois. Le vent hurlait parfois en allant se fendre sur les grandes montagnes de Freljord, tandis que la neige et le givre recouvraient implacablement le sol d'un vaste tapis blanc. Il n'y avait que la glace à perte de vue et c'est dans cette immensité grandiose et dangereuse que la troupe de guerriers avançait d'un pas assuré. Chaque homme qui naissait là n'avait finalement que peu de choix, et les premiers hivers se chargeaient toujours de tracer la destinée d'un individu. Ici, il fallait mourir par le froid, ou s'en faire un allié, une force que l'on apprivoise petit à petit sans pouvoir toutefois la dompter totalement.
Dans ce paysage de glace, le temps semblait comme suspendu, prisonnier des tempêtes et des bourrasques glaciales du vent. La lumière brillait aussi d'une façon singulière, et il était parfois difficile de discerner s'il faisait jour ou nuit. En effet, la neige éclairait perpétuellement le paysage d'une lumière bienveillante, et les déserts de glace étaient enveloppés d'un halo bleu, calme et paisible. Il n'y avait que le vent qui semblait pouvoir briser ce silence, et c'était en cela que résidait la grandeur de Freljord : une immensité de glace, éternelle et menaçante, magnifique et dangereuse.
Ashe marchait en tête du cortège, fendant la glace avec bravoure et conviction. Elle était une enfant du froid, et alors que les hivers étaient passés, elle était parvenue à dompter ces conditions hostiles, jusqu'à les dominer parfois. Elle était maintenant la reine de Freljord, et elle n'avait jamais eu aucun doute quant à sa mission de réunir les peuples dispersés de la toundra. Elle l'avait su dès qu'elle avait posé les yeux sur ce paysage de glace, et qu'elle avait senti résonner en elle le nom d'Avarosa.
En dépit des brimades qu'elle avait reçues sans cesse, Ashe continua de vénérer avec ferveur l'ancienne reine de Freljord, offrant tout ce qui était en son pouvoir pour perpétuer sa noble cause. Elle était aujourd'hui un guide, juste et vertueux, pour ceux qui avaient choisi de partager sa route. La jeune femme avait su faire taire les rébellions et lorsqu'un jour, elle revint de l'une d'entre elles, seule et victorieuse, avec à la main, une arme teintée d'une aura légendaire, tout un peuple s'était rallié à elle, car ils voyaient briller en Ashe l'éclat de la reine antique, et c'est ainsi que naquit cet espoir : celui d'un Freljord uni, resplendissant de la grandeur du temps jadis.
Alors qu'elle marchait, sereine et confiante, Tryndamere qui était à ses côtés la regardait du coin des yeux. Il détailla chaque parcelle du visage de la jeune femme et il sentit une secrète admiration le gagner. Ashe semblait presque figée dans la glace, tant sa peau était pâle et diaphane. Mais lorsque le vent venait lacérer sa peau, Ashe ne sursautait pas, et aucune larme ne venait perler dans ses yeux. Elle ne ressentait plus la douleur, et le froid était devenu pour elle un ami de chaque jour, fidèle et familier.
La troupe était en route depuis maintenant quelques heures, dans le but de se rendre dans un village voisin, situé à plusieurs kilomètres de là. Et lorsque ce village avait fait part de sa difficulté récente à cultiver les terres, Ashe avait immédiatement ordonné que l'on mette quelques récoltes de côté afin de venir en aide à ces frères dans le besoin. Alors qu'ils n'étaient plus qu'à quelques dizaines de mètres du village, Ashe sentit l'air devenir plus lourd et plus chargé. Une odeur nauséabonde et dense se dégageait du campement : c'était celle du feu et des cendres encore fumantes. En entrant dans le village, ce fut une scène de désolation qui s'imposa à leur regard. Les habitations avaient été réduites en cendres, et des dizaines de corps sans vie tapissaient le sol, teintant ici et là la neige de pourpre. Ashe marcha parmi eux, affrontant péniblement les expressions de peur et d'agonie qui se dessinaient encore sur le visage de certains défunts. Alors qu'elle arrivait auprès du cadavre d'un enfant, Ashe s'agenouilla et détacha sa cape afin de recouvrir le corps inerte du jeune garçon, laissé là, dans une nudité malsaine. Ashe sentait peu à peu la révolte s'emparer de son cœur et, en baissant le visage quelques instants, elle parvint à réprimer les larmes qui lui montaient aux yeux. Elle savait qu'elle avait réussi à gagner la confiance des siens mais elle savait aussi que cette situation était fragile et délicate. Elle balaya les quelques mèches de cheveux qui étaient venues se mêler à ses larmes, tandis qu'elle réprimait une à une chaque vague de violence qui tentait de corrompre son âme.
Un silence empreint de tristesse et de ferveur régnait dans les ruines du village où l'on ne pouvait entendre que le crépitement sourd des braises encore chaudes. Soudain, une silhouette se détacha du brouillard, hagarde et vacillante. Une dizaine d'hommes se ruèrent alors vers la reine, afin de la protéger d'une éventuelle attaque. Elle arrêta leur course d'un geste de main bref et autoritaire et, après avoir tenté de distinguer plus nettement la silhouette approchante, Ashe s'avança seule vers l'inconnu. Arrivé à sa hauteur, l'homme s'écroula, et la jeune femme parvint à le rattraper de justesse au creux de ses bras. La jeune femme ne réussit pas cette fois à contenir ses larmes et lorsque le mourant rendit son dernier souffle, Ashe laissa échapper un gémissement, à la fois indignée et impuissante face à cette macabre découverte. Elle ne souhaitait qu'une chose : pleurer la mort de cet homme ainsi que celle des autres victimes pendant de longues heures, sans que quiconque ne puisse interrompre l'expression de son chagrin. Mais il n'en fut rien, et soudainement, des paroles vinrent briser le silence environnant.
« Voilà à quoi mène notre pacifisme, Ashe. Nous ne pouvons pas tolérer un tel massacre sans répliquer. Ce sont nos frères qui gisent ici, et tout cela, c'est par ta faute, car nous connaissons notre ennemi.
— Si ma façon de faire ne te convient pas, je t'en prie, tu es libre de partir, car je n'imposerai jamais que l'on me suive si ce n'est pas le chemin que vous souhaitez prendre.
— Tu n'es pas digne d'être notre reine, Ashe, murmura-t-il. »
En prononçant ces mots, le soldat s'avança jusqu'à la jeune femme et, après avoir croisé son regard, il lui arracha son arc des mains. Surpris que la reine ne montre pas plus de combativité, l'homme s'immobilisa devant elle et après quelques instants, il laissa échapper un puissant cri de douleur. Il lâcha l'arc brusquement et constata avec effroi que l'arme faite de givre avait lacéré sa peau jusqu'au sang, tandis que le vent venait gifler de plein fouet cette plaie encore fraîche. Ashe se pencha alors doucement, et avec le plus grand calme, elle reprit en main l'arme légendaire d'Avarosa. En se relevant, elle constata que l'homme avait pris la fuite, courant et trébuchant dans la neige jusqu'à disparaître peu à peu dans la brume hivernale. Ashe croisa alors le regard de Tryndamere, ainsi que ceux du reste de sa troupe, meurtrie par le deuil , en proie à une incertitude grandissante. À quelques mètres de là, dans la neige, se dessinaient une multitude d'empreintes, témoins du carnage qui s'était déroulé ici. L'une d'entre elles était celle d'un animal, immense et imposant qu'ils connaissaient et redoutaient tous : Bristle, la fidèle monture de Sejuani.